"Et mon fils avec moi n’apprendra qu’à pleurer" de Frédéric Roux

Et mon fils avec moi n’apprendra qu’à pleurer
Auteur : Frédéric Roux
Editions : Grasset (Septembre 2005)
ISBN : 9782246693314
304 pages

Présentation de l'éditeur 

Ce livre a six chapitres comme un revolver a six coups. Deux coups pour mon père, un pour ma ville, un pour l'école et les deux derniers pour ma mère. Feu sur mon père parce qu'il a raté sa mort comme il avait raté sa vie. Feu sur ma ville puisqu'elle a fait de moi un étranger. Feu sur l'école parce que c'était une prison. Feu sur ma mère parce que celle qu'il faut assassiner, c'est la mère. Né tué, je ne prends aucun risque en tirant sur des cadavres. Je suis devenu prudent depuis que j'ai appris (par cœur) la tirade d'Agrippine : " Ne crois pas qu'en mourant, je te laisse tranquille. " F.R.

Mon avis 

« Depuis toujours, je me suis méfié de ceux qui montrent leur intelligence comme l’on agite sa gourmette, ce sont souvent des salauds, toujours du côté du manche. »

« Ils étaient bien élevés et c’est nous qui avions obtenu ce résultat.
Ils lisaient des livres. »

« J’ai toujours pensé que j’étais plusieurs …. »

Trois parties : au début de chacune d’elle, des extraits de poèmes, en français, en anglais, en espagnol ...
Fonds de miroir (ou comment se regarder dans le miroir familial ...)
La France d’outremère (ou comment se détacher de sa mère en allant à l'école et en ville ...)
Larmes de fond (ou comment la Mort peut aider à vivre...)

Six chapitres, (chacun précédé d’une courte citation), où l’auteur « règle ses comptes », tour à tour avec son père, sa mère, sa ville, son école etc …

Une écriture « coup de poing », ressemblant à un de ses centres d’intérêt : la boxe.
Les mots frappent, résonnent en nous, virevoltent et nous échappent parfois, jaillissent, explosent, libèrent tout ce que l’auteur a accumulé en lui, comme autant de « violence(s) » qu’il lui faut exprimer pour se libérer ….

Se libérer de quoi, de qui ?
De ses parents, de sa famille, de sa ville, de son enfance, de sa vie pour pouvoir enfin la vivre à sa guise ?

Une écriture aiguisée, audacieuse, caustique, ne mâchant pas les mots, maniant la dérision et l’humour, avec dextérité et brio.

Que faire quand « on ne se retrouve pas» dans les «siens », quand on a l’impression de ne pas comprendre sa famille, de ne pas l’aimer, de ne pas en être aimé ?

Lire, lire ….. et lire ce qui nous tombe sous la main, fut-ce Le Nouveau Larousse illustré en sept volumes ….

Ce livre oscille entre hommage et critique acerbe ... On peut avoir la larme à l'oeil, sourire, rire (jaune parfois) ... Frédéric Roux, par son écriture, nous transmet intensément son ressenti.
On "suit" la famille, dans les années cinquante-soixante, les événements, la vie de tous les jours, les coups durs, les choses avouées (mais pas forcément pardonnées), les choses inavouables (mais que beaucoup connaissent...), on ne s'ennuie pas, tout cela va très vite et les pages s'enchaînent sans problèmes ...

Roman ? Vous avez dit roman ? Ne faudrait-il pas, Monsieur Roux, rajouter « autobiographique » ? ...

Ce qui est certain, c’est que si Frédéric Roux, a une fois encore besoin de « vider son sac », il peut s’allonger sur mon canapé, c’est bien volontiers que je « l’écouterai » à nouveau ….


"Une saison blanche et sèche" d'André Brink (A Dry White Season)


Une saison Blanche et sèche (A Dry White Season)
Auteur : André Brink
Traduit par Robert Fouques Duparc
Éditions : Stock (20 Avril 1994)
ISBN : 978-2234012530
370 pages

Quatrième de couverture

Dans la moiteur des nuits orageuses de Pretoria, Ben Du Toit découvre un monde tout proche et pourtant si loin de sa vie d'Afrikaner. Peu à peu, il ouvre des yeux incrédules sur un système qu'il cautionne par ignorance et par lâcheté et qui entretient une communauté, un peuple, dans le désespoir et la résignation. La naïveté de Ben est telle qu'il croit encore à une justice où toute notion de couleur ou de race serait abolie, mais dans les années quatre-vingt en Afrique du Sud, l'espoir est un privilège de Blanc.

Mon avis

Ce livre me laisse une impression de rencontre ratée.

J’ai apprécié le fond, l’histoire en filigrane qui m’a fait découvrir l’Afrique du Sud, Soweto, l’apartheid, les conditions de vie des personnes à peau noire, celles des Afrikaners, les humiliations cachées, les abus du pouvoir, la loi du silence lorsqu’on creuse un peu et qu’on « dérange » …

Mais je n’ai pas apprécié l’écriture, la forme, la façon dont l’auteur s’exprime.
Ce qui fait que ce roman ne m’a pas émue, touchée, et cela représente au niveau de la lecture, un gros manque pour moi.

A mon sens, André Brink est resté « observateur ». D’autres écrivains ont dépeint des faits sans donner leur avis mais leur style m’avait intéressée. Là, ce n’est pas le cas. L’écriture m’a semblé lisse, sans « force » intérieure, comme si tout était décrit de la même manière, sur le même ton …. Même dans les faits graves, rien ne s’emballe … rien ne me prend « aux tripes » … Et que c’est dommage !

Ben Du Toit avait pourtant tout pour me plaire : la volonté, le charisme de celui qui ne lâche rien malgré les intimidations, l’envie de comprendre, de réussir ou d’autres ont échoué …

« Je sais seulement que je ne peux plus m’arrêter. Je vais devenir fou si je ne peux pas croire en ce que je fais. »

Et malheureusement, son aventure ne m’a pas captivée …

Les personnages secondaires m’ont presque plus intéressée que lui, sans doute parce que je n’ai pas réussi à m’attacher à ses pas, à partager sa quête de vérité …
La femme de Gordon m’a touchée, habitée par la peur et malgré tout désireuse de s’en sortir, d’agir …
« A la longue, on finit par être fatigué d’avoir peur…. »

Cette phrase, lue dans la troisième partie, me donnerait presqu’envie de dire que c’est cette partie qui m’a le plus passionnée mais peut-être m’étais-je tout simplement, habituée au style de l’auteur ….

J’ai lu que ce livre avait été interdit, en Afrique du Sud, lorsqu’il est sorti, sans doute parce qu’il mettait le doigt sur des problèmes vitaux bien réels …. Le prix qu’il a obtenu serait-il un choix politique ?

"Les vents contraires" d'Olivier Adam

Les vents contraires
Auteur: Olivier Adam
Editions: Point 2 (Avril 2011)
ISBN:978 2363940049
440 pages

Quatrième de couverture


Depuis que sa femme a disparu sans jamais faire signe, Paul Andersen vit seul avec ses deux jeunes enfants. Mais une année s'est écoulée, une année où chaque jour était à réinventer, et Paul est épuisé. Il espère faire peau neuve par la grâce d'un retour aux sources et s'installe alors à Saint-Malo, la ville de son enfance.

Mon avis

A Paul,

Quelques heures à vous côtoyer, à tenir votre histoire au creux de ma main (à cause du format du livre?), à me sentir proche de vous, si proche que j’aurais presque fait la folie de partir en voiture vous chercher sur la plage que vous décrivez si bien …

Je vous aurais pris par la main, je vous aurais dit ce que vous savez déjà et que vous avez si bien retranscrit … A savoir que jamais, on ne s’habitue à l’absence de la personne aimée …
On apprivoise la souffrance, on continue à avancer, appuyé sur ses enfants, ses amis, parfois sa famille … la béance se referme, petit à petit, douloureusement, se rouvrant parfois, mais il reste toujours une trace, une cicatrice …
« La nuit nous protégeait et à ce moment précis j’avoue avoir pensé que les choses allaient redevenir possibles, ici j’allais pouvoir recoller les morceaux et reprendre pied, nous arracher les enfants et moi, à cette douleur poisseuse qui nous clouait au sol depuis des mois … »
Un jour, on se reprend à sourire, Paul, oui, je vous l’assure … On se demande ce qui arrive, les enfants explosent de rire eux aussi … On s’en veut, l’absent ( e ) n’est plus là et malgré tout, on retrouve un peu de couleurs … En a-t-on le droit ?

