1793 (1793)
Auteur : Niklas Natt och Dag
Traduit du suédois par Rémi Cassaigne
Éditions : Sonatine (4 Avril 2019)
ISBN : 978-2355846960
450 pages
Quatrième de couverture
1793. Le vent
de la Révolution française souffle sur les monarchies du nord. Un an après la
mort du roi Gustav III de Suède, la tension est palpable. C'est dans cette
atmosphère irrespirable que Jean Michael Cardell, un
vétéran de la guerre russo-suédoise, découvre dans un lac de Stockholm le corps mutilé d'un inconnu. L'enquête est
confiée à Cecil Winge. Celui-ci va bientôt devoir
affronter le mal et la corruption qui règnent à tous les échelons de la société
suédoise, pour mettre à jour une sombre et terrible réalité.
Mon avis
« 1793 »
est un livre brut, violent, empli de souffrance mais d’une profondeur sans
pareille. Il a « du souffle », et on y trouve une atmosphère d’époque
épique retraçant des faits sombres, cruels.
Nous sommes à Stockholm,
en Suède, en 1793. Il y a un an que la noblesse a mis au point un complot. En
effet, le 16 mars 1792, au cours du bal masqué de l'opéra royal de Stockholm,
le roi a été assassiné d'un coup de pistolet. Son fils Gustave IV Adolphe (âgé
de treize ans) lui a succédé mais comme il est immature, la lutte pour le
pouvoir est en place. La police, les hommes politiques, les riches seigneurs,
tous veulent commander et tous s’arrogent le droit de faire ce qu’ils veulent
en toute impunité. De là à ce que les « puissants » se permettent de torturer,
tuer sans se poser de questions, en se sentant intouchables, puis appliquer la
loi comme ils l’entendent, il n’y a qu’un pas.
D’ailleurs, ce soir-là,
dans une ville remarquablement campée par l’auteur, un cadavre atrocement
mutilé est découvert dans l’eau d’un lac. En toute discrétion, deux hommes que
tout semble opposer vont récupérer l’enquête. Cecil Winge, un homme de loi, malade,
fatigué mais perspicace, est le premier. Michael Cardell, un ancien soldat, manchot,
est le second. L’un est dans la réflexion, la recherche, le raisonnement, l’autre
est dans l’action, le coup de poing, un brin imprévisible, parfois à la limite
de la folie. Ce duo improbable se complète, s’épaule en quelque sorte. Chacun a
vécu un traumatisme, chacun porte en lui une douleur secrète.
Les voilà tous les deux dans les rues, quelques
fois mal famées, avec des rencontres qui s’avèrent compliquées mais ils ne
lâchent rien, pugnaces, entêtés, comme si cette enquête était l’affaire de leur
vie, à résoudre absolument. Certaines scènes sont difficiles, presque
insoutenables et resteront gravées longtemps dans la mémoire du lecteur. Mais c’est
aussi ce qui fait la force de cet opus. Il a du répondant ! On sent bien que les deux limiers dérangent,
que leurs questions ne sont pas forcément les bienvenues mais ils restent droits
dans leurs bottes, coriaces.
Le style de l’auteur
est magistral, son écriture puissante et de qualité. Quant à la traduction, je
la pense excellente car rien ne m’a choquée tant dans le phrasé que le choix du
vocabulaire.
Niklas Natt och Dag a réussi un tour de force avec ce
recueil. Il a dû beaucoup se documenter pour donner une forte crédibilité à son
récit. Dans les premières pages, il y a une carte magnifique pour situer les
lieux, puis le contexte historique : lieux, situations, vêtements, conditions
de vie (notamment pour les plus pauvres : brrrr), tout est parfaitement
décrit, représenté. Mêlant habilement des événements fictifs dans un contexte
ayant existé, il nous fait voyager dans le temps et l’espace avec intelligence.
Le recueil est constitué de quatre parties (dont certaines
sont des retours dans le passé) qui se « répondent » et s’imbriquent
à la manière d’un puzzle même si la dernière représente en quelque sorte « la
clé de voute », écho de la première, expliquant tout ce qui a été tu ou
qui nous a échappé dans les pages précédentes.
« 1793 » est une lecture dure, exigeante, qui
secoue, mais tellement marquante que je ne la regrette en rien.
NB : La postface de l’auteur apporte un plus indéniable.
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