"La prophétie de la cathédrale" de Christophe Ferré

 

La prophétie de la cathédrale
Auteur : Christophe Ferré
Éditions : Archipoche (1er octobre 2020)
ISBN : 978-2377358267
408 pages

Quatrième de couverture

" Il n'y a de Dieu qu'Allah l'Unique. " Par quel mystère la profession de foi de l'islam figure-t-elle sur un vitrail de la cathédrale de Chartres retraçant la vie du Christ ? Lors de fouilles dans la crypte de cette cathédrale, Mary, jeune et brillante étudiante, est sur le point de mettre au jour une découverte archéologique majeure. Mais cette révélation risque de bouleverser l'équilibre du monde. Un rempart de haine et de sang se dresse alors pour empêcher la jeune femme d'accéder à cette vérité qui dérange.

Mon avis

Trois….

Avec ce nouveau roman, Christophe Ferré s’est renouvelé. Il a changé de registre en écrivant un thriller en lien avec le passé. Il a choisi la cathédrale de Chartres et les environs comme lieux principaux, il a mêlé faits réels et fiction avec doigté. Tout cela et une excellente intrigue m’ont donné envie de revisiter Notre-Dame de Chartres. En effet, le récit m’a offert un autre regard, une approche différente sur cet édifice, son histoire, ses vitraux….ma curiosité a été éveillée et j’ai le souhait d’en apprendre plus sur le plan historique.

Mary, une jeune étudiante américaine, participe, dans le cadre de ses études, a un chantier de restauration dans la cathédrale de Chartres. Passionnée, vive et intelligente, ceux qui la côtoient sont sous le charme car elle est pertinente dans ses questions, ses recherches. Elle a attiré l’attention d’un vieil homme que l’on surnomme « Le spécialiste des mystères de la cathédrale ».  Après avoir sympathisé, pas mal discuté, il l’invite un soir à descendre avec lui dans la crypte pour lui révéler un secret. Mais rien ne se déroule comme prévu et Mary se retrouve en plein cauchemar. Accusée à tort, elle va essayer de s’appuyer sur Frédéric Conte, un historien avec qui elle a échangé pour prouver sa bonne foi.

C’est alors que va commencer une course poursuite folle. Le délai est court pour comprendre les tenants et aboutissants de la mission pour laquelle Mary semble désignée. D’ailleurs quelle mission ? En a-t-elle une ou tout cela n’est qu’un leurre ? Qui sont les Légionnaires de Dieu qui œuvrent dans l’ombre ? Quel est leur but ? Déstabiliser la nation ? Mettre à mal la religion ? Ce qui est certain, c’est qu’ils ne veulent pas que quiconque révèle ce qu’ils taisent et cachent depuis des années.

C’est avec une écriture fluide, vive, très agréable que l’auteur nous entraîne sur les pas de Mary. On la suit pendant ces quelques jours où elle doit lutter pour sa survie contre des gens dangereux, prêts à tout pour se débarrasser d’elle et des quelques personnes qui l’aident. Elle a peur, elle ne sait pas à qui donner sa confiance, encore moins que croire face aux nombreuses informations qui lui parviennent.

Le style est « endiablé », il y a des rebondissements, des révélations nouvelles au fur et à mesure et le lecteur s’interroge sur les rôles de chacun …. C’est une lecture prenante, intéressante car il y a tout l’aspect historique avec de nombreuses références. On sent que l’auteur s’est documenté, a fait des recherches et a construit son texte autour d’une ossature sérieuse. Je trouve que c’est un exercice difficile et qu’il a très bien réussi car tout ce qui fait partie du passé en éléments tangibles est parfaitement intégré à sa fiction. Le tout est harmonieux.

Les personnages sont variés et certains sont ambivalents, on se demande s’ils ne sont pas agents doubles, cela maintient le suspense. L’attention ne faiblit pas car plusieurs pistes sont possibles pour comprendre ce qui trame, de plus il y a une ébauche de discussion sur les religions qui pourrait lancer un débat. C’est donc une excellente lecture !


"Le héron de Guernica" d'Antoine Choplin

 

Le héron de Guernica
Auteur : Antoine Choplin
Éditions : Le Rouergue (20 Août 2011)
ISBN : 978-2812602481
159 pages

Quatrième de couverture

A Guernica, en avril 1937, le jeune Basilio passe son temps dans les marais à peindre des hérons cendrés, alors que la population fuit dans la crainte de l'arrivée des Nationalistes. Le jour même du bombardement, le 26 avril, il cherche à rendre le frémissement invisible de la vie, dans les plumes d'un oiseau. Mais une fois la ville en feu, il ne peut se retenir d'aller voir, de ses propres yeux le massacre. Comment rendre compte de la réalité, que ce soit celle d'un héron ou d'une guerre terrible ?

Mon avis

" Comme chaque fois, il s’émerveille de la dignité de sa posture. "

Basilio observe, dans le silence de l’affût, le héron. Il le regarde, et, admiratif, souhaite le peindre pour immortaliser l’instant de grâce… Le peindre, oui, mais le peindre pour le garder vivant, éternel …. 

C’est un poète à ses heures, cet homme simple qui vit sans complications.

De quoi a-t-il besoin ? De la nature, de ses amis, de sa famille mais surtout du héron dont la contemplation semble l’apaiser, et même lui apporter l’essentiel : la sérénité. S’il pouvait le réussir ce tableau, il l’offrirait à celle qu’il aime…

Un temps … 

Et là, monte l’embrasement, les mots restent réfléchis, choisis mais se bousculent un peu, comme ces personnes qui fuient, souffrent, hurlent, sous nos yeux et ceux de Basilio ….

" Le vacarme croît et chante curieusement dans l’espace du conduit en faisant vibrer le béton. "

L’écriture reste poétique, le phrasé soigné, mais l’horreur est bien présente. Les phrases sont courtes, donnant un rythme cadencé comme dans un long poème.

Un temps ….

Car c’est bien de cela qu’il s’agit envers et contre tout : mettre l’Art au service de la mémoire de l’homme. 

Que ce soit avec le héron, immobile au milieu du fracas, seule touche de liberté.

Que ce soit avec  le tableau de Picasso, dur et violent pour ne pas oublier.

Que ce soit avec ce bijou littéraire que nous offre Antoine Choplin.  La musique de ses mots distille une histoire qu’il nous murmure à l’oreille comme une broderie à  points comptés prenant vie sous nos yeux.


"Roseanna" de Maj Sjöwall & Per Wahlöö (Roseanna)

 

Martin Beck – Tome 1 : Roseanna (Roseanna)
Auteurs : Maj Sjöwall & Per Wahlöö
Traduit de l’anglais par Michel Deutsch
Éditions : Rivages (13 Avril 2016)
ISBN : 978-2743636296
320 pages

Quatrième de couverture

Le cadavre dénudé d'une jeune inconnue est retrouvé dans un canal proche de la petite ville de Motala. La victime semble avoir été violée. Martin Beck, de la criminelle de Stockholm, est envoyé en renfort auprès de l'équipe locale chargée de l'enquête. Longtemps, les investigations piétinent, mais si Beck est un bon flic, c'est parce qu'il possède « les trois qualités les plus importantes indispensables à un policier : il est têtu, il est logique et il est d'un calme absolu ». Sans oublier qu'il est patient, incroyablement patient...

Mon avis

C’est entre 1965 et 1975 que les auteurs ont écrit une série de dix romans mettant en scène l’inspecteur Martin Beck et son équipe. Il est donc important de remettre ce livre dans le contexte et les conditions de travail, de vie dans ce coin du monde pour l’époque évoquée.

Motala, une bourgade non loin de Stockholm... Le corps d’une jeune femme étranglée est retrouvé dans un canal. Il faudra deux mois avant que l’on découvre de qui il s’agit. Martin Beck et son équipe se lancent dans l’enquête. Ce n’est pas rapide, Martin prend son temps, il observe, analyse, réfléchit. Il est vraiment plus dans la réflexion que dans l’action. Et lorsqu’il se décide à tenter quelque chose, tout est pesé. Il y a une vraie atmosphère qui se dégage de ce récit. Les choses s’installent, petit à petit, calmement. L’aspect social est très important. On sent une Suède plus fragile qu’il n’y paraît.

C’est une lecture calme, à l’image de l’enquêteur. Il établit un lien avec les Etats-Unis dont était originaire la jeune femme assassinée. A partir de là, il remonte le fil, têtu, opiniâtre, il ne lâche rien, ne cède pas à la pression.

C’est un roman policier qui se démarque de mes lectures habituelles car je préfère lorsque ça bouge. Il n’en reste pas moins que suivre les recherches de Martin, voir comment il utilise le moindre indice est très intéressant et instructif !


"De si bons amis" de Joyce Maynard (Under the Influence)

 

De si bons amis (Under the Influence)
Auteur : Joyce Maynard
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Françoise Adelstain
Éditions ; Philippe Rey (3 Janvier 2019)
ISBN : 978-2848767123
333 pages

Quatrième de couverture

Quand Ava et Swift Havilland, couple fortuné, décident de prendre sous leur aile Helen McCabe, celle-ci est au plus bas. À quarante ans, Helen a perdu la garde de son fils Oliver, huit ans, et partage sa semaine entre rencontres aux Alcooliques Anonymes, petits boulots de serveuse et soirées à faire défiler sur son écran les profils d'hommes célibataires de la région. Après s'être réfugiée depuis l'enfance derrière des récits de vies fantasmées pour masquer sa fragilité, elle trouve auprès des Havilland ce qu'elle a toujours désiré : se sentir unique et aimée.