Vous lire, vous un homme, un de ces hommes dont on sait qu’ils parlent peu, s’expriment moins que les femmes,
« Alex et moi on était faits du même bois, toujours à fuir les gouffres intimes, les confessions sentimentales, toujours à lire entre les lignes, à nous livrer à demi-mot, entre deux silences, toujours à écarter les questions, à les enterrer, les ensevelir, comme si se parler était une chose dangereuse, comme si parler du cœur de nos vies pouvait nous blesser et nous rendre plus friables encore. »
m’a aidée à comprendre ceux, qui vous ressemblent et que je connais (bien ou mal, connaît-on vraiment quelqu'un?), parce qu’ils sont seuls pour élever leurs enfants …

Ceux qui, comme vous le dites avec tant de poésie, de charme, de luminosité, avec tant d’émotions contenues, tant de pudeur, tant de tendresse dans les mots, doivent être « présence » pour leurs enfants, être là, faire face aux questions, aux cauchemars, aux nuits troubles, troublées, aux regards, aux enseignants qui ne comprennent pas tout et qui sont maladroits, aux curieux, aux voisins, à tout ........... seul …

« Parfois leur sommeil m’était une déchirure, un long hiver se posait alors sur la nuit, une gangue épaisse de silence et de solitude. »

J’aurais voulu trouver des mots des phrases des métaphores des expressions qui parlent au cœur qui bouleversent comme vous, comme ça sans virgule mais avec un rythme qui donne vie à ce qu’on lit …

Mais je suis maladroite, Paul, sans doute parce que je suis tant émue, bouleversée, enchantée de vous avoir rencontré, de vous avoir lu qu’il me semble que vous êtes là, palpable, vivant …
Je sais que vous m’habiterez longtemps, je sais que je vous relirai et finalement, ce format est adapté à mon ressenti, je pourrais vous glisser dans une poche, tout près de mon cœur ….

Cassiopée

La vie est comme un arc-en-ciel : il faut de la pluie et du soleil pour en voir les couleurs…
Que les nuages et le gris se fassent oublier et que les couleurs égaient votre vie…

"Potions amères" de Patrick S. Vast


Potions amères
Auteur : Patrick S. Vast
Éditions : Le Chat Moiré Éditions (7 Septembre 2017)
ISBN : 978-2-95661888-0-8
240 pages

Quatrième de couverture

L’Herboristerie Ragonot : une véritable institution. Patrice et Germaine Ragonot la tiennent paisiblement avec Denise, leur employée qui se remet difficilement d’un deuil. Mais tout va basculer dans les pires tourments une fin d’après-midi, quand Denise se fait voler par un délinquant, la recette qu’elle porte à la banque.

Mon avis

C’est à Béthune qu’il connaît bien que Patric S. Vast situe l’action de son dernier roman. Une petite ville d’un peu plus de deux cent mille habitants où survivent encore quelques commerces. Dans le quartier où il a imaginé son intrigue, on trouve ainsi une herboristerie tenue par un couple vieillissant secondé par une jeune femme, Denise. Cette dernière a perdu son fiancé, victime d’en accident du travail, et malgré les appels du pied d’un représentant d’un commerce, elle reste triste et solitaire. C’est elle qui porte l’argent de la caisse à la banque et elle va se faire voler la sacoche contenant la dernière recette. Ce sera le début d’un « virage » dans sa vie, pas forcément facile à négocier….

Ses patrons, des gens de la « vieille école », sont soupçonneux. Enfin, surtout, elle, Germaine, qui se demande si son employée n’est pas complice avec le voleur pour partager ensuite le butin. D’autant plus que la jeune femme semble quitter ses vêtements de deuil, retrouver un peu de son énergie et qu’en outre, elle s’est achetée un scooter !!! Tout cela semble bien bizarre aux propriétaires du commerce…. Ils sont donc méfiants, sur leurs gardes, prêts à agir et à se protéger (après tout, la légitime défense existe et parfois la police… on l’attend et quand elle arrive, c’est trop tard…) Le mari tente bien de nuancer les propos de sa femme mais …. Leur commerce est une institution, toute leur vie et il n’est pas question de se laisser dépouiller…. Pas loin de chez Ragonot, il y a le boucher, le restaurateur, une famille avec une jeune femme souffrant d’un handicap mental qui aime regarder par la fenêtre….. Ce secteur est parfaitement mis en place par l’auteur et on visualise la place de chaque magasin ainsi que son responsable…..

L’enquête sur le vol est confiée à un policier un peu teigneux, le genre qui fourre son nez partout et a tendance à poser (trop ?) de questions…. Ce brave homme ne lâche pas le morceau bousculant chacun dans ses habitudes, récoltant des indices minimes qu’il essaie d’exploiter malgré tout. Ce n’est pas un roman sanglant, effrayant mais bien un récit ancré dans le quotidien avec des protagonistes tout à fait crédibles. Je pense notamment à la jeune voisine ayant des troubles du spectre autistique (vu ce qu’il y a comme signes de son infirmité, je pense que c’est la pathologie dont elle souffre), sa description est parfaitement en phase avec sa pathologie et les éléments qu’elle apporte sont bien intégrés au récit. Les individus sont présentés en quelques lignes et cela suffit à leur donner de la consistance. J’aurais volontiers mis une gifle à la « vieille peau » (pardon pour l’expression) si vous voyez de qui je veux parler…. C’est dire qu’elle est tout à fait vraisemblable.

Patrick S. Vast signe là un recueil vivant (malgré les défunts ;-) , agréable à lire. Il aborde en toile de fond plusieurs sujets, celui de la légitime défense pour les petits négociants qui se sentent parfois bien seuls lorsqu’ils ont des déboires, celui de l’accompagnement des repris de justice, celui du voisinage et de la différence entre surveiller les faits et gestes et agir à bon escient s’il se passe quelque chose d’anormal…..tout est question de dosage….comme avec les décoctions de plantes médicinales, et je ne crois pas que l’auteur me contredira ;-)

"L'Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T. S. Spivet" de Reif Larsen (The Selected Works of T. S. Spivet)

L'Extravagant Voyage du jeune et prodigieux T. S. Spivet (The Selected Works of T. S. Spivet)
Auteur: Reif Larsen
Traduit de l’anglais par Hannah PASCAL
Editions: NiL (Avril 2010)
ISBN : 9782841115167
375 pages

Quatrième de couverture

T. S. Spivet est un enfant prodige de douze ans, passionné par la cartographie et les illustrations scientifiques. Il dessine tout ce qu’il observe : la carte de ses rêves, les expressions de sa famille, les distances qui séparent l’Ici de l’Ailleurs. Mais, entouré d''un père mutique, d''une mère entomologiste, d’une soeur en pleine adolescence, et de leur chien dépressif, T. S. se sent très seul dans son ranch du Montana.
  
Mon avis

A consommer par petites portions pour ne pas risquer l’overdose et rater ainsi un livre original à souhait et parfois jubilatoire.
Trop d’un coup pourrait nuire gravement à la santé (comme les cherrios, comprenne qui lira le livre …)

Un petit garçon, passionné de sciences et de cartographie est convié à Washington pour recevoir un prix prestigieux sauf qu’il pense que … tout le monde là-bas croit qu’il est adulte …
Et lui, persuadé que personne dans son entourage sait et ne va comprendre ce qui lui arrive, décide de traverser seul les Etats-Unis …

Décliné en trois parties : L’Ouest, la traversée, l’Est, nous allons suivre T.S.Pivet dans son fabuleux voyage …
Nous découvrirons en marge de son récit, ses commentaires, ses croquis, ses réflexions, ses dessins, ses envies, ses analyses, ses tableaux (Exemple : une colonne pour le temps qui passe, une colonne pour le discours du secrétaire, une colonne pour ce que fait son voisin de table à chaque instant du discours et une colonne pour son niveau d’intérêt) etc …
C’est lui qui raconte, il parle de ses parents, de son père, rancher, de sa mère qu’il appelle Dr Clair, (c’est une scientifique), de son frère, de sa sœur ….

J’ai eu beaucoup de plaisir à suivre ses raisonnements décalés, à observer ses croquis, à comprendre ses questions, à l’écouter parler, analyser, à le voir découvrir certains « secrets de famille », à comprendre ce qu’il note dans ces multiples carnets, à « l’entendre » réfléchir sur sa place dans sa famille, sur le poids de sa culpabilité, sur son avenir ….

