"Stavros contre Goliath" de Sophia Mavroudis

 

Stavros contre Goliath
Les enquêtes à Athènes du commissaire Stavros Nikopolidis, Tome 2
Auteur : Sophia Mavroudis
Éditions : Jigal (15 septembre 2020)
ISBN : 978-2377221097
275 pages

Quatrième de couverture

Le commissaire Stavros Nikopolidis est un électron libre et désabusé, charmeur invétéré, amateur d’ouzo et de rebetiko, au caractère bien trempé et à l’instinct aiguisé. À peine remis de la traque de son ennemi intime, il se retrouve, sur ordre de sa hiérarchie et de Bruxelles, à devoir collaborer avec les Turcs – ennemis jurés des Grecs depuis toujours – en vue d’interpeller en mer Égée un terroriste embarqué dans une caravane de migrants à destination de l’Europe.

Mon avis

Sophia Mavroudis est gréco-française, elle a grandi en Grèce. Elle est docteur en Sciences Politiques, spécialiste de géopolitique et des conflits en Europe et à sa périphérie. C’est sans aucun doute pour cela qu’elle parle si bien de la Grèce, de ses souffrances, de ses errances, des difficultés pour la politique européenne à gérer les migrants.

Cette fois-ci, la mission du commissaire Stavros et de son équipe est claire, c’est un ordre de Bruxelles. Il faut coincer un terroriste et l’arrêter avant qu’il fasse des dégâts. Sauf que pour l’attraper, il est nécessaire de collaborer avec les voisins turcs, les ennemis de toujours. En effet, l’homme en question s’est caché au milieu de migrants sur un bateau en pleine mer Égée.   

Stavros n’aime pas qu’on lui donne des ordres, comme ça de loin, sans que ceux qui exigent n’aient conscience de la réalité du terrain. Mais il est bien obligé d’agir, aidé de sa coéquipière Dora. D’ailleurs cette dernière semble s’impliquer encore plus que d’habitude dans cette quête, pourquoi ? Il faut qu’il la garde à l’œil car elle est impulsive. Quand elle a une idée en tête, elle fonce sans réfléchir aux conséquences. Il y a aussi le geek de l’équipe, Eugène et son drone, il voit tout ou presque mais il ne dit que ce qu’il veut. Quant à Glykas, un autre collègue, il n’est pas toujours très clair… pas facile de coopérer, de cohabiter et d’aller tous dans le même sens pour mener à bien la tâche qui leur a été confiée. D’autant plus que les relations avec les turcs ne sont pas cordiales et que certains font de la rétention d’informations.

Sous couvert de cette nouvelle enquête pour le policier, l’auteur présente la Grèce et ses habitants. Un pays meurtri, fatigué, exsangue, où beaucoup cherchent à donner du sens à leur vie tant ils ne se reconnaissant plus dans les actions et les choix des hommes politiques. On découvre les camps de migrants, les enfants malmenés, les conditions de vie précaires et horribles. Mais Sophia Mavroudis glisse ça et là des expressions typiques, un plat du coin, un poème, un jeu (le tavli) et cela sent bon le terroir, l’amour de ses racines. Cela donne un peu d’air aux propos. Non pas qu’on oublie la douleur des personnes dans les camps et les exactions qu’ils subissent mais ça remet un peu d’humanité au milieu de tout ça.

Stavros est comme son pays, il a enduré des choses terribles mais il s’est relevé. Dans ce livre il continue de lutter contre l’injustice, il essaie de garder la foi, de croire en d’autres possibles. C’est un homme à la fois hanté et aidé par son passé. Il se souvient de son enfance et les passages qu’ils évoquent en pensées sont d’une tendresse infinie.

Avec une écriture précise, incisive, ne cachant rien, l’auteur nous entraîne à la suite de Stavros et de son groupe. Elle nous confronte à la réalité et nous oblige à ouvrir les yeux. La Grèce, ce n’est pas que le soleil et le tourisme… Stavros et Dora ne lâcheront rien, jamais. Ils seront les résilients et par eux, des voix seront entendues, respectées. Bien sûr, parfois, ils flirtent avec la loi, dépassent les limites mais c’est à ce prix-là qu’ils peuvent avancer.

J’aime lire cet écrivain. Au-delà de l’intrigue, elle me bouleverse par l’approche très juste, très fine et surtout très courageuse et sans jugement qu’elle fait de la Grèce.

 


"Vélotaf" de Jérôme Sorrel (texte) & Eve Coston (illustration)

 

Vélotaf
Mode d’emploi du vélo au quotidien
Auteurs : Jérôme Sorrel (texte) & Eve Coston (illustration)
Éditions : Guides Alternatives, Gallimard (25 Février 2021)
ISBN : 9782072899904
162 pages

Quatrième de couverture

Grèves des transports, crise sanitaire, prise de conscience écologique…, le vélo est désormais la mobilité douce privilégiée en masse par les Français en ville comme en milieu rural. Mais pour que la pratique du vélo au quotidien soit synonyme d’efficacité et de plaisir, Jérôme Sorrel, « vélotaffeur » de longue date, aborde ici le sujet sous toutes ses coutures.

Mon avis

Vélotaffeuse (c’est une personne qui se rend au boulot en vélo) depuis cinq ans, je tenais à découvrir ce livre pour voir s’il correspondait à mon expérience. Une façon également, pour moi, de faire le point sur l’avant : trajet en voiture et l’après : utilisation d’un VAE (vélo à assistance électrique) pour aller au travail chaque jour et plus si affinités (cinéma, visites, courses légères etc)

L’édition de ce recueil a été réactualisée suite à la crise sanitaire de 2020 qui, pour certains, a provoqué une prise de conscience intéressante. La pratique du vélo s’est notamment pas mal développée ces derniers mois. Sur un ton juste, teinté d’une pointe d’humour à bon escient, l’auteur analyse tout ce qui peut poser problème lorsqu’on décide de se lancer. Il décortique les bonnes et les mauvaises raisons pour passer de la conduite stressante en voiture, des transports en commun bondés, à la bicyclette.

« Aucun autre moyen de transport n’offre cet espace-temps de méditation et d’introspection. »

Je trouve très intéressant que l’auteur ne nous fasse pas la leçon. Il suggère à partir d’exemples concrets de tenter l’expérience. Pas n’importe quand, ni n’importe comment. Il faut éviter les pièges qui risquent de vous dégoûter à vie, du style : commencer en plein hiver avec un vélo pourri.

Ce qui est certain, et il le souligne, c’est que cette pratique est vraiment à découvrir. Pourquoi ? Quand ? Où ?

Tout d’abord, pour le sentiment de liberté qu’elle procure. Avec mon VAE, j’ai retrouvé la légèreté de ma jeunesse lorsque je roulais en solex. Le temps de trajet est sûr et la facilité pour se garer évite de tourner en rond dans le quartier, de s’énerver et d’arriver en retard et à cran.

Ensuite, essayer aux beaux jours du printemps et de l’automne permet de profiter pleinement d’une météo clémente et de toucher du doigt, un petit air de vacances, de douceur inégalée. Faire de petits trajets au début sécurise, et prouve que c’est possible.

Le choix du vélotaffeur ou du vélutiste (nom inventé par l’auteur pour désigner vélo et utilitaire, moins réducteur donc puisque l’idée est de se servir de son vélo pour tout un tas de trajets (- Je suis d’ailleurs vélutiste puisque je m’en sers pour d’autres choses que le boulot- )) est de commencer par aller de chez soi au lieu de l’activité professionnelle. S’il y a entre cinq et dix kilomètres à faire, il faut absolument tenter !

Vélotaf est un vrai guide, expériences, conseils (matériel, vêtements etc), risques… tout y est !

Les bonnes raisons de se mettre au vélotaf sont nombreuses : réduire l’empreinte carbone, gérer ses horaires, faire un peu de sport, bénéficier d’un « tampon » entre maison et travail, ne dépendre de personnes etc.

Oui, parfois il pleut (fort), il fait froid, ça fait mal aux cuisses, aux mollets mais la sensation de liberté n’a pas de prix et le fait d’être moins stressé aussi !

L’auteur donne des conseils sur la tenue, indique des sites où on peut récupérer de bons tuyaux. Ses propos sont joliment illustrés par Eve Coston. C’est un ouvrage bien fait, équilibré (aucun thème ne prend trop de place) et qui peut aider ceux qui hésitent et se posent de (trop) nombreuses questions.


"Le quai de Ouistreham" de Florence Aubenas

 

Le quai de Ouistreham
Auteur : Florence Aubenas
Éditions : de l’Olivier (4 février 2010)
ISBN :9782879296777
276 pages

Quatrième de couverture

" La crise. On ne parlait que de ça, mais sans savoir réellement qu'en dire, ni comment en prendre la mesure. Tout donnait l'impression d'un monde en train de s'écrouler. Et pourtant, autour de nous, les choses semblaient toujours à leur place. J'ai décidé de partir dans une ville française où je n'ai aucune attache, pour chercher anonymement du travail. J'ai loué une chambre meublée. Je ne suis revenue chez moi que deux fois, en coup de vent : j'avais trop à faire là-bas. J'ai conservé mon identité, mon nom, mes papiers, et je me suis inscrite au chômage avec un baccalauréat pour seul bagage. Je suis devenue blonde. Je n'ai plus quitté mes lunettes. Je n'ai touché aucune allocation. Il était convenu que je m'arrêterais le jour où ma recherche aboutirait, c'est-à-dire celui où je décrocherais un CDI. Ce livre raconte ma quête, qui a duré presque six mois, de février à juillet 2009. J'ai gardé ma chambre meublée. J'y suis retournée cet hiver écrire ce livre. ", Florence Aubenas.