Mon avis

Helen se sent seule. La quarantaine, elle a perdu la garde de son fils (il n’a pas envie de la voir en plus…). Elle vit de petits boulots et n’envisage pas l’avenir sereinement malgré les rencontres aux alcooliques anonymes. Alors, lorsqu’elle rencontre Ava et Swift, un couple fortuné, elle a l’impression de remonter la pente grâce à eux. Ils la prennent sous leurs ailes, l’aident, l’hébergent. Ce sont des gens qui rayonnent, avec une « cour » autour d’eux. Ils « aimantent » par leurs conversations, leurs loisirs, ils attirent à eux ceux qui se sentent mal aimés et ils semblent leur offrir une amitié indéfectible.

Sont-ils de vrais amis ? Peut-on vraiment compter sur eux ? Quelle est la part du « jeu », de la manipulation et la part d’empathie réelle ? Helen se sent reconnue, épaulée, d'autant plus que cette fréquentation lui permet de reconquérir son fils mais à quel prix ses « amis » l’aident-ils ? Doit-elle faire ce qu’ils veulent en permanence au risque de se perdre et de ne plus être elle-même ?

C’est avec une écriture d’une précision quasi chirurgicale que l’auteur analyse cette amitié. La traduction est excellente et retrace bien les liens qui se tissent ou l’influence de chaque fait sur la vie des uns et des autres. Le récit est construit à la perfection. Le rouleau compresseur avance lentement mais sûrement, pour détruire et faire le vide …

J’apprécie l’approche psychologique des personnages comme le fait Joyce Maynard. Elle excelle vraiment à décortiquer les âmes, à montrer les différents aspects de chacun…. Ce roman est encore une réussite !


"Le château des Pyrénées" de Jostein Gaarder (Slottet i Preneene)

 

Le château des Pyrénées
Auteur : Jostein Gaarder
Traduit du norvégien par Hélène Hervieu
Éditions : Seuil (11 février 2010)
ISBN : 978-2020993944
224 pages

Quatrième de couverture

Hasard ou destin ? Steinn et Solrun se rencontrent en 2007 là où ils se sont séparés trente ans plus tôt. Ils reprennent par mails leur discussion philosophique où s'affrontaient deux conceptions opposées du monde : rationalisme de Steinn, le scientifique athée, et foi de Solrun, la mystique. Leur séparation est liée à des circonstances tragiques.

Mon avis

Tout d’abord, un grand merci à mon fils qui m’a offert ce livre et qui, une fois encore, a su bien choisir.

« Je conçois davantage cette reprise de contact comme un flot vibrant de pensées entre deux âmes plutôt qu’un échange de lettres destinées en quelque sorte à nous survivre. »

« Est-ce qu’on n’a pas été, avant tout, deux âmes qui s’appartiennent ? Je veux dire par là, imbriquées l’une dans l’autre, tels deux photons indissociables qui forment un tout et qui réagissent l’une sur l’autre, même à des années-lumière de distance …. »

« Je ne sais pas quand nous mettrons définitivement les voiles. Mais je sais qu’un jour nous claquerons la porte et quitterons cette mascarade et ses jeux de rôles, en laissant seulement quelques accessoires derrière nous, avant que ceux-ci soient balayés à leur tour. »

Quelques mots sur le titre, tableau éponyme de Magritte que l’on trouve en couverture et qui fait partie de la vie de nos deux "épistoliers".

Ce rocher, au-dessus de l’océan, comment pensez-vous qu’il tient en l’air ? Explication scientifique, rationnelle ou pas ?

Le ton est donné …

J’ai lu ce livre le 21 décembre, date de l’anniversaire de mon fils, qui m’a offert ce roman …

Hasard ou coïncidence ? La seule chose dont je suis sûre c’est que ce n’est pas un choix délibéré de ma part de l’avoir lu à cette date…

Aujourd’hui ce livre s’est imposé à moi, allez savoir pourquoi …

À travers leurs échanges de mails, Steinn et Solrun vont régulièrement, comme je viens de le faire, se poser des questions.

Pourquoi se sont-ils retrouvés ? Qu’en est-il de la volonté de chacun d’avoir été là, à ce moment précis ? Comment le passé conditionne-t-il le présent ?

Tout au long de leurs courriels, une longue conversation avec l’obligation de se repositionner sur la création, la vie, la mort, les religions … Une approche très scientifique mais compréhensible et passionnante pour qui s’intéresse (le passage sur l’espace m’a beaucoup plu) et une autre plus dans l’émotion, la perception, l’intuition … En filigrane, leur vie, trente ans après et la place de ceux qui sont maintenant acteurs dans leur quotidien (mari, femme, enfants….)

Ce roman est un coup de cœur, pourquoi ?

Pour moi, l’écrit est l’essence même de l’échange.

L’écrit permet de poser ses idées, d’aller au fond des choses sans être interrompu, on peut se relire, réfléchir à ce qu’on va transmettre et laisser « couler » les mots ensuite, on ne voit pas immédiatement la réaction du destinataire et cela permet parfois plus de liberté dans le propos …

Écrire c’est donner un peu de soi, c’est prendre le risque de laisser une trace (ne dit-on pas: « les paroles s’envolent, les écrits restent »…).

J’ai aimé ces échanges, ces réflexions profondes, cette approche de la vie. Je me suis « retrouvée » dans certains commentaires faits par nos deux héros.

Ce livre m’a parlé aussi par la qualité de son écriture, tour à tour, scientifique, poétique, légère, profonde, mais au parler « vrai » …

À votre tour, laissez-vous porter ...


"Le Projet Vanility - Tome 1 : L'ombre du passé" de Marion Salvat

 

Le Projet Vanility  - Tome 1 : L'ombre du passé
Auteur : Marion Salvat
Éditions : IGB Éditions (2 juillet 2020)
ISBN : 978-2491770037
408 pages

Quatrième de couverture

La mise au point du traitement Centurion permet de guérir un grand nombre de maladies incurables, mais il génère des capacités hors du commun. À l'aube du 23e siècle, la méfiance entre « Porteurs du Centurion » et « Naturels » n'a jamais été aussi forte. En l'an 2220, après avoir grandi loin du monde moderne, Maxine, jeune Porteur de 16 ans, emménage à Paris où elle découvre une société divisée dans laquelle elle cherche sa place et aidée de ses nouveaux amis, elle devra résoudre le mystère qui entoure la mort de son père.

L'avis de Franck

Soyons franc : la couverture du roman ne m’engageait pas trop à aller plus loin.

Le dessin d’une jeune fille de face en plan serré avec des yeux dorés...

Est-ce une énième histoire adolescente avec des amourettes ? Une histoire axée sur un personnage féminin pour rester dans la tendance actuelle ? Un récit d’anticipation qui va essayer de nous faire rêver d’un monde meilleur ?

Point du tout !

Après les premiers chapitres, j’ai trouvé le thème très intéressant : au XXIIIème siècle, les scientifiques ont créé un traitement (le Centurion) capable de guérir les maladies incurables mais qui a pour effet secondaire de vous développer une capacité hors du commun (traverser un mur – changer une couleur – devenir invisible). Ce bénéfice a un revers : le racisme de ceux qui, étant en bonne santé, n’ont pas eu droit au Centurion et n’ont pas de capacités surnaturelles ! Les « Naturels » se méfient donc des « Porteurs » qui se trouvent ainsi rejetés de la société. Vous avez été malade ? On vous a guéri grâce au Centurion ? Vous êtes un paria !

L’ambiance futuriste (voitures volantes – métro aérien) est anecdotique par rapport au reste de l’histoire. On suit le personnage de Maxine, jeune fille de 16 ans, orpheline de père, qui a passé sa vie en Afrique auprès de sa mère. Son retour à Paris pour poursuivre ses études va être un choc, tant par la découverte de la capitale, que par le fonctionnement d’une société qu’elle ne connaissait pas.

Je me suis régalé à suivre ses premiers pas dans sa nouvelle école : ses premières amitiés, sa première confrontation avec le harcèlement scolaire, son premier émoi amoureux (oui, il y en a un) et surtout la découverte d’un complot dont elle est le centre d’intérêt sans le savoir. L'écriture est "vivante", agréable, accrocheuse. Le rythme maintient l'intérêt du lecteur.

C’est donc un roman qui oscille entre l’adolescence, la fiction, l’enquête policière, l’aventure, la chronique de société.

Bref, une très bonne surprise malgré mon à priori sur la couverture.

J’attends la suite avec envie.

 


"Un bon jour pour mourir" de Mark Edwards (The Lucky Ones)

 

Un bon jour pour mourir (The Lucky Ones)
Auteur : Mark Edwards
Traduit de l’anglais par Louis Poirier
Éditions : Thomas & Mercer (8 septembre 2020)
ISBN : 978-2496702231
445 pages

Quatrième de couverture

C'était le plus beau jour de sa vie. Elle ne savait pas que ce serait aussi le dernier. Lorsque le corps d'une femme est découvert dans les ruines d'un ancien prieuré, l'inspectrice Imogen Evans comprend qu'elle a affaire à un tueur en série dont les victimes semblent mourir en pleine extase, les yeux ouverts, un grand sourire figé sur le visage.