« Mais moi, je ne veux pas mourir sans avoir essayé de comprendre comment tous les petits morceaux du monde tiennent ensemble … » …. Comme je le comprends !

Format, papier, couleur, iconographie d’une originalité remarquable ajoutent du charme à ce livre.

Et à la manière de T.S., voici quelques bonnes raisons pour lire ce livre :

1) Vous ne rencontrerez pas un autre petit garçon comme lui et comme ce n’est pas le vôtre, il ne vous fatiguera pas
2) Connaissez-vous la boîte à ennui avec ces cinq types d’ennui : ennui par anticipation, par dépit, …. Non je ne vous dirai pas les autres, lisez le livre !
3) Avez-vous déjà entendu parler du comportement grégaire de l’étourneau sansonnet ?
4) A partir de quand un short devient-il pantalon ?
Je vois votre œil qui frise et qui me fait comprendre que ça ne suffit pas … D’autres raisons ?
5) Il faut sortir parfois des sentiers battus …
6) L’auteur ne pourra jamais écrire un autre livre comme celui-là, il restera unique !

"La tresse" de Laetitia Colombani

La tresse
Auteur : Laetitia Colombani
Éditions : Grasset (Mai 2017)
ISBN : 978-2246813880
230 pages

Quatrième de couverture

Trois femmes, trois vies, trois continents. Une même soif de liberté.
Inde. Smita est une Intouchable. Elle rêve de voir sa fille échapper à sa condition misérable et entrer à l’école.
Sicile. Giulia travaille dans l’atelier de son père. Lorsqu’il est victime d’un accident, elle découvre que l’entreprise familiale est ruinée.
Canada. Sarah, avocate réputée, va être promue à la tête de son cabinet quand elle apprend qu’elle est gravement malade. Liées sans le savoir par ce qu’elles ont de plus intime et de plus singulier, Smita, Giulia et Sarah refusent le sort qui leur est destiné et décident de se battre.

Mon avis

Moi qui suis souvent coiffée d’une longue tresse et qui offre mes cheveux ; avec un aussi joli titre, ce livre était fait pour moi. De plus il m’avait été recommandé par une lectrice de qualité.

« La tresse » est un roman qui s’est fait connaître par le bouche à oreille et que rien ne destinait, a priori, à un tel succès….

Pourtant, lorsqu’on le lit, on est conquis. Il y a le thème : ces trois femmes dans des contrées très éloignées les unes des autres mais qui ont en commun cette rage de vivre, de gagner un combat annoncé comme perdu d’avance.  Il y a également une écriture lumineuse, tendre, délicate pour les protagonistes qui sont attachantes et puis enfin, la découverte de trois milieux très différents (et on sent que l’auteur s’est documenté) : celui de l’Inde, des castes, celui des perruquiers siciliens et enfin celui des avocats d’affaires au Canada où il faut être plus fort que les autres pour réussir.

Il n’y a pas de détails inutiles sur chaque situation, simplement les faits. Ceux qui rendent heureux, ceux qui donnent de l’espoir, ceux, destructeurs dans un premier temps, qui obligent à rebondir, à se battre…..

J’ai énormément apprécié cette lecture que j’ai quitté à regret. J’ai trouvé la couverture sobre et élégante comme le contenu  et j’aime à penser que Laetitia Colombani s’accorde avec ces deux aspects de son recueil, ce doit être une femme solaire ….

"Et Nietzsche a pleuré" de Irvin Yalom (When Nietzsche wept)

Titre: Et Nietzsche a pleuré
Auteur: Irvin Yalom
Traduit par Clément Baude
Editions: Le Livre de Poche (Mars 2010)
ISBN: 978 2253129455
Nombre de pages: 504

Quatrième de couverture

Venise, 1882. La belle et impétueuse Lou Salomé aborde le Dr Breuer, ancêtre de la psychanalyse et mentor du jeune Sigmund Freud. Elle vient solliciter son aide pour son ami, Friedrich Nietzsche. Le philosophe est encore méconnu du grand public. Après l'échec de son ménage à trois avec Lou Salomé et Paul Rée, Nietzsche est plongé dans le plus profond désespoir. Irvin Yalom imagine la rencontre fictive entre Breuer et Nietzsche, véritable partie d'échecs entre les deux hommes, qui concluent alors un pacte pour tenter de se guérir l'un l'autre. Et c'est à une nouvelle naissance de la psychanalyse, dense, ludique et originale, que nous convie Irvin Yalom.

Mon avis

Ce livre se lit comme un roman, il est d’ailleurs référencé « roman » mais ce n’est pas un roman ordinaire.

Il fait côtoyer des personnages ayant existé à la même époque mais ne s’étant jamais rencontrés dans la réalité. L’auteur imagine donc les rencontres, les dialogues, les visites…et en même temps, certains éléments sont historiques. On y parle aussi de philosophie et de psychanalyse.
C’est très bien écrit et bien qu’il n’y ait, à proprement parlé, pas de suspense, on se laisse emporter par le récit.

Le Docteur Breuer (qui a initié Freud à la psychanalyse) va, à la demande de Lou Andréa Salomé, rencontrer Nietzsche, qui souffre et essayer de le soigner. Nietzsche qui dit : « la maladie frappe mon corps mais ce n’est pas moi ».A travers des réflexions (qui font parfois suite à un dialogue entre les personnages), des dialogues, des échanges, des lettres, des « notes » écrites par les personnages, on apprend beaucoup sur le couple, la vie, la mort, les questions existentielles (pourquoi j’existe, pourquoi je souffre ? qui suis-je ? etc… ), l’incidence du passé.... On suit les pensées et le cheminement de chacun et on voit comment sont mises en place certaines thérapies par la parole, à travers la parole (page 157, le terme employé est « cure de la parole »)…On se demande qui soigne qui, si les rôles ne s’inversent pas entre Nietzsche et Breuer lorsqu’ils discutent tous les deux au début du livre (je n’en dis pas plus pour ne pas dévoiler le déroulement.)
Mais il n’y a pas qu’eux.... avec d’autres personnes, on découvre comment sont analysés certains faits (l’hydrophobie par exemple), les rêves, les passions, les obsessions, les peurs, l'oubli, le néant, etc…
Breuer fait une « autoanalyse », il réfléchit à ce qu’il est et ses questions nous servent parfois de miroir.
Lorsque Breuer pense : « Qu’ai-je perdu de la vie, faute, simplement, d’avoir su regarder ? Ou d’avoir regardé sans rien voir ? », On prend cette interrogation en pleine face…Et nous qu’avons-nous perdu de notre vie ?
Breuer et Nietzsche s’observent, s’écoutent, se parlent, échangent, parfois avec prudence, parfois avec vivacité, ils avancent dans la connaissance de l’autre et dans leur propre connaissance, ils utilisent chaque expérience, chaque vécu, comme autant de pièces d’un puzzle pour « être mieux avec soi-même et les autres ». Ces deux hommes ont en commun un certain « désespoir », une espèce de solitude…

On a aussi une approche de Vienne et de son ambiance à la fin du 19 ème siècle.

A travers ce livre, j’ai eu l’impression de « suivre » différentes réflexions, différents regards menant à la « naissance » de la psychanalyse(même si tout cela est fictif, la psychanalyse n’étant pas née de cette rencontre qui n’a pas existé…) On sent que les personnages veulent soit en aider d’autres, soit s’aider eux-mêmes en comprenant leur fonctionnement, en aidant les « âmes » à s’exprimer, en faisant « sortir » ce qui est enfoui en nous, que nous refoulons, refusons de voir, ce qui parfois angoisse, fait peur, dérange. (« Du plus loin qu'il m'en souvienne, j'ai toujours été effrayé par les espaces vides qui sont en moi. Et ce sentiment de solitude n'a rien à voir avec la présence ou l'absence de gens autour de moi. Comprenez-vous ?")
C’est en cela que ce livre m’a paru très intéressant. Mais il n’y a pas que cela, chaque question, chaque remarque ou réflexion peut nous amener à réfléchir, à cheminer, à mieux discerner ce que nous sommes, qui nous sommes (si nous acceptons de nous laisser « entraîner » par ces questions) et nous permettre de plonger au cœur de nous-mêmes.
Ce livre est dans ce sens une "ouverture" qui peut nous donner envie d’aller plus loin….
(« Il faut trouver la force de s’aimer soi-même », « trouver son propre chemin », « votre seul devoir, c’est de devenir qui vous êtes », « aimer son destin »).