Mon avis

Ayant lu «Tête de turc » et «Dans la peau d’un chinois », il était intéressant pour moi de découvrir ce livre.
Non pas pour comparer car les situations sont malgré tout différentes, mais pour avoir une fois encore, un regard de « l’intérieur » sur des faits que nous ne pouvons ignorer …

Florence Aubenas a donc glissé ses pieds, ses mains, ses bras et tout son corps dans la peau des techniciennes de surface, femmes de ménage ou autres appellations ….
Elle a pris sur elle pour vivre leur quotidien, avec les difficultés qui y sont liées : logement, alimentation, transport mais aussi les bons côtés: la solidarité, l’écoute, le partage …

Elle a rencontré les employés de Pôle Emploi pour qui elle était « le fond de la casserole », les files d’attente interminables, les personnes qui vous écoutent à peine.
Elle a connu les matins où au bout de 2h 30 de nettoyage, elle avait l’impression d’avoir une journée complète dans les jambes. Elle été humiliée, critiquée, de ne pas aller assez vite, de ne pas faire correctement mais elle a également rencontré des êtres humains, certainement plus humains que quelques grands patrons …
Être transparente, avoir l’impression de n’être que le prolongement d’un aspirateur (une des scènes est édifiante, elle est là avec son appareil mais on ne la voit pas, on ne l’entend pas, elle fait partie du décor) …. Tout cela, elle l’a découvert, ressenti au plus profond d’elle-même et elle a su le transmettre d’une écriture simple et régulière à travers une galerie de portraits et de situations diverses.

Je crois qu’au-delà de la souffrance physique, des horaires malaisés, des dos et des nuques raides, ce qui est le plus ardu à vivre, c’est la peur du lendemain.
Ne pas pouvoir refuser deux heures de labeur, à l’autre bout du département parce que « si tu dis non une fois, on t’oublie et c’est fini. », ne pas être sûre d’être reprise pour une autre mission parce qu’on ne va pas assez vite, parce que ça ne brille pas assez ….
Et là, Florence Aubenas sans pathos, sans misérabilisme a su parfaitement être la porte parole de ces femmes.

Il y aura forcément des esprits chagrins qui feront remarquer qu’après, elle a retrouvé sa vie de femme aisée, n’ayant pas de problème d’argent …. D’autres qui diront « Qu’est ce que ce que ça a changé d’avoir écrit ce livre ? »

Je répondrai simplement :

Peut-être rien pour les uns …
Peut-être tout pour d’autres ….


"Nous sommes bien pires que ça" de Guillaume Audru

 

Nous sommes bien pires que ça
Auteur : Guillaume Audru
Éditions : du Caïman (12 Janvier 2021)
ISBN : 978-2919066803
332 pages

Quatrième de couverture

Été 1918, la Première Guerre Mondiale touche à sa fin. Ici, on combat. Ailleurs, on négocie la paix. Le capitaine Simon Fleurus est un héros contradictoire. Harassé par ces guerres obscures et souffrant de stress post-traumatique, il sollicite sa mutation, au grand étonnement de son état-major. Ses supérieurs, qui ont apprécié ses capacités d'enquêteur, l'envoient en Algérie française. Dans un bagne de l'armée, en plein désert du Sahara, les cas d'évasion sont particulièrement élevés. Fleurus, accompagné du major Louis Zamberlan, pénètre dans la gueule de l'enfer...

Mon avis

C’est un livre d’hommes, de mecs qui savent se battre, se montrer violents, indifférents, humains aussi, bref des soldats. Les figures féminines sont rares et ne sont pas sur le devant de la scène.

Fin 1918, la guerre est quasiment finie, l’armistice va être signé et ceux qui sont au front ne rêvent que d’une chose : rentrer à la maison. C’est le cas de Simon Fleurus qui pense à son épouse et son fils et espère les retrouver bientôt. Et puis, finalement, il est obligé de repartir en mission en Algérie, au centre pénitentiaire de Ouchkir. Comme il a participé aux tribunaux militaires qui jugeaient les mutins, il est affecté dans ce bagne du Sahara, isolé de tout, pour mener l’enquête. Sauf qu’il ne se sent plus en accord avec tout ça. Il a de terribles migraines, il fait des cauchemars, il est hanté par des images de camarades blessés ou morts, il est mal et personne ne le comprend. Embarqué malgré lui, il part même s’il n’est pas d’accord car « il se doit de comprendre. »

Sur place, au cœur de ce désert à la chaleur étouffante, il doit essayer de saisir pourquoi il y a tant de désertions parmi les prisonniers. Le colonel Gardanne qui est le responsable, ne le voit pas arriver d’un bon œil. Il n’aime pas qu’on vienne à critiquer ou surveiller son fonctionnement. Pour lui, les hommes qui sont là sont des rebelles, il faut les briser, les casser, pour qu’ils soient soumis, dociles. Les traitements, les conditions de vie, tout est inhumain mais il ne veut pas discuter. Il a raison et c’est ainsi. « Comme si la violence qui s’étale au quotidien au camp était devenue banale, comme si la discipline était la seule voie à suivre. » Si Fleurus creuse trop et dérange, il se débrouillera pour lui faire comprendre qu’il faut regarder ailleurs et se taire, quitte à employer des moyens illicites. Le lecteur est confronté à l’horreur et à l’impuissance de ceux, peu nombreux, qui voudraient faire bouger les choses et par l’intermédiaire de retours en arrière, il revit le séjour de Fleurus à Ouchkir.

En parallèle, c’est le présent, nous sommes en 1955. Gabriel Fleurus (fils de Simon) part en pleine guerre d’Algérie pour retrouver le colonel Julien Gardanne, qui l’a « convoqué ». L’homme n’a pas vraiment perdu de sa superbe même si c’est un vieillard alité et malade dans un hôpital à Alger. Il veut toujours être celui qui parle, qui décide, qui en impose mais son corps ne le suit plus.

Quel est le but de ces retrouvailles ? Revenir sur le passé et s’expliquer ? Boucler la boucle ? Comprendre l’attitude des uns et des autres ? Ce qui les motivait à agir ainsi ou ce qui les empêchait d’être humain ? Pourquoi Gardanne a-t-il demandé à voir Gabriel ?

Ce roman met des frissons, il vous happe très fort et ne vous lâche plus. Il montre le côté sombre de certains hommes, leur soif de pouvoir, de puissance sur les autres, leur besoin d’exister par ce biais. L’écriture de l’auteur est incisive, précise, elle pointe les événements et nous les transmet. Il n’en fait pas trop, il présente chacun, les faits, le quotidien mais c’est tellement vivant qu’on y est, en plein dedans. On le vit et c’est pour ça qu’on se prend à serrer les poings de rage devant l’attitude de certains, devant l’injustice flagrante, devant les mauvaises raisons, devant l’inconcevable…. Ce récit est fort, puissant et bouleversant. Une réussite !

"La malédiction des colombes" de Louise Erdrich (The Plague of Doves)

 

La malédiction des colombes (The Plague of Doves)
Auteur : Louise Erdrich
Traduit de l’américain par Isabelle Reinbarez
Éditions : Albin Michel (18 Août 2010)
ISBN : 978-2226215215
498 pages

Quatrième de couverture

Depuis toujours, la petite ville de Pluto, Dakota du Nord, vit sous "la malédiction des colombes" : les oiseaux dévorent ses maigres récoltes comme le passé dévore le présent. Nous sommes en 1966 et le souvenir de quatre innocents lynchés cinquante ans auparavant hante toujours les esprits. En écoutant les récits de son grand-père indien qui fut témoin du drame, Evelina, une adolescente pleine d'insouciance, prend conscience de la réalité et de l'injustice…

Mon avis

Parmi les différents romans que j’ai lus de Louise Erdrich, celui-ci est certainement un des plus exigeants (au niveau de la concentration pour ne pas perdre le fil) mais surtout un des plus aboutis.

Nous sommes en 1966, dans le Dakota du Nord, pas très loin d’une petite ville nommé Pluto, près d’une réserve où vivent la plupart des indiens. Evelina, est une adolescente gaie, sans complexe, elle écoute souvent les récits de son grand-père et petit à petit, elle va réaliser que son peuple n’est pas toujours respecté, écouté, entendu et que les spoliations sont nombreuses.

Dans ce recueil polyphonique, les histoires des différents personnages sont teintées de désespérance, quelques fois d’un peu d’humour ou d’ironie. Il y a des associations improbables, des faits divers terriblement injustes, une vie difficile mais un attachement profond à la communauté, aux racines. Les jeunes ont le poids du passé ardu de leurs aînés sur le dos, ils portent la mémoire de ceux qui ont souffert, de ceux qui souffrent encore mais ne renoncent jamais.

Plusieurs voix se succèdent, la plupart en s’exprimant à la première personne, mais on sait tout de suite de qui il s’agit (de plus un index des familles est présent en fin d’ouvrage). Le vocabulaire et le phrasé sont adaptés à chaque narrateur. L’écriture est belle, fluide (merci à la traductrice pour son travail). L’auteur a un réel talent de conteuse. Entre les explications sur les traditions, la vie à cette époque, les rappels du passé, aucune fausse note ne se fait sentir. Ce qu’évoque Louise Erdrich est détaillé avec précision, les émotions sont rapportées et transmises avec beaucoup de justesse.

