"Vérités et mensonges" de Caz Frear (Sweet Little Lies)

 

Vérités et mensonges (Sweet Little Lies)
Auteur : Caz Frear
Traduit de l’anglais par Sophie Guyon
Éditions : L'Archipel (21 mars 2024)
ISBN : 978-2809847727
434 pages

Quatrième de couverture

31 mai 1998. Cat avait 8 ans. Pourtant, elle se souvient avec précision de ce jour-là. Celui où Maryanne Doyle, adolescente de 17 ans qui faisait tourner toutes les têtes, a disparu. Celui où Cat a surpris son père en flagrant délit de mensonge...
Aujourd'hui, Cat Kinsella a 26 ans. Inspectrice de police, elle se rend avec son équipe sur une scène de crime dans le quartier londonien d'Islington, non loin du pub que tient son père. Le corps d'une certaine Alice Lapaine y a été découvert.
Quand il apparaît qu'Alice n'est autre que Maryanne, le passé revient hanter Cat, et elle se met à douter. Elle savait son père menteur, se pourrait-il qu'il soit aussi meurtrier ? Où est la vérité ?

Mon avis

Cat Kinsella est inspectrice de police et nous faisons sa connaissance dans ce roman (qui devrait faire partie d’une série et qui va être adapté à la télévision anglaise).  Célibataire, elle est plus préoccupée par son travail que par sa famille (sa sœur, son neveu, et encore moins par son père qu’elle fuit).

Une jeune épouse vient d’être retrouvée assassinée, pas très loin du pub paternel. Elle est bien décidée à mener l’enquête, surtout quand elle réalise que cette femme, Alice, n’est autre que Maryanne qu’elle a connu dans le passé quand elle était enfant. Elle avait même vu cette dernière avec son papa alors qu’elle l’avait suivi pour l’espionner. Et leur discussion avait semblé très animée. A-t-il fait quelque chose autrefois et/ou maintenant à cette personne ?

Forcément, Cat se pose des questions mais elle sait qu’elle ne peut pas prendre son géniteur de front car ça va dégénérer, ils sont sanguins tous les deux. En plus les faits datent de 1998, la mémoire peut jouer des tours …

Et c’est bien là son principal problème : gérer les interférences entre sa vie privée et sa vie professionnelle. Que dire à ses supérieurs, que taire? Jusqu’où aller sans se mettre dans une situation délicate ? Cette approche de l’affaire criminelle est un plus et permet de voir comment les événements peuvent se télescoper ou pas. Vers qui porter ses soupçons ? Qui croire et pourquoi ? Cat n’est pas à l’aise et parfois ça se voit trop, ses collèges s’interrogent …

L’époux de Maryanne découvre que sa conjointe menait une double vie. Un autre pan d’elle où elle habitait Londres et s’appelait Alice. Que lui cachait-elle et pourquoi ? Il ne comprend rien, pas plus que les policiers chargés des investigations. Où tout cela va-t-il les emmener ?

J’ai eu un peu de mal à entrer dans l’histoire, il m’a fallu une petite centaine de pages avant de me sentir dedans. J’étais à l’extérieur, je ne voyais absolument pas comment l’auteur allait relier tout ça : le passé / le présent, les différents personnages, son histoire familiale. Et surtout, la vérité nous échappe. Je sais que c’est volontaire de la part de Caz Frear mais au début je me méfiais de tout le monde, même de Cat !

Après, une fois l’intrigue posée, les liens entre les uns et les autres établis, mon intérêt s’est renforcé et j’ai été beaucoup plus captivée. Pour autant, ce n’est pas un récit qui se lit rapidement comme certains polars. Les ramifications nombreuses, le jeu de poker menteur de plusieurs individus fait qu’on nage en eaux troubles en doutant de tous. L’écriture est fluide (merci à la traductrice), le style agréable avec de nombreux rebondissements, de l’action… Mais comme indiqué dans le titre, « vérités et mensonges », il y a des menteurs et plus qu’on l’imagine. J’ai été dupée par l’attitude certains-nes qui paraissent parfaits et qui sont en réalité pervers. Les révélations finales sont très fortes ! Je n’y avais pas pensé et c’est très fort !

Un nouvel auteur à suivre !


"Les saisons" de Maurice Pons

 

Les saisons
Auteur : Maurice Pons
Éditions : Christian Bourgois (7 Mars 2024)
ISBN : 978-2267049282
272 pages

Quatrième de couverture

Un jour du seizième mois de l’automne, Siméon arrive dans une vallée perdue où se succèdent inlassablement deux saisons ― une de pluie et une de gel bleu ― et où seules les lentilles parviennent à germer. En pleine saison pourrie, cet étranger qui se déclare écrivain cherche à prendre place dans la communauté qui y vit, vaille que vaille. Isolé au milieu de ces habitants aux moeurs mystérieuses, Siméon affronte une hostilité grandissante…

Mon avis

Ce livre est indéfinissable, fascinant par son histoire, son phrasé, ses événements qui peuvent tour à tour vous dégoûter, vous surprendre, vous donner de l’espoir. Il ne laissera personne indifférent. Il a été publié la première fois en 1965.

Le récit se déroule dans un pays où les saisons sont rudes (après des mois de pluie, le gel peut rester présent trente à quarante mois), longues ; où la nature est difficile à maîtriser ; où la nourriture est rare et les occupations également….. Un homme, qui a beaucoup souffert, arrive dans un village au milieu de nulle part. Il veut s’installer quelque temps pour écrire. Les habitants, peu nombreux, sont soupçonneux et envoie les douaniers enquêter. Il arrive malgré tout à s’installer, dans des conditions précaires, chez une veuve qui tient ce qu’on pourrait appeler une auberge (mais elle ne ressemble en rien à un tel lieu).

Il pleut, tout le monde est hostile mais notre homme espère être avec son crayon, ses feuilles et les remplir. C’est son but et il le dit : « Je suis venu pour partager avec vous le pain des mots et le vin de la phrase ». (Oui, il y a quelques allusions à la Bible). Il essaie de surmonter chaque obstacle, d’avancer son projet mais toujours quelque chose se met en travers. L’auteur nous parle de la condition d’écrivain, des maux et des mots de ceux qui veulent transmettre, par un livre, un message, raconter une vie, des vies….

Un narrateur extérieur, parlant à la première personne et interpelant de temps à autre le lecteur, présente le quotidien de cet étranger, Siméon, qui a osé débarquer et surtout rester là alors qu’il n’est pas franchement le bienvenu. Il croit qu’on s’habitue à lui mais ce n’est pas si simple… Il fait tout pour apporter un peu de lumière, de chaleur, de printemps avec ce qu’il tente de transmettre.

La galerie de personnages est très riche, tous ont un petit côté burlesque qui s’explique par ce qu’on apprend sur eux, sur les traditions de ce coin du monde atypique, sur les relations que les gens entretiennent ou pas.

J’ai pensé à Kafka et « La métamorphose », un recueil inclassable lui aussi mais d’une force extraordinaire. Ce sont des textes qui restent dans notre mémoire, même des années plus tard. J’ai pensé à la cour des miracles et puis j’ai compris : « Les saisons » c’est incomparable.

C’est tendre, loufoque, décalé, hypnotisant. Maurice Pons a une écriture riche au vocabulaire soigné, aux tournures de phrases travaillées. La poésie est là même quand il décrit des moments plus ardus. C’est un sacré contraste d’utiliser un style qui magnifie chaque terme pour parler de la laideur (celle des autochtones, celle du paysage, celle des faits…..) J’ai été ébahi de la puissance de ce petit bouquin !

Rédiger ce texte a dû être aussi une prise de risque. Comment peut réagir un éditeur le découvrant la première fois ? Pense-t-il que l’originalité, la beauté du libellé, et tout ce qui fait l’unicité de cette rédaction, emporteront les lecteurs dans un univers qu’ils n’oublieront jamais, entre réel et imaginaire ?

C’est mon cas. Dire que j’aurais pu passer à côté de cette œuvre magistrale et ne jamais la lire ! Je ne l’oublierai pas !


"Le chat du rocher - Tome 3: Fatale Mona Lisa" d'Alice Quinn et Sandra Nelson

 

Fatale Mona Lisa
Auteurs : Sandra Nelson & Alice Quinn
Éditions : Alliage afnil (25 mars 2024)
ISBN : 978-2369100713
205 pages

Quatrième de couverture

Et si la Joconde, au Louvre, était une … copie ?
Que feriez-vous si un charmant italien prétendant posséder le chef-d’œuvre de
Léonard de Vinci, vous sollicitait pour le restituer au célèbre musée ?
Vous le traiteriez de cinglé et l’enverriez consulter un bon psy.
Mais pour Calypso Finn, ex-actrice de telenovelas reconvertie en brocanteuse,
rien n’est impossible.
À peine accepte-elle sa mission qu’elle est témoin d’un meurtre. Quant au
tableau, il s’est volatilisé.

Mon avis

Calypso est de retour !

Vous ne la connaissez pas ? C’est l’occasion de la rencontrer. Ancienne actrice, elle a quitté le Brésil car elle n’était plus la priorité du réalisateur, son ex-mari. Elle s’est installée sur le Rocher, où elle aide sa tante Peggy à tenir son magasin (une brocante). Pendant ses années de comédienne, elle était Zézé Pinta, une détective amateur, plutôt dégourdie. D’ailleurs cet ancien rôle l’a aidé à éclaircir des histoires et à donner un coup de main au vrai policier, le commissaire Vadim. On se demande si elle n’en pince pas pour lui mais bon… Elle est devenue assez copine avec Poker, un chat très futé qui observe et qui la guide lorsqu’il comprend qu’elle n’a pas su déceler ce qui va lui permettre d’avancer. Comme il ne parle pas, il prend des initiatives quitte à renverser un vase, cracher ou courir dans tous les sens !