Mon avis

L’idée de de base de ce thriller est originale. Le tueur assassine les personnes qu’il choisit en souhaitant leur offrir le bonheur. La construction du livre est intéressante. On alterne l’enquête d’Imogen Evans, une policière atypique qui recherche le meurtrier et Ben Hofland, un homme qui vient de se séparer et qui s’est installé dans ce coin, a priori tranquille, d’Angleterre. L’un et l’autre avancent dans leur vie avec des hauts et des bas. Il vit un divorce difficile, elle se bat contre un meurtrier insaisissable tant dans les faits que dans les pensées…. Tout pour être captivant….

Mais, comme disait un de mes professeurs, il y a un « bémol ». Un petit quelque chose qui donne une impression d’inachevé, presque brouillon pour certains passages. Comme si le roman méritait beaucoup mieux, à savoir retravailler certains extraits. Je me suis longtemps demandée si ça venait de l’écriture, de la traduction, de la difficulté qu’avait dû éprouver l’auteur à tout équilibrer : récit, enquête, ressentis des protagonistes. Je ne prétends pas que ma réponse est la bonne mais globalement, j’ai le sentiment d’un style irrégulier. Prenant parfois, trop « scolaire » à d’autres moment avec un phrasé et un vocabulaire mal adaptés.


Je resterai donc sur une impression mitigée mais je suivrai les publications de cet auteur car je pense qu’il a de bonnes idées et que, très bientôt, son écriture sera plus aboutie.


"Les blondes amères" de Pierre Willi

 

Les blondes amères
Auteur : Pierre Willi
Éditions : Fleur Sauvage (16 Septembre 2016)
ISBN : 979-1094428283
465 pages

Quatrième de couverture

Une jeune femme, vendue comme esclave, cherche à quitter le navire où on l’a embarquée de force, quitte à se noyer. Deux associés tirent dans l’ombre des fils de marionnettes, quitte à se perdre. Un gamin attardé joue à l’adulte. Un journaliste oublie qu’à trop fouiller, on creuse sa tombe. Un ex-policier, reconverti auteur de polars, voit sa vie déraper dans une fiction qu’il n’aurait jamais voulu écrire.  Tous vont se rejoindre dans un tourbillon où la mort distribue les cartes.

 Mon avis

Ce livre est un feu d’artifice. L’écriture pétille, scintille, part dans tous les sens, revient en trombe au gré des événements qui nous sont exposés. La peur est omniprésente et lorsqu’elle se fait oublier, elle nous rejoint au galop. Au milieu de tout ça, un peu de douceur avec cette jeune femme qui subit son destin, qui a fait le mauvais choix et qui rêve d’une autre vie, de s’en sortir…..

Les personnages de Pierre Willi sont vraiment « travaillés ». Au fil des pages, il leur donne de la consistance, du caractère, les intégrant aux différentes situations sans temps mort. Il se passe toujours quelque chose et pas forcément ce à quoi s’attend le lecteur. Le contenu de ce roman est assez indéfinissable, il peut parfois déstabiliser celui qui lit et  qui pensera que trop c’est trop…. Mais à bien réfléchir, est-ce que la vie est toujours douce et belle ? Est-ce qu’il n’y a pas des tas de choses pour lesquelles on fait comme si on ne les voyait pas ? Ne rien voir, ne rien entendre, ne rien dire, c’est si facile…. Pierre Willi, de son écriture acérée, teintée d’humour acide nous entraîne dans un récit où des les hommes sont parfois désespérés mais souvent prêts à tout pour trouver le meilleur.


"La Horde du Contrevent" de Alain Damasio


La Horde du Contrevent
Auteur : Alain Damasio
Éditions : La Volte (26 juin 2014)
ISBN : 978-2370490001
700 pages (numérotées à l’envers ….)

Quatrième de couverture

Une Terre poncée, avec en son centre une bande de cinq mille kilomètres de large et sur ses franges un miroir de glace à peine rayable, inhabité. Un vent féroce en rince la surface. Les villages qui s'y sont accrochés, avec leurs maisons en goutte d'eau, les chars à voile qui la strient, les airpailleurs debout en plein flot, tous résistent. C'est en Extrême-Aval qu'a été formé un bloc d'élite d'une vingtaine d'enfants aptes à remonter au cran, rafale en gueule, leur vie durant, le vent jusqu'à sa source, à ce jour jamais atteinte : l'Extrême-Amont.

Mon avis

D’où vient le Vent ?

Il m’a bien fallu cent cinquante pages pour m’immerger dans ce roman foisonnant et particulier. La narration se fait à plusieurs voix : au début de chaque paragraphe se trouve un symbole, indiquant au lecteur quel membre de la Horde s’exprime, de plus, il le fait en fonction de son sens prioritaire (visuel, kinesthésique etc). Cela donne forcément une approche différente des événements car chacun ne perçoit pas l’importance d’un fait de la même façon en fonction de ce qu’il est. Plus de vingt personnages prennent la parole et racontent. En outre, il est nécessaire de s’habituer au vocabulaire imaginatif de cet univers ainsi qu’au phrasé d’Alain Damasio ; ce sont des aspects du roman qui en rebuteront plus d’un, ce que je peux comprendre.

Ce recueil se démarque totalement des récits de fantasy ou de science-fiction, on adhère ou pas et je pense qu’il est difficile d’avoir un avis mitigé. C’est une lecture exigeante, il ne faut pas se perdre ni perdre le fil de la lutte incessante menée par les protagonistes. Chacun apporte sa pierre à l’édifice et ils ont besoin d’être ensemble pour avancer.

"Moins que d'autres, je ne savais si le but de notre vie avait un sens. Mais je savais, plus que quiconque, qu'elle avait une valeur."

La mission de la Horde : comprendre les neuf formes du Vent, remonter l'univers à pied et atteindre l'Extrême-Amont, où personne n’est jamais allé. Tout a été pensé depuis longtemps, ses membres ont été choisis, formés dans cet ultime but. La quête est ardue, difficile, rien n’est prévisible. Un monde plat, battu par les vents et un seul combat : avancer….

C’est une lecture décoiffante, surprenante, atypique. Je lui ai trouvé quelques longueurs dans certaines descriptions mais je crois que, tout simplement, l’auteur était emporté par son enthousiasme (il a mis quatre ans pour écrire ce bouquin !). Je suis certaine qu’il faudrait que j’en fasse une relecture pour découvrir encore d’autres choses (notamment en ce qui concerne les liens entre les uns et les autres). Peu importe ce qui se passe à la fin, seul le voyage est beau, bercé par les mots d’Alain Damasio. Parce que la richesse de ce périple sans repères dans le temps, est aussi dans la langue que l’auteur magnifie en faisant d’elle un élément primordial, nécessaire, de son histoire, la rendant presqu’humaine tant il lui permet de donner le meilleur. A savoir une poésie de chaque instant qui comme le Vent peut caresser, vibrer, fouetter, vivre……



"Mortel Sabbat" de Douglas Preston & Lincoln Child (Crimson Shore)

 

Mortel Sabbat (Crimson Shore)
Tome 15 : Cycle Pendergast
Auteurs : Douglas Preston & Lincoln Child
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Sebastian Danchin
Éditions : L’Archipel (Mai 2016)
ISBN : 9782809818826
500 pages

 Quatrième de couverture

Pendergast est contacté par Percival Lake, un sculpteur à qui on a volé une collection de vins rares. En compagnie de Constance Greene, Pendergast se rend à Exmouth, petit village de pêcheurs situé au nord de Salem, dans le Massachusetts. En examinant la cave pillée, Pendergast découvre, derrière les rayonnages, une niche secrète ayant abrité un corps. Le vol des précieux flacons ne serait donc qu’un leurre destiné à masquer la disparition du squelette…

Mon avis

Aloysius Pendergast et sa protégée, Constance Greene, sont tranquilles, bien décidés à rester au calme pendant quelque temps. Mais la visite inopinée de Percival Lake, à qui on a volé une précieuse collection de bouteilles rares, va les faire sortir de leur retraite. Est-ce pour l’amour du vin, la curiosité, le besoin de bouger ou l’envie de prendre des vacances ? Toujours est-il qu’ils vont se déplacer jusqu’au petit village d’Exmouth, dans le Massachusetts. Proche de Salem (ça ne vous dit rien ce nom ?), la ville où l’on parle de sorcières. Pour la petite histoire, c’est en 1692 qu’ont commencé, là-bas, les procès contre les personnes accusées de sorcellerie, et tout cela reste encore présent. De là à basculer dans un univers un tantinet occulte, il n’y avait qu’un pas qu’ont franchi avec dextérité les deux auteurs.

Exmouth, c’est un petit village de pêcheurs où tout le monde se connaît et où tout se sait. Percival Lake, sculpteur, s’est installé là avec sa nouvelle compagne. Amateur de vins de crus rares, il a découvert que sa cave avait été « visitée ». Entre litres brisés ou volés, il va falloir toute la sagacité de Pendergast pour comprendre qu’au-delà du méfait, la situation est beaucoup plus complexe qu’elle en a l’air. Avec son air sombre, sa peau livide, ses vêtements noirs, ses provocations calculées envers la police locale, il va se lancer dans une enquête difficile. On s’aperçoit très vite que des indices sont cachés ici ou là dans le texte, et qu’il vaut mieux connaître la série pour comprendre tout ce qui se trame sous nos yeux. Qu’en est-il de ce mystérieux bateau disparu corps et bien, il y a des années, quel rapport avec « ici et maintenant » ? Pourquoi la présence de Pendergast dérange-t-elle a maréchaussée locale qui n’a de cesse de le mettre en garde et de l’inciter à aller voir ailleurs ? Que souhaite réellement Constance dans sa relation avec son tuteur ?