On découvre l’évolution de la bourgade de Pluto et de la réserve sur plusieurs générations, les liens qui se sont créés, ceux qui ont construit ou détruit les amitiés, les hommes et les femmes car certains actes sont extrêmement destructeurs et on n’en sort pas indemne.

Comme souvent avec Louise Erdrich, je me suis régalée, m’attachant aux personnages, me révoltant contre l’iniquité, contre la violence, contre l’irrespect. Avec doigté elle parle des maux rencontrés par ses protagonistes : alcoolisme, délinquance, problème de drogue, pauvreté, emprise des sectes etc…Elle démontre combien l’histoire collective des indiens influence les générations à venir. Elle est une porte-parole et elle le fait divinement bien, sans juger, sans pathos, simplement avec ce qu’elle est, ce qu’elle vit, transmettant dans chaque mot la voix de tous ceux qu’elle représente.


"Agoria : Saison 1 Episodes 01 02 03" de Maxime Frantini

 

Agoria : Saison 1 Ep 01 02 03
Auteur : Maxime Frantini
Éditions : A. Monfort; v1 édition (2 juin 2017)
ISBN : 979-1091116329
320 pages

Quatrième de couverture

La paix règne sur Agoria, mais pour combien de temps ? 20 ans après la grande guerre contre le roi sorcier, le monde est soumis à de nouvelles tensions. Malgré sa prestigieuse académie militaire, le Léhan peine à combattre les brigands qui prolifèrent avec la famine. En Sylmanie, la mort d'Hélicade pose la question de sa succession.

L’avis de Franck

On retrouve dans Agoria l’esprit de saga comme, par exemple, dans le très connu Game of Thrones. Nous sommes loin des mondes de Tolkien et de son bestiaire fantastique.

Le prologue installe bien le monde d’Agoria avec la magie détenue par les Dayens et la menace des vuckails, grands oiseaux carnivores sous la coupe d’un sorcier, puis la solution trouvée par les dayens pour combattre ces monstres et se débarrasser de la menace.

Une fois passé le prologue, l’action reprend quelques vingt années plus tard.

Chaque chapitre raconte l’action au sein d’un territoire du royaume. D’ailleurs les chapitres s’appellent ici des chroniques (Chronique de Yutah – Chronique d’Ostran – Chronique de Sylmanie - etc) et la carte d’Agoria permet de bien se repérer géographiquement, ce qui est une excellente idée.

Ce qui nous rapproche de l’ambiance moyen-âge est le combat perpétuel entre les différents seigneurs et les alliances plus ou moins stables entre eux. De plus, le bestiaire fantastique est limité aux seuls vuckails et les noms des personnages sont faciles à retenir, ce qui rend la lecture agréable.

Une fois qu’on a intégré que les chapitres/chroniques n’ont pas forcément de rapport entre eux, tout du moins au début, la lecture du récit s’avère plaisante.

Le style est fluide et assez descriptif pour se faire une image mentale du monde sans toutefois exiger des trésors d’imagination. L’action, à base d’alliances politiques, se suit facilement et on imagine sans peine la suite du récit avec la réapparition d’un ancien danger (les vukails) qui avait fédéré les nations dans les temps anciens.

Le tome 1 d’Agoria est une belle découverte et m’a permis de passer un bon moment pendant ce temps de confinement.

 


"Balle perdue" de Mary Louise Kelly (The Bullet)

 

Balle Perdue (The Bullet)
Auteur : Mary Louise Kelly
Traduit de l’anglais par Aline Azoulay-Pacvoñ
Éditions : Marabout (1 er Juin 2016)
ISBN : 9782501103954
374 pages

Quatrième de couverture

Caroline Cashion, professeure de littérature française à l'université de Georgetown, découvre lors d'une IRM qu'elle a une balle logée à la base du crâne. Or elle est sûre de ne jamais avoir essuyé aucun tir. Elle apprend qu'elle a été adoptée après le meurtre de ses parents biologiques quand elle avait 3 ans. L'enquête n'a jamais été bouclée et la jeune femme devient une cible.

Mon avis

Voici un premier roman parfaitement abouti et mené de main de maître. Si l’intrigue (une jeune femme qui est la cible d’un malfrat) n’a rien d’exceptionnel, le fait que cette situation soit liée à une balle reçue dans la tête (et restée en place ), il y a plus de trente ans, est assez extraordinaire. D’ailleurs, qui est le personnage principal : Caroline ou le projectile qu’elle a à la base de la nuque ?

La jeune femme qui menait jusqu’à cette découverte, une vie linéaire et bien classique, va se retrouver confronter à l’inconnu. C’est tout un pan de son existence qui n’est plus ce qu’elle croyait. Dans l’écriture de l’auteur, on sent très bien, le mal-être de Caroline qui augmente au fur et à mesure des découvertes déstabilisantes qu’elle fait. La professeure n’a, d’un coup, plus de racines, plus de bases solides sous les pieds et c’est terrifiant pour elle. Le lecteur prend alors fait et cause pour elle tant ses questions nous interpellent. Comment aurions-nous réagi à sa place, qu’aurions-nous fait ? Lorsque ce que qu’on croit vrai depuis plus de tente ans, se révèle faux, que faire, que dire ?

Caroline va décider d’aller sur les traces de son passé. On la comprend mais tout cela est loin, si loin, que va-t-il en rester ? Obstinée, tenace, elle n’aura de cesse de vouloir aller plus loin, de savoir d’où vient cette balle. Cela va l’entraîner dans une spirale infernale où elle va être un gibier car certains ne souhaitent pas que la vérité (dérangeante forcément) éclate…. La révélation finale sera stupéfiante, déroutante mais bien pensée !

Le style est vif, la traduction excellente et l’ensemble des chapitres très harmonieux. On suit Caroline, on assiste à « la destruction » de la personne qu’elle était, comme si sa personnalité avait été faussée et qu’il lui faille repartir autrement…. Et de ce fait, on la verra petit à petit, tout en souffrant, « se reconstruire » pour devenir celle qu’elle décidera d’être, au plus profond d’elle-même. Pour cela, il lui faudra du temps. Que ce soit sa famille, son médecin ou ceux qui vont apparaître dans sa vie suite à ses recherches, chacun se devra de respecter son rythme, ses silences, ses colères, son cheminement …..

Ce roman est captivant d’un bout à l’autre. Le suspense va grandissant et quelques fois, ce qu’on tenait pour acquis s’avère faux, ainsi on repart avec d’autres indices, d’autres suggestions...

Mary Louise Kelly qui est journaliste reporter, a parcouru le monde. Peut-être que le soir, lorsqu’elle se retrouvait au calme, son esprit vagabondait et s’inventait des histoires ? Son attachante héroïne va d’ailleurs voyager dans cet opus et les descriptions sont très précises.

J’ai beaucoup apprécié cette lecture, j’ai été très intéressée par l’évolution de Caroline en fonction de ses découvertes, ses doutes, ses certitudes puis parfois tout qui s’ébranle avant qu’elle se donne les moyens de cerner les tenants et les aboutissants de ce passé qui s’éclaircit par bribes. C’est d’ailleurs une des forces de ce recueil. Ce qu’on lui dévoile, petit à petit, n’est pas exprimé de la même façon par les différents individus. On s’aperçoit qu’à la relecture des faits, chacun a une interprétation, cela va plus loin que le regard ou le souvenir. Les faits n’ont pas le même sens, les mêmes raisons d’être pour les protagonistes rencontrés. Chacun d’eux les présente avec, en filigrane, ce qu’il a ressenti, ce qu’il ressent face à Caroline, ce qu’il souhaite qu’elle comprenne…..

C’est une lecture comme je les aime. Elle ouvre sur des questionnements personnels car on peut s’identifier à cette femme. Elle nous accroche au texte et nous permet d’avoir des belles heures de détente.


"Amazones de turbulences" de Delphine Roulet

 

Amazones de turbulences
Auteur : Delphine Roulet
Éditions : 7 écrit (21 Décembre 2012)
ISBN : 978-2368491539
350 pages

Quatrième de couverture

Ce roman démarre comme un thriller. Louise, victime d’un viol collectif lorsqu’elle était adolescente ne survit que pour se venger. Elle décide de séduire et manipuler Emma, la femme de l’un de ses agresseurs pour mieux anéantir ce dernier.

Mon avis

Emma est mariée à Olivier, leur couple bat de l’aile, elle se cherche. Louise, la voisine veut tuer Olivier pour se venger d’avoir été violée par ses amis et lui à l’adolescence.

La « vengeance » de Louise n’est qu’un prétexte pour un roman qui voit des personnages faire le point sur leur vie, se poser des questions lorsqu’ils se retournent (qu’ai-je fait ? quelle image ai-je donnée de moi ?) À travers différentes situations, divers dialogues, l’auteur pose en filigrane quelques interrogations essentielles sur le fait que le passé influence le présent, que le présent nous lie parfois les mains.

Emma est une femme moderne, intègre qui décide de prendre sa vie en mains après avoir subi plus qu’agi. Louise, veut sanctionner ceux qui l’ont fait souffrir, et au fil des rencontres, des contacts avec les uns et les autres, elle découvrira un autre but pour sa vie.

Les deux femmes vont évoluer au fil des pages et aller vers une prise de conscience différente de leur quotidien.

L’écriture est posée et de qualité, les références apportées bien ciblées. Mais pour moi, le style manque un peu de rythme. Quelques courriels apportent du souffle au roman et c’est une bonne chose car il n’y a pas énormément de rebondissements. Malgré quelques points positifs, cette lecture ne m’a pas vraiment emballée.


