"Ma vie ressemble à la vôtre" de Jan Grue (Jeg lever et liv som ligner deres)

 

Ma vie ressemble à la vôtre (Jeg lever et liv som ligner deres)
Auteur : Jan Grue
Traduit du norvégien par Marina Heide
Éditions : Le bruit du monde (17 Août 2023)
ISBN : 978-2493206220
194 pages

Quatrième de couverture

Sa vie ressemble à la nôtre - sauf qu'il est atteint d'une maladie neuromusculaire rare. Cela pourrait ne rien changer, et pourtant cela change tout. Parce que le monde tel qu'il le vit depuis son fauteuil roulant est si différent du nôtre. Avec une sincérité et une sobriété bouleversantes, Jan Grue nous livre ses souvenirs comme autant de facettes de son identité : de son enfance en Norvège à ses années d'études en Russie, aux Pays-Bas et en Californie, il retrace les défis, les défaites et les victoires de son quotidien.

Mon avis

Jan Grue est professeur à l’Université d’Oslo. Il est marié et a un fils, Alexander. Présentée comme ça, c’est une vie ordinaire d’enseignant, de père et de mari, sauf que son quotidien est extra ordinaire en deux mots. Il partage avec nous sa route, depuis l’enfance jusqu’à maintenant, sans pathos, avec des mots simples, des expressions de tous les jours (sauf pour quelques termes médicaux).

Le premier diagnostic des médecins, posé quand Jan Grue avait trois ans, avait été pessimiste. Il a évolué au cours des années (on ne savait pas trop de quelle pathologie il souffrait). C’est déstabilisant mais Jan ne s’est pas laissé impressionner.

Il a dû accepter le corps qui est le sien et mettre en place des automatismes pour que les tâches d’une journée soient plus aisées. Tout lui prend plus de temps, il ne peut pas se dépêcher, courir, il a besoin d’anticiper pour tout. Se lever du canapé pour aller chercher un verre d’eau est une action réfléchie, calculée mais il ne veut pas qu’on fasse à sa place. Il est chez lui, il agit.

« J’ai beau lire vite, penser vite, apprendre vite, mon corps a son propre rythme, il est lent. »

C’est très intéressant de le lire et de « suivre » son raisonnement. Lorsqu’il a besoin d’aide, il repère les gens susceptibles de le soutenir (par exemple, afin de franchir quelques marches pour lesquelles il doit quitter son fauteuil) et il demande en expliquant clairement ce dont il a besoin.

« Un jour, j’ai arrêté de m’inquiéter à l’idée de voir des médecins. Un jour, j’ai arrêté de me considérer comme quelque chose qu’il fallait réparer. »

Ses parents se sont battus, il s’est battu, il continue de se battre (contre les administrations, les transports, les difficultés) et ce ne sera jamais fini. Il raconte, sans rancœur, les aberrations lorsqu’il voyage, dont certaines seraient risibles si ce n’est que pour lui, c’est un problème supplémentaire. Il parle des incohérences avec le système de santé….

Il souligne le fait de rester vigilant au vocabulaire et au langage employés, notamment dans le milieu médical, pour que ça ne devienne pas « enfermant ».

Pour lui, il ne s’agit pas de devenir « un être humain ». Il a compris qu’il l’a toujours été. Son livre relate tout ce à quoi il a aspiré et comment il y est parvenu. Bien sûr, il faut une force de caractère exceptionnelle, une volonté sans cesse renouvelée mais il y arrive et c’est une sacrée leçon de vie. Il se fixe des défis, fait ses expériences, trouve des solutions et ne lâche jamais rien.

L‘écriture de l’auteur est fluide, plaisante. Il a du recul sur ce qu’il vit, il analyse et explique comment contourner les obstacles. Toutes les personnes qui l’aiment (ses parents, sa femme, ses amis, les ami-e-s de son épouse) l’ont « boosté », porté pour qu’il ne se décourage jamais.

Ce récit est un témoignage fort, bouleversant. Et oui, sa vie ressemble à la nôtre même si son corps est différent… C’est sans doute plus compliqué que de prendre des lunettes ou une canne mais il y arrive et on ne peut que l’admirer !


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