J’ai vraiment beaucoup apprécié cette lecture, je ne mettrai qu’un bémol:
j’ai trouvé trop « rapide » (même si c’est après une séance d’hypnose), le « mieux être » du docteur Breuer …. même si on peut penser que ce n’est que le résultat d’un long cheminement personnel et de tous les échanges avec Nietzsche et Freud….


A la fin du livre, dans la postface et une note de l'auteur, Irvin Yalom explique comment il a eu l'idée de ce livre. Il dit également que des contacts avaient été établis entre ces deux hommes mais ils n’avaient pas abouti. Il a donc essayé d’imaginer ce qu’aurait pu être leur rencontre et cela a donné naissance à ce livre.

"Le goût du bonheur : Tome 1 : Gabrielle" de Marie Laberge


Le goût du bonheur : Tome 1 : Gabrielle
Auteur : Marie Laberge
Éditions : Anne Carrière (Février 2003)
ISBN : 9782764604885
700 pages

Quatrième de couverture

Québec, 1930. Gabrielle est mariée avec Edward depuis bientôt dix ans. Entre la maison de l'île d'Orléans et celle de la Grande-Allée, elle mène une vie bien remplie, entourée de ses cinq enfants. De toute évidence, il s'agit d'un mariage heureux. Mais cette chose qui devrait être si simple fait pourtant froncer bien des sourcils dans l'entourage de Gabrielle. Décidément, le bonheur est suspect en cette époque où notre sainte mère l'Église nous dit que nous ne sommes pas sur terre pour être heureux, mais pour accomplir notre devoir.

Mon avis

« L’harmonie vient de la parenté mais aussi de la différence »

Dès les premières pages, on entre dans un récit vif, haletant, très vivant, ancré pour l’essentiel dans la vie d’une famille.  Il y a Gabrielle et Edward, un couple un peu atypique pour l’époque (début du vingtième siècle). Pourquoi ? Parce que contre l’avis de ses parents, de sa famille, Gabrielle a laissé son fiancé pour aimer Edward.  Ils s’Aiment avec un grand A, « oubliant » certains codes de l’église de l’époque, ils ne renoncent pas au plaisir de danser, s’embrasser, se toucher….Ils vivent ! Mais cela n’est pas toujours vu d’un bon œil comme d’ailleurs l’éducation qu’ils dispensent à leurs enfants. Quand les difficultés se présentent, c’est à deux qu’ils les affrontent. Pas question pour Gabrielle d’être uniquement une mère au foyer, effacée, efficace, et discrète. Elle existe et le fait sentir !

Ce couple est délicieux, frais, enthousiasmant, il est à lui seul, une bulle de bonheur dans ce roman. J’aime leur approche du quotidien, leurs rituels du soir (défaire un chignon, discuter avant de s’endormir… et bien d’autres choses….)  Je les ai trouvés attachants, vrais, sincères….

La toile de fond avec les événements de l’époque plante un contexte intéressant. La politique et le droit des femmes à s’exprimer, à choisir un travail, à utiliser la contraception, à choisir ce qu’elles veulent. Ces réflexions sur la femme sont bien approfondies et apportent un éclairage donné par les différents protagonistes : mari, ami, famille, femme coincée ou plus « libre », jeunes femmes etc…

Je n’ai pas senti le temps passer tout au long de cette lecture. Il m’est arrivé d’avoir envie de secouer certaines personnes, d’en encourager d’autres, de donner un bon coup de coude à quelques uns…. L’écriture est fluide, il y a de la sensibilité sans mièvrerie . Bien entendu, c’est parfois un peu « cliché », presque trop « évident » mais ça reste globalement une lecture sans prise de tête et avec des thèmes et des individus à découvrir….





"Trajectoires dans le cercle" de Sophie Aman


Trajectoires dans le cercle
Auteur : Sophie Aman
Editions : Aéropage (mars 2010)
ISBN:978-2908340853
Nombre de pages : 420

Quatrième de couverture :

Roman d'action, d'amour et d'aventure, qui vous immerge dans l'univers mystérieux et complexe des Services Secrets : une plongée délicieuse et mouvementée en eaux troubles...
Aude, une jeune étudiante, se trouve accidentellement impliquée dans un réseau terroriste. Une équipe est chargée de la mettre à l'abri et d'assurer sa protection. Un autre regard, de l'intérieur, entre fraîcheur et gravité, entre renoncement et sacrifice. Ou comment ces artisans de l'ombre conjuguent le verbe servir.

Mon avis 

«Toute ressemblance avec …. »

« Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé ne saurait être que fortuite. »

Cette petite phrase m’a trotté dans la tête et j’ai bien regardé, elle n’est écrite nulle part dans le livre ….
Mais ….. ce n’est pas écrit non plus, « roman …. »
Alors …..
Connaissant le «vécu » de Sophie Aman » (agent des services de renseignements, coma profond suite à un accident de ski etc ….), je ne peux m’empêcher de penser qu’elle a mis probablement beaucoup de son histoire personnelle dans ce livre …
D’ailleurs, lorsqu’on écrit, on donne toujours de soi, n’est-ce pas ?

En couverture, une très belle aquarelle, sobre, qui m’a beaucoup plu, réalisée par le peintre officiel des Armées (Tiens ? Coïncidence ? ….)

Puis nous rentrons dans le vif du sujet …
Aude, jeune fille de 18 ans, va se trouver entraînée, sans le vouloir, à œuvrer dans « l’ombre » pour les services secrets français. En la suivant, nous redécouvrirons des événements du passé récent : Proche-Orient, Afrique, Europe (chute du mur de Berlin) … les lieux et les faits seront « revisités » à travers le regard d’Aude et de ses compagnons. Nous allons être avec eux, de l’autre côté, du côté de ceux qu’on ne voit pas, qui agissent pour défendre au mieux les intérêts de leur patrie.

Remarquablement expliqués, nous saurons tout ou presque, des entraînements pour faire de ces hommes et femmes des combattants aguerris, des caches, des méthodes de communication, des doubles identités, des précautions à prendre, des « couvertures » officielles, des sacrifices demandés, des exigences …. Le vocabulaire « militaire » ne dérange pas car il est expliqué, si besoin, en bas de page.

Il y a donc de l’action et on se laisse vite prendre au rythme trépident de ce livre que je n’ai pas lâché une fois commencé …. enfin presque …..
En effet, il m’a fallu une soixantaine de pages pour être vraiment accrochée.
Au début, j’ai trouvé l’écriture « trop simple », les phrases me semblaient très courtes et posées les unes à la suite des autres, puis cette façon « militaire » (dépourvue de toute circonvolution inutile) d’écrire m’a conquise (ou alors je me suis habituée) et cela ne m’a plus dérangée dans ma lecture au contraire, cette espèce de « sobriété » permettait d’aller à l’essentiel.

Mais Sophie Aman ne se contente pas d’écrire un livre d’actions, elle mène une véritable réflexion sur le rôle de la peur …

« Celui qui maîtrise sa peur, qui est capable de ne rien laisser paraître, dans les circonstances les plus périlleuses, est véritablement au sommet de son art. Il est littéralement maître de lui. »
« S’affranchir de la peur, c’est lâcher-prise, s’abandonner consciemment avec peut-être la mort à la clé … »

Cette peur qu’il faut « apprivoiser » pour donner le meilleur de soi, cette peur qui nous habite tous plus ou moins face à l’inconnu, cette peur qu’il est nécessaire de canaliser pour avancer dans la vie … Cette peur, encore plus importante dans les missions de ces « agents secrets » qui risquent leur vie …

Vie ? C’est aussi un sujet abordé de nombreuses fois dans cet ouvrage …
L’expérience des 126 jours de coma de notre auteur, lui a donné, sans doute, un autre regard sur la vie ….
Délicatement, sobrement, mais profondément, à travers les lignes retraçant l’évolution des différents personnages, Sophie Aman nous fait réfléchir à ce cadeau de chaque matin : se réveiller vivant …. et libre ….