"Miranda" de Philippe Cuisset

 

Miranda
Auteur : Philippe Cuisset
Éditions : Kyklos (30 Octobre 2020)
ISBN : 978-2918406457
200 pages

Quatrième de couverture

Bien que Miranda soit essentiellement une héroïne de papier ou l’ombre indécise de quelques souvenirs vagues, je l’ai croisée au cours de l’automne 2017 à Reims sur un camp de réfugiés et de demandeurs d’asile.

Miranda n’est qu’une des innombrables figures de l’abandon qui s’échouent sur les plages, s’épuisent au pied de murs fraîchement érigés, disparaissent sur le fil ininterrompu de l’exil avant de mourir dans les mascarades savantes des études statistiques. M’est-elle apparue dès le début sous la forme d’un squelette ? Je l’ignore, mais il fallait bien que quelqu’un songe un jour à lui rendre un peu de sa chair.

Mon avis

« L’indifférence ne cesse de nous anesthésier »

Miranda, c’est la voix de tous ceux qu’on oublie, qu’on ne voit pas parce que c’est plus facile de faire comme si…. Parce qu’après tout, on ne peut pas prendre toute la misère du monde sur son dos, et d’autres s’en occupent et on n’a pas le temps…. Ce n’est pas qu’on ne veut pas hein, c’est juste que c’est comme ça…

Et puis paf, on prend en pleine face un roman, parce que oui, ce n’est qu’un roman ouf, enfin, pas vraiment, l’auteur semble être bénévole pour ces gens qui n’ont plus rien, qui parfois ne sont plus rien….

Miranda est mexicaine, elle a cru à un bel avenir et pourtant une mauvaise rencontre plus tard, elle s’est retrouvée prisonnière de sa vie, soumise, éteinte, obligée d’obéir à son souteneur. Alors elle s’accroche à la Santa Muerte, tatouée sur sa peau. Elle la prie régulièrement, attendant ses conseils, lui demandant de l’aide, car elle peut protéger ou guérir. Pourquoi ne pas y croire ? Dans cette ville de Reynosa où les cartels de la drogue se font la guerre, que peut espérer la jeune femme ? Pas grand-chose. Un jour, Manuela, qui tient le bar à tacos où elle se sert parfois, lui fait une proposition. Fuir toutes les deux. Partir loin, tout laisser et rebondir ailleurs, dans le Sud des Etats-Unis. Quand ? Une fête va bientôt être organisée dans la ville, il faudra profiter du remue-ménage que ça provoquera.

Après avoir assisté impuissant au quotidien difficile de Miranda, le lecteur l’accompagne dans sa fuite. Mais ce n’est pas pour autant qu’on respire. La tension est là, hyper présente car les deux amies sont poursuivies. On assiste, par l’intermédiaire de dialogues très réalistes, aux questionnements qui surgissent, ont-elles fait le bon choix d’itinéraire, de compagnie ? Est-ce un binôme qui peut fonctionner ? Vont-elles s’en sortir ? Le tueur qui les trace va-t-il les rattraper ?

J’ai lu ce livre d’une traite, les descriptions sont saisissantes de vérité. On est loin de l’image aseptisée du Mexique avec le folklore, le clinquant, le soleil et le tourisme. On est dans le dur, avec de la violence, des femmes qui ont été brisées. Miranda et Manuela partent, fuyant la pauvreté, ce ne sera peut-être pas mieux ailleurs, la route sera longue et ardue mais elles auront agi par elles-mêmes, elles auront pris leur destin en main.

Philippe Cuisset a su trouver les mots justes pour parler de deux femmes alors qu’il est un homme. L’approche psychologique qu’il en fait est excellente. La place donnée à la Sante Muerte aussi, parce qu’elle est la mort et malgré tout elle apporte une note d’espoir, comme si elle transmettait de la force à Miranda.

Par l’intermédiaire de son recueil, l’auteur nous rappelle qu’ils sont nombreux à s’exiler dans l’espérance d’un meilleur futur, que leurs voix ne sont pas toujours entendues, mais que ces gens luttent à chaque instant, sans renoncer. Miranda puise au plus profond d’elle-même pour avancer, elle a quitté la prostitution et n’abandonne pas, trouvant des ressources insoupçonnées même lorsqu’elle pense être au bout du rouleau. Face à la peur, à l’adversités, les hommes et les femmes sont capables de beaucoup.

En donnant vie à une laissée pour compte, Philippe Cuisset offre de la dignité à tous ceux qui lui ressemblent nous obligeant à nous pencher sur leur histoire, à les regarder dans les yeux, à entendre leurs besoins (pas leurs paroles parce qu’ils ne crient pas, ils ne réclament pas…)…

Après à chacun de voir comment il peut tendre la main, agir, en se souvenant de ce récit et de Miranda pour garder les yeux, le cœur et l’esprit ouverts…..

« L’indifférence devant le malheur ne tient que parce que nous nous agrippons à cette pensée : la mort se contente de nous frôler de son aile et la vie, indolore et tenace, s’échappe au compte-goutte sans que nous nous en rendions réellement compte. »

NB : Coup de cœur douloureux mais coup de cœur quand même, Miranda, je ne vous oublierai pas.


"La marche de l'incertitude" de Yamen Manai

 

La marche de l’incertitude
Auteur : Yamen Manai
Éditions : Elyzad (18 Novembre 2010), (première édition : Elzévir en 2008)
ISBN : 978-9973580290
170 pages

Quatrième de couverture

Comment le hasard a-t-il choisi l’univers rigoureux des mathématiques pour réunir ceux qu il a séparés onze ans auparavant à cause d’un oeuf ? Comment un ouvrier sourd a-t-il fait pour aider une mère à retrouver son enfant qu’ elle pensait perdu à jamais ? Et qu est venu faire ce chat de Sidi Bou dans tout ça ? Dans son premier roman, Yamen Manai mêle ce qu on est spontanément tenté de séparer : science et folklore, rêve et réalité, Nord et Sud... Dans ce monde aussi riche en paramètres qu en particules qui le composent, peu importe l’univers dans lequel on avance, notre marche est toujours celle de l’incertitude.

Mon avis

Le hasard maître des dés……

…….. a fait que ce court mais subtil et agréable roman est arrivé entre mes mains.

« Le regard bleu de l’amour » …. est-ce cette tâche bleue sur la couverture au milieu d’une combinaison d’entrelacés représentant les chemins du hasard ou de la destinée ?….à moins qu’il ne s’agisse de la Vie tout simplement ?

Comme un précieux labyrinthe dont on ne maîtrise pas tout, les routes se croisent, s’entrecroisent pour mieux se séparer ou se retrouver mais l’amour est toujours présent, comme une attache qui permet à ceux qui s’aiment de se revoir ici ou là bas ….

C’est de cela qu’il s’agit dans ce livre…. Des hommes et des femmes se rencontrent puis ne se voient plus mais restent présents de temps à temps dans les pensées de l’autre…. Un lien intemporel les unit….

C’est d’une plume poétique, douce et exquise qu’ Yamen Manai m’a conquise, les mots sont déposés avec délicatesse sur le papier, sous nos yeux…pour construire une histoire dont les pièces du puzzle s’emboîtent petit à petit… Rien n’est linéaire mais c’est tellement bien écrit qu’on sait de qui il s’agit et comment ce qu’on déchiffre est rattaché au reste….

Raconter la vie, l’amour filial, le rapprochement amoureux est si difficile tant les termes employés peuvent sembler pauvres face à la force des sentiments… C’est là que la magie de l’auteur donne toute sa dimension… Nous sommes dans un tourbillon poétique où le raffinement du style offre un éclat presque surnaturel à de simples événements de la vie ….

Le hasard maître des dés à magnifiquement inspiré un auteur qu’il ne faudra pas perdre de vue….

Merci …..

 


"Les étoiles, la neige, le feu" de John Haines (The Stars, the Snow, the Fire)

 

Les étoiles, la neige, le feu (The Stars, the Snow, the Fire)
Mémoires du Grand Nord
Auteur: John Haines
Traduit de l’américain par Camille Fort
Éditions : Gallmeister (1 Octobre 2020)
Première publication par le même éditeur sous le titre « Vingt-cinq ans de solitude » en 2006
ISBN : 9782351787670
266 pages

Quatrième de couverture

Dans les étendues vierges de l'Alaska, déchiffrer la nature sauvage est une question de survie. Couper du bois, tracer une piste, piéger une marte, dépecer un élan, faire provision de saumon, affronter l'hiver arctique : pendant vingt-cinq ans, John Haines a vécu dans une cabane isolée perdue dans le Grand Nord.

Mon avis

John Haines est né en 1924 (décédé en 2011). Après des études d’art et de peinture, à vingt-trois ans, il achète une propriété en Alaska. Pendant vingt-cinq ans, à partir de 1947, il passera beaucoup de temps là-bas, parfois avec une femme (mais c’est rare) le plus souvent seul en compagnie de chiens, en rencontrant épisodiquement quelques voisins. Ce recueil, publié à l’origine en 1989 est le récit de ce qu’il a vécu pendant cette période.