Une fois encore, il y a meurtre et Caly ne peut pas s’empêcher de se mettre son joli nez et son magnifique chapeau orange un peu partout pour démêler le vrai du faux. Le vrai du faux ? c’est tout à fait ça ! Figurez-vous que la Joconde ne serait qu’une imitation fabuleuse et tellement bien réussie que même les experts n’ont rien vu. Je vous vois venir ! Qu’ont inventé les deux autrices ? Et bien, je ne dirai rien. Mais sachez que vous allez découvrir quelques éléments historiques intéressants dont un assez récent (en 2016 à Aix en Provence) tous en lien avec la peinture et l’art. On apprend même comment s’y prennent les faussaires pour faire plus vrai. C’est dire si Alice Quinn et Sandra Nelson se sont documentés avant d’écrire. Ce cosy mystery est donc bien étoffé et travaillé en profondeur.

C’est très plaisant à lire, d’abord parce qu’il y a régulièrement des pointes d’humour lorsque Calypso « entend » la voix de Zézé Pinta, son double de l’écran télé, qui lui suggère des idées surtout dans les situations délicates. Caly s’appuie également sur ce qu’elle faisait pendant la série et qui lui a apporté de l’expérience (pour crocheter une serrure par exemple). Et puis Poker, prend le lecteur en aparté avec ses réflexions bien senties. Ajouter à ça des protagonistes et une intrigue qui tiennent la route, quelques recettes qui mettent l’eau à la bouche et vous saurez pourquoi il faut se plonger dans cette lecture !

Mais Caly, parfois accompagnée de ses copines, est quelques fois trop impulsive et elle se retrouve confrontée à des événements qu’elle doit gérer avec doigté. À elle de ne pas se laisser déborder par ses émotions.

C’est un roman captivant, avec du rythme, un récit bien construit où on ne sent jamais de différence de style bien qu’il soit rédigé par deux écrivaines distinctes. J’ai particulièrement apprécié de voir l’évolution des personnages que je « suis » depuis le début, d’apprendre des anecdotes sur l’art, de suivre Caly (et Poker) dans une nouvelle aventure sans temps mort!


"La maison aux sortilèges" d'Emilia Hart (Weyward)

 

La maison aux sortilèges (Weyward)
Auteur : Emilia Hart
Traduit de l’anglais par Alice Delarbre
Éditions : Les  Escales (28 Septembre 2023)
ISBN : 9782365697002
450 pages

Quatrième de couverture

2019. Kate fuit Londres pour se réfugier dans une maison délabrée dont elle a hérité.
1942. Alors que la Seconde Guerre mondiale fait rage, Violet est cloîtrée dans le grand domaine familial, étouffée par les conventions sociales. Elle vit avec le souvenir de sa mère, dont il ne lui reste qu'un mystérieux médaillon et une inscription étrange sur le mur de sa chambre.
1619. Altha connaît les secrets des plantes, savoir ancestral transmis de mère en fille. Pourtant, quand un fermier meurt piétiné par son troupeau, tous la pointent du doigt et l'accusent de sorcellerie.

Mon avis

Une journée aura été suffisante pour lire ce premier roman. Dans la lignée d’une Kate Morton, Emilia Hart a réussi haut la main son récit.

Trois magnifiques portraits de femmes sur trois périodes différentes. Elles sont reliées de près ou de loin par leur famille mais ne se connaîtront pas vraiment. C’est à travers différents écrits que le lien se fera. Le lecteur, lui, aura les détails de ces trois vies exceptionnelles.

Exceptionnelles car toutes ont dû se battre pour s’accomplir, faire ce qu’elles voulaient, choisir, face à des hommes qui entendaient dicter leur loi.

Et à aucun moment ce n’est simple car ils peuvent être pervers, retors, manipulateurs, dominateurs, sous couvert de « faire ce qui est le mieux pour toi ».

En 1619, connaître les plantes et faire mieux parfois qu’un médecin pouvait être dangereux. C’est vite fait d’être accusé de sorcellerie. C’est ce qui arrive à Altha qui a hérité du don de sa mère.

Violet, elle, en 1942, est une jeune fille passionnée de nature, d’insectes, d’animaux mais son père souhaite une demoiselle bien rangée, capable de sortir en société.

Quant à Kate, elle va « s’éteindre » par amour avant de comprendre que ce n’est pas ce sentiment qui est le plus fort dans son couple.

Nous passons de l’une à l’autre au gré des chapitres (leur nom au début donc on sait tout de suite de qui on parle). Chaque époque est présentée avec un contexte historique suffisant pour cerner les événements. Le caractère des protagonistes est précis et permet de comprendre les relations qui s’établissent.

L’écriture est fluide (merci à la traductrice), prenante, on est vite au cœur de l’histoire et on se prend d’affection pour ces trois femmes. On ne veut pas, plus, les voir souffrir, on les accompagne, on serre les poings à leurs côtés.

J’ai trouvé cet opus captivant, parfaitement construit. L’auteur maîtrise à merveille chaque individu pour créer des fils tendus entre eux. Elle a dû réfléchir avant de se lancer et tout est agencé sans fausse note. Bravo !


"La petite fille sur le pont" d'Isabelle Chaumard

 

La petite fille sur le pont
Auteur : Isabelle Chaumard
Éditions :  Independently published (25 mars 2024)
ISBN : 9798884293342
144 pages

Quatrième de couverture

Plongée dans le coma après un accident de voiture, une petite fille bascule en pleine seconde guerre mondiale. Dans un village occupé par les Allemands, elle découvre la noirceur des hommes. Son regard candide posé sur la période immerge le lecteur dans un univers naïf qui se révèle de plus en plus âpre.

Mon avis

S’inspirant de ce que sa mère, Michelle (avec deux ailes) a vécu pendant la seconde guerre mondiale (elle avait six ans en 1943), Isabelle Chaumard a rédigé un récit délicat et original.

Suite à un accident de voiture, une petite fille est plongée dans le coma. Entre rêve et réalité, elle est projetée dans un petit village de l’Ain, occupé par les allemands pendant la guerre. Elle réalise qu’elle est ainsi confrontée à l’horreur de cette période. Son esprit, resté dans le présent, se rappelle des cours d’histoire de son enseignante, des souvenirs de sa grand-mère (d’ailleurs n’est-ce pas elle qu’elle rencontre dans ce passé douloureux ?). Seule une fillette la voit et elle peut tisser un lien avec elle, malgré les difficultés.

Elle souhaite revenir dans son quotidien tranquille sans voir les souffrances, en oubliant tout ce qui est dur à observer, à vivre. Son principal problème, c’est qu’elle « sait ». Elle connaît l’issue pour les enfants juifs entre autres…

Dans son roman, écrit « à hauteur d’enfant », l’auteur souligne avec finesse les silences, les non-dits pour préserver les plus jeunes qui, malgré tout, comprennent, sentent ….et se posent de nombreuses questions.

L’écriture et le style sont plaisants, il y a toujours un peu d’action, des événements qui font avancer l’histoire de cette famille et de cette petite « invitée ».  J’ai beaucoup aimé les personnages dont certains sont très attachants.

On sent que ce texte a été rédigé après lecture d’un fonds documentaire important. Avec acuité, Isabelle Chaumard décrit les traumatismes, les actions mises en place, les « bêtises » des gosses qui veulent agir (et c’est beau…). Chacun, à son niveau, a des ressentis, des peurs, des émois et fait de son mieux.

Loin de ses écrits habituels, Isabelle Chaumard a su, d’une façon indirecte, rendre hommage à sa Maman. C’est un livre qui peut être lu avec des collégiens pour leur donner accès à l’histoire de notre pays par l’intermédiaire de mots qui leur parleront et les toucheront au cœur et à la tête.


"Sable noir" de Cristina Cassar Scalia (Sabbia nera)

 

Sable noir (Sabbia nera)
Auteur : Cristina Cassar Scalia
Traduit de l’italien par Laura Brignon
Éditions : L’Archipel (14 Mars 2024)
ISBN : 978-2809847383
380 pages

Quatrième de couverture

Le corps momifié d'une femme est retrouvé dans une villa sur les pentes de l'Etna, alors que le volcan répand une pluie de cendres noires sur toute la région. L'enquête est confiée à la commissaire Vanina Guarrasi qui, après trois années passées à Milan, est revenue dans sa Sicile natale diriger la brigade criminelle de Catane. Depuis un demi-siècle, la villa est quasiment à l'abandon, et découvrir l'identité de la victime – avant celle de l'assassin – va se révéler délicat.

Mon avis

Catane, une ville de Sicile. C’est l’été, il fait chaud, et l’Etna envoie de la cendre noire de partout. Les voitures en sont couvertes. La commissaire Giovanna Guarrasi, dite Vanina, a quitté Milan (on découvrira pourquoi) et est revenue dans ce coin où elle est née. Elle y dirige la brigade criminelle. Solitaire, elle vit dans le bourg de Santo Stefano, aime les vieux films italiens qu’elle regarde chez elle, se nourrit assez mal (malgré les efforts d’une gentille voisine), et semble hantée de temps à autre par des souvenirs douloureux. Elle a de bons adjoints, plutôt efficaces et s’il faut se mettre au boulot, tous sont prêts.

