Le cimetière de la mer (Havets kirkegård)
Auteur : Aslak Nore
Traduit du norvégien par Loup-Maëlle Besançon
Éditions : Le bruit du monde (2 Février 2023)
ISBN : 978-2493206237
514 pages
Quatrième de couverture
La famille Falck compte parmi les plus puissantes de
Norvège. Le suicide de Vera Lind, la matriarche de la lignée, pourrait
toutefois entraîner l'effondrement de leur empire : elle laisse derrière elle
un testament disparu et convoité, ainsi que de nombreux mystères. Comme celui
qui entoure la fin de sa carrière d'écrivaine à succès. Sasha,
sa petite-fille, part alors à la recherche du dernier manuscrit de sa
grand-mère, resté inédit, au sein duquel celle-ci aurait raconté le naufrage
d'un express côtier qui a sombré pendant la seconde guerre mondiale, entraînant
avec lui les secrets de sa jeunesse.
Mon avis
« Le cimetière de la mer » est un excellent roman
et je comprends qu’il ait été traduit dans de nombreux pays. Il offre une
approche sociale, une saga familiale et une enquête. Les événements se
déroulent principalement en Norvège où une riche famille (on a un arbre
généalogique en fin de livre) est à la tête d’une société importante, la
fondation SAGA. Il y a Vera la grand-mère, Olav son fils, et les trois enfants
de ce dernier dont une fille qui est mariée et mère de famille. Vera et Olav ont
échappé, lorsqu’il était bébé, à un naufrage, pendant la seconde guerre
mondiale, où l’époux (et père) a disparu. Un traumatisme important pour la
jeune femme de l’époque. Elle n’a jamais réussi à en parler aux siens car c’était
trop difficile.
Un jour, Vera se suicide, personne ne comprend son geste.
Son testament a disparu et tout le monde s’interroge. Les tensions avec les
descendants « non directs » s’installent. Apparemment, l’aïeule
aurait laissé un manuscrit (elle était écrivain mais avait arrêté depuis
longtemps) à son éditeur. Un texte dans lequel elle présenterait des « vérités »
soigneusement cachées et tues depuis des années. Elle-même était dans l’obligation
de ne rien dire …. Sasha, sa
petite-fille, responsable des archives de la fondation, veut comprendre son
geste, connaître son histoire. Elle est troublée par l’attitude de son père, Olav
et par quelques décisions qu’il a prises et dont elle prend connaissance. Elle
décide de mener l’enquête et de retrouver l’écrit de sa Mamie. Elle va être
aidée par un homme qui réalise des interviews mais qui a été également lié à
certains actes au Moyen-Orient.
Mêlant habilement secrets de famille, politique ainsi que faits
de société, ce récit est prenant et une fois commencé difficile de le lâcher.
La mise en abyme du texte testamentaire de la grand-mère est parfaitement intégrée
à l’histoire. De nombreuses personnes ont des choses à cacher, et se protègent
des investigations de Sasha. Certains penseront qu’il n’est jamais bon de
remuer le passé mais a-t-on le droit de construire sa vie sur des bases
faussées ? Je comprends Sasha qui veut savoir, quitte à remettre en cause ses
certitudes, à ne pas faire confiance à ses proches, à être obligée de se mettre
en porte-à-faux avec sa famille.
Il est toujours dangereux de sortir « les cadavres des
placards », mais c’est à ce prix-là que la paix peut revenir dans l’esprit
de Sasha. J’ai admiré sa ténacité, son amour pour cette grand-mère qui la porte
afin d’avoir des explications sur sa vie, ses choix, ce qu’elle a voulu, ce qu’elle
a subi. Plus le lecteur avance dans les chapitres, plus il découvre ce qui a
été dissimulé et les ramifications sont nombreuses, notamment dans le passé, avec
le gouvernement ou autre. Ces gens étaient-ils aussi honnêtes qu’ils voulaient
le faire croire ?
Aslak Nore est journaliste (il l’a été dans les forces norvégiennes en Afghanistan et les
forces américaines en Irak), éditeur, écrivain… C’est sans doute un homme qui a
énormément d’expérience ce qui explique un recueil bien construit, foisonnant,
complet, intéressant et captivant. Son écriture (merci à la traductrice qui a
un bien joli prénom) est puissante, elle porte à la fois un souffle romanesque
et une excellente observation des relations humaines tant professionnelles que
personnelles. L’atmosphère est norvégienne, il fait froid, les individus ne se
confient pas facilement et les paysages sont dépouillés. Les protagonistes sont bien détaillés, ils ont
souvent une part d’ombre et ne sont pas sereins. Ce récit reprend l’histoire
des Falck sur plus de cinquante ans et on peut observer l’évolution de certains
membres. Les pages s’enchaînent toutes seules, sans temps mort, les révélations
distillées ça et là maintenant notre intérêt jusqu’à la fin.
Une lecture comme je les aime, avec de la profondeur et un
déroulé sur plusieurs générations.
NB: et une couverture magnifique !
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