Peintre, poète et écrivain, John Haines utilise tous ses talents pour ces « mémoires ». Il fait battre le cœur profond de la terre, il explique comment en vivant à son rythme, en respectant ce qu’elle est, on peut ressentir une profonde harmonie. Ode à la nature, ce livre se savoure, se mérite. On écoute la neige crisser sous les pas, on entend les feuilles bruisser au printemps, on observe l’écureuil volant, le ciel étoilé. On avance calmement, en profitant du moment présent.  On pourrait croire que rien ne se passe mais si, lentement, aussi sûrement que le jour revient après la nuit, les hommes vivent et apprennent les uns des autres. Et l’auteur nous conte ses expériences. Il a appris à chasser, à vivre de peu, à apprécier chaque chose à sa juste valeur. Il défriche, il bâtit. Parfois il repart. « Pendant un temps, je retournai au monde des villes et des citadins, des livres et des écoles : une autre partie de la forêt, qui possédait aussi ses pièges et ses leurres. »

Haines parle de ceux qui sont passés, de certains qui ont disparu, d’autres qui ont partagé une pratique avec lui, une discussion ou un silence. Il y a des histoires dans son histoire. Des liens se nouent, se créent mais sans obligation. Ce n’est pas linéaire mais peu importe, on le suit et on découvre à ses côtés. Son écriture (merci à Camille Fort pour la traduction) a un souffle épique. On sent un homme empli de sérénité, heureux de ce qu’il vit, corps et esprit en harmonie. Un sage qui ne fait pas la leçon, qui n’en rajoute pas, le ton reste juste, vrai. Il vit des choses simples qui paraissent extraordinaires, parce que, sans doute, on a tendance à oublier que la vie palpite partout, quand on est « mangé » par notre quotidien et que son texte nous le rappelle de bien belle manière.

Dans sa quasi solitude, John Haines se sent merveilleusement bien. « Je suis ici et nulle part ailleurs. » Il a choisi de vivre cette vie, de cette façon là et ses amis lui semblent loin, très loin. Il ne ressent pas de manque parce qu’il est en paix, avec lui-même et avec ce qui l’entoure.

J’ai eu un coup de cœur pour cet opus. J’ai aimé les descriptions qui se construisaient sous mes yeux comme si elles étaient créées à coups de pinceaux, je me suis délectée des phrases, des mots, qui se sont glissés sous mes yeux comme un poème, un chant d’amour pour la nature, j’ai apprécié le rythme, le tempo qu’offrent les chapitres. L’essence de la vie est magnifiée par le phrasé de cet écrivain. "Pour qui vit dans la neige et l'observe jour après jour, elle se lit à livre ouvert. Les pages se tournent au souffle du vent. Le même texte s'écrit là depuis des milliers d'années..."

La couverture superbe, les illustrations magnifiques, épurées mais très expressives que l’on trouve ça et là, complètent à merveille cette lecture hors du temps. Elle fait du bien et distille de la quiétude.


"Une saison douce" de Milena Agus (Un Tempo Gentile)

 

Une saison douce (Un tempo gentile)
Auteur : Milena Agus
Traduit de l’italien par Marianne Faurobert
Éditions : Liana Levi (4 Février 2021)
ISBN : 979-1034903696
176 pages

Quatrième de couverture

 Il pleuvait à torrents et personne, vraiment personne, n'était prêt à ouvrir sa porte, et surtout pas à ces individus. Oui, il y avait des Blancs parmi eux ― les humanitaires qui les accompagnaient ― mais ils étaient tout aussi étranges que les autres malheureux, mal fagotés et mal en point. Que venaient-ils faire, ces envahisseurs, dans notre petit village où il n'y avait plus de maire, plus d'école, où les trains ne passaient plus et où même nos enfants ne voulaient plus venir ?

Mon avis

Les jeunes ont fui le village, il n’y a plus d’enfants, plus de bébés. Les maisons sont bricolées par la poignée d’habitants qui est restée ici. Même le Maire est parti dans une autre bourgade. Une ancienne et grande bâtisse, « La Ruine » est vide, elle a été offerte en don, mais personne ne s’en préoccupe. La vie est monotone, sans enthousiasme, sans dynamisme, sans vibrato. Même le train ne s’arrête plus, il passe en sifflant, vite, comme s’il ne voulait rien voir… de toute façon, il n’y a rien à voir…

Et puis, un jour, ils sont arrivés. Eux, les envahisseurs, car c’est ainsi qu’ils ont été nommés.
« Nous, on n’en veut pas chez nous. » ont pensé les villageois. Mais ils n’ont pas eu le choix, les migrants et les humanitaires qui les accompagnaient se sont installés à la Ruine. Des noirs, des blancs, des étrangers….c’est l’affolement, la peur. Ils ressemblent à ceux qu’on peut voir à la télévision mais tant que c’est derrière un écran…. Comment s’en débarrasser ?

Un chœur de femmes s’exprime dans ce roman. Ce sont elles qui les premières ont fait un pas vers les autres. Pourtant, elles le disent, elles le soulignent, elles se sont senties envahis. Le soupçon et la méfiance sont arrivés et les habitants du village se sont divisés. Que faire, que dire, comment agir face à cette invasion ? Les obliger à s’en aller, les accueillir ? Les réactions sont diverses et variées mais le « nous » tient bon, puis tient tête avant de se réinventer pour ouvrir les yeux, le cœur, les bras, donner et partager en pleine conscience.

Ce « nous » qui se penche sur les autres, accepte de les aider.
« Les voir porter nos affaires nous fit une drôle d’impression, parce qu’elles les rendaient un peu comme nous et nous, un peu comme eux. »
Ce n’est pas sans difficulté, les maris, les belles-mères n’aiment pas que les épouses s’émancipent, choisissent une autre attitude que la leur, d’autres conjointes ne sont pas d’accord avec ce soutien pour ceux qui n’ont rien à faire là. Finalement, pour ces mères qui ne voient plus beaucoup leurs enfants, les migrants « cette bouillabaisse de races et de religions, ressemblait bel et bien à une famille, aussi rafistolée fût-elle. » Ces femmes, qui, au départ, ont eu un sentiment de rejet envers les « Autres », se sont sentis plus vivantes en se rendant utiles pour eux.

Avec son écriture magnifique, fine comme une dentelle (merci à Marianne Faurobert), Milena Agus tisse l’histoire de ces personnes qui, sans point commun, sans envie de se voir ni d’être ensemble, ont su aller plus loin que le premier contact superficiel pour vivre une saison douce, en presque harmonie. Par l’intermédiaire du chœur de femmes, l’auteur exprime comment elles sont sorties de leur vie un peu étriquée pour ouvrir leur horizon, comment l’arrivée de ces migrants a bouleversé leur quotidien, leurs relations entre elles et dans leurs familles, comment elles se sont nourries de petits projets (les jardins partagés par exemple), de la vie tout simplement. Cette histoire émouvante est contée de manière délicate par un écrivain au sommet de son art qui sublime les mots pour nous offrir un texte superbe comme un poème.


"Jours tranquilles, brèves rencontres" de Eve Babitz (Slow Days, Fast Company)

 

Jours tranquilles, brèves rencontres (Slow Days, Fast Company)
Auteur : Eve Babitz
Traduit de l’anglais par Gwilym Tonnerre
Éditions :  Gallmeister (4 Mai 2015)
ISBN :  978-2-35178-551-5
230 pages

Quatrième de couverture

Un acteur qui fuit les studios le temps d’un match de base-ball et une starlette qui déteste sa célébrité, des plages californiennes et des bars où l’alcool coule à flot, Los Angeles… et Eve. Eve qui promène au coeur de ce monde son insolente sensualité et nous le raconte avec beaucoup d’esprit et une superbe légèreté. Hédoniste et éternelle amoureuse, Eve Babitz possède une voix sans égale et nous entraine à travers une ville frénétique comme un studio de cinéma et pétillante comme une coupe de champagne.

Mon avis

Prenez un album aux photos un peu jaunies,

Regardez les lieux, les personnes, les situations et,

Laissez-vous porter par l’écriture d’Eve Babitz (née en 1943) qui vous raconte « son » Amérique….

Ce recueil est une peinture du milieu artistique des années 1970 à Los Angeles (où vit l’auteur, recluse, depuis qu’elle a été grièvement brûlée). La mère d’Eva Babitz était une artiste et son père un violoniste classique. Elle a fait parler d’elle, à vingt ans, en posant nue en train de jouer aux échecs avec Marcel Duchamp. Elle avait des idées bien tranchées sur la sexualité et n’a jamais pratiqué la langue de bois. On adhère ou pas à ce langage non pas cru mais du « cru », c’est-à-dire tranché, gai, vif mais également poétique, humoristique à ses heures. « Je pense que l’adultère est un art. En France, ils jouent plus ou moins cartes sur table et ennoblissent les liaisons amoureuses en tant qu’aventures créatives, car pour la plupart des gens, ce sont les seules aventures créatives qu’ils vivront de leur vie ».

Il est très délicat de faire la part du vrai et du faux dans ce qu’elle décrit. On la retrouve avec des hommes, beaucoup d’hommes. D’ailleurs elle présente ses textes « comme une histoire d’amour et elle s’en excuse ». De temps en temps, en exergue, quelques lignes en italiques à son aimé qu’elle interpelle sans aucune gêne devant nos yeux…

Elle nous brosse quelques situations dont elle fait toujours partie, un peu comme les «Martine » « Martine au cirque, Martine à la ferme, Martine à l’école… Là c’est Eve dans les vignes, Eve au match (de base ball), Eve de sortie, etc….. Mais, même si elle se met en scène, la grande gagnante de ces récits reste Los Angeles, la belle, la mystérieuse, la facétieuse, la troublante, la changeante…..que l’on découvre à travers les yeux d’une femme qui nous crie son amour pour ce lieu…..