Alors qu’elle se prépare pour une soirée cinéma à la maison, Spanò, son collègue efficace, l’appelle. Un corps momifié a été trouvé dans le monte-charge inutilisé d’une villa. Qui ? Pourquoi ? Que s’est-il passé ? L’enquête promet d’être difficile car les faits datent forcément. Les recherches d’indices, d’ADN, ou autres, semblent déjà compromises. La demeure est en partie occupée par le neveu de la propriétaire mais pas du côté où a été retrouvée la morte (car il s’agit d’une femme). Les vêtements conservés correctement montrent qu’elle avait un certain niveau social. Le passe-plat fermant de l’extérieur, elle a dû être coincée là-dedans mais pourquoi n’a-t-elle pas appelé à l’aide ? Était-elle décédée avant d’être installée dans ce lieu ?

Le médecin légiste, les anciens du village, dont le commissaire retraité Patanè, quelques amis sûrs, vont apporter un peu d’aide, ou à défaut un autre éclairage sur cette situation pour le moins bizarre et surprenante. Vanina aura bien besoin de tout ce monde pour comprendre ce qu’il s’est passé.

Les investigations entraînent les policiers dans le passé. Vanina peut interroger quelques témoins de cette époque qui ont probablement connu la femme. Mais elle sent très vite qu’il y a rétention d’informations, qu’on ne lui dit pas tout. Il faudra ruser pour faire parler ces personnes, observer de vieux objets ou documents, recouper ce que lui souffle son instinct et ce qui est tangible.

Impliquant des habitants d’hier et d’aujourd’hui, ce récit est très intéressant. Il est situé en Sicile et les explications des mœurs, des habitudes, sont précises et amusantes…..

« Elle était arrivée en Sicile un peu plus d’un an auparavant. Elle s’était habituée à beaucoup de choses : les horaires flottants, les services inexistants ; elle avait appris à sortir avec des lunettes de soleil en plein hiver, […] »

De plus, comme Vanina mange souvent, les plats locaux sont souvent évoqués (on aurait presque pu nous mettre la liste et les recettes à la fin. C’est dire si on est dans l’atmosphère de cette histoire. Tout y est, l’Etna qui rejette le sable noir, la chaleur, le soleil éblouissant, les habitants taiseux, parfois pas très honnêtes, arrangeant la vérité à leur façon…ajouter à ça une commissaire attachante dans ses forces et sa fragilité, des personnages hauts en couleur, et vous avez une intrigue qui se tient.

L’écriture est plaisante (merci à la traductrice), les chapitres s’enchaînent et les rebondissements permettent de maintenir l’intérêt. Je pense que le « décor » est un atout pour « pimenter » la lecture. Cela m’a bien maintenu dans le contexte, c’est mieux car on s’imprègne plus du texte quand on « visualise » tout ce qui est décrit (et puis pour les spécialités culinaires, avoir uniquement la description, c’est pratique, on ne grossit pas ;- )

Un nouvel auteur à suivre !


"Fairyland" d'Alyssia Abbott (Fairyland)

Fairyland  (Fairyland)
Un poète homosexuel et sa fille à San Francisco dans les années 1970
Auteur : Alyssia Abbott
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Nicolas Richard
Éditions : Globe (10/18) (7 Mars 2024)
ISBN :9782267049381
464 pages

Quatrième de couverture

1974. Après la mort de sa femme, Steve Abbott, écrivain et militant homosexuel, déménage à San Francisco. Avec sa fille de deux ans, Alysia, il s'installe dans le quartier de Haight-Ashbury, le centre névralgique de la culture hippie.

Mon avis

Ce récit aurait pu être écrit par le père de l’auteur mais il est décédé quand elle avait à peine vingt-deux ans. Des années plus tard, elle a repris les journaux intimes, les textes, les lettres de son Papa, ses souvenirs personnels, quelques photos, et elle s’est lancée. Dans ce livre, sur fond d’années sida pratiquement impossible à soigner, c’est l’amour, d’un père et de sa fille, accompagné d’un quotidien un peu bohème que le lecteur découvre. C’est représentatif d’une époque, d’un certain mode de vie, de choix le plus souvent assumés. C’est empli d’une forme de douce et tendre folie, de poésie.

Alyssia avait deux ans lorsque sa mère est morte. Son père décide alors de partir avec elle à San Francisco où il pense que ses penchants homosexuels seront plus faciles à assumer. La fillette le suit de locations (quand il paie) en hébergements chez des « amis ». Lui, ce qui le motive, c’est la poésie, c’est son moteur, son ambition. On ne s’improvise pas père alors il galère et sa gosse avec lui. La marginalité du paternel rejaillit sur elle et fait d’elle une marginale, les autres gamines la persécutent. Elle se tait, ça pourrait empirer. Elle sent, elle sait, que ce n’est pas la norme mais pas vraiment le choix.

« Il allait me falloir des années […] avant que je perçoive ma différence comme l’éclat désirable de la vie bohème »

Elle n’a pas « le rôle » d’une petite fille. Elle est la seule relation continue et stable de son paternel. Il fait tout pour elle et elle fait tout pour lui. Elle reçoit ses confidences, trop quelques fois, mais elle est là pour lui-même si ça lui pèse à certains moments.

Quand elle est jeune, elle le voit fréquenter des personnages atypiques, faire des soirées qui n’e finissent pas. Elle devrait être au lit et se retrouve sur le siège d’une voiture ou sur les genoux d’un copain. Elle ne dit rien. Inconsciemment, elle le protège par ses actes, par ses silences.

Plus tard, même quand ils sont un peu éloignés, jamais ils ne s’abandonnent. Parfois, elle se questionne sur sa mère, son attitude avant sa mort. Mais elle revient vite à celui qui remplit toute sa vie. Plus grande, elle s’éloigne, va vivre à Paris mais quand il appelle, elle vole à son secours.

Pas facile d’élever un enfant quand on essaie de se « nourrir » de la poésie, qu’on mène une vie bohème et qu’on souhaite assumer son homosexualité. C’est un sacré défi !

Au-delà de cette forte relation père / fille, l’auteur nous fait découvrir Sans Francisco en 1970/ 1980. Le sida qui fait son apparition et dont elle espère qu’il épargnera son père, les événements politiques, les soirées etc. Elle partage des anecdotes, des peurs, des espoirs, des coups de mou, des éclairs où tout paraît possible. Parfois, elle en a assez, elle veut dire non, stop, mais elle repart parce que le lien qui unit ces deux-là est tellement solide qu’il ne peut en être autrement.

Texte intime, intense, avec une écriture fine (merci au traducteur), Alyssia montre combien il lui a été difficile de se construire. Elle ne souligne pas les manquements de son père (même si le lecteur les lit), elle ne lui en veut sans doute pas mais on comprend bien que parfois elle était totalement déstabilisée, presque abandonnée, elle aurait pu être signalée aux services sociaux je pense. Mais à côté de ça, je crois que cette vie unique, indéfinissable l’a « forgée » et a fait d’elle la femme qu’elle est. Une écrivaine lucide qui nous offre un portrait de famille d’une authenticité bouleversante.

 

"Les entrailles de la nuit" de Marco Pianelli

 

Les entrailles de la nuit
Auteur : Marco Pianelli
Éditions : Plon (14 mars 2024)
ISBN : 9782259315814
290 pages

Quatrième de couverture

Lucie, huit ans et demi, vient d’être enlevée. Grâce à sa montre connectée, elle a pu donner l’alerte et le compte à rebours est lancé : dans vingt-quatre heures, les chances de la retrouver vivante seront moins qu’infimes… Le major Victor Tchaïev est dépêché sur place. Coriace et rugueux, il est spécialisé dans la résolution des crimes les plus complexes. Or, dans ce cas précis, il ne s’agit pas de confondre un criminel, mais de sauver une vie. Et plus l’enquête progresse, plus la vérité devient mirage. Car celui qui joue avec le sablier possède toujours un coup d’avance. Tchaïev va devoir affronter un maître dans l’art de manipuler les faits, les êtres et les esprits. S’il n’est pas déjà trop tard, comment arracher cette petite aux entrailles de la nuit ?

Mon avis

PRIX DU ROMAN DE LA GENDARMERIE NATIONALE 2024

En apnée, le souffle court, le cœur à cent à l’heure…. Dès les premières pages, j’ai été happée, presqu’incapable de poser ma lecture. Ce n’était pas envisageable. L’enquêteur l’avait dit : vingt-quatre heures pour retrouver la fillette, après c’est le plus souvent un échec.

Avec son écriture dynamique, puissante, avec ses puch lines, son style vif et un rythme rapide, l’auteur m’a pris dans ses rets. J’aime sa façon d’écrire, toujours en mouvement, sans temps mort.

Lucie, huit ans et demi a disparu, probablement enlevée. Par qui et pourquoi ? Elle a activé sa montre connectée et a ainsi alerté ses parents. La gendarmerie est prévenue et le major Victor Tchaïev est envoyé sur place, sur ordre du ministre qui connaît très bien la famille inquiète. On ne tarit pas d’éloges sur Victor qui a choisi de rester sur le terrain alors qu’il pourrait faire autre chose.

Lui, il a besoin de se confronter aux situations délicates, de chercher, de sentir l’adrénaline qui l’aide quand il est en danger. Derrière un bureau, ce n’est pas pareil, ça ne lui correspond pas, je suis sûre qu’il serait malheureux. Arrivé sur place, il collabore avec l’équipe de gendarmerie où tous les membres se mettent pratiquement à son service, prêts à l’aider, à le soutenir (ne serait-ce qu’en fournissant du café chaud), à lui expliquer la vie ici loin de la capitale, à l’accompagner dans sa réflexion et ses investigations.