« … je suis dans l’instant. Demain est un autre jour, que peut-être je ne connaîtrais pas, où la mort nous séparera.
……
Alors la vie prend véritablement  tout son sens, toute son intensité, toute sa profondeur et sa richesse. »

L’écriture est parfois encore un peu « stricte » et pourra s’étoffer,
tout comme les prochains personnages, dont il me plairait que l’aspect « psychologique » (pensées profondes et ressentis de chacun) soit développé.

En conclusion, l’histoire retracée dans « Trajectoires dans le cercle » est très « visuelle », les scènes d’action sont très bien décrites. Tout cela pourrait donner naissance à un film.

Ce très bon livre réunit à la fois, l’action, les sentiments et la réflexion  sur des sujets nous touchant « au cœur. ».
Sophie Aman sait nous captiver mais elle n'oublie pas non plus de nous faire réfléchir ....

"Le jeu de la défense" d'André Buffard


Le jeu de la défense
Auteur : André Buffard
Éditions : Plon (14 Juin 2018)
Collection : Sang Neuf
ISBN : 978-2259263368
432 pages

Quatrième de couverture

A Lyon, une jeune magistrate est découverte battue à mort sous une porte cochère alors qu'elle venait rejoindre son amant. Ce dernier est rapidement soupçonné, d'autant que ses mensonges, et plusieurs éléments matériels, l'accablent et en font le coupable idéal. Cet avocat connu, futur candidat à la mairie, décide de confier sa défense à David Lucas, un pénaliste réputé, qui va tout tenter pour le faire acquitter.

Mon avis

La justice a horreur du vide….

A l’âge de la retraite, tout en continuant d’exercer son métier d’avocat, André Buffard publie son premier roman et sans mauvais jeu de mots, il le fait d’une main de maître, même si on peut émettre quelques bémols que j’évoquerai par la suite.

Les chapitres sont courts et donnent du rythme, ce qui laisse le lecteur toujours dans le « mouvement ». Le récit est écrit soit avec « je » à la première personne, soit avec un narrateur. Lorsque c’est le « je » qui s’exprime, c’est David Lucas, le pénaliste, personnage principal, qui parle et on sent qu’André Buffard met beaucoup de son expérience dans ce qu’il fait dire à son protagoniste.  C’est d’ailleurs plutôt « technique », il y a plus de détails. On découvre le quotidien d’un avocat, qui gère plusieurs affaires en parallèle, qui doit se renseigner à droite et à gauche, qui a besoin d’une assistante dévouée, discrète et efficace. On  se demande si les réflexions de David Lucas ne sont pas le reflet de ce que pense Maître Buffard. Lorsqu’on lit des entretiens de ce dernier avec des journalistes, on retrouve des points concomitants … Dans les passages sans le « je », c’est  l’intrigue qui sert de fil conducteur, à savoir l’assassinat d’une jeune magistrate. Qui a commis l’irréparable ? Le compagnon jaloux, un homme sans domicile fixe qui passait par là, la femme de l’amant, un client mécontent ? La police mène l’enquête, l’avocat défend l’accusé… Chacun son rôle….. Mais pas facile de collaborer, sans se gêner et là aussi tout est calibré, pensé, ….

L’écriture et le style sont ceux d’un excellent conteur. André Buffard sait captiver (dans son travail, c’est essentiel d’être un bon orateur et il doit, sans doute, écrire avant de se rendre en plaidoirie), il sait impliquer le lecteur dans ce qu’il présente et les affaires qu’il a suivies de près ou de loin ont dû l’inspirer (celle qu’il évoque entre une comptable et son patron n’est pas sans rappeler un fait divers lu dans un quotidien stéphanois ;-)

Son approche du métier d’avocat m’a surprise, le titre en est la preuve « le jeu de la défense ». Il considère qu’il joue et qu’il essaie de gagner. Vu ainsi, c’est un raccourci bien entendu . Mais il y a un peu de ça. Il ne cherche pas à savoir si la personne qu’il défend est innocente ou coupable, son but est d’être sans état d’âme et d’ instiller le doute dans l’esprit des jurés pour que celui ou celle qu’il défend s’en sorte le mieux possible. Il met toute une stratégie, remarquablement décrite dans cet opus, en place.
« La part du jeu est inhérente au fonctionnement même de la justice. Loterie du choix de l’avocat, des magistrats qui vont gérer un dossier, tirage au sort des jurés, loterie des verdicts. »
C’est intéressant pour le lecteur même si c’est également dérangeant.  Dérangeant …le mot est lancé… j’ai trouvé que certains protagonistes étaient un peu « clichés » (par exemple, il n’y a pas que des tchéchènes dans le milieu de la prostitution.... )  et puis pourquoi planter le décor à Lyon ? Saint-Etienne ce n’est pas assez bien ? Je plaisante  …. quoique …. Une dernière chose : globalement, les avocats m’ont paru être des gens très sûrs d’eux… Ils ne se remettent pas énormément en question ou alors ils ne le montrent pas …péché d’orgueil ?

Malgré ces quelques petits reproches, j’ai avalé les plus de quatre cent pages très rapidement, signe d’un bouquin addictif, prenant et bien construit.

"Et je danse, aussi " de Anne-Laure Bondoux et Jean-Claude Mourlevat


Et je danse, aussi
Auteurs : Anne-Laure Bondoux et Jean-Claude Mourlevat
Éditions: Fleuve Editions (12 Mars 2015)
ISBN : 978-2265098800
288 pages

Quatrième de couverture

Pour Pierre-Marie, romancier à succès (mais qui n'écrit plus), la surprise arrive par la poste, sous la forme d'un mystérieux paquet expédié par une lectrice. Mais pas n'importe quelle lectrice ! Adeline Parmelan, « grande, grosse, brune », pourrait bien être son cauchemar... Au lieu de quoi, ils deviennent peu à peu indispensables l'un à l'autre. Jusqu'au moment ou le paquet révèlera son contenu, et ses secrets...

Mon avis

Ce n’est pas un secret, j’aime beaucoup les romans épistolaires et là, avec des échanges de mails, on retrouve ce style.

J’avais très peur d’un roman « gentil », un peu mièvre, écrit à quatre mains par des auteurs cherchant à se faire plaisir. Et bien pas du tout. J’ai été conquise dès le début, j’ai ri toute seule (à faire retourner les gens qui étaient dans la même pièce que moi), j’ai admiré l’intégration des nouveaux courriels, permettant une autre approche des deux principaux personnages et une autre « dimension ».

J’ai toujours été plus à l’aise à l’écrit qu’à l’oral, je fais partie des gens qui aiment écrire des lettres, des vraies, celles où on se confie, où on échange vraiment. Alors ce livre était fait pour moi.
Petit à petit, les deux protagonistes avancent, se révèlent. Je serai s curieuse de savoir comment les auteurs ont fait. Avaient-ils une trame commune ou chacun donnait-il ses idées au fur et à mesure ?

En tout cas, c’est une belle réussite. L’humour est omniprésent (la lettre où Pierre Marie s’adresse à un couple d’amis est à se tordre de rire), la tendresse aussi et la plume (les plumes ;-) sont belles.

Et en plus, c'est bien meilleur que les anti dépresseurs pour le moral!!!!

"Le ruisseau rouge" de Patrick S. Vast


Le Ruisseau rouge
Avril 1918. La bataille de la Lys.
Auteur : Patrick-S. Vast
Éditions : Pôle Nord Éditions
ISBN : 979-10-92285-06-2.
260 pages

Quatrième de couverture

Au printemps 1918, la pression allemande s’accentue entre Flandres et Artois. A quelques kilomètres à l’arrière des lignes britanniques, le petit village de Robecq est évacué. Demeure sur place Germain Baudouin, qui cinq ans plus tôt a été mêlé à une affaire tragique et inexpliquée au cours de laquelle le Rimbert une des quatre rivières qui traversent la commune s’est teinté de rouge. Au milieu des ruines, des destins vont se croiser. C’est l’heure des règlements de comptes.

Mon avis

Ruisseau rouge est le deuxième livre, sorti le 23 janvier 2014, d’une collection sur la Grande Guerre, dirigée par Léo Lapointe. Il a été prévu une série de six récits, avec des parutions étalées entre novembre 2013 et novembre 2014 par la maison d’éditions dirigé par Gilles Guillon, Pôle Nord Éditions (siège à Roubaix). Chaque histoire se passe dans la région du Nord et est écrite par un écrivain nordiste.