"Verte" de Marie Desplechin

 

Verte
Auteur : Marie Desplechin
Éditions : L’École des Loisirs (6 Septembre 2007)
ISBN : 9782211089999
182 pages

Quatrième de couverture

À onze ans, la petite Verte ne montre toujours aucun talent pour la sorcellerie. Pire que cela, elle dit qu'elle veut être quelqu'un de normal et se marier. Sa mère Ursule, est consternée. C'est si important pour une sorcière de transmettre le métier à sa fille.

Mon avis

Cette lecture jeunesse aborde plusieurs thématiques. Une famille de femmes, la grand-mère, la mère, la fille, le passage de l’enfance à l’adolescence avec les premiers émois, la question du père absent, le choix de l’orientation, le poids du regard des autres…

D’ailleurs il est lourd ce regard pour Verte (drôle de prénom ?  oui, mais quand on est une future sorcière, il faut se démarquer), qui n’a pas trop envie que sa mère, un tantinet excentrique, vienne la chercher à l’école.  En plus, le métier de sorcière ne l’intéresse absolument pas ! Reprendre le flambeau familial qui se transmet de mère en fille aînée, ce n’est pas pour elle. Au grand désespoir de sa génitrice, qui se décide à la confier chaque mercredi à mamie afin que celle-ci s’occupe de son éducation.

Le lien entre la grand-mère et la petite fille est doux, respectueux, dans l’écoute et le partage. C’st plus difficile avec la maman, en ligne directe qui a peur que Verte soit « banale »… Verte est attachante, vive, gaie et elle possède une certaine forme de maturité. Sa mère est un peu embourbée dans ses idées fixes et ne pense qu’à la transmission du don….

Ce roman jeunesse est plaisant à lire, il offre plusieurs regards car différents personnages s’expriment et donnent leur ressenti sur la situation. L’écriture est de qualité, pas du tout mièvre. J’ai eu beaucoup de plaisir à découvrir ce recueil !


"Un carrousel sur la mer, du sang et des coquelicots" de Bernard Dupuis

 

Un carrousel sur la mer, du sang et des coquelicots
Auteur : Bernard Dupuis
Éditions : Langlois Cécile (11 juin 2015)
ISBN : 979-1093510323
180 pages

Quatrième de couverture

Un homme aveugle plante le décor dès les premières lignes : Solitude, tristesse, et annonce abrupte de l’assassinat d’une dame âgée, dans son village de Belgique, Aumont. Le narrateur redoute l’assassin, mais il en deviendra l’ami très proche. Il nous apprend que la perte de sa vue est survenue lors d’un accident, alors qu’il avait treize ans, dû à la négligence de son père, qui, lui, a perdu la vie à ce moment-là. Il laisse deviner, en plusieurs endroits, que les relations avec sa mère ont fait de lui à la fois un enfant aimé et mal-aimé. Il nous laisse entendre que la femme à qui il s’adresse n’est pas réelle. Mais ensuite, immédiatement, elle revient dans une intense présence. Jeux de miroirs, de kaléidoscopes.

Mon avis

Un homme se raconte, il se dit aveugle et écrit un long monologue sur sa rencontre avec une femme (rêve ou réalité, il a parfois du mal à le savoir lui-même). Il parle par intermittence, de son parcours et d’autres rencontres mais le fil conducteur reste « la femme » qui emplit ses jours, ses nuits, sa vie…

Il est dans l’interrogation permanente sur sa relation à l’autre, aux autres. La femme semble secrète, auréolée d’un certain mystère, s’enfuyant lorsqu’il en demande trop, aérienne et vaporeuse. La perception qu’il ressent, à savoir qu’il a du mal à « cerner » cette femme, et pas seulement parce qu’il ne la voit pas, est remarquablement bien exprimée.

On peut se questionner, le personnage principal est-il l’homme qui se raconte ou la femme qui le hante ? Je pense que les deux sont intimement liés, l’un ne pouvant pas exister sans l’autre.

Une très belle écriture, « racée » et poétique, forte, toute en ressentis. Les pensées de cet homme, son cheminement dans sa relation à cette femme, ses questions, sont très bien formulées. Je crois qu’il faut avoir une âme de poète pour en apprécier la saveur, aimer les mots et ce qu’ils expriment pour que le style, très particulier, « nous parle ».

Une lecture qui ne trouvera pas forcément beaucoup d’échos, tant le sujet est original mais un texte à découvrir si on a le souhait d’un récit qui se « démarque ».


"Les femmes n’ont pas d’histoire" d'Amy Jo Burns (Shiner)

 

Les femmes n’ont pas d’histoire (Shiner)
Auteur : Amy Jo Burns
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) pat Héloïse Esquié
Éditions : Sonatine (18 février 2021)
ISBN : 978-2355846984
310 pages

Quatrième de couverture

Dans cette région désolée des Appalaches que l'on appelle la Rust Belt, la vie ressemble à une damnation. C'est un pays d'hommes déchus où l'alcool de contrebande et la religion font la loi, où les femmes n'ont pas d'histoire. Élevée dans l'ombre de son père, un prêcheur charismatique, Wren, comme sa mère avant elle, semble suivre un destin tout tracé. Jusqu'au jour où un accident lui donne l'occasion de reprendre sa vie en main.

Mon avis

Dans la chaîne de montagne des Appalaches, les hommes fabriquent du moonshine (un alcool de contrebande) pour faire vivre leur famille. Les enfants sont livrés à eux-mêmes et les mères essaient de tout tenir à bout de bras. Wren habite dans ce coin avec ses parents. Leur maison est isolée, pratiquement invisible. C’est ainsi parce que le père l’a voulu. Il domine et décide de tout : le quotidien, les activités de chacun. Il s’est improvisé homme de Dieu et pour cela, comme dans un verset de Saint Marc, il saisit des serpents, il impose les mains aux malades etc. S’occuper des serpents et professer prennent tout son temps. Certains voisins l’écoutent, l’admirent, le suivent. D’autres sont un peu plus loin. Les journées sont sombres, difficiles. La seule lueur vient des visites d’Ivy, la meilleure amie de Ruby, la mère de Wren. Elle débarque avec ses fils et la vie prend tout son sens. Pique-nique improvisé, baignade, rires en cascades, la décontraction, la simplicité sont de mises. Les deux mamans échangent, discutent, et on sent que le lien qui les unit est d’une force incroyable. Elles sont fusionnelles, elles sont tout l’une pour l’autre. Elles acceptent les défauts, les erreurs de l’autre parce qu’étant amies à la vie à la mort, elles ne jugent pas. Rien ne leur pose problème, un regard et elles se comprennent. Elles ne peuvent pas survivre l’une sans l’autre.
« Leurs vies étaient une seule et même vie, vécue deux fois. »

Dans la première partie du roman, Wren, quinze ans, s’exprime. Elle explique qu’elle voudrait une Ivy elle aussi. Elle présente ce qu’elle fait. Elle parle de son père, le manipulateur de serpents, d’Ivy et de ses fils, de sa Maman Ruby. Puis elle raconte sa rencontre avec Caleb, un jeune garçon et ce que ça provoque de remous chez son père et comment la situation dérape et échappe à tous. Ensuite nous partons dans le passé et c’est par l’intermédiaire d’un narrateur que nous découvrons les événements. Comment Ivy et Ruby ont rencontré leurs maris, ce qu’a été leur adolescence, leurs secrets. Jeunes filles, elles rêvaient d’une autre vie, de fuir et finalement elles sont restées. Pourquoi ?

Sur fond d’alcool, de violence quelques fois, mais également de beaucoup d’amour, ce récit initiatique est magnifique. Oui, il est noir, c’est parfois dur mais Wren illumine toute l’histoire. En quête d’émancipation, mue par une farouche volonté, initiée à d’autres perspectives lorsqu’elle rencontre Caleb, elle ne renonce jamais ni à avancer, ni à comprendre, encore moins à faire tout ce qu’il est possible de mettre en place pour décider de sa vie.

J’ai énormément apprécié cette lecture. L’évolution des personnages est très intéressante et la construction du livre permet de la découvrir avec des retours dans le passé bien placés. Wren est une adolescente attachante, sans doute un peu sauvage mais qui ne demande qu’à être apprivoisée, aimée. L’écriture de l’auteur (merci à Héloïse Esquié pour la traduction) est délicate. Elle analyse les raisons d’agir des protagonistes à travers une approche psychologique menée avec finesse. Enfance douloureuse, vie conjugale difficile, les femmes n’ont pas d’histoire ? Si, elles restent droites, elles font des choix qui n’en sont pas car elles n’ont pas d’autres solutions mais leur amitié les nourrit, les enchante, les maintient en vie avec le sourire.

Une lecture comme je les aime, qui bouscule, qui bouleverse et qui reste gravée dans mon esprit.


"La piste du jaguar" de J.P.S. Brown (The Forests of The Night)

 

La piste du jaguar (The Forests Of The Night)
Auteur : J.P.S. Brown
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Sébastien Danchin
Éditions : L’Archipel (2 Novembre 2011)
ISBN : 978-2809805437
310 pages

Quatrième de couverture

Un jaguar surnommé El Yoco terrorise les habitants d'une vallée de la Sierra Madre, au Mexique, s'attaquant tant au bétail qu'aux hommes. Une nuit, la famille de don Juan Vogel, propriétaire d'un ranch, en réchappe de justesse. Adàn Martinillo, cow-boy qui travaille pour lui, est missionné pour l'éliminer. Chasseur réputé, il se lance sur la piste du jaguar. Mais il est d'autres prédateurs, en particulier un cow-boy suspecté d'avoir tué un voisin et kidnappé sa fille...