En plus de toutes ces personnes motivées et à disposition, il a Pénélope dans l’ombre. Bras droit efficace, capable d’anticiper, de « sentir » ce que veut le major, une geek rapide, dégourdie, intuitive, une femme quoi ! Ce qui fait toute la différence, n’est-ce pas ? Ces deux-là communiquent à demi-mots, savent toujours où ils veulent aller et ce qu’il faut obtenir pour avancer.

La course contre la montre est engagée, Victor ne veut pas perdre. La caféine le maintiendra éveillé, sa volonté d’en découdre, de coincer le saligaud qui a fait ça, fera le reste. Victor c’est un homme brut de décoffrage, qui ne tergiverse pas, qui veut des résultats. Bougon mais attachant. Il exige de lui-même le maximum et les collègues doivent le suivre. Quand il s’exprime, on l’écoute, on agit et vite. C’est tout. Ses raisonnements sont « pointus » parce que son cerveau « scanne » ce qu’il voit, ce qu’il entend, ce qu’il a analysé.

Dans chaque ligne, on sent l’urgence dans le phrasé. Les dialogues sont précis, ciblés, parfois teintés d’humour (et là d’un coup, on reprend sa respiration).

« -Je ne suis pas vraiment une anguille, major, plutôt un phacochère, faudrait pas que je reste coincé dans un terrier.
-Au moins, ça bouchera une sortie. »

Les scènes sont décrites avec des mots qui font mouche. On y est, on ressent l’atmosphère, on voit les lieux, on sent les odeurs qui envahissent les narines de Victor. Presque de la réalité virtuelle sans le casque, rien qu’en lisant, ça c’est fort !

« Sa superbe venait de faire faillite, le front offert à la sudation et la jambe droite remuant de manière épileptique, hurlaient le langage de la trouille. »

Marco Pianelli prend ses lecteurs en otage. Il sait bien qu’on ne lâchera pas le récit, qu’on voudra savoir, qu’on tremblera, que parfois un sourire pointera mais pas longtemps car l’angoisse, la peur, reprendront le dessus. On est comme Victor, on essaie de recouper les informations, de trouver un indice, et on est malheureux de ne pas y arriver.

C’est un roman qui a largement mérité le prix qu’il a reçu. L’intrigue est originale, réfléchie et elle met en avant plusieurs aspects du mensonge. Les personnages sont hauts en couleurs, « palpables »avec des caractères bien définis. Le contexte du kidnapping d’un enfant nous prend aux tripes et on aimerait intervenir. Voilà pour le fond. Quant à la forme…c’est une réussite, des chapitres courts, des phrases qui s’enchaînent et qui percutent et un Victor que je reverrai volontiers dans un prochain titre !



"Comment te croire?" de Pétronille Rostagnat

 

Comment te croire ?
Auteur : Pétronille Rostagnat
Éditions : HarperCollins (13 mars 2024)
ISBN : 979-1033917038
290 pages

Quatrième de couverture

Depuis six ans, Jean Pagen, chef de groupe à l’Office central pour la répression des violences aux personnes, est obnubilé par une enquête qu'il n'a su résoudre : la disparition en 2015, à Franconville, de l’adolescente Alice Bastide. Alors que la retraite a sonné, il ne peut se résigner à abandonner cette affaire. Célia, sa petite-fille, est victime de terreurs nocturnes depuis plusieurs années. Florence, sa mère, tente de comprendre ce que traverse sa fille alors qu’elle doit elle-même faire la paix avec ce père si longtemps absent. Comment accepter la relation fusionnelle qu’il noue avec Célia ? Que lui cachent-ils ? De nouveaux éléments vont permettre à Jean de relancer l’enquête.

Mon avis

Je lis Pétronille Rostagnat depuis quelque temps et à chaque nouvelle parution je me demande ce qu’elle va bien pouvoir inventer pour me surprendre. Car c’est bien là, le but : me donner envie de continuer l’aventure avec elle. Et bien bingo tiercé gagnant : écriture, personnages, intrigue, tout est réuni pour rendre le récit addictif et original.

Jean Pagen a pratiquement élevé sa fille seul. Mais il n’a pas été un père très présent. Est-ce qu’il voulait fuir son chagrin, était-il mal à l’aise dans son rôle de parent ? Il a consacré beaucoup de temps à son travail, énormément, avec le souhait de réussir. Il était chef de groupe à l’Office central pour la répression des violences aux personnes. Maintenant, c’est l’heure de la retraite, et il rattrape le temps perdu en s’occupant de ses petits-enfants. Il est très proche de Célia, sa petite fille. Cette dernière est victime de terreurs nocturnes qui lui empoisonnent la vie.

Pour autant, il n’est pas totalement décontracté, une ancienne affaire qu’il n’a pas résolue, l’obsède. C’est la disparition d’Alice Bastide, une jeune adolescente. Son collègue et ami Yves Touveneau a du mal à accepter cette idée fixe. Mais lorsque Jean, installé quelques semaines chez sa fille, lui dit qu’il a peut-être de nouveaux éléments, il accepte de l’écouter et de le suivre dans ses idées. Le problème c’est que Jean refuse de citer ses sources dans un premier temps et qu’aucune recherche ne peut être lancée de façon officielle. Les deux hommes vont devoir agir par eux-mêmes en prenant le risque d’un retour de bâton de la part des supérieurs, surtout s’ils obtiennent un résultat.

Forcément, cette situation va créer quelques tensions entre les deux copains. Jean n’est pas très bien. Et chez sa fille, c’est aussi compliqué. Elle lui reproche d’être fusionnel avec Célia, de lui mettre des idées bizarres en tête. Mais Jean sent qu’il peut avancer sur le dossier Bastide, que la vérité n’est pas loin, à portée de main. Ce qu’il pense entrevoir est étonnant, déstabilisant, angoissant. Mais pourquoi ne pas tenter si cela peut l’apaiser et résoudre l’énigme Alice ?

L’autrice a construit une nouvelle intrigue bien ficelée, prenante, intéressante, documentée pour la rendre crédible. Ses personnages sont bien campés, ils ont de l’étoffe et des caractères marqués. Quand elle décrit des lieux, elle le fait avec précision en parlant des monuments qu’on y trouve, donc on visualise parfaitement. Il y a de l’action, du suspense, de l’émotion.

Ce n’est pas évident de se renouveler quand on écrit des romans policiers. Il faut accrocher le lecteur et surtout, le plus difficile, maintenir son intérêt. Je n’ai ressenti ni lassitude, ni temps mort, au contraire, j’avais les yeux bien ouverts, comme devant un film, pour ne pas rater un mot, une information et comprendre l’indicible.

L’écriture très addictive, le style vif et vivant, les chapitres courts, les rebondissements donnent du rythme au texte, entraînant le lecteur, la lectrice au cœur de l’histoire. J’ai beaucoup aimé cette lecture, je me suis attachée à Jean, cet homme qui réalise ses erreurs, qui ne peut pas revenir en arrière, mais qui fait tout pour que l’avenir soit meilleur et plus apaisé.


"La promesse" de Friedrich Dürrenmatt (Das Versprechen)

 

La promesse (Das Versprechen)
Requiem pour un roman policier
Auteur : Friedrich Dürrenmatt
Traduit de l’allemand par Alexandre Pateau
Éditions : Gallmeister (5 Octobre 2024)
ISBN : 978-2351788714
194 pages

Quatrième de couverture

Dans un bois des environs de Zurich, la petite Gretl Moser vient d’être assassinée à coups de rasoir. Confronté au terrible regard d'une mère dévastée, le commissaire Matthias promet de trouver le meurtrier. La police arrête un potentiel coupable, qui avoue avant de se suicider, mais Matthias est persuadé que le véritable tueur court toujours. Hanté par cette affaire, il décide de le traquer seul, en lui tendant un piège aux conséquences tragiques. Une promesse est une promesse, mais la fin justifie-t-elle toujours les moyens ?

Mon avis

Le titre : « La promesse », a été rédigé en 1958 et « retravaillé » pour être étoffé plusieurs fois. Ce roman est en lien avec un scénario de film que l’auteur a écrit. Dans le film, on s’attache au crime et à la résolution de l’enquête. Dans le livre, sous-titré « requiem pour un roman policier », il met l’enquêteur et une affaire qui l’obsède « au cœur du texte », au centre du « débat ».
Dans ce recueil, un conférencier (dont le but est de guider pour un écrire un bon polar) est interpelé par un spectateur, un ancien commandant. Ce dernier explique à l’orateur qu’il n’a pas captivé son public parce qu’il n’avait pas les bons « codes ». Il se décide à partager une histoire qu’il a vécue, pour qu’il comprenne qu’on ne maîtrise jamais tout, que résoudre une enquête n’est pas soumis à une logique parfaite.

Pour appuyer son propos, il l’emmène en voiture et s’arrête dans une station-service où se trouve son ancien coéquipier, Matthias. Celui-ci avait promis, des années auparavant, à une famille de retrouver l’assassin de leur petite fille. C’est devenu une idée fixe, une obsession, alors que fait-il là ?

C’est le policier qui raconte à la première personne. Il résume les faits : un crime sordide sur une fillette, un coupable probable, et son copain Matthias persuadé que le prédateur court toujours et décidé à mettre en place un piège pour l’arrêter. Il y a une mise en abyme de ce qu’il s’est passé et des conséquences que cela a entraînées. Il analyse tout ce qui a eu lieu et comment cela a joué sur la « vie » de son adjoint, sur son esprit, en transformant son quotidien, à tel point qu’il pouvait agir de façon insensée.