Patrick-S. Vast suit la bataille de la Lys d’avril 1918 dans un petit village près de Béthune. Il mêle habilement une ambiance historique à des faits issus de son imagination. La construction du roman alterne trois époques : une très courte situant les premiers faits en 1897 et les deux autres datées de 1914 et 1918. Le village est décrit avec précision, comme si l’auteur étalait des photographies un peu jaunies sous nos yeux. Chacun des individus, apparaissant tour à tour, est parfaitement intégré dans « le paysage ». L’ambiance est celle, typique, de certaines petites contrées, les habitants ont tendance à se surveiller, s’observer, colporter tout en disant haut et fort qu’ils ne s’occupent pas du voisin et à chacun sa vie….

L’écrivain qu’est Patrick-S. Vast a l’intelligence de ne pas « juger » : les français, les allemands ou autres étrangers qui font vivre son œuvre. Il les intègre pour le besoin de son roman au fur et à mesure de l’avancement des événements. De plus des faits dramatiques entraînent des recherches policières donnant une consistance intéressante à son écrit. On ne reste pas figé sur la vie d’un village pendant la première guerre mondiale, on va plus loin par le regard des inspecteurs ou autre essayant de démêler l’écheveau des relations.
Les retours en arrière apportent les éléments nécessaires à la compréhension des faits mais permettent également de mieux cerner l’évolution des personnalités. Mensonges, trahisons, petits arrangements pas très honnêtes, « débrouillardises » pour essayer de tirer du profit, tous les travers de tout un chacun sont soigneusement exprimés sans que cela lasse le lecteur ou paraisse « surfait ».

J’ai lu que Patrick-S. Vast s’était beaucoup documenté pour écrire cet opus. Il y a certainement un travail de fond très important mais là où l’écrivain est « fort », c’est que cela ne se sent pas. Tout est parfaitement « fondu » : le réel et l’imaginaire, et au final, nous avons une lecture fluide, agréable, où tout s’enchaîne avec merveille. Le passé éclaire le présent et cette lecture « non linéaire » est menée de « main de maître ».
Les «romans » dits historiques n’ont pas ma préférence en règle générale mais là, je suis rentrée très vite dans l’intrigue, m’attachant aux différents protagonistes (pas tous, hein, certains ont un « mauvais fond »). Les caractères de toutes ces personnes ne sont pas trop « marqués », on ne sombre ni dans la caricature, ni dans le pathos, tout est plausible.
J’ai particulièrement apprécié l’enquêteur Tillette : discret, opiniâtre, dévoué, attentif aux autres, compréhensif, mais aussi persuadé de certaines choses et souhaitant arriver à ses fins.
Un homme comme on les aime.

Je ne suis pas férue de cette période historique mais Patrick-S. Vast a su me donner l’envie de découvrir un peu plus la vie des hommes à cette époque. Comme il cite sa documentation dans une annexe assez complète, je pense que je vais me pencher un peu plus sur « La bataille de la Lys ».

Je vais avoir un souci pour « classer » ce roman, historique ? Policier ? Littérature générale ? En tout cas, un excellent livre que je recommande chaudement.
Bravo à Monsieur Patrick-S. Vast mais aussi à l’éditeur pour la qualité de cette publication : le « thème » commun des couvertures de la collection est une bonne idée et le format poche de qualité (pages et couverture de grammage épais ce qui donne une prise en mains plaisante).

"Le roi des mensonges" de John Hart (The king of lies)


 Le roi des mensonges (The king of lies)
Auteur : John Hart
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Philippe Rouard
Éditions :  Jean-Claude Lattès (Février 2008)
ISBN : 9782709628846
445 pages

Quatrième de couverture

Quand on retrouve le corps de son père, Ezra, tué de deux balles dans la tête, Work se retrouve plongé dans les conflits de son passé. Nombreuses sont les personnes qui avaient des raisons d’en vouloir à l’homme dur et secret qu’était Ezra. Á commencer par Jean, sa propre fille et la sœur de Work. Afin de protéger sa sœur, Work tente de faire disparaître l’arme du crime et se retrouve accusé du meurtre.
Pour prouver son innocence, et peut-être celle de sa sœur, Work doit fouiller dans les secrets et les mensonges de son père, et revenir sur ses propres erreurs.

Mon avis

«Ce fut à ce moment que je sentis le sol se dérober sous moi et que je chutai dans ce puits profond de la haine de soi »

Ce roman qui est caractérisé comme un roman policier ou même thriller d’après l’éditeur n’est pas ordinaire. Pourtant l’histoire pourrait paraître banale : Work, un avocat issu d’un mileu pauvre et le reniant, se retrouve face au cadavre de son père, assassiné. Une enquête va être menée, on peut le soupçonner tout comme sa sœur Jean. De non-dits en découvertes, nous allons accompagner Work dans son cheminement vers la vérité, SA vérité ou comment prendre sa vie en main quand vous avez toujours subi…A travers un secret de famille, enfoui au plus profond mais qui empoisonne et régule le présent, il erre, divague, se pose des questions existentielles, fait des choix (bons, mauvais ?) … Il est attachant parce qu’on a tous été un jour ou l’autre comme lui.

Ecrit à la première personne, on peut s’identifier à cet avocat, qui sent l’étau se resserrer autour de lui mais qui connaît quelques « trucs » pour ralentir la justice. C’est rare, dans un roman policier, que ce soit le suspect qui dise « je », c’est une approche originale.
Les relations avec le père, évoquées par flash back, avec son épouse, sa sœur dans le présent sont assez abouties mais sans prise de tête inutile.

Un roman qui se lit bien et qui est prenant.

Un seul petit défaut: certaines situations sont un peu "prévisibles"

"Les lumières de l’île" d'Elizabeth George (The edge of nowhere 4)


Les lumières de l’île
The edge of nowhere 4
Auteur : Elizabeth George
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Alice Delarbre
Éditions : Presses de la Cité (Octobre 2017)
ISBN : 978-2258090101
360 pages

Quatrième de couverture

Becca a débarqué sur l'île de Whidbey sous une fausse identité afin d'échapper à son beau-père ; sa mère devait la rejoindre un an auparavant, pourtant la jeune fille est toujours sans nouvelles. Désespérée, elle s'est lancée à sa recherche mais son enquête tourne court...

Mon avis

Elizabeth George écrit des romans policiers avec des héros récurrents dont, notamment, Thomas Linley et Barbara Havers mais dans ce livre, ne vous attendez pas à les retrouver. Cette lecture agréable pour les adultes, doit être totalement emballante pour les adolescents puisque les personnages principaux ont leur âge. J’ai dépassé cette période de jeunesse depuis longtemps mais j’ai malgré tout, beaucoup apprécié ce livre.

On se retrouve sur une île avec tout ce que cela peut entraîner : des lieux où tout le monde (ou presque) se connaît et où il est difficile d’être totalement indépendant en faisant ce qu’on souhaite sans être observé ou jugé. Les jeunes que nous découvrons vivent dans des familles très différentes. Certains très (trop ?) proches de la religion, empêchant leur enfant de penser par lui-même, d’autres ayant baissé les bras devant les difficultés rencontrées par leur progéniture, d’autres encore ayant eu recours à l’adoption pour devenir parents …... Présenté comme cela, ce groupe peut sembler très caricatural. Mais il n’en est rien car dans la vie, nous rencontrons des gens comme ceux qui sont les protagonistes de cet opus. Parfois un peu secrets, très souvent enthousiastes, s’emballant vite mais attachants, ces différents individus m’ont vraiment intéressée. J’ai apprécié que la plupart ait le courage de se battre pour ses idées, voire pour sa famille. Il m’a semblé qu’ils choisissaient tous (ou presque) des combats qui en valaient la peine.

Je ne connaissais pas les tomes précédents et cela ne m’a gênée en rien. Je regrette par contre une fin qui me paraît incomplète (surtout en ce qui concerne Becca) et il semblerait que la série s’arrête là…. Dommage…. Becca est d’ailleurs la plus mystérieuse de tous et son « talent » (dont je ne dirai rien ;-) permet au lecteur de s’échapper dans l’imaginaire…..

L’écriture est fluide, merci à la traductrice ! Les aventures racontées addictives donc on tourne les pages et on ne ressent aucun temps mort et on a sans cesse envie d’en savoir plus.


Certains diront qu’Elizabeth George a un style nettement plus élaboré lorsqu’elle rédige sa série de policiers. Evidemment, mais elle montre un réel talent en étant capable d’écrire « plus simple » pour un autre public.