Mon avis

Adepte des livres de Jim Harrison et de Cornac McCarthy, j’avais hâte de retrouver les grands espaces américains (ici Mexicains) avec ce roman d’aventures (édité à l’origine en 1974), étudié dans les universités américaines où il est considéré comme une œuvre majeure.

Âpre, dur et sec comme cette nature où se déroule l’intrigue, les pages ne défilent pas d’une seule traite sous nos yeux. Il faut laisser le temps aux différents paysages de s’installer, au soleil de nous brûler la nuque, au silence de laisser la place aux cris des choucas, au murmure de l’eau si rare de nous arriver à l’oreille, au vent chaud et poussiéreux de nous envahir nous coupant le souffle, nous laissant les poumons desséchés, la gorge déshydratée, les yeux rougis malgré le chapeau baissé …. Car ce livre, au-delà de l’intrigue, c’est tout ça, l’évocation de ces panoramas de la Sierra Madre qui ne se définissent pas en photographies couleurs, mais en sensations, impressions et émotions contenues à peine esquissées. Le vocabulaire, malgré son impression de rudesse, peut se montrer poétique.

« Les arbres qui avaient poussé sur le bord protégeaient la mare d’un manteau d’ombre. Des vautours étaient perchés sur les branches les plus hautes, dont ont voyait les déjections sur les rochers bordant la mare. »

C’est dans un milieu masculin, brut, que les protagonistes évoluent, un milieu sans douceur, sans cadeau. L’alcool est un des moteurs des hommes, comme pourrait l’être un bon thé et un gâteau pour une femme …. sauf que les femmes ont très peu le temps ou la possibilité de « se poser ». Elles sont tributaires de l’humeur des hommes, pas toujours bien traitées, elles subissent plus qu’elles ne décident …. Malgré tout, elles sont porteuses d’une certaine force, leur permettant de faire face aux événements les plus dramatiques.

On pourrait se laisser aller à penser que ce livre fait partie de la catégorie de ceux appelés « nature writing » (descriptions de la nature où évoluent des personnages) mais ce n’est pas que cela. Il y a omniprésentes la chasse et la violence, cette dernière allant crescendo ….

Le cow-boy principal de cette histoire Adàn Martinillo (appelé indifféremment par son prénom ou son nom), part à la chasse. « El Yoco », un jaguar terrorise la population. Adàn admire inconsciemment ce dernier bien que sachant qu’il est périlleux de se trouver face à lui.

Il voudrait être celui qui libèrera les habitants de la peur. Mais la rencontre avec la bête ne sera pas celle qu’on imagine … Ce n’est pas qu’un animal qui fait peser son joug sur les membres de cette communauté de paysans, de riches propriétaires et autres, c’est un aussi un homme.

Un homme sans sentiment, un criminel, qui ne sait pas exactement pourquoi il tue.

« El Yoco », la bête va se personnifier sous nos yeux, on « l’entend » raisonner, on la voit observer, ses actes sont décortiqués car l’animal ne laisse que peu de place au hasard. C’est tout juste s’il n’a pas une âme. On suit sa progression, il semble errer sans savoir où il va mais ce n’est pas le cas. Il est parfois assimilé au diable.

A contrario, l’humain, l’assassin, est comparé à une bête, sans cœur, sans esprit, sans sentiment, sans réflexion, sans état d’âme. Il agit, blesse, persécute, tue, puis réfléchit ensuite … lorsqu’il réfléchit ….

Le diable est-il l’homme ou la bête ?

Ce chassé croisé entre l’homme et l’animal est la grande force de cet opus. On les voit agir, être traqués, se cacher, manipuler les autres, qui est le plus fort ? Qui fait le plus peur ? Qui nous trouble ?

L’écriture est rugueuse, économisant parfois les mots, se délectant avec détails pour retranscrire une ambiance à d’autres moments. Ce n’est pas un livre « facile » dans le sens où l’action arrive petit à petit dans un climat soigneusement mis en place et qu’il faut laisser du temps au temps pour apprivoiser les personnages de ce récit et les suivre mais quelle belle découverte !

NB : L’avant propos, où l’auteur donne des indications sur le pourquoi et le comment de ce livre est intéressant et bienvenu.

"Aller simple" de Jean-Pierre Siboun

 

Aller simple
Auteur : Jean-Pierre Siboun
Éditions : Bestseller (12 Juin 2013)
ISBN : B00DHKIZMU
190 pages

Quatrième de couverture

« Aller simple » peut apparaître comme la chronique d’un paisible village provençal...Mais tout est parti de cette maudite tempête destructrice de Décembre 99 et de l’accident de route mortel qui s’en suivit, d’un amour défunt et d’un autre qui nait, événements qui vont troubler sa tranquillité.

Mon avis

Dans ce petit village de Provence, un médecin, veuf, s’est installé. Il est seul et rencontre une jeune divorcée et son fils. Des liens se nouent, une histoire d’amour naît sous nos yeux avec quelques difficultés dues à l’ex-mari de madame. On va suivre leur quotidien, jusqu’à un événement grave qui va tout déstabiliser.

Les personnages sont intéressants. Simon, le docteur est attachant, dans la relation qu’il maintient avec sa femme décédée. C’est un homme bon. Les réflexions faites sur le veuvage sont très justes. La personne qu’il rencontre est Amandine, une jeune femme qui a souffert mais qui souhaite aller de l’avant. Elle est prête pour un nouvel amour mais fait très attention à son fils. Elle accepte Simon avec son passé. Il y a également Toinou (Antoine), jeune garçon élevé par son grand-père, attaché à Simon, il veut devenir médecin. Il commente avec l’accent et le vocabulaire provençal ce qui se passe et apporte ainsi un peu de fantaisie au roman.

Si certaines situations semblent un peu prévisibles, cela n’enlève rien à la qualité de cette histoire. L’écriture est précise, plaisante. On s’immerge dans le récit et on se laisse embarquer à la suite des protagonistes.


L’Odyssée du marsouin de Mark Haddon (The Porpoise)

 

L’Odyssée du marsouin (The Porpoise)
Auteur : Mark Haddon
Traduit de l’anglais par Odile Demange
Éditions : Nil (21 janvier 2021)
ISBN : 978-2378910457
402 pages

Quatrième de couverture

Il était une fois, dans l'Angleterre du XXIe siècle, un homme qui, rendu fou de douleur par la mort de son épouse, tomba éperdument amoureux de leur fille. Il était une fois une jeune fille qui rêvait du prince charmant qui viendrait l'arracher à l'emprise délétère de son père.

Mon avis

Ce roman commence de façon assez classique. Un accident d’avion, une femme meurt. Les secouristes ont juste le temps de procéder à une césarienne et de sauver Angelica, la petite fille qu’elle portait. Son mari, fou de douleur, va reporter son amour, son attention sur le bébé, puis l’enfant, l’adolescente qu’il a avec lui. Mais il l’aime mal et tombe rapidement dans des extrêmes. Comme il est très riche, le personnel de maison qui reçoit de belles sommes, ne « voit » rien. Rapidement, il utilise l’école à domicile, et coupe son enfant de l’extérieur (pas de télévision, pas d’internet, pas de visite…). Angelica s’évade dans des lectures, des contes qui agissent sur elle en la reposant, en l’isolant lorsque l’inacceptable se produit. De toute façon, elle ne connaît rien d’autre que ce quotidien et même si elle sent que ce n’est pas la normalité, elle le subit en silence. Elle est « sous cloche » et fait preuve de candeur.

Une visite impromptue, qui dérange beaucoup le paternel, ouvre des perspectives à la jeune femme (Pourquoi ne pas fuir et échapper à son père ?) mais rien ne se passe comme prévu. A partir de là, le récit bascule dans plusieurs dimensions, espaces temps, revisitant la pièce de théâtre : Périclès, prince de Tyr (de Shakespeare), inspirée du poème : Histoire d'Apollonius de Tyr. Pourquoi ? parce qu’un parallèle peut être fait entre les deux écrits. Des femmes qui souffrent, qui essaient d’échapper à l’emprise des hommes, qui ne veulent plus de la carapace à l’intérieur de laquelle elles passent leur vie. Et les éléments, l’eau, le vent, le feu, les tempêtes qui font bifurquer ce qu’on croyait établi.

On aime ou on n’aime pas ce mélange de style, cette écriture qui mêle parfois d’un paragraphe à l’autre le présent et le passé. Je pense qu’il faut se laisser porter par les mots, car l’auteur excelle à les manier, les faire vivre, les emmener plus loin pour qu’ils donnent le maximum. Il y a également quelques illustrations en tête des différentes parties, une magnifique couverture, sans doute pour mettre l’art dans toutes ses dimensions au service de cette histoire.

Mark Haddon a fait de nombreuses recherches documentaires pour adapter son texte à ce qu’il souhaitait partager. Les sources ont été multiples et variées, même si ensuite, son inspiration a joué pour laisser parler l’imaginaire.

Je pense que certains lecteurs auraient préféré n’avoir que l’époque d’Angelica à suivre. Il me semble, au contraire, mais cela ne reste que mon avis, que le contenu serait vite devenu classique (une énième histoire de relations humaines mal gérées) alors qu’avec les deux intervalles-temps, habilement enchevêtrés, l’auteur nous offre un autre regard temporel. Il le fait de façon adroite, subtile, transformant une observation qui devient autre sous les yeux surpris d’un protagoniste et permettant alors au lecteur de basculer ailleurs.