Entre ésotérisme et recherches de proximité le duo infernal d’auteurs maîtrise parfaitement son texte. Pas de temps mort, des pistes cachées entre les lignes, de l’action, du mouvement et le lecteur qui oscille entre une idée puis une autre. Après un « petit coup de mou » dans les derniers tomes, on retrouve une plume vive, alerte, addictive, captivante. Les chapitres s’enchaînent, on ressent l’atmosphère brumeuse, humide, boueuse, glauque d’Exmouth où beaucoup d’habitants semblent avoir une part d’ombre. Pendergast ne s’en laisse pas compter, il fouille, il gratte, il s’entête encore et encore, ne lâchant rien pour notre plus grande satisfaction.

J’ai beaucoup apprécié ce tome qui reste sur une fin ouverte, m’incitant à enchaîner immédiatement avec le suivant. L’écriture fluide (bravo au traducteur qui sait garder le rythme) nous permet de rester impliqué sans nous plaindre de longueurs inutiles. Et le contenu, bien ficelé, est intéressant. J’ai trouvé très astucieux les liens passé présent ou comment des événements antérieurs peuvent encore influencer le présent. Le trait n’est pas forcé sur le côté surnaturel et donc tout est dosé avec intelligence. A suivre …avec plaisir…..


"Philosophie du triathlon" de Raphaël Verchère


Philosophie du triathlon
Auteur : Raphaël Verchère
Éditions : du Volcan (16 Juillet 2020)
ISBN : 9791097339265
272 pages

Quatrième de couverture

« Nagez 3,8km. Pédalez 180km. Courez 42,195km. Vantez-vous pour le reste de votre vie. »
Voici le mot d’ordre du triathlon Ironman, tel qu’énoncé par John Collins, l’un des pionniers de la discipline dans les années 1970. Ce programme séduit toujours et davantage, et n’en finit pas de recruter des adeptes. D’où vient ce sport ? Comment s’est-il installé ? Pourquoi tant de personnes éprouvent-elles le besoin de se mettre à l’eau, de pédaler, de courir ?

Le triathlon pourrait bien avoir à dire sur notre temps, sur notre société, sur notre rapport à l’effort, à la nature et à la technologie.

Mon avis

Bigorexie ?

Dans ce livre, Raphaël Verchère nous parle du triathlon, un sport pas comme les autres où chacun se met au défi d’aller au bout de soi. Une discipline en lien avec les éléments : l’eau, la terre et même le feu sous une certaine forme comme l’explique l’auteur. Avec des nombreuses références, il présente la genèse même de ce sport, les choix de ceux qui se donnent à fond pour réussir, etc.

Que l’on fasse un XS ou un triathlon de taille « normale », le but est le même : être un finisher. Aller jusqu’au bout malgré la fatigue, s’être dépassé, avoir relevé un défi, réussi un challenge et surtout avoir ressenti des émotions si fortes, si intenses qu’on ne peut les oublier et qu’on aimera à les retrouver sur une autre course. Certains se fixent d’y arriver une fois, pour se dire « je l’ai fait ». D’autres visent à améliorer leurs performances au fil des mois, des années… Tous sont habités par le goût de l’effort, l’envie d’aller plus loin, de se bousculer….

Participer à un triathlon n’a rien d’anodin, tout est calculé, foulée, poids, position sur le vélo, température de l’eau lorsqu’on nage, rien n’est laissé au hasard. Pourquoi tant de souffrance ? Les participants ne parlent pas de souffrance mais d’efforts, la souffrance ne pouvant être due qu’à des blessures. Cela en dit long sur leur rapport à ce sport de haut niveau. Être un Ironman, un triathlète n’est jamais fini. On peut toujours faire mieux, améliorer ses performances, repousser les limites et alors l’homme, la femme s’entraînent avec une passion parfois démesurée. On sait tous que la pratique du sport sécrète des endorphines (molécules produites par le cerveau qui apportent un sentiment de bien-être) et qu’à partir de là, le sportif se sent léger, heureux, presque tout puissant. Une véritable drogue ? Presque…..

J’ai, en premier lieu, beaucoup apprécié la couverture, les dessins au trait se détachant sur ce fond d’un magnifique bleu et le titre, presque doré, comme une médaille. Et puis, j’ai plongé dans la lecture. Plonger, c’était tout à fait ça puisque la première épreuve, c’est de nager. J’ai d’abord accompagné l’auteur dans ce challenge, nageant, pédalant, courant, transpirant avec lui. J’ai poussé un ouf de soulagement quand il a franchi la ligne et je n’étais pas loin de pleurer avec lui.

Et puis, j’ai lu la suite, celui qu’a condensé l’auteur avec doigté et intelligence, tout ce qu’il a découvert, tout ce qu’il a compris, tout ce qu’il a écouté, vu, lu sur ce sport et pas une seconde je ne me suis ennuyée. En sept parties et vingt-huit chapitres, le triathlon est décliné, décortiqué, analysé et c’est bigrement intéressant. Les propos sont dosés, Raphaël Verchère n’en rajoute pas, reste sur du concret, avec des renvois à ses sources. J’ai trouvé tout cela vraiment passionnant (notamment tout ce qu’il explique sur le rapport aux éléments) et je crois que je regarderai les Ironmen d’un autre œil maintenant parce que je saurai ce qui les anime.


"La remplaçante" de Michelle Frances (The Temp)


La remplaçante (The Temp)
Auteur : Michelle Frances
Traduit de l’anglais par Antoine Guillemain
Éditions : L’Archipel (10 Septembre 2020)
ISBN : 9782809828917
370 pages

Quatrième de couverture

Emma est la remplaçante idéale pour occuper le poste de Carrie pendant son congé maternité. La jeune femme se rend très vite indispensable auprès d'Adrian, le mari de Carrie... Un peu trop, d'ailleurs. Très vite, il apparaît qu'Emma a une idée derrière la tête... 

Mon avis

Carrie et Adrian sont mariés et travaillent ensemble pour une société de production mettant en scène des séries. Elle est productrice et il est scénariste. Les séries ont le vent en poupe, c’est indéniable mais il faut sans cesse se renouveler. Adrian a gagné un BAFTA (BAFTA Awards organisées par la British Academy of Film and Television Arts, équivalent d’un Oscar pour les séries télévisées) et il est important qu’il reste en « haut », en trouvant de nouvelles idées. C’est un univers pas du tout tendre, la concurrence est rude entre les différents promoteurs, chacun essayant d’attirer les meilleurs scénaristes, les acteurs les plus cotés etc…. Chacun est obligé de travailler sans relâche pour garder sa place, ne pas être oublié, voire remplacer…. C’est pour cela que jamais Carrie et Adrian n’ont envisagé d’être parents. Leur carrière et leur réussite suffisent à leur bonheur. Mais il s’avère que Carrie attend un enfant, événement assez improbable à quarante-deux ans….. Elle décide de garder le bébé et informe son époux, pas vraiment prêt, ni ravi d’être Papa.

Pendant son congé maternité, même si Carrie souhaite suivre au maximum les dossiers à distance, elle va devoir se faire remplacer. C’est Emma qui est embauchée. Elle semble parfaite, à l’écoute, créatrice, intelligente, discrète et intuitive, proposant même d’excellentes idées pour améliorer des scènes, un texte etc…. Une perle …. Mais quand tout est trop parfait, il faut se méfier…. Emma est prévenante avec Carrie mais on sent que cette dernière se pose des questions. Le lecteur également, en découvrant que le CV n’a pas été tout à fait honnête, qu’elle n’est pas « claire »…. A partir de là, très vite, on rentre dans le vif du sujet, dans un roman qu’on ne lâche plus. On s’aperçoit que finalement, chaque protagoniste cache quelque chose, qu’il a une part d’ombre. J’ai particulièrement apprécié cet aspect du récit, parce que, dans la réalité, c’est la même chose, personne n’est parfait ou alors ça se saurait !

Michelle Frances a particulièrement travaillé son intrigue. Les caractères sont bien explorés ainsi que différents aspects des relations humaines. Des thèmes divers sont abordés :  la jalousie, le mensonge, l’empathie, les secrets de famille, la maternité, la vie de couple, la reconnaissance professionnelle, l’estime de soi, l’orgueil …. Vous pensez que ça fait beaucoup ? Et bien, pas du tout ! Tout cela s’intègre parfaitement au texte, nous montrant comment (et pourquoi) les uns se comportent par rapport aux autres. L’auteur a su très bien décrire le monde de la télé où certains sont superficiels, ne pensant qu’au paraître…. Elle a présenté le déséquilibre familial après la naissance d’un tout petit …. Et la peur de Carrie par rapport à son poste…..

L’écriture de Michelle Frances est accrocheuse, fluide (merci au traducteur), le suspense est omniprésent et il y a des rebondissements lorsque des révélations surprenantes sont faites. On ne voit pas tous les liens qui vont être établis et c’est une excellente chose car l’intérêt ne faiblit pas du tout. Sans cesse, on se demande quel est le but d’Emma, où elle veut en venir, si elle manipule ou si elle est manipulée …. L’ambivalence des uns et des autres est un atout supplémentaire dans ce recueil car on ne sait pas à quoi s’attendre lorsqu’on va découvrir le chapitre suivant. J’ai lu ce livre en un après-midi et je n’avais pas envie de le poser, je voulais savoir ! Avec plusieurs approches, une atmosphère angoissante qui monte en puissance au fil des pages,  cette histoire m’a captivée et je vais surveiller les nouveaux titres de l’auteur !


