Digital Way of Life
Auteur : Estelle Tharreau
Éditions : Taurnada (9 Juin 2022)
ISBN : B0B2KHDCY7
176 pages
Quatrième de couverture
Serons-nous l'esclave de notre assistante de vie connectée ?
Nos traces sur le Net constitueront-elles des preuves à charge ?
La parole et la pensée deviendront-elles pathologiques à l'heure de la
communication concise et fonctionnelle ?
Qu'arrivera-t-il si les algorithmes des moteurs de recherche effaçaient des
pans entiers de notre mémoire collective ?
Mon avis
Ce recueil regroupe dix nouvelles. Toutes ont un même
postulat de départ : extrait d’articles, ou de documents existants, tous
évoquant le numérique. L’auteur a choisi de « pousser » au maximum la
« dérive » de ce qui est présenté et de construire le scénario du
pire pour chaque situation.
Est-ce qu’elle veut nous faire peur ? Nous prévenir des
risques ? Nous alerter afin que nous soyons vigilants ? Chacun verra
et fera son choix…
Je fais une petite parenthèse : lorsque Jules Verne a
rédigé ses romans, beaucoup ont pensé qu’il avait une imagination débordante…
et puis…il avait quand même une sacrée capacité d’anticipation ! Je repense
également au film « Avatar »… le progrès va vite, et parfois l’homme
le maîtrise mal.
Je fais une seconde parenthèse : après son doctorat sur
l’intelligence artificielle et les algorithmes, mon fils a choisi de garder un
téléphone portable basique (sms et appels), de ne pas s’inscrire sur les réseaux
sociaux, de ne prendre que des logiciels libres, et il met en garde tous ceux
qui veulent bien l’écouter sur les dérives du numérique. Il a vu, par ses
recherches, comment ça fonctionne et il ne veut pas être « pisté » et
bien plus encore… Il anime des conférences et ça fait froid dans le dos comme
les écrits d’Estelle…
Tout ça pour dire que la fiction deviendra réalité pour peu
qu’on lui en laisse la place, simplement par négligence ou par peur de dire « non »
et d’être marginalisé (parce que cela aussi peut aller très vite).
Toute cette introduction, sans doute un peu longue, pour dire
que j’ai découvert ces dix courtes histoires tous les sens en alerte. Je ne
parlerai pas de ce qu’elles contiennent en détails mais elles sont vraiment
bien pensées, construites à la perfection et porteuses de sens. Elles nous
parlent de la vie, de ceux qui sont différents, qui ne trouvent pas leur place,
parce qu’ils n’ont pas choisi le numérique à fond par exemple (mon fils est
professeur dans le supérieur et ses étudiants ne comprennent pas qu’il ne
possède pas un smartphone « Mais monsieur, vous rigolez ? ».
Non, il est bien sérieux). Que dire des jeux sur tablette ou en réalité
virtuelle qui isolent (oui, les écoliers sont sages, chacun dans sa bulle, dans
son univers mais la socialisation, les relations humaines ?), que dire du
livre papier qui disparaît, de l’assistant de vie numérique qui vérifie la posture,
les activités (et quelle chute pour cette nouvelle, bravo Estelle !),
que dire de tout cela ? Et on pourrait parler des robots qui font tout,
remplacent le chat, le chien, (avant peut-être de prendre la place du mari (il
y aurait un bouton pour qu’il ne ronfle pas ?)?), des répondeurs :
taper un, taper étoile et toutes nos lignes sont actuellement occupées…
Bref. Je suis en colère ? Non, ces textes m’ont rappelé
ma colère et le fait qu’il faut agir avant qu’il ne soit trop tard, en espérant
que ce n’est pas déjà le cas. Je ne suis pas une vieille réactionnaire, je
reconnais les bienfaits des évolutions scientifiques et je m’en réjouis. Mais
je reste persuadée que l’homme ne doit pas baisser sa garde, encore moins tout
accepter….
L’écriture d’Estelle Tharreau est percutante, elle ne s’embarrasse
pas de fioritures, elle nous balance des faits, nous démontre comment un effet dominos
peut se mettre en place. Un accord sur du numérique en entraîne un autre etc et
jusqu’où le monde pourrait aller. J’ai été scotchée par ses recherches, par sa
capacité à nous captiver, sans faire vraiment la leçon, simplement en énonçant
de futures vérités. J’ai trouvé que le format de textes courts était
parfaitement adapté aux propos. On n’a pas le temps de trop réfléchir, et on prend
en pleine face le désarroi, la peur, les erreurs, ou les certitudes des protagonistes
et ça nous fait forcément réfléchir….
Bravo Estelle !
NB : Pauvre Julien qui pense avoir retrouvé l’amour de
sa fille….