L’écriture de Mark Haddon a beaucoup de charme (merci à la traductrice). Ses phrases sont souvent courtes, donnant du rythme. Il décortique et analyse finement ce qu’il évoque. Il y a de la fantaisie, un brin de folie, et cela repousse la chappe de plomb provoquée par l’attitude néfaste du père, permettant ainsi de ne penser qu’à ses femmes qui luttent pour un mieux, avec leurs armes, en se trompant quelques fois mais en osant…

 


"Vous allez payer" d'Aloysius Wilde

Vous allez payer
Auteur : Aloysius Wilde
Éditions : Chaka Edition (16 novembre 2020)
ISBN : 978-2957455812
504 pages

Quatrième de couverture

Deux amis associent leurs compétences pour réduire la pollution plastique dans les océans. Les deux hommes ont pourtant des profils diamétralement opposés : Abhijee Chakir est un mafieux Indien et AlanGarfield un universitaire Américain. Pour financer leur croisade les complices mettent en place deux escroqueries d’une inventivité inouïe.

Mon avis

Parler d’environnement, d’écologie et de développement durable dans un roman n’est pas chose facile. Cela peut être vite rébarbatif, donneur de leçons, et de ce fait lassant. En se lançant dans un « thriller écologique », l’auteur a pris des risques. Il pouvait en mélangeant les genres, perdre le lecteur et n’intéresser ni les écolos, ni les amateurs de sensations fortes. Il fallait donc la jouer fine comme on dit.

Le hasard, le destin, la main de Dieu diront d’autres, mettent en présence deux hommes totalement opposés : Abhijee Chakir,un mafieux Indien et Alan Garfield un universitaire Américain. Leur point commun ? Le surf qu’ils pratiquent avec bonheur et dextérité. Cela semble improbable tant ils sont différents, mais ils établissent des liens amicaux forts. Apprenant à se connaître, ils s’aperçoivent qu’une autre chose les lie : la cause écologique. La colère et la révolte qu’ils ressentent tous les deux devant l’inactivité des hommes de pouvoir pour agir et limiter la pollution les poussent à tenter quelque chose. Ils décident de combattre ensemble mais comment faire lorsque l’argent manque ?

Le choix qu’ils font est audacieux : monter des anarques et récupérer la monnaie. Ils osent tout : la manipulation, les mensonges, les coups bas, des escroqueries très imaginatives. Et puis, point fort de leur action : ils s’attaquent aux grands des mondes économique et politique. Les deux copains n’ont pas froid aux yeux et rien ne les arrête !

New-York, Paris, Bombay, c’est dans divers lieux du monde qu’ils procèdent en essayant de ne pas se faire prendre, de ne pas être en première ligne. Il y a de nombreux personnages, car plusieurs enquêtes vont être menées de front. Mais il ne faut pas prendre peur, l’auteur a mis une liste des protagonistes pour que personne ne soit perdu en lisant. De temps à autre, des références, des informations réelles qui font froid dans le dos et nous rappellent qu’il est urgent d’agir et pas seulement dans les livres !

L’écriture est endiablée, vive, jubilatoire, avec une pointe d’humour. Le style est pétillant, vivant, les nombreux dialogues mettent un rythme d’enfer. C’est plaisant à lire sans temps mort. Le suspense associé à des actions pour une prise de conscience écologique est bien dosé. L’équilibre est bon entre les deux aspects de ce recueil et cette lecture est prenante. Et si cela pouvait faire réfléchir …

 

"Ici n'est plus ici" de Tommy Orange (There There)

 

Ici n’est plus ici (There There)
Auteur : Tommy Orange
Traduit de l’américain par Stéphane Roques
Éditions : Albin Michel (21 Août 2019)
ISBN : 978-2226402905
356 pages

Quatrième de couverture

À Oakland, dans la baie de San Francisco, les Indiens ne vivent pas sur une réserve mais dans un univers façonné par la rue et par la pauvreté, où chacun porte les traces d'une histoire douloureuse. Pourtant, tous les membres de cette communauté disparate tiennent à célébrer la beauté d'une culture que l'Amérique a bien failli engloutir. À l'occasion d'un grand pow-wow, douze personnages, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, vont voir leurs destins se lier.

Mon avis

« Être indien en Amérique n’a jamais consisté à retrouver notre terre. Notre terre est partout et nulle part. »

Tommy Orange est écrivain américain arapaho et cheyenne. Dans son roman choral « Ici n’est plus ici », il donne la parole à une douzaine de personnages. D’abord sans lien apparent, on suit les uns et les autres. Leurs voix nous transmettent la détresse de ceux qui souffrent d’une perte de repères : alcoolisme, chômage, dépression…. Ils ne trouvent plus leurs racines et les cherchent.

Est-ce pour cela qu’ils convergent vers le pow-wow ? Ce rassemblement convivial qui répond sans aucun doute à un besoin identitaire. On y retrouve la famille, les amis. On célèbre la tradition, on fait vivre l’héritage culturel à travers des chants et des danses afin de ne pas oublier. C’est un lieu où on se rencontre, on se parle, on échange. Le costume traditionnel est de rigueur, on répète les chorégraphies. Il est important de s’affirmer.

Mais avant ces retrouvailles, chacun va s’exprimer, soit en disant « je », soit par l’intermédiaire d’un narrateur. Chacun va partager sa souffrance, ses doutes, ses peurs, ses silences, l’histoire de sa famille avec tout ce que cela entraîne lorsque le passé est déjà lourd à porter pour les jeunes générations. Il n’est pas facile d’avoir une place lorsqu’on naît avec « l’étiquette indien » en Amérique. On appartient à une minorité, une de celles qui peut être méprisée, mal aimée, mal comprise, mal respectée. Une de celles qui n’est pas « reconnue ». Les protagonistes sont souvent en quête de reconnaissance, essayant de changer leur quotidien pour aller vers un mieux mais bien souvent rattrapés par leurs mauvais démons ou de sombres fréquentations.

Ce recueil est un cri de détresse, où les laissés pour compte choisissent de ne pas se taire et de tout faire pour exister, avancer et vivre…. Avec les différents points de vue des protagonistes, on revisite une partie de l’Histoire. « Les gens sont emmurés dans l'Histoire, et l'Histoire est emmurée en eux. »
On entend la rage qui les habite, on frisonne, on tremble devant cet avenir qui se dessine noir, si noir…

L’écriture de l’auteur est puissante. Quelle que soit la personne qui se confie, il a su adapter phrasé, rythme et vocabulaire (merci au traducteur, je n’ai pas ressenti de fausse note). Il transmet un message fort et le fait de fort belle manière.

J’ai, depuis toujours, une tendresse particulière pour les indiens. J’aime à les retrouver dans des récits. Cet opus ne fera pas exception. Il vivra longtemps en moi car il secoue, il pose des mots sur la détresse humaine, sur ceux qui refusent d’être oubliés et de disparaître. Merci Tommy Orange !


"Nuit sombre et sacrée" de Michael Connelly (Dark Sacred Night)

 

Harry Bosh - Tome 24 : Nuit sombre et sacrée (Renée Ballard - Tome 2) (Dark Sacred Night)
Auteur : Michael Connelly
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Robert Pépin
Éditions : Calmann-Lévy (11 mars 2020)
ISBN : 978-2702166314
472 pages

Quatrième de couverture

En revenant au commissariat d’Hollywood après une mission de son quart de nuit, l’inspectrice Renée Ballard tombe sur un inconnu en train de fouiller dans les meubles à dossiers. L’homme, elle l’apprend, est un certain Harry Bosch, un ancien des Homicides du LAPD qui a repris du service au commissariat de San Fernando, où il travaille sur une affaire qui le ronge depuis des années. D’abord sceptique, Ballard le chasse puis, intriguée, ouvre le dossier qu’il feuilletait… et décide de l’aider.

Mon avis

Inconditionnelle de Michael Connelly, j’aime beaucoup son héros récurrent : Harry Bosh, je m’intéresse aussi à Mickey Haller qui m’a permis d’avoir une autre approche de la justice américaine (il est avocat). J’ai découvert, il y a quelque temps, Renée Ballard, un nouveau personnage, féminin, qu’il a créé.

Dans ce roman, l’auteur a choisi de faire rencontrer Harry et Renée. Tous les deux sont un peu en marge dans leur boulot pour avoir trop parlé ou dénoncé des faits. Pudiques, secrets, tenaces, solitaires, ils décident de collaborer pour élucider un cold case, tout en continuant d’assurer le travail qu’on leur confie. Rapidement, la mayonnaise prend entre les deux. Ils forment un binôme complémentaire. Il y a donc plusieurs enquêtes menées de front dont celle qui les voit collaborer. Comme le rythme est assez lent, avec des descriptions pour situer les lieux et les investigations, le lecteur ne se perd pas et cerne bien les différentes intrigues et les individus en lien avec celles-ci.

L’écriture est fluide, addictive. Le traducteur qui suit Connelly depuis plusieurs années connaît ses tics de langage et doit avoir du plaisir à nous présenter ses récits. Si on ne retrouve pas une étude psychologique des protagonistes comme dans les premiers livres de l’auteur, l’atmosphère de Los Angeles (surtout la nuit) est bien présente. On voit le côté sombre de cette ville avec ces dérives.

Si, à mon avis, ce roman n’est pas un des meilleurs de l’auteur, il est quand même pas mal. Je pense qu’il a eu raison d’introduire des rencontres entre ces héros, cela lui permet de se renouveler et de nous intéresser. J’émettrai malgré tout un petit bémol : il me semble que les derniers opus sont presque tous construits sur le même modèle, avec une trame identique. C’est un peu dommage…..