"Chasse à l'épaulard" de Williams Exbrayat


Chasse à l’ Épaulard
Auteur : Williams Exbrayat
Éditions : Storylab (16 Juillet 2014)
ASIN : B00YWGOLA8
100 pages
Temps de lecture : une heure ou un peu plus

Quatrième de couverture

Maddog, l'incorrigible détective privé au passé mouvementé, pensait se la couler douce quelque temps après sa dernière investigation. Mais c'était sans compter l'appel de son ex-femme, qui le somme de venir à Pau pour retrouver son nouveau mari Épaulard, un ancien militaire. Lorsque Maddog découvre qu’Épaulard n’est pas le seul membre de son ancien bataillon à avoir disparu, cette affaire en apparence banale se transforme en une enquête plus complexe que prévu… et bien plus meurtrière.

Mon avis

Revoilà Maddog !!!

Pari réussi une dois encore pour les éditions Storylab.
Quel pari ? Celui de vous divertir avec un ebook dans une durée limitée à une heure ou à peine plus.

Cette fois-ci, c’est un court roman policier où l’on retrouve pour la seconde fois : Maddog, qui est en passe de devenir un personnage récurrent de Williams Exbrayat.
L’un comme l’autre (« le héros » et son auteur) n’ont rien perdu de leur langage caustique, fleurant bon l’humour et la dérision.

L’ex-femme de Maddog est bien ennuyée, son nouveau compagnon a disparu, alors qu’elle est enceinte et que tout allait bien entre eux. L’associé de son époux est également introuvable depuis quelque temps. Alors, la belle est aux quatre cents coups et elle appelle au secours son premier mari, qui est détective (donc c’est son rayon de rechercher ceux qui ne donnent plus signe de vie.)

Celui-ci, bien que n’entretenant pas de merveilleux rapport avec son ex-femme, accepte la mission et part à la recherche de ce brave homme…
Il n’y aura pas de temps mort et les rebondissements seront nombreux, les situations cocasses (ou vues avec un regard plein de dérision), aussi. Quant aux dialogues, ils sont amusants et même de temps à autre truculents.

L’écriture est fluide et agréable et sans faute (ce qui n’est pas toujours le cas pour les ebooks), tout s’enchaîne parfaitement et l’intrigue se suit sans aucune difficulté. Il faut reconnaître à l’auteur que les raisons des diverses disparitions sont bien pensées.

J’ai bien aimé la courte intervention des personnages sur la langue des signes et cet individu « muet qui est très bavard » (je confirme, les sourds ont toujours des tas de choses à dire !)

Une lecture sans prise de tête mais loin d’être stupide. A conseiller !

"Chiennes fidèles" de Williams Exbrayat


Chiennes fidèles
Auteur : Williams Exbrayat
Éditions : StoryLab éditions (23 octobre 2013)
Format Kindle
ASIN: B00G2BOQTW
45 pages
Temps de lecture : 45 minutes

Quatrième de couverture

Ex-flic à la morale discutable et aux pratiques expéditives, Maddog est devenu détective privé. Il lui arrive même de s'offrir quelques à-côtés juteux à la limite de la légalité.
Sa principale faiblesse : son goût pour les femmes. Lorsque la vénéneuse Dora le plaque, il se rend compte que sa dernière combine était peut-être celle de trop…

Mon avis

Une petite heure à tuer dans la salle d’attente d’un médecin, dans les transports en commun ou par une après-midi pluvieuse ? Voilà une solution…
Lire un des ebooks proposés par StoryLab éditions (je ne reçois aucun émolument ;-) qui font preuve d’une certaine originalité en nous indiquant un temps de lecture.

A défaut de papoter avec un voisin inconsistant ou de piocher dans un des magazines dégoulinant de mièvrerie, vous téléchargez (hop c’est rapide) un pur moment de lecture sur votre tablette et c’est tout bon. D’abord, il vous appartient alors que les publications qui trainent chez le médecin … vous n’êtes pas sûr de finir votre article… Il est propre (car neuf) et en plus il tient dans la main ou dans le sac !!!
Et s’il vous fait rire, vous pourrez le relire à souhait….

En général, on nous dit de nous méfier de l’eau qui dort…
Ici, l’eau est une femme, elle prend son temps pour courtiser, se laisser courtiser et s’installer dans une relation amoureuse avec Maddog.

Lui, il y croit et malgré les recommandations de ses amis « …quand on est équipé comme elle, le mec lui sert de faire-valoir, il est dans une sacrée merde. Et ce mec, Maddog, pour l’instant c’est toi. »
Maddog a bien entendu les conseils mais il se dit que cette fois-ci c’est différent….
Mouais….
Pas vraiment différent mais lorsqu’il va réaliser, ce sera largement trop tard et il sera dans la panade jusqu’au cou….
Mon côté féminin (moi qui n’ai pas les mensurations et la prestance de Dora) me ferait presque penser « Bien fait ! » C’est vrai, qu’est ce qu’ils ont tous, ces hommes, à ne voir que la beauté extérieure, qui est somme toute une vitrine ?
Mon côté Mère Térésa me fait penser « Pauvre gars… »
Il est attachant ce Maddog, terriblement humain avec ses faiblesses et si le but de l’ebook n’était pas de faire court, on pourrait lui reprocher de ne pas avoir plus de consistance… Il a tout pour devenir un personnage récurrent, de plus en plus approfondi, pour peu que son auteur se penche sur lui…

Une petite histoire qui s’emballe juste ce qu’il faut pour que le lecteur accroche, une écriture ponctuée de dialogues vifs, de remarques caustiques, le but est atteint « court et efficace ».

Comme de plus, ce n’est pas prise de tête (pratique lorsque tout s’agite autour de vous), que les faits s’enchainent sans temps mort, on ne voit pas le temps passer.

Que dire de plus ? Sans aucun doute : à suivre…..

"Les princes du bitume" de Rachid Santaki

 

Les princes du bitume
Auteur : Rachid Santaki
Éditions : Jigal (18 Mai 2017)
ISBN : 978-2-37722-010-6
288 pages

Quatrième de couverture

Alors que s'annonce la prochaine Coupe du Monde de football, Saint-Denis s'apprête à vivre une furieuse bataille pour le contrôle du biz de la drogue, opposant voyous à l'ancienne et jeunes rageux. Hachim, lui, est un ado brillant, sensible, curieux, passionné de culture Hip-Hop et qui rêve de devenir journaliste. Pourtant, coincé entre le quartier, sa famille et Houssine, le boss de Saint-Denis qu’il admire, Hachim semble choisir une autre voie…

Mon avis

Quand on est né en banlieue, à Saint-Denis, au milieu des « petites frappes » et des gros caïds, quelles sont les chances d’avoir une vie droite et simple ? Difficile, n’est-ce pas ? Les tentations de prendre les chemins de traverse sont nombreuses, les rencontres parfois délicates à gérer...

On est en 1997, la coupe du monde football se profile à l’horizon, qui plus est, elle sera accueillie en France. Quelle aubaine ! Cela va occuper les jeunes, et pendant qu’ils seront devant leur écran, ils ne penseront pas à faire des c … Ce serait un raccourci bien trop rapide d’imaginer que cela va se passer comme ça.

Hachim est un de ces banlieusards, il est brillant et rêve de journalisme mais il est aussi très admiratif des racailles qui tiennent tête à la police, qui ramassent de l’argent facilement. De quel côté va-t-il pencher ? Risquer de passer pour un dégonflé s’il ne frôle jamais le danger, est-ce que ce ne serait pas perdre la face ? Mais décevoir ses parents, le professeur qui lui fait confiance, est-ce que ce ne sera pas trop lourd à porter ? Il ne sait pas, il ne sait plus Hachim…. Et nous, pauvre lecteur, on voudrait bien le conseiller, lui tenir la main mais il veut vivre sa vie, faire ses expériences lui-même…..

Entrecoupé d’extraits de presse authentiques, mêlant argot, verlan et français correct, Rachid Santaki, nous balance uppercut sur uppercut…. Pas le temps de souffler, de respirer, de penser, les actions s’enchaînent. Mensonges, trahisons, coups bas, pièges, tout y passe…Comme dans la vraie vie de ces cités où vivre tourne parfois au cauchemar car il s’agit d’être plus fort, plus malin que les autres pour survivre et avancer vers le lendemain qui sera peut-être meilleur ou peut-être pas….

L’écriture est rythmée, vive, sans fioriture, elle emplit les pages comme un coup de g… d’un père déçu ou d’un jeune trompé par ceux qu’il croyait être des amis. Jamais moralisateur, l’auteur porte un regard acéré sur le business de la drogue, sur les hommes, sur la société, sur la vie tout simplement….


"Caroline de Paris" (tome 1) de Esther Lère

 

Caroline de Paris (tome 1)
Auteur : Esther Lère
Éditions :  Amazon Media EU S.à r.l. (6 Juillet 2016)
ISBN : 978-2955796801
143 pages

Quatrième de couverture

Caroline , jeune fille de 17 ans, vient de déménager et change d’arrondissement parisien. Nouveau quartier, nouveau lycée, Caroline arrivera-t-elle à s’intégrer, à se faire de nouveaux amis ? La tourbillonnante Manue l’y aidera-t-elle ? Le mystérieux Victor se laissera-t-il approcher et apprivoiser ?