"Homicide par précaution" de Olivier Kourilsky

Titre : Homicide par précaution
Auteur : Olivier Kourilsky
Editions Glyphe (Mai 2010)
ISBN : 978-2352850717
208 pages

Quatrième de couverture 

Francis Liotais, représentant d’une entreprise de matériel médical, est un joyeux célibataire, aussi charmant que volage.
Sa tranquillité s’envole le jour où une de ses maîtresses est assassinée et qu’il commence à suspecter une autre de ses conquêtes, une femme violemment jalouse.

Mon avis

En refermant ce livre, je me suis dit qu’il ne faisait pas bon mentir ….

Alexander Pope dit d’ailleurs :

« Celui qui dit un mensonge ne prévoit point le travail qu'il entreprend ; car il faudra qu'il en invente mille autres pour soutenir le premier. »

Le personnage principal de ce roman Francis Liotais, dragueur insatiable se prenant au jeu de la séduction va se retrouver pris à son propre piège. De conquêtes en conquêtes, pour protéger ses arrières, il va mentir … Tout se passe sans trop de problèmes, même si certaines de ses maîtresses ont des doutes sur cette vie un peu dissolue, jusqu’au jour où …. des disparitions de matériel hospitalier  (il est responsable des ventes de ce matériel) vont lui poser quelques soucis …

Des maîtresses pas toujours faciles à gérer, la pression de ses supérieurs au travail pour comprendre ce qui se passe, voilà notre pauvre Francis, entraîné malgré lui sur des chemins qu’il n’avait nullement l’intention d’explorer.

Les premiers chapitres vont nous faire découvrir la vie de Francis, réglée comme du papier musique, entre ses déplacements professionnels qui lui offrent « une femme dans chaque port …. euh …non …. dans chaque hôpital et ses « régulières » dans la ville où il habite. Le « baise-en-ville » toujours présent dans le coffre, Francis est, comme les scouts, « toujours prêt » ….

Vient ensuite, le premier meurtre et Francis se retrouvera « coincé» par ses mensonges, pris entre deux feux …

L’intrigue démarre doucement. Au départ une histoire de vol qui peut sembler banale, puis qui va aller crescendo … Les événements vont se succéder les uns aux autres nous emmenant toujours plus loin dans la découverte de nœuds, de complications, d’autres ramifications que les deux « enquêteurs » : Francis et le commissaire Maupas vont s’ingénier à délier les uns après les autres, essayant de mettre en relation le passé et le présent afin que l’un explique l’autre.

L’essentiel du roman est « raconté » par Francis, à la première personne du singulier. Il nous explique les faits et les analyse.

L’introduction et l’épilogue donne une note d’originalité à ce livre qui se lit « bien » et dont l’écriture est alerte, bien rythmée par les nombreux dialogues.

Un bon moment de détente !

N.B.: Précision de la part de l'auteur .... l'emploi du pronom "je", ne signifie pas que .... enfin c'est lui qui le dit .... ;-)

"Ecrasées" de Gérard Sévin


Écrasées
Auteur: Gérard Sévin
Editions: Fleur Sauvage (3 Juillet 2018)
ISBN:
9782378370329
290 pages

Quatrième de couverture


Lucca Palavèse, commissaire de police constamment obsédé par le meurtre de sa femme, est sur la piste d'un tueur en série surnommé « l’écraseur ». La tête des victimes, féminines, n’étant plus qu’une bouillie informe. Depuis plusieurs années, Chif tire les ficelles de ce monstre qu’il pense avoir fabriqué. Faute d’avoir raté son élimination, il a maintenant le devoir de le nourrir...

Mon avis

Lucca Palavèse a perdu sa femme, assassinée dans des conditions terribles. Malgré une longue enquête, le meurtrier n’a jamais été retrouvé, ce que Lucca prend pour un échec personnel vu qu’il est commissaire de police. Il ne désespère pas de « coincer » celui ou celle qui a commis cet acte horrible un jour ou l’autre. D’autant plus que des crimes semblables se sont reproduits, ayant des points communs avec celui de son épouse. Entre autres, le fait « d’écraser » la tête des victimes à travers un sac en plastique…  Tout laisse à penser qu’il peut s’agir du même tueur alors Lucca reste aux aguets prêt à venir dès qu’on l’appelle. Mais à quelle logique obéit l’assassin pour choisir les lieux et les femmes qu’il décide d’éliminer ? Les villes ne sont pas forcément proches les unes des autres… Est-ce que c’est un itinérant ? Et pourquoi laisser parfois passer plus d’une année avant de passer à l’acte à nouveau ?

Un matin de Novembre, un ornithologue se promenant aux aurores vers le lac du Der, qui accueille la migration des grues au printemps et à l’automne, fait une macabre découverte.  Cela ressemble beaucoup à ce qui s’est déjà produit en d’autres endroits. Lucca et son équipe sont aussitôt invités à se rendre sur les lieux.  Va s’en suivre une enquête des plus intéressantes menée avec intelligence par le chef et ses collègues. Parallèlement à leurs recherches, nous suivrons « l’écraseur », son raisonnement, sa vie quotidienne, ses rencontres… Nous plongerons au coeur de l’inconcevable, découvrant avec effroi la face cachée de cette personne…..

Gérard Sévin signe là un roman de qualité. Son écriture précise et acérée nous met en première ligne de l’indicible. Face à l’horreur de la situation, nous assistons impuissant aux exactions de celui qui prend du plaisir à ôter la vie. Qui est-il ? Qu’est-ce qui a pu l’amener à agir ainsi ? Toute l’approche psychologique est présentée petit à petit par l’auteur. Les faits se dévoilent par étapes et plus on avance, plus c’est angoissant et prenant. On a l’impression d’une machine à tuer qui ne peut plus être arrêtée sauf par une personne … C’est très bien pensé, original et captivant… J’ai particulièrement apprécié plusieurs choses : la découverte d’un groupe de travailleurs (que je ne nomme pas volontairement) avec « ses codes », ses règles… ; l’atmosphère et les relations entre Lucca et ses coéquipiers ; le rythme du livre qui ne laisse pas le lecteur s’ennuyer….

Une excellente lecture et une belle découverte !

"Vise la lune et au-delà" de Marilyse Trécourt


Vise la lune et au-delà
Auteur : Marilyse Trécourt
Éditions : Eyrolles ( 5 Juillet 2018)
ISBN : 978-2212569490
256 pages

Quatrième de couverture

Estelle a 38 ans et, en apparence, tout pour être heureuse. Lors d'une insomnie résistant aux somnifères, Estelle googlise " changer de vie ". Elle tombe sur un article, inspiré par la loi d'attraction, qui explique que pour amorcer le changement, il suffit de visualiser ce que l'on souhaite et de l'écrire.

Mon avis

J’ai longuement hésité ;-) et puis finalement, j’ai renoncé… Faire un vœu, comme Estelle, la narratrice de ce roman, et retrouver toutes les nuits le sosie de Brad Pitt partageant mon traversin, pas sûre que cela m’aurait plu….

Lorsqu’Estelle, un soir où tout va de travers, lance ce défi fou, elle ne sait pas où cela va l’entraîner…. En effet, Tom, un assistant virtuel, lui permet de réaliser ses souhaits. Qui ne rêve pas d’un mari beau, attentionné, amoureux et d’enfants qui étudient sans râler ? Notre héroïne pense que tout sera plus facile si …. Alors, elle ose, elle demande et elle obtient …. ce qui pourrait ressembler, sur le papier, à une vie idéale… Mais la questions fondamentale reste en suspens….elle a tout et elle est-elle heureuse, épanouie ?

Comme beaucoup de femmes de notre époque, elle n’a plus le temps de s’occuper d’elle, de prendre le temps. Il faut gérer le quotidien à la maison, sortir le chien (Mojito, un personnage à part entière), faire face, tenir le coup, finir fatiguée et avoir du mal à trouver le sommeil…. La tentation est grande d’améliorer tout cela et de vivre mieux….