Un grain de sable peut modifier un destin, voire plusieurs par ricochet. C’est ce qu’essaie de démontrer l’ex enquêteur à celui qui voulait donner des conseils pour créer un bon texte policier. Et le lecteur le constate également. Matthias a fait demi-tour pour ne pas abandonner ses investigations. Il s’est « noyé » dedans, s’est perdu, a été déçu de voir que rien n’avançait, mais a toujours espéré tenir sa promesse. C’est ce qui « le tient » debout même dans un état pitoyable…. Mais ce n’est pas ainsi qu’il pensait à son avenir.

Merci au nouveau traducteur. J’ai trouvé l’écriture profonde et intéressante. D’autant plus qu’elle parle des rapports humains, de la volonté de réparer ce que l’on pense être une erreur et d’empêcher d’autres méfaits. Ça se déroule dans un petit coin de Suisse qu’on imagine sans peine, les personnages et les lieux sont décrits avec précision car ils font partie du décor et jouent parfois un rôle, la météo aussi. On voit comment les événements peuvent agir sur le caractère de chacun, changer les liens qui unissent les personnes, surtout quand elles tiennent compte du regard des autres…

De nombreuses références sont présentes, à commencer par le petit chaperon rouge qui part en forêt ….  Cela permet de faire des parallèles et de se questionner : peut-on tout se permettre dans la recherche de la vérité ?

« […] notre devoir premier consistait à ne pas dépasser nos limites, sans quoi nous ne ferions qu’ériger un État policier. »

La folie peut-elle tout excuser ? Peut-on se cacher lorsqu’on a une conviction ?

J’ai beaucoup apprécié cette lecture qui aborde le thème du roman policier sous un angle totalement différent, un peu comme de l’intérieur, « à l’envers ». Il n’y a pas surenchère d’actions. Cela peut paraître assez lent mais c’est parce que tout est décortiqué avec doigté.

"La conjuration de Dante" de Fabrice Papillon

 

La Conjuration de Dante
Auteur : Fabrice Papillon
Éditions : Seuil (8 Mars 2024)
ISBN : 978-2021524062
516 pages

Quatrième de couverture

Les tombeaux des plus grands scientifiques profanés.
Des meurtres inexpliqués dans plusieurs capitales européennes.
Un complot d’une envergure sans précédent.
Une enquête de la commissaire Vernay, sous haute tension.

Mon avis

Dans ce nouveau roman, on retrouve Louise Vernay que l’auteur a déjà mis en scène dans son livre précédent. Il y a quelques allusions aux années antérieures et c’est suffisant pour comprendre qui elle est, son passé et l’influence qu’il a sur ce qu’elle vit actuellement.

L’histoire se déroule en Avril 2024. Louise est normalement au repos forcé mais une affaire bizarre va vite la remettre sur les rails. En sortant d’une consultation dans un hôpital parisien, elle se retrouve avec un homme inconscient sur les bras (c’est un motard qui le dépose à ses pieds en tenant des propos sibyllins). Il s’avère que cet inconnu évanoui est le directeur adjoint du CEA (Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives). En parallèle de cet incident, la tombe de Marie Curie est profanée. Ce n’est que le début… D’autres tombeaux seront « visités » dans différents pays …

Louise, son coéquipier Lorrain Ceylac (avec qui les rapports ne sont pas faciles), un collègue italien, Bianchi, et d’autres enquêteurs vont essayer de trouver le point commun entre tous ces faits et stopper la spirale infernale. Sentant qu’il faut agir vite car ils ont compris que ceux qui tirent les ficelles dans l’ombre n’ont pas l’intention de s’arrêter, ils font leur maximum.

C’est une intrigue assez complexe, aux nombreuses ramifications et à la documentation solide. Fabrice Papillon a su intégrer dans son récit des références scientifiques, des personnages réels, et il a ainsi bâti une fiction qui est captivante. Il y a des retours en arrière (dont certains très loin) qui expliquent le comportement des protagonistes, les décisions prises ou les raisons d’une attitude dans le présent. Je pense que l’auteur a été « gonflé », audacieux et futé pour nous entraîner dans son univers, rendre tout ça globalement crédible et réussir à nous intéresser mais également nous angoisser et nous faire peur.

Ce récit semblera sans doute trop « savant » à certains, je pense qu’il faut un minimum d’intérêt pour le cerveau et tous ceux qui ont contribué à son étude pour maintenir l’envie de lire. J’ai retrouvé certaines choses que je savais, j’en ai découvert d’autres, vérifiant régulièrement pour démêler le vrai du faux. Je n’avais jamais entendu parler du CSG (Coma Science Group) au CHU de Liège par exemple. C’est fascinant de voir ce qui se met en place.

Si quelques petites actions peuvent sembler invraisemblables, l’ensemble des pièces de ce gigantesque puzzle s’emboîte parfaitement. L’auteur sait bien où il veut nous emmener et on y va tout droit en se laissant emporter par son écriture fluide et son style vif et vivant. Des dialogues bien pensés, du suspense, des personnages troubles, d’autres attachants malgré leur maladresse, des fins limiers intuitifs, parfois électrons libres comme on les aime (trop lisses et trop rangés, ils sont vite insupportables), des esprits retors dont l’aspect psychologique est décrit avec doigté. Parce qu’il n’y a rien de plus difficile que de parler de la folie des hommes, on peut en rajouter, en faire trop, lasser le lecteur par trop de tout. Fabrice Papillon dose, équilibre et c’est pour cela que « La conjuration de Dante » nous prend dans ses rets avant de nous lâcher ébaubi à la dernière page sans espoir de retour en arrière car le mot fin est écrit ….


"Perdre la main" de Dominique Sigaud

 

Perdre la main
Auteur : Dominique Sigaud
Éditions : Globe (7 Mars 2024)
ISBN : 978-2383612858
210 pages

Quatrième de couverture

Ce livre, elle pensait l’appeler La Colline. Dominique Sigaud avait tout noté dans un carnet lorsqu’elle était à Bisesero, en 1994. Journaliste indépendante sans autre nom que le sien sous lequel se ranger, elle fut l’une des rares femmes à couvrir le génocide des Tutsis au Rwanda. Vingt-cinq ans plus tard, les mots, elle les retrouvait, intacts, comme elle les avait agencés sur les pages pour organiser le chaos du monde, pour raconter les massacres et les assassins ivres d’alcool et de sang. Mais le récit ne s’écrivait toujours pas. La colline où toute l’horreur du génocide s’était écrite n’était pas le lieu central comme elle le pensait. Le lieu central, il lui a fallu trente ans pour comprendre que c’était le corps de cette jeune femme, croisée dans une boîte de nuit.

Mon avis

Dominique Sigaud est journaliste. En 1994, elle était au Rwanda, témoin du génocide, prenant des notes dans un carnet. Elle a vu, senti, entendu et elle est rentrée. Vivante mais marquée, détruite de l’intérieur. Elle a mis ses souvenirs à distance, pour oublier, se préserver, ou tout simplement parce qu’elle ne pouvait plus accepter.

Et puis, trente ans après, elle a écrit et elle partage avec nous. D’abord le titre qui n’est en rien anodin (elle l’explique en détails plusieurs fois), puis ce qui revient par flashes, par bribes ou beaucoup trop nettement quelques fois. Et à ce moment-là, ça fait terriblement mal. Le réel vous rattrape, vous savez que cela a vraiment existé puisque vous y étiez.

Elle raconte en employant le « je », ou en disant « elle ». Est-ce trop douloureux de parler à la première personne, de reconnaître qu’on était sur place, impuissante à changer le cours des événements ? Est-ce que dire « elle » c’est un moyen pour se sentir moins concernée ? Elle explique :

« […] c’est comme un va-et-vient entre deux formes de moi, deux versants qui furent présents en même temps, l’un plus distancé, plus éphémère, l’autre plus directement atteint par les événements, plus accaparé, plus incapable de distance aussi. »

Ce qu’elle présente est bouleversant. Elle parle de la culpabilité, de cette impression de n’avoir servi à rien, d’être inutile. Elle raconte cette boîte de nuit colorée, éclairée, bruyante, foisonnante de monde, où la vie semble redevenir « normale » au milieu du chaos, comme une parenthèse. De ces jeunes qui veulent danser, chanter, oublier ? Non, on ne peut pas oublier… Il y a toujours quelque chose qui vous ramène à l’horreur même dans un dancing … Et vous ne pouvez pas vous voiler la face, faire comme si …..

Elle jette les mots sur le papier, elle les expulse, il arrive qu’ils se bousculent sans majuscule, ni ponctuation comme lorsqu’on ne sait plus comment dire, ou alors que tout veut sortir en même temps, comme si les minutes lui étaient comptées et qu’il fallait faire vite, ouvrir les yeux, les siens, les nôtres. Est-ce qu’elle fait ça pour s’en débarrasser, tirer un trait, penser « ça, c’est dit, ouf, on tourne la page ? »  Impossible, ça vous colle à la peau, à l’esprit, ça vous ronge, ça vous envoie des cauchemars, des peurs irraisonnées, ça revient …

Et ceux d’en face, qui n’y étaient pas, qui reçoivent le texte, qu’en font-ils ? Publier ou pas ? Accepter le style, l’écrit trente ans après, se dire que les souvenirs ont été émoussés ou pas ? Est-ce vraiment nécessaire de remuer tout ça ?

J’ai fini cette lecture laminée, vidée, je comprends l’auteur et son ressenti. Son style m’a remuée au plus profond de moi et je sais que je me souviendrai longtemps de ce recueil.