Mon avis

Pas forcément adepte des romans « Young adult »  je me suis malgré tout lancée dans la lecture de celui-ci.  L’écriture de l’auteur est vive agréable, les dialogues installent les relations entre les différents personnages. L’orthographe (déformation professionnelle oblige) est de qualité.

Caroline, cette jeune fille forte et fragile à la fois, a dû renoncer à son environnement suite à un déménagement. Ce n’est jamais simple, à l’adolescence, d’être « déracinée » même si les anciens amis ne sont pas si loin que ça…. Elle se retrouve confrontée à des choix avec l’éternel dilemme de savoir si elle fait le bon….et le risque d’avoir des conséquences inattendues en fonction de ce que penseront les autres car ils ont vite fait d’interpréter ….

L’auteur nous montre combien, à cet âge délicat, le regard extérieur  est important, vital même. Et combien, il est difficile de s’en affranchir. Caroline est une jeune fille d’aujourd’hui, accrochée à son téléphone et Facebook, prête à tout (ou presque) pour être aimée de ses amis, d’un amoureux …..

C’est une romance d’aujourd’hui, bien ancrée dans la réalité que nous propose Esther Lère et le contenu est divertissant à lire. Je découvrirai la suite, lorsqu’elle sera publiée, avec plaisir.

 


"Mille soleils" de Nicolas Delesalle

 

Mille soleils
Auteur : Nicolas Delesalle
Éditions : Préludes (10 Janvier 2018)
ISBN : 978-2253107873
260 pages

Quatrième de couverture

Ils sont quatre, réunis en Argentine par un travail et des passions communes. Vadim le taiseux aime la physique des particules, et le bel Alexandre a installé des panneaux solaires sur les 1 600 cuves de l’observatoire astronomique de Malargüe. Avec ses yeux clairs, Wolfgang est un astrophysicien rêveur, spécialiste des rayons cosmiques d’ultra-haute énergie. Quant au jeune Simon (qui consulte toujours Clint Eastwood avant de se décider), il doit écrire un article sur ces rayons pour le CNRS.
Ils ont quelques heures pour parcourir deux cents kilomètres de piste, et prendre leur avion à Mendoza. Pourtant en un instant, leur destin sera bouleversé.

Mon avis

Ils sont quatre hommes embarqués dans une voiture sur la nationale 40, une route mythique d’Argentine…. Longue de plus de cinq mille kilomètres, elle traverse le pays du Nord au Sud… Chacun est perdu dans ses pensées quand survient l’impensable : un accident. Les voilà, seuls au milieu de la nature sans réseau téléphonique et dans une situation critique…. L’occasion de faire le point, de se rendre compte du chemin parcouru,  de repenser aux rendez-vous ratés, aux rencontres porteuses de promesses….

 Entre 7h35 et 22h10, sur une journée, le temps ne s’égrène pas au même rythme suivant les événements… Certains moments sont très (trop) longs, d’autres vous semblent aller bien vite…..

Nicolas Delesalle a une écriture très cadencée. Il peut alterner les passages avec des phrases courtes, parfois deux ou trois mots, avec ceux où les lignes s’entassent mais sans lourdeur, comme cette chaleur qui accable les personnages ou l’inquiétude qui pèse sur leurs épaules….

Face à l’indicible, chaque homme réagit différemment. Le taiseux va-t-il devenir bavard, ouvrant enfin les vannes ?  Celui qui a des regrets va-t-il repartir avec une énergie nouvelle ? Ce serait presque un huis-clos entre scientifiques mais il y a au milieu de ce paysage désolé, une femme et sa bicyclette…. Elle a choisi de fuir son quotidien, de vivre une expérience unique et elle aussi sillonne la nationale 40….

Le parallèle est établi : l’une qui a bien voulu que sa vie soit déstabilisée, les autres qui n’ont rien demandé mais qui se retrouvent dans une situation qu’ils ne maîtrisent pas et dont ils ne peuvent prévoir l’issue…. Pour des hommes de sciences, que c’est difficile à vivre….

C’est un roman surprenant, intense en contenu, mais superbement bien écrit. Le phrasé est poétique, le propos profond sur le sens de la vie, sur ce qui peut la faire basculer d’un côté ou d’un autre … Les caractères des différents protagonistes sont présentés avec finesse, au cours de ces heures où les destins vont chavirer …..


"Zurich by Night" de Laurent Trousselle

 

Zurich by Night
Auteur: Laurent Trousselle
Éditions : du Tiret (26 septembre 2012)
ISBN : 00343740
540 pages

Quatrième de couverture

En surface le lac de Zurich est calme, mais les réponses aux questions que la ville ne pose jamais sont peut-être enfouies dans les profondeurs de ses eaux froides, à moins qu'elles ne soient cachées dans certains sous-sols des palais de la Goldküste...
Qui a scellé les portes de ce bâtiment oublié près du Dolder Grand, pourquoi ces deux mécènes se font-ils discrets, quel est l'objectif de cette vieille dame désirant léguer sa fortune à un héritier… qui n’existe pas ?

Mon avis

En se promenant…

Les quinze nouvelles de Laurent Trousselle sont reliées entre elles par le lieu où elles se déroulent: Zurich.

Ce n’est pas le seul point commun que l’on va découvrir en les lisant. Quelques unes d’entre elles se passent dans une atmosphère geek, pas forcément optimiste. Elles nous emportent à la suite des dérives que peuvent permettre l’informatique et internet par le biais des hackers mais aussi des espions de tout bord. On s’aperçoit alors, avec effroi (et quelque part la chair de poule nous gagne car la réalité n’est pas si loin) que l’on peut être manipulé sans voir venir quoi que ce soit. Ou bien, parce qu’on a voulu « jouer » (en manœuvrant une certaine forme de vérité et en faisant comme si on était un indicateur), on entame une descente aux enfers qu’on ne maîtrise plus.

Heureusement, d’autres textes, comme celui qui raconte l’histoire d’une joggeuse, sont plus optimistes et apportent de la légèreté à un recueil où le noir semblerait dominer.

L’écriture de l’auteur est profonde, complète, parfois presque trop parfaite pour ce type de récit. Les circonvolutions sont nombreuses et de temps à autre, un événement évoqué dans un des textes, ressort en écho dans un autre. Ceci est fait de façon très subtile, quelquefois sans grand développement et cela est encore plus intéressant pour le lecteur attentif qui peut chercher à comprendre pourquoi il en est ainsi. L’ambiance est très bien retranscrite que ce soit pour évoquer l’angoisse, la recherche, les rencontres ou les imbroglios auxquels sont confrontés les personnages. L’atmosphère est palpable et comme elle n’est pas toujours la même, il s’agit en quelque sorte d’une prouesse d’écriture.

Chacune des quinze historiettes est écrite à la troisième ou à la première personne, dans ce cas-là, le « je » n’est jamais le même. Il peut être homme ou femme. Les sujets sont divers et variés, on peut se retrouver dans un décor un peu fantastique (La porte) ou avec des thèmes plus graves également, bien ancrés dans notre quotidien et présentés à travers le devenir des protagonistes.

Laurent Trousselle doit bien connaître la ville qu’il évoque, ses rues, ses quartiers. Le recueil aurait pu être accompagné de photographies de quartiers ou de bâtiments démontrant ainsi l’inspiration réelle de l’écrivain pour le lecteur n’ayant jamais mis les pieds dans cette bourgade. Il y a quelques « pièces jointes » comme des articles, des captures d’écran apportant un plus au contenu ….

Je pense que certaines expressions sont typiquement suisses (ou alors je les ignore) et cela m’a de temps à autre, un peu gênée. Par exemple des mots: pigron, ou des phrases: « Quelqu’un pourrait de le passer ces écritures de son poste ? ».

Mais il faut reconnaître que cela ne perturbe pas malgré tout, la compréhension globale et que l’on peut suivre le déroulement sans problème.

Mon rythme de lecture a été irrégulier. J’ai littéralement dévoré certains textes, traînés sur d’autres qui m’attiraient moins ou qui me semblaient plus confus. Ce qui est une erreur de ma part car pour les nouvelles moins « parlantes », il ne faut pas perdre le fil donc les lire d’une traite de façon linéaire.

Globalement une lecture originale qui mérite un arrêt…


"La ville des Brumes" de Sara Gran (Claire DeWitt and the Bohemian Highway)

 

La ville des Brumes (Claire DeWitt and the Bohemian Highway)
Une enquête de Claire DeWitt
Auteur : Sara Gran
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Claire Breton
Éditions du Masque (JC lattès)  (9 Mars 2016)
ISBN : 9782702440018
352 pages

Quatrième de couverture

Quand Paul Casablancas, l’ex-petit ami musicien de Claire, est retrouvé mort dans sa maison de San Francisco, la police est convaincue qu’il s’agit d’un simple cambriolage. Mais Claire sait que rien n’est jamais si simple.
Avec l’aide de son nouvel assistant, Claude, elle suit les indices, trouvant un éclairage sur le destin de Paul dans ses autres affaires – notamment celle de sa sœur de sang Tracy disparue dans le New York des années 1980 et celle d’une disparition de chevaux miniatures dans le comté de Sonoma.