Présenté comme cela, on peut s’imaginer que ce livre est une comédie légère, un texte « feel be good » de plus et que sur la plage, il sera un bon compagnon. Oui, mais pas que…En effet, Marilyse Trécourt , à travers une histoire agréable à lire, nous livre quelques (bons) conseils de développement personnel. Certains dont on a forcément entendus parler, d’autres moins connus. Elle a une écriture pleine d’humour, teintée d’autodérision. On sourit devant les situations cocasses auxquelles Estelle est confrontée mais on s’attarde également sur les passages plus sérieux où l’auteur nous rappelle qu’il est important de se poser pour réfléchir, de prendre soin de soi, de choisir sa vie sans la subir….…. Mettre en scène une femme « de tous les jours » donne de la véracité à son propos. Bien sûr, certains esprits chagrins ne manqueront pas de trouver un côté « cliché » à certains faits évoqués (et à leur solution) mais l’essentiel n’est pas là. Le principal, c’est que cette histoire se lit avec plaisir, que les idées transmises par Marilyse sont applicables facilement et que si ça peut aider à aller mieux, pourquoi s’en priver ?

J’ai beaucoup apprécié cette lecture. Le ton n’est pas moralisateur, les discussions entre Estelle et Tom sont édifiantes et porteuses de sens, l’atmosphère générale est plutôt amusante,  on passe vraiment du bon temps en compagnie des différents protagonistes et on a envie de faire la bise à Estelle pour la remercier (ou à Marilyse ;-)

"Les prières de sang" de Jean-Marc Dhainaut


Les prières de sang
Auteur : Jean-Marc Dhainaut
Éditions : Taurnada (5 Juillet 2018)
ISBN : 978-2372580441
218 pages

Quatrième de couverture

Alan Lambin, spécialiste en paranormal, est appelé à enquêter dans un vieux monastère ayant accueilli autrefois quatre templiers en fuite. Et dire que tout a commencé parce qu'une étudiante a acheté un jour une armoire ayant appartenu aux moines. Une armoire qui n'avait pas perdu la mémoire…

Mon avis

Alan Lambin est chasseur de fantômes. Assisté de sa fidèle Mina, le voilà embarqué dans une nouvelle recherche afin d’aider une jeune femme, Céline Fairland. Celle-ci, enceinte et seule, s’est installée dans une petite maison, dans le département de la Normandie
Pas tout à fait persuadé qu’il peut lui apporter un quelconque soutien, Alan, encouragé par sa secrétaire qui souhaite profiter de l’occasion pour une petite visite à ses parents , finit par se rendre sur place avec elle. Il reste très sceptique quant aux événements décrits par la future maman mais bon …... ne croulant pas sous le travail, pourquoi pas ? Les voilà partis tous les deux, en ce mois d’Octobre 1986, cahin caha, écoutant la radio et les chansons de l’époque. Une fois arrivés, ils installent leur matériel et observent, prennent des notes, enregistrent les phénomènes auxquels ils sont confrontés. Alan doit bien se l’avouer : il se passe des choses très curieuses dans cette demeure. Céline est attachante et ils veulent l’aider à combattre ces manifestations paranormales. Mais comment lutter ? Par quel bout essayer de s’opposer à ces hommes du passé qui semblent influencer le présent ? Comment interpréter ses étranges visions qui paraissent très réelles ?

Alan et Mina vont conduire leur enquête dans des conditions difficiles. Leur quête de la vérité va les emmener dans un monastère, ils vont rencontrer des ecclésiastiques et se trouver confrontés à des situations délicates, essayant tant bien que mal, de faire face.

J’ai beaucoup apprécié ce roman. L’écriture de l’auteur s’affirme, ses personnages aussi. On les voit « grandir », prendre de « l’épaisseur ». Alan, fait parfois preuve de maladresse mais cela le rend terriblement humain. Mina, prend un peu plus de place au fil de l’histoire et on sent qu’elle ne tardera pas à s’étoffer elle aussi. L’intrigue en elle-même est très recherchée, puisant sa force dans un lourd passé fait de violence, de mensonges et de non-dits. Les apparitions sont placées au bon moment dans le déroulement du récit soit pour apporter un éclairage sur ce qui se passe de nos jours, soit pour relancer le rythme. Le tout est équilibré, plaisant à lire, porté par une écriture de qualité.  Jean-Marc Dhainaut  maîtrise bien son sujet et ses descriptions sont très visuelles, vous hérissant les cheveux sur la nuque tant on s’y croirait.  Quand on commence, on n’a nullement l’envie de s’arrêter !

NB : on pourrait presque mettre une play list tant la variété musicale est présente lorsqu’Alan et Mina n’osent pas se parler….






"La dernière couverture" de Matthieu Dixon


La dernière couverture
Auteur : Matthieu Dixon
Éditions : Jigal (Mai 2018)
ISBN : 978-2-37722-019-9
208 pages

Quatrième de couverture

Voir une de ses photos en première page d’un magazine, affichée sur tous les kiosques, pour Raphaël, jeune reporter, c’est le graal. Mais en travaillant avec Bernard, célèbre photographe devenu son mentor, il comprend très vite que les choses ne sont jamais aussi simples et que les apparences sont parfois trompeuses.

Mon avis

L’actualité n’est-elle qu’un immense jeu de dupes ?

Ancré dans la réalité et le quotidien des médias, ce roman, même s’il est une fiction, nous met la puce à l’oreille. A travers l’histoire de Bernard, grand photographe de presse, et de Raphaël qu’il a pris en affection et avec qui il fait équipe de temps à autre, l’auteur nous rappelle qu’en matière d’informations, il ne faut pas toujours se fier à ce qu’on nous montre.  

Ce soir là, Bernard demande à Raphaël de l’accompagner sur un « gros coup » dans un restaurant où deux personnes publiques vont se rencontrer alors qu’ils ne sont pas officiellement en couple. Ils font leur shooting et se séparent, chacun rentrant chez soi.  Avec le recul, Raphaël réalise que Bernard aurait très bien pu gérer ça tout seul. Avait-il un autre but lors de cette soirée, voulait-il photographier d’autres personnes que celles annoncées ?  Quelque temps après, ce dernier meurt dans le crash de son hélicoptère. Plusieurs  témoignages se rejoignent pour dire que cet accident semble bizarre mais impossible de creuser car personne ne veut vraiment parler …. Raphaël se pose des questions et décide de mener sa petite enquête sans penser que cela va l’emmener bien plus loin qu’il ne l’imagine…..

C’est avec, le plus souvent, des phrases courtes, cadencées par les réflexions, les pensées et le récit de Raphaël (narrateur de ce livre) que l’auteur nous fait pénétrer au cœur des magouilles des services secrets, des rédacteurs corrompus ou achetés par les puissants. Ceux-ci  donnant  l’orientation qu’ ils décident à l’information…. Pas de temps mort, de détails inutiles, un style vif qui met en exergue le besoin viscéral de comprendre pour le jeune reporter…. Malheureusement, il se rend compte qu’il ne maîtrise pas tout et que tout est bien plus compliqué qu’il l’a cru au premier abord….

Ne soyons pas naïfs, on le sait, il est possible de manœuvrer pour ne dévoiler qu’une partie de ce qu’on veut communiquer. Un cliché choc qui divulgue « la vérité » peut très bien n’en publier qu’une infime part et taire le reste. La photo elle-même a pu être choisie avec ceux qui sont ainsi exposés, pour un buzz voulu, construit de toutes pièces. Dans ces cas là qui tire les ficelles et pourquoi ? Comment garder son intégrité de rédacteur lorsqu’on vous propose un pont d’or pour une instantané volé ? L’auteur présente toutes les facettes des médias, même les plus sombres, mêlant habilement quelques noms et quelques événements réels à son texte, lui donnant ainsi plus de « fond ».  Raphaël, au premier plan,  veut préserver son couple, d’autant plus que sa femme …. la justice….c’est son boulot … alors pas de malversations, de mensonges, de tricheries…. Mais peut-il tout lui dire ? N’est-ce pas prendre des risques ? Est-ce que tout s’achète ? Une photo compromettante ? Le silence ? A quels prix ? Le jeune reporter est tiraillé, manipulé, stupéfait de ce qu’il discerne petit à petit. Et lorsque la situation lui semble plus claire, un autre fait apparaît lui renvoyant en pleine face que des hommes tirent les ficelles dans l’ombre …..

J’ai trouvé cet opus criant de réalisme. Lorsque Matthieu Dixon explique la hiérarchie des médias,  on se dit « mais c’est bien vrai ! » . Evidemment … si Médiapart met au jour un scandale , on le croira plus facilement que si un magazine people dit la même chose… L’intrigue est excellente, écrite avec beaucoup de justesse dans le propos.  Une lecture que je conseille vivement !