« Perdre la main », c’est peut-être également, se dire que maintenant le texte n’appartient plus à Dominique, il vit. Et c’est à nous, lecteurs, de lui faire continuer son chemin, pour que personne n’oublie, pour que les « ogres » ne restent pas impunies, pour que les survivants aient un peu de reconnaissance, pour que les disparus existent encore dans la mémoire de ceux qui les font vivre en parlant d’eux.


"Refuge au crépuscule" de Grégoire Domenach

 

Refuge au crépuscule
Auteur : Grégoire Domenach
Éditions : Christian Bourgois (7 Mars 2024)
ISBN : 9782267049732
324 pages

Quatrième de couverture

Quand Gaspard Dernaisse, jeune photographe français, engage la conversation avec un inconnu à l’aéroport d’Istanbul, il ne sait pas encore que cette rencontre va marquer le début d’une longue aventure. L’homme qui se présente sous le nom d’Arstan Isaev va lui révéler assez vite qu’il est condamné par la maladie. Il aimerait néanmoins réaliser avec l’aide de Dernaisse un livre de photos sur son pays, le Kirghizstan, et l’offrir comme un dernier témoignage d’amour à son épouse, spécialiste de la photographie. Arstan lui présente alors un autre Français, installé au Kirghizstan depuis plus de dix ans, qui pourra lui servir de guide : Barza.

Mon avis

Les histoires, c’est le miel du monde.

L’auteur a sillonné l’Europe de l’Est et séjourné longuement en Asie Centrale. Je ne sais pas s’il a passé du temps au Kirghizstan mais c’est principalement dans ce pays qu’il situe son récit. Au cours de ma lecture, j’ai regardé quelques vues de ce lieu sur internet et c’est magnifique. Paysages de montagne à perte de vue, contrées sauvages, la nature à l’état pur et en plus des léopards des neiges. Cela m’a permis de rentrer encore plus dans cette histoire, de m’imprégner de l’atmosphère, de visualiser certaines scènes.

Gaspard Dernaisse a quitté la France pour voyager. Il n’a pas de but précis, il a juste besoin à ce moment-là de partir. Le lieu ? C’est une vieille dame qui le lui souffle au cours d’une conversation. Bien sûr, il peut trouver une raison, mais il n’est pas toujours nécessaire de donner des explications. Le principal, c’est ce besoin d’aller ailleurs sans savoir pour combien de temps.
À Istanbul, il rencontre un inconnu, Arstan Isaev. Ils se mettent à discuter et ce dernier lui demande, puisqu’il n’a rien de prévu, de lui rendre un service. Faire des photos des lieux et des personnes qu’il a aimés pour créer un album qu’il offrira à sa compagne. Il se sait condamné par la maladie et ce sera pour lui un ultime témoignage d’amour.

Gaspard accepte et voyagera dans cette contrée dont il ignore tout avec Barza, qui sera son guide.

« Je serai le guide et vous l’artiste. »

Il leur sera nécessaire de « composer » avec le temps : le prendre pour réaliser de beaux clichés et en parallèle ne pas trop traîner pour revenir auprès d’Arstan avant qu’il ne soit trop tard. Ils devront apprendre à s’accepter, s’apprivoiser, communiquer pour avancer. Parfois, d’autres individus se rapprocheront d’eux et ils chemineront un peu ensemble, quelque temps. Gaspard sent que Barza ne dit pas tout, qu’il triche avec la vérité. Ce dernier est un homme secret, mystérieux, souvent silencieux. Mais pour lui photographier est un art.

« Est-ce que vous savez encore contempler ? Si non, on empile des photos. »

Le recueil ne peut pas rassembler des images banales, quelconques. Elles doivent avoir capturer des instants de vie, transcrire une ambiance, transmettre une émotion, voire un message. Alors les voyageurs s’efforcent de trouver ce qui pourra sublimer l’instant.

Cette lecture a été un moment hors du temps, une parenthèse enchantée. J’ai beaucoup aimé la façon dont s’est tissée la relation entre Gaspard et Barza. Le caractère de Barza est subtil. C’est un homme atypique et attachant dont on comprend les silences. Au fil des pages, on le connaît mieux et on se prend à éprouver une forme d’admiration pour celui « qui refusait de vendre son âme au diable ».

Je ne sais pas comment l’auteur a eu l’idée de ce roman et comment il a mis en place ce qu’il a rédigé (un plan, des pensées libres ? …), j’aimerais bien savoir car le thème est original, l’endroit ou ça se déroule est méconnu et l’atmosphère feutrée est belle. L’écriture est poétique, elle parle d’aventure, de sentiments, d’hommes ou de femmes qui ont souffert, de ceux qui choisissent un jour de tout quitter pour un ailleurs dont ils ne savent pas s’il sera prometteur.

Un texte pour voyager, pour rêver, pour se laisser emporter et changer d’horizon….


"La librairie sur la colline" d'Alba Donati (La libreria sulla collina)

 

La librairie sur la colline (La libreria sulla collina)
Auteur : Alba Donati
Traduit de l’italien par Nathalie Bauer
Éditions : Christian Bourgois (7 Mars 2024) (première parution en 2022)
ISBN : 9782267049336
304 pages

Quatrième de couverture

Alba Donati menait une vie trépidante. Pourtant, à la cinquantaine, elle décide de tout quitter pour retourner à Lucignana, le village de Toscane où elle est née, et ouvrir sa librairie dans une jolie bâtisse à l’orée des bois, sur la colline. Avec seulement 180 habitants dans les environs, son entreprise semble vouée à l’échec. Ouverte en 2019 grâce à un financement participatif, la librairie affronte un incendie qui la détruit en partie, puis, un mois plus tard, les restrictions du confinement. C’est alors que s’organise autour d’Alba un étrange et vertueux mouvement de solidarité.

Mon avis

L’idée de la librairie était certainement tapie dans les replis de ce lieu sombre et joyeux qu’on nomme l’enfance.

Qu’est-ce qui peut pousser une femme de cinquante-huit ans, poétesse et écrivain, travaillant dans le monde de l’édition, à ouvrir une librairie dans un village de cent quatre-vingts habitants, perdu en Toscane ?

Un grain de folie, l’idée que « qui ne tente rien n’a rien », et peut-être par-dessus tout, la volonté d’amener les livres aux habitants et aux élèves de ce coin qui l’a vu naître.

Le lieu ? Une petite maison (dont elle ne ferme pas les portes) avec un jardin à l’anglaise où l’on peut boire le thé dans des tasses dépareillées. Des arbres, des plantes, des fleurs, des oiseaux, des nuits étoilées, le bruit de la pluie, le silence parfois. Une vie différente de celle qu’elle connaissait avant à Florence. Mais un quotidien empli de surprises, de bons ou de mauvais moments (un incendie destructeur par exemple).

Dans ce livre, l’auteur témoigne de son expérience. Elle parle de ses rencontres avec des gens du coin, avec les écoliers, ceux qui viennent de plus loin et se déplacent pour passer du temps dans ce lieu calme, atypique ou ceux qu’elle côtoie par la vente en ligne.

 C’est en 2019 qu’elle s’est installée à Lucignana. Un démarrage en douceur et puis le COVID, le confinement, un tournant à prendre, à ne pas rater pour s’en sortir et ne pas mettre la clé sous la porte. Alba aurait pu baisser les bras, abandonner et retourner dans la grande ville, sans doute que cela aurait été plus facile. Mais sa détermination n’a pas faibli. Elle croyait en son projet et avait le désir de réussir.




C’est sous forme de journal de bord, de Janvier à Juin, qu’elle partage son quotidien. Les difficultés, les réussites, les livres à envoyer chaque jour permettant de maintenir la boutique à flots. Il y a également la famille à gérer, les parents vieillissants …. Beaucoup de références littéraires peuplent ce récit et c’est forcément intéressant.

Ce qui transparaît en permanence, c’est son amour des livres et de ce qu’ils apportent, le besoin de les mettre à la portée de chacun, notamment ceux à qui on ne pense pas lorsqu’on discute de littérature.

« Une librairie pour cent quatre-vingts habitants, destinée sur le papier à l’échec commercial, qui, en avançant à contre-courant, intercepte ses semblables dans la tourmente et les conduit chez elle ».

Alba Donati a été soutenue et accompagnée dans son intention, entre autres par l’intermédiaire d’un financement participatif. Certainement parce que ses arguments tenaient la route et on fait « mouche ». Ouvrir une librairie indépendante est un pari osé, risqué. Choisir de mettre en avant les ouvrages et les écrivains qui ne sont pas en tête des ventes l’est encore plus. Et pourtant, ça fonctionne !

« Je passe mes nuits à débusquer des livres, des nouveautés et des ouvrages oubliés, écartés à cause du mécanisme des arrivées en chaîne en librairie : quinze jours en exposition, puis dégagez, on passe à un autre. Il y a de toute évidence un public attiré par les mêmes livres que moi. »

Son écriture est plaisante (merci à la traductrice). Son style vivant et agréable. Elle nous présente ce qu’elle vit mais elle développe aussi une belle réflexion sur le temps qui passe, la vie et ce qu’on veut en faire.