Mon avis

Il est loin le temps des enquêteurs avec une vie rangée, bien propres sur eux et aux méthodes d’investigation classiques (avec un petit carnet, une pipe à la bouche…) Claire DeWitt est à l’opposé de ces clichés…. Elle ne recule pas devant un rail de coke ( c’est même un peu trop présent à mon avis)ou des médicaments dont elle pourrait se passer (quand on a le moral un peu bas, n’y a-t-il pas d’autres solutions que prendre une pilule rose ou bleue ?) Cette détective privée a un quotidien assez décousu et des fréquentations parfois un peu douteuses, c’est sans doute volontaire de la part de l’auteur, pour la démarquer de tous les autres et lui donner une consistance différente. On adhère ou pas…. Claire est la narratrice , son vocabulaire et ses activités sont en phase avec son look.  Peut-être que sous des dehors très « peace and love », elle cache une certaine forme de fragilité ? On la perçoit de temps à autre à travers des réflexions personnelles lorsqu’elle daigne se pencher sur elle-même, non pas pour s’apitoyer et se plaindre de sa vie mais vraiment pour faire le point.

Après avoir été amoureuse de Paul, elle a laissé la place (sans faire de remous)  à Lydia avec qui il forme un beau couple. Elle est restée en lien avec eux de temps à autre, comme on le fait avec de vieux copains mais sans plus.  Elle apprend que son ex a été assassiné et elle décide de mener son enquête, histoire d’avoir une réponse à ses questions. Elle va se faire aider de Claude, son assistant, pas vraiment  au top mais qu’elle semble apprécier. On la suit à San Francisco, une ville qui, décrite comme elle le fait, ne m’attire pas vraiment.  Je pense que c’est dû aux  personnes qu’elle rencontre pour les besoins de l’enquête et qui donnent une image assez dépravée de la ville….. Bref, ce n’est pas une folle ambiance et une atmosphère sereine dans lesquelles évolue notre personnage principal.

Mêlant le présent et les retours en arrière qui nous parlent d’une ex-enquête et nous permettent de mieux cerner la personnalité de Madame DeWitt, nous avançons et tâtonnons avec elle. Elle décide de retrouver les guitares du musicien (qui ont été volées) en espérant qu’elles la conduiront au meurtrier. Elle va aller de découvertes en découvertes…. Le rythme est soutenu et il n’y a pas vraiment de temps mort (si ce n’est quand elle sniffe et trop c’est trop….). La jeune femme  cite régulièrement Jacques Silette , un détective français, auteur de « Détection ». Elle semble accro au contenu de son bouquin, come si cela était sa Bible…. Est-ce que cela l’aide vraiment dans ses investigations ?  Je n’en suis pas certaine….

Mon avis sera mitigé. La lecture est fluide, pas désagréable pour une chaude journée d’été. Mais, j’émettrai quelques bémols : la place de la drogue, même si elle fait partie de l’univers de l’héroïne (sans jeu de mots…) m’a semblé trop importante et pas nécessaire. L’intrigue elle-même est un peu légère, les  flash back meublent un peu le récit qui sans tout cela aurait été forcément plus court (et qui sait, cela aurait été peut-être mieux ?).

 


"Goliat" de Mehdy Brunet


Goliat
Auteur : Mehdy Brunet
Éditions : Taurnada (3 Septembre 2020)
ISBN : 978-2372580748
250 pages

Quatrième de couverture

La mer de Barents, au large des côtes norvégiennes : Goliat, une plateforme pétrolière en proie aux éléments déchaînés, est le sinistre théâtre d'une série de meurtres odieux.
David Corvin, ex-agent du FBI, va devoir utiliser toutes ses compétences pour stopper l'hécatombe.

Mon avis

2016 : Abigaël, David, un couple sans histoire. Il a été renvoyé du FBI, elle a décroché un poste sur une plateforme pétrolière. Ils vont être séparés, ça leur fera du bien car en ce moment, le dialogue est difficile, rugueux…. Finalement, il l’accompagne, il trouve un job de surveillance sur les lieux. C’est un nouveau départ pour eux. Ils y mettent toute leur énergie, leur volonté. L’amour est de retour.
2013 : un avion s’écrase, des couples sont dans la douleur, des familles éclatées.
2015 : des assassinats très sordides ont lieu, la police mène l’enquête
2019 : un homme est en pleine détresse, il boit. Que cherche-t-il à oublier ?
Au départ, ces différents repères temporels désarçonnent, l’auteur s’en sert pour présenter les personnages. On se doute bien qu’à un moment ou un autre, des liens seront établis mais lesquels ?
On part sur Goliat, où la plateforme isolée accueille le jeune couple. Très vite, l’ambiance tourne au cauchemar. En parallèle, on suit les autres protagonistes, chacun dans leur époque.

Le suspense est omniprésent dans ce roman. L’écriture de Mehdy Brunet nous prend aux tripes, la tension est importante, on la perçoit en permanence et cela nous serre la gorge tant on se sent impuissant. Le thème du traumatisme, (des traumatismes car plusieurs sont évoqués), est abordé sous différents angles avec toujours un ton très juste. Certains penseront que parfois ce n'est qu'effleuré mais c'est suffisant car tout se joue entre les lignes et c’est tellement palpable qu’il n’y a pas besoin d’en faire plus. C’est sans doute un exercice difficile de faire ressentir plein de choses à un lecteur avec un peu de mots et c’est particulièrement réussi. On perçoit la détresse des uns, la colère des autres, la résignation, l’amour… On devine combien un passé lourd, révoltant, peut amener un homme ou une femme à des extrémités impensables, tant le cheminement est difficile. Quand on est habité par la rage, que plus rien ne nous retient à la vie, comment avancer ? On s’interroge, quelles auraient été mes réactions face des situations telles que décrites dans ce recueil ?

Mehdy Brunet a réussi un excellent roman. Les pièces du puzzle s’emboîtent petit à petit et si le lecteur a quelques doutes, il y a tant d’actions et de rebondissements qu’il ne peut pas s’appesantir. L’intérêt va grandissant au fil des chapitres. On sait tout de suite la date, le lieu et on ne se perd pas. Le nombre de pages, bien dosé, permet d’aller à l’essentiel, de cerner très vite les ressentis des uns et des autres.

Cette lecture m’a captivée, j’ai particulièrement apprécié les moments sur la plateforme. C’était prenant, angoissant et j’aurais voulu agir, signe que j’étais bien ancrée dans l’histoire ! On voit aussi combien la communication doit être établie dans toutes les circonstances. Et pas de n’importe quelle façon, une maladresse, des mots mal choisis peuvent avoir des conséquences graves.
L’écriture et le style sont addictifs, l’auteur affine son phrasé de roman en roman et devient plus percutant. Il monte en puissance.

J'ai beaucoup aimé la fin qui, bien qu'elle soit dure, se termine pour moi sur une note de tendresse, d’amour.


"Mississippi Solo" de Eddy L. Harris (Mississippi Solo)


Mississippi Solo (Mississippi Solo)
Auteur : Eddy L. Harris
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pascale-Marie Deschamps
Éditions : Liana Levi (3 Septembre 2020)
ISBN : 979-1034902613
338 pages

Quatrième de couverture

Le Mississippi. Un fleuve mythique qui descend du lac Itasca dans le Minnesota jusqu’au golfe du Mexique, en passant par Saint-Louis et La Nouvelle-Orléans. Impétueux et dangereux, il charrie des poissons argentés, des branches d’arbre arrachées, des tonnes de boue, mais aussi l’histoire du pays et les rêves d’aventure de ses habitants. À l’âge de trente ans, Eddy décide de répondre à l’appel de l’Old Man River, de suivre en canoë son parcours fascinant pour sonder le cœur de l’Amérique et le sien, tout en prenant la mesure du racisme, lui qui ne s’est jamais vraiment vécu comme Noir.

Mon avis

Connaître ce fleuve, c’est savoir qui nous sommes.

Les hommes ont besoin de challenges et de projets pour s’accomplir. Pour certains, il leur faut même relever un défi qu’ils décident de réaliser seuls. Cela peut être de parcourir le chemin de Saint Jacques de Compostelle, un périple à vélo dans la cordillère des Andes, ou toute autre idée qui s’impose, comme ça, sans raison.

A l’âge de trente ans, Eddy L. Harris (qui est né en 1956) a choisi de descendre le fleuve Mississippi en canoë. Sans pratique particulière pour ce moyen de transport ou ce genre de circuit, il avait un besoin viscéral de tenter cette expérience, de réussir, sans doute pour faire le point sur sa vie, se retrouver et arriver à une harmonie « corps esprit ».  De ce voyage, que l’on peut qualifier d’initiatique, est né un livre en 1998. Il vient d’être traduit avec brio (Merci à Pascale-Marie Deschamps) pour que nous puissions découvrir cette magnifique histoire.

Le récit est riche, captivant, bercé par les états d’humeur du fleuve et du navigateur. Il n’y a pas vraiment de chapitres mais des sous-titres qui annoncent ce qui va être présenté pendant quelques pages. Eddy L. Harris s’exprime sur les rencontres, les difficultés, les joies, les peurs…. Il raconte son apprentissage du fleuve, comment ils se sont compris pour finalement s’apprivoiser, se connaître et que chacun trouve sa place. Parce que oui, le Mississipi est devenu son compagnon de route, créant des liens avec lui, certainement aussi forts que ceux que l’on tisse avec un ami. Cette relation au fleuve est un point fort de ce recueil, dictant le rythme des pagaies et celui des rendez-vous.

