"Danser au bord de l'abîme" de Grégoire Delacourt


Danser au bord de l'abîme
Auteur : Grégoire Delacourt
Éditions ; Jean-Claude Lattès (2 Janvier 2017)
ISBN : 978-2709659567
366 pages
  
Quatrième de couverture

Emma, quarante ans, mariée, trois enfants, heureuse, croise le regard d’un homme dans une brasserie. Aussitôt, elle sait.

Mon avis

« Les mots qu’on ne dit pas sont ceux qui font le plus mal. » *

Emma a tout pour être heureuse : un mari, de beaux enfants, une maison alors que demander de plus ? La logique voudrait qu’on réponde « Et bien que ça continue… » Sauf que la vie ne répond à aucune logique et les émotions encore moins…. Et, un jour, sans s’y attendre, sans le chercher, sans le vouloir, Emma se retrouve avec des papillons dans le ventre. Pas ceux que l’on sent, comme ça, au hasard d’une rencontre (tiens, cet homme, j’en aurais bien fait mon quatre heures ;-), et qu’on oublie en rentrant chez soi…Non, pas ceux là…Ce sont les autres, vous savez, ceux, impérieux, qui en plus d’envahir votre ventre, vous mettent le cœur en vrac, vous tourneboulent le cerveau à tel point que vous ne savez plus où vous habitez, que vous êtes prête à faire tout et n’importe quoi (surtout n’importe quoi d’ailleurs). Vous ne vous reconnaissez plus, les autres vous regardent étonnés se demandant ce qu’il vous arrive… Et vous ne dites rien, parce qu’en parler c’est comme « abîmer » ce qui existe sans exister, cette envie absolue de tout envoyer en l’air et de partir pour tenter l’aventure…..  Non, pas tenter l’aventure, ce n’est pas si léger, c’est déjà une certitude, cette fois, tout est différent, et vouloir vivre ce balbutiement, c’est vital, nécessaire pour continuer de respirer….  Voici ce qui arrive à Emma, et elle n’avait ni prévu, ni anticipé une situation pareille…. Pourquoi d’ailleurs, puisque son quotidien était bien réglé ?

Ce roman va se décliner en trois parties où nous allons suivre Emma, puisque c’est elle qui s’exprime à la première personne. L’auteur, qui est un homme, a parfaitement su retranscrire les émois, les questions, les angoisses, les doutes, les peurs mais aussi cet élan qui emporte Emma dans un tourbillon, ce compte à rebours qui s’installe avant les décisions qu’il faut prendre…..

Elle va être confrontée aux regards des autres, à celui de  son mari, de ses enfants, de sa mère avec qui un contentieux est déjà en place. C’est douloureux, terrifiant… Est-ce qu’elle va lutter, passer outre les commentaires des uns et des autres ? Vivre ce qui se dessine à l’horizon ou pas ?
« Faut-il vivre les choses alors qu’il est aussi beau de seulement les rêver ? »
Faut-il prendre le risque de quitter ceux qu’on aime (et surtout qui nous aiment) et devenir pour eux une inconnue ?  Mais laisser passer une espérance ? Qu’est-ce qui est le plus déraisonnable ? Et est-il utile d’analyser, de chercher à comprendre ?

Lorsque Emma s’exprime, s’explique par l’intermédiaire de Grégoire Delacourt, elle le fait avec des termes de femme, qui parlent directement au cœur. En quelques pages, parfois deux ou trois paragraphes ou quelques lignes voire peu de mots , son trouble est palpable, présent.

C’est une lecture que j’ai beaucoup aimée. Il m’a semblé que la deuxième partie avait quelques longueurs mais rien de pénible à lire. J’ai apprécié le ton employé, tout ce que l’on peut lire entre les lignes, tout ce qui habite cette femme face à ses choix, face à l’indicible …. J’ai trouvé que le rapprochement avec la chèvre de Monsieur Seguin était une bonne idée (en plus elle est là sur la couverture…) pour nous rappeler la lutte