En ouvrant ce magasin, en fédérant les villageois et d’autres personnes autour d’elle, Alba Donati a créé une communauté forte, unie. Elle est revenue à l’essentiel : le partage, la douceur de la vie, la plénitude offerte par une mission aimée et vécue comme un rêve. Elle est heureuse, elle vit à fond ce qu’elle souhaite, chaque jour est un émerveillement. Et c’est la même chose pour le lecteur … 

"Maddi" d'Edurne Portela (Maddi y las fronteras)

 

Maddi (Maddi y las fronteras)
Auteur : Edurne Portela
Traduit de l’espagnol (Espagne) par Marianne Million
Éditions ; Liana Levi (7 Mars 2024)
ISBN : 979-1034908837
272 pages

Quatrième de couverture

Elle ne sait pas ce que l’avenir lui réserve, Maddi, quand un beau jour de 1929 elle débarque au pied de La Rhune. Cette fille de paysans basques veut simplement échapper à une vie de résignation. Rebelle et anticonformiste, elle est bien décidée à mener sa barque à l’hôtel-restaurant du col de Saint-Ignace. Mais bientôt l’Espagne voisine, puis l’Europe tout entière vont s’embraser. Alors cette habituée des sentiers de contrebande fera passer documents et humains à travers la frontière toute proche, même après 1940, quand son hôtel sera réquisitionné par des officiers allemands.

Mon avis

Maddi est un livre magnifique, librement inspiré de la vie de María Josefa Sansberro, née à Oiartzun en 1895. L’auteur, historienne espagnole, a reçu des documents sur cette femme et sa cousine et après les avoir consultés, après avoir écouté ceux qui les lui avaient transmis, elle a décidé de rédiger ce roman. C’est pour elle une façon de donner une existence à toutes ces témoins disparues, oubliées, en leur rendant hommage. Elle explique sa démarche dans les dernières pages et c’est très intéressant.

Ancré dans un contexte historique riche, ce récit est un très beau portrait de femme.
Maddi choisit de partir pour vivre autre chose que ce à quoi elle était destinée en tant que fille de paysans. Son vélo, une petite valise et la voilà qui débarque vers Louis qui tient un hôtel. Il est plus âgé qu’elle, elle l’aidera au bar, à faire les chambres, la vaisselle, la cuisine…  On est en 1929, ça ne se fait pas une jeune femme qui décide, qui tient tête, qui refuse ce qu’on lui a imposé mais elle s’en fiche Maddi, à un peu plus de trente ans, elle veut se sentir libre. Peu importe les regards de travers. Que fait-elle avec cet homme plus vieux, y-a-t-il quelque chose entre eux ? Sa réputation ? Elle n’attache pas d’importance à ce que les gens pensent, pourvu qu’on la laisse tranquille.

Ce n’est pas facile mais elle est volontaire, tenace, exigeante avec elle-même. Un événement va bouleverser le quotidien de Louis et Maddi. Ils vont de voir faire des choix forts, qui les engagent mais ces deux-là ne baissent pas les bras. Ensuite, viendra la guerre et l’hôtel sera réquisitionné. Que faire ? Maddi connaît la forêt, les sentiers, elle peut aider à combattre l’ennemi, quitte à prendre des risques. Alors, elle agit parce qu’elle veut continuer à se regarder dans une glace, parce qu’elle croit en la force du combat des résistants.

Maddi n’a pas été la seule à se battre contre le fascisme. En lui donnant la parole (le texte est écrit à la première personne du singulier), l’auteur nous rappelle toutes celles qui ont fait la même chose et qui n’ont pas forcément de plaque commémorative (Maddi en a une seulement depuis 2021). L’écriture (merci à la traductrice) fluide, engagée, donne une place importante aux femmes, on sent la féministe qui parle entre les lignes.

C’est une histoire qui prend aux tripes, qui émeut (j’ai même pleuré). Le style de l’auteur est prenant. Elle s’est appropriée la personnalité de Maddi, comme si elle était de sa famille. On la suit dans son quotidien difficile, fait de luttes, de peur, de doutes, mais jamais de résignation. Il y a une photo en noir et blanc de sa cousine (très présente dans le recueil également) et elle. J’imagine Maddi le regard vif, droite dans ses espadrilles, refusant d’obéir aux bien-pensants, capable de secouer les hommes, de réagir vite et bien en cas de coup dur, sachant aimer ceux qui en ont besoin, tissant des liens solides avec ceux à qui elle fait confiance.

Le destin de Maddi m’a émue, bouleversée, je ne peux que remercier Edurne Portela de l’avoir présentée avec son cœur parce qu’elle a fait battre le mien plus fort tant je me suis attachée à Maddi, tremblant pour elle et ceux qu’elle aimait.


"Amsterdam En quelques jours" de Barbara Woolsey

 

Amsterdam
En quelques jours
Auteur : Barbara Woolsey
Éditions : Lonely Planet (13 avril 2023)
ISBN : 978-2384920570
194 pages

Quatrième de couverture

Toutes les clés pour découvrir Amsterdam le temps d'un court séjour.
Un guide tout en couleurs, concis et ultra pratique pour découvrir Amsterdam.

Mon avis

Dix centimètres sur quinze pour une épaisseur d’un petit centimètre, voilà un guide peu volumineux et très bien conçu !

Plusieurs parties : comment préparer son séjour, les différents quartiers à explorer (avec de nombreux plans accompagnés, coups de projecteur sur quelques monuments, promenades à pied….

Ce guide est fourni avec un plan, agrémenté de nombreuses photos et de bonnes adresses où se restaurer pour un bon rapport qualité prix (je recommande le Pilek et sa plage. Restaurant conçu à base de containers avec une excellente cuisine).

Les promenades à pied conseillées sont accessibles et ciblent des horizons variés. On a un très bon aperçu de la ville.

Le découpage de la ville par secteur avec chaque fois les monuments, les boutiques, les restaurants est très bien pensé et adapté. Il y a des photos, les pages sont solides (c’est important car on le feuillette souvent) et l’essentiel est présenté.


"Les ombres de Bombay" d'Abir Mukherjee (The Shadows of Men)

 

Les ombres de Bombay (The Shadows of Men)
Auteur : Abir Mukherjee
Traduit de l’anglais par Emmanuelle et Philippe Aronson
Éditions : Liana Levi (7 Mars 2024°
ISBN : 9791034908882
374 pages

Quatrième de couverture

Calcutta 1923. Gandhi est en prison, et les tensions entre communautés religieuses sont à leur comble. La plus petite étincelle mettrait le feu aux poudres. Alors, quand un célèbre homme de lettres hindou se fait assassiner dans un quartier musulman de Calcutta, il faut tout faire pour masquer le crime. Mais la rumeur est plus rapide que le sergent Banerjee pourtant arrivé sur les lieux aussitôt. Très vite, la ville est à feu et à sang. Après quelques déboires, Banerjee se lance à la poursuite du principal suspect. Le capitaine Wyndham lui emboîte le pas, et les deux enquêteurs se retrouvent bientôt à Bombay dans un climat politique de plus en plus explosif.

Mon avis

Abir Mukherjee est un écrivain d’origine indienne, né à Londres en 1974. Il est traduit en France depuis 2019. C’est le cinquième roman que je lis de lui. Ils se situent tous en Inde après 1919 et intègrent deux personnages récurrents que l’on voit évoluer (mais chaque histoire peut se lire séparément même si c’est plus intéressant de le faire dans l’ordre). Deux hommes, collègues, mais que tout oppose et qui pourtant partagent un appartement. Il s’agit de deux policiers : le capitaine Sam Wyndham inspecteur de Scotland Yard, vétéran de la première guerre mondiale, installé à Calcutta pour rebondir et le sergent Satyendra Banerjee qui lui, est indien et dont les parents auraient souhaité une autre situation professionnelle.

Malgré leurs différences de vie, de quotidien, de culture, de formation, de perception du monde et des hommes, ils collaborent, se respectent, s’aident et essaient de mener à bien leurs enquêtes. Pour chaque récit, le contexte historique est riche, bien documenté. On comprend que rien n’est évident, ni pour le colonisateur, ni pour les colonisés. Certains faits évoqués peuvent expliquer les attitudes des protagonistes, les réactions. Il y a un gros travail de recherches de la part de l’auteur.

Cette fois-ci, nous sommes en 1923, à Calcutta, toujours sous domination britannique. Gandhi est emprisonné et les groupes communautaires religieux se déchirent. Sam et Satyen ne sont pas ensemble et ils prennent la parole à tour de rôle. En tête de chapitre, leur nom qui permet de savoir qui s’exprime.  Banerjee a été envoyé en mission par un supérieur et Sam l’attend…. Sauf qu’il ne viendra jamais car rien ne s’est passé comme prévu. Le sergent est dans une situation plus que délicate et c’est très compliqué car s’il l’aide le capitaine peut se mettre en danger. Pourtant, il veut soutenir son coéquipier. Un assassinat a mis la ville en émoi et il faut agir pour calmer tout ça.

Parfois ensemble, parfois séparés, les deux policiers doivent se cacher, agir avec discrétion, dénicher des alliés (ils croisent deux femmes formidable et exceptionnelles), ruser, trouver des solutions, se faire confiance, croire ou pas ceux qu’ils rencontrent. Le lecteur est embarqué, grandeur nature, dans cette nouvelle aventure et c’est fascinant.

Je n’aurais jamais pensé qu’Abir Mukherjee pouvait encore se bonifier. Et bien si ! Tout y est ! L’ambiance est décrite avec intelligence, précision, elle est comme « vécue », les relations humaines sont bien en lien avec l’époque, le pays. On sent que tout peut exploser à n’importe quel moment.

« L’air semblait brûler, comme chargé d’une violence menaçante et électrique. »

J’aime beaucoup le style et l’écriture (en plus, dans ce recueil, il a fallu l’adapter à Sam ou Sayten et à leurs émotions, façons de penser etc). Je remercie les nouveaux traducteurs (avec une douce pensée pour la regrettée Fanchita Gonzalez Battle), ils ont su maintenir ce qui fait la « patte » de l’auteur qui a toujours une pointe d’humour malgré la gravité des événements qu’il expose.