On sent au fil des pages que plus rien ne compte que le plaisir d’être en vie, d’avancer, de se sentir bien dans la nature, de retrouver le goût de l’effort. Les moments de découragement, de peur (par exemple lors de visites impromptues ou d’une météo néfaste), de souffrance, le dos raide et les jambes courbaturées, s’effacent devant le bonheur d’un partage simple autour d’une tasse de café ou devant une assiette de poisson-chat. Plus Eddy rame, plus il gagne en autonomie, en pratique. Il est plus sûr de lui alors que plus il se rapproche du Sud, plus le racisme envers les gens à la peau noire (comme lui) peut être important. Il grandit, vogue et marche la tête haute, droit dans ses bottes.

Ce texte est l’occasion d’une belle réflexion sur plusieurs sujets. Les amis et la famille, leurs réactions très diverses : aider Eddy, l’encourager ou le traiter de tête brûlée …. La xénophobie, en effet Eddy pointe du doigt les difficultés de son expédition : « Aller de là où il n’y a pas de Noirs à là où on ne nous aime toujours pas beaucoup. » Et puis, surtout, la transformation de l’homme qu’il est.
« Ce voyage sur le fleuve serait différent. Il s’ancrerait si profondément en moi qu’il s’agrégerait à mon âme, mais avec une vie propre qui le ferait revenir de lui-même, si intimement lié à moi qu’il me pénétrerait la moelle et modifierait ma façon de penser, de sentir et de marcher, me laissant bien plus que des souvenirs et des sourires, car il m’aurait changé en profondeur, de façon indélébile. »

Il y a eu « un avant » et « un après » pour l’auteur et cela retentit chez le lecteur. Eddy L. Harris a su me transmettre son audace, sa volonté, son leitmotiv, à savoir qu’il ne faut jamais renoncer, et surtout pas à ses rêves. J’ai aimé cette lecture, bercée par les flots. J’aurais souhaité qu’elle soit accompagnée d’un album photos mais je visualisais déjà très bien chaque scène. Les émotions ont été fortes, pour l’auteur sur le fleuve, mais elles le sont également pour celui qui s’imprègne de ce compte-rendu complet, riche et intéressant à tout point de vue.



"Un jour viendra couleur d'orange" de Grégoire Delacourt


Un jour viendra couleur d’orange
Auteur : Grégoire Delacourt
Éditions : Grasset (19 Août 2020)
ISBN : 9782246824916
272 pages

Quatrième de couverture

Tandis que le pays s’embrase de colères, Geoffroy, treize ans, vit dans un monde imaginaire qu’il ordonne par chiffres et par couleurs. Sa pureté d’enfant « différent » bouscule les siens : son père, Pierre, incapable de communiquer avec lui et rattrapé par sa propre violence ; sa mère, Louise, qui le protège tout en cherchant éperdument la douceur. Et la jeune Djamila, en butte à la convoitise des hommes, fascinée par sa candeur de petit prince.

Mon avis

Réparer la colère ….

Pierre est en colère….. Contre la vie qui lui a donné un fils autiste avec lequel il n’arrive pas à communiquer…. Contre sa femme qui, elle, a réussi à établir un lien, à comprendre leur enfant malgré son côté étrange …. Contre la société car les choses sont compliquées…. le coût de la vie, les conditions de travail etc…. Toute cette colère rentrée, accumulée, presque éteinte ne demande qu’à flamber….

Alors, lorsque commence le combat des gilets jaunes, il en est. Il y va, c’est comme une seconde famille, lui qui ne trouve plus de place dans la sienne, il a l’impression d’exister à nouveau, d’être visible. Alors, il crache sa colère, il la vomit, il la crie ….. Pendant ce temps, son épouse accompagne ceux qui sont en fin de vie, en soins palliatifs … Elle n’est que douceur, délicatesse, alors qu’il n’est que rébellion…..

Deux mondes opposés, qui ne savent plus se parler. Est-ce que hurler sa révolte suffit à s’en débarrasser, à faire bouger les lignes ? Pierre va réaliser que non… Alors que faire ?  Pendant qu’il devient un père plus qu’absent, son fils a des soucis et doit lutter lui aussi.

Ce livre, dont le titre de chaque chapitre est une couleur, raconte plusieurs combats. Celui des gilets jaunes, celui de Geoffroy, autiste, celui de Dajmila contre le racisme, les préjugés, les traditions familiales, celui de ces hommes et femmes qui ont faim, qui souffrent…. Et celui de tous ceux, dans l’ombre qui se battent pour un monde meilleur….

L’écriture de Grégoire Delacourt est d’une poésie infinie, elle nous enchante en quelques mots.
« Le ciel se marbrait de cuivre. Les six gilets jaunes ressemblaient à des flammes qui dansent. Des lucioles d’ambre. »
J’aime son phrasé, le rythme qu’il donne à son récit avec des mots qui murmurent à l’oreille. Le style est caractéristique, parfois deux mots, sans verbe. Ça suffit et ça fait mouche. On les prend. Comme ça. De plein fouet. Et on se dit qu’il a raison, c’est la vie qu’il décrit même si on peut penser que, dans ce roman, il y a un sacré condensé de cabossés par la vie. Peu importe, on n’est pas là pour vérifier si c’est vraisemblable ou pas, on est là pour se délecter, s’imprégner de cette histoire et espérer avec l’auteur et ceux qu’ils évoquent qu’un jour, on revienne à :
« Le temps où le monde avait la taille d’un jardin. »
Un monde où on se parlait, on se regardait, on s’entraidait et surtout où on se connaissait…..

"Les Dynamiteurs" de Benjamin Whitmer (The Dynamiters)


Les dynamiteurs (The Dynamiters)
Auteur : Benjamin Whitmer
Traduit de l’américain par Jacques Mailhos
Éditions : Gallmeister (3 septembre 2020)
ISBN : 978-2351782293
400 pages

Quatrième de couverture

1895. Le vice règne en maître à Denver, minée par la pauvreté́ et la violence. Sam et Cora, deux jeunes orphelins, s’occupent d’une bande d’enfants abandonnés et défendent farouchement leur “foyer” – une usine désaffectée – face aux clochards des alentours. Lors d’une de leurs attaques, un colosse défiguré́ apporte une aide inespérée aux enfants, au prix de graves blessures que Cora soigne de son mieux. Muet, l’homme-monstre ne communique que par des mots griffonnés sur un carnet. Sam, le seul qui sache lire, se rapproche de lui et se trouve ainsi embarqué dans le monde licencieux des bas-fonds.

Mon avis

Sam a quatorze ans, en 1895, il vit à Denver dans une usine désaffectée où il est installé avec Cora. A eux deux, ils s s’occupent de jeunes orphelins. A cet âge-là, ils seraient mieux dans un foyer, dans une famille d ‘accueil mais la vie ne leur a pas offert cette chance… Alors ils mettent toute leur énergie, toute leur volonté au service de ces petits à qui ils essaient de donner un semblant d’existence équilibrée.

Ils mendient, ils survivent tant bien que mal comme les miséreux qu’ils sont. Ce qui les a amenés ici ? La faute à pas de chance, des parents déficitaires, un mauvais concours de circonstances, une aide ou une main tendue qui ne sont pas venues au bon moment…. Les conditions de vie sont difficiles, les clochards attaquent souvent mais la bande de Sam et Cora a mis au point des stratégies de défense. Et ils ne s’en sortent pas trop mal. Et puis, un jour, une bataille plus violente les met en difficulté et un homme gigantesque intervient et les aide….

Une relation particulière va se nouer avec lui. Il ne peut plus parler, il est blessé, il souffre. Seul Sam sait lire….Il sera le « lien » pour cet homme. En échange, ce dernier les aidera, les protègera en quelque sorte, mais à quel prix ?  Jusqu’où peut-on aller pour rester en vie ? La violence peut-elle être une forme de rédemption ? Que peut tolérer l’homme, que peut-il pardonner ? Guerre de gangs, actions violentes, vies dans les bas -fonds, c’est au plus noir de l’âme humaine que nous emmène Benjamin Whitmer et l’excellent traducteur Jacques Mailhos. Est-ce qu’on peut prendre goût à semer la terreur autour de soi lorsqu’on a le sentiment de s’ériger en justicier ? Que se passe-t-il lorsqu’on tombe dans l’engrenage de l’agressivité avec excès ?

C’est Sam qui raconte et par sa voix, le lecteur entend tous ces laissés pour compte qui ont dû faire des choix qu’ils ne voulaient pas. Avec une écriture au scalpel, où chaque mot vous renvoie à vos propres peurs, l’auteur fait mouche. Il vous tord le ventre, vous fait trembler ou rugir de rage, de colère….Il ne vous laisse que peu de répit. Le style est puissant, c’est noir, terriblement sombre… L’aspect psychologique des personnages est abordé avec doigté, sans pathos, les faits, rien que les faits et c’est ce qui est terrible…L’espoir est si ténu que vous vous demandez si ce mot existe encore…..

Il me laisse à chaque fois le cœur en vrac et c’est pour cela que Benjamin Whitmer est un très grand écrivain. Il rend ses histoires infiniment réalistes, ses protagonistes vous hantent encore longtemps une fois la dernière page tournée et vous savez qu’ils ont laissés une marque au fer rouge dans votre esprit….