« […] il affichait cet air d’optimiste infondé dont il est si friand et qui me rappelle celui d’un chiot devant encore se familiariser avec les bottes des hommes et le caractère traditionnellement capricieux du monde. »

Il a une immense culture et c’est très intéressant par exemple lorsqu’il évoque les Parsis, on apprend énormément. Il explique également comment tout peut être soumis à interprétation, combien les hommes peuvent changer suivant le lieu où ils sont ou les personnes qu’ils ont en face d’eux. Peut-être que quelques fois, il est nécessaire d’être caméléons pour survivre dans un lieu où les braises couvent….

« En public, ils proclament que les Britanniques ne sont que des vampires suçant le sang de l’Inde […] Mais loin des feux de la rampe, ils sont bien souvent des individus fort agréables […] »

C’est une lecture dépaysante, enrichissante, plaisante, prenante et je ne me lasse pas de cet univers !


"Le château des insensé" de Paola Pigani

 

Le château des insensés
Auteur : Paola Pigani
Éditions : Liana Levi (7 Mars 2024)
ISBN : 979-1034908783
290 pages

Quatrième de couverture

« Jeanne tout court, sans nom de jeune fille, sans nom d’épouse. Jeanne sans état civil ni sac à main.» C’est ainsi que se présente cette frêle jeune femme à sa descente du « train des fous » en septembre 1939. Internée après la mort de son nouveau-né, elle a été transférée à Saint-Alban avec les autres patients. Dans ce château, une ambitieuse équipe de psychiatres met en place de nouvelles pratiques thérapeutiques. Dans une communauté atypique, que chapeaute la diligente mère supérieure, une nouvelle voie s’ouvre à chacun. Au contact des autres, Jeanne va renaître lentement à la vie et à elle-même.

Mon avis

Ils avancent avec vous, même s’ils ne suivent pas les lignes. Ils écrivent leur histoire avec les moyens du bord. 

Ce roman, inspiré de faits réels, est très intéressant. L’auteur est d’une infinie délicatesse avec ses personnages et en plus, elle parle de Paul Éluard, mon poète préféré.

On est en 1939, le bébé de Jeanne est décédé à la naissance. Elle a complètement perdu pied, on peut même considérer qu’elle est devenue folle de douleur. Son mari ne sait plus comment se comporter face à sa souffrance extrême, son attitude irrationnelle, sa perte de repères. Il n’y a, malheureusement, qu’une solution, la faire interner. À l’époque, on parle d’asile, pas d’hôpital ou de clinique pour les personnes qui ne « rentrent » pas dans la norme. C’est violent ce mot « asile » et c’est violent ce qu’on y vit dans les soins, les échanges, l’accueil, l’hébergement.

Et puis, un jour, Jeanne est transférée, avec d’autres patients, car il faut évacuer certains lieux, les allemands ne sont pas loin….Elle part en train, direction Saint-Alban les Eaux. Son époux lui est mobilisé pour faire la guerre. De toute façon, ces deux-là ne savent plus comment se parler, comment se toucher, comment se regarder…. Alors, qu’elle reste ici ou qu’elle aille là-bas, il ne pourra pas lui rendre visite dans l’immédiat ….

Jeanne suit le mouvement, elle n’en pouvait plus des cris, des hurlements, du froid, des bains thérapeutiques, des traitements durs, alors s’éloigner et vivre ailleurs, pourquoi pas ? Arrivée à Saint-Alban, en Lozère, elle se tait, elle observe, elle lâche quelques phrases : « Je ne sais plus vivre … Il m’attend. »

Éluard aurait écrit « Et par le pouvoir d’un mot », mais pour Jeanne, c’est « Et par le pouvoir d’une rencontre ». Il suffit de peu parfois, pour avancer un pas après l’autre … Jeanne croise d’autres « malades », des religieuses qui gèrent le lieu, des médecins, dont le docteur Tosquelles (qui a existé et révolutionné l’approche des maladies psychiatriques). Cet homme ouvre sa clinique sur l’extérieur, entre en lien avec les gens du village qui ne voient plus les malades comme des fous étranges mais comme des êtres humains.

Cette façon de faire profite à Jeanne qui, petit à petit, s’apaise, se pose, s’ouvre, refleurit, comme une plante qui a été privée de lumière et qui retrouve le soleil. Cette lente évolution est décrite avec minutie, amour, tendresse.

Ce récit est magnifique, entrecoupé de quelques pages où l’on découvre le journal intime d’une religieuse qui partage ses réflexions et ses ressentis. Le médecin et son équipe suivent les patients, les accompagne, les encadre, les aide, les soutient. Alors, il a des résultats encourageants, positifs.

Paola Pigani a une écriture poétique, lumineuse, mettant l’être humain au centre des préoccupations des soignants, au coeur de son texte, pour lui donner une place essentielle. J’ai bien sûr, beaucoup aimé qu’elle glisse l’arrivée de Paul Éluard et de sa compagne au Château, qu’elle parle du poème Liberté qui est celui qui, à dix ans, m’a fait aimer la poésie.

En mêlant fiction et réalité, elle a rendu hommage aux souffrants, à ceux qui les soigne. Elle célèbre la vie. Elle nous éclaire sur un pan d’histoire qu’on ne connaît pas forcément et son livre vaut vraiment le détour.


"Les mains au feu" de Virginie Armano

 

Les mains au feu
Auteur : Virginie Armano
Éditions : Récamier (7 Mars 2024)
ISBN : 9782385770273
260 pages

Quatrième de couverture

François a seize ans. Ni courageux ni endurant, sans ambition ni vocation, il flotte dans la vie, observe ce qui lui arrive et les gens qui l’entourent avec distance, légèreté et drôlerie. Sur décision de son père, lassé de son peu d’entrain pour les études, François devient apprenti coiffeur dans un salon pour dames. Il y compte les heures, dans un état semi-végétatif. Jusqu’à l’arrivée de Gabriel. Charismatique, ambitieux et instinctif, le jeune homme attire et hypnotise. François a enfin trouvé son modèle, son frère, son héros. Mais peut-on à ce point idolâtrer sans risquer de se perdre ?

Mon avis

Virginie Armano est consultante dans le luxe. « Les mains au feu » est son premier roman et il est très abouti.

François a seize ans. Fils unique, il est en échec scolaire, peu travailleur, sans ambition. Son père est dur avec lui, sa mère désespérée. Seule sa grand-mère, Simone, semble le comprendre. Il se réfugie parfois chez elle. Ses parents finissent par se mettre en colère. Après seize ans, on peut arrêter les études. Il ira au salon de coiffure de sa Maman et donnera un coup de main en balayant, en servant le café. Après on verra.

François n’est pas motivé par la coiffure. Son horizon est bouché mais il n’a pas le choix alors il accepte de se rendre dans la boutique. Là, les journées sont très longues malgré la jeune apprentie qui essaie de l’initier aux shampoings. Pour s’occuper, il observe et écoute les vieilles dames qui viennent se faire coiffer, leurs petites manies, leurs conversations… mais ça ne remplit pas les journées ….

Un jour, un beau jeune homme, Gabriel, demande à ce qu’on lui coupe les cheveux alors que, normalement, il n’y a pas de clients masculins. Il revient le lendemain pour une coupe. François est fasciné par celui qui a su s’imposer dans le magasin, qui a charmé la patronne et obtenu ce qu’il voulait.  C’est le genre de personnes qui rayonnent, que tout le monde écoute, avec qui on a le souhait d’être ami.

François est dans cette période délicate qu’est l’adolescence. Il tâtonne, a besoin de modèle (son père brutal ne peut pas en être un), de repères, de se sentir exister aux yeux des autres. Trouver sa voie, être reconnu, aimer ce qu’il choisira de faire, voilà de vrais challenges. Il voudrait être bien dans sa vie, bien dans sa peau ….

Gabriel a l’air tellement tout ça : sûr de lui, à l’aise, beau gosse, aimé de tous, étincelant, drôle, plein d’idées…. Alors quand il accorde un regard, des paroles à François, ce dernier est galvanisé. Un avenir différent s’ouvre à lui d’autant plus que Gabriel lui ouvre les yeux sur ce qui pourrait être un atout. Le binôme est constitué, avec des projets et peut-être la réussite ? La lumière sera-t-elle partagée ? Ou l’un prendra-t-il le dessus sur l’autre ?  Où se trouve l’équilibre ?

L’auteur explore la complexité des liens qui se nouent entre deux personnes dont l’une recherche un appui et est prêt à tout pour plaire à l’autre. Dans ces cas-là le dosage est délicat car il ne faut pas s’oublier, se perdre, ne plus avoir de personnalité pour correspondre à ce que l’autre attend de vous. Elle montre comment les sentiments, les rapports, évoluent. Elle décortique les attitudes, les gestes, les paroles, l’enchaînement des événements, les choix, les priorités….

L’approche psychologique de l’amitié entre ces deux garçons est bien vue. Virginie Armano rend tout cela encore plus vivant en utilisant le « je » pour faire parler un de ses personnages.

Son écriture est très vivante, fluide. On est rapidement au cœur du récit, totalement accroché par l’histoire. J’ai lu ce recueil d’une traite. Les chapitres courts, les dialogues, donnent du rythme. Le contenu parlera à tout le monde.

Cette lecture m’a beaucoup plu. Pour un premier écrit, c’est à la fois « commun » dans l’idée et original dans la façon d’aborder les faits. S’il fallait trouver un petit défaut, je dirai que la fin m’a semblé un peu rapide mais l’essentiel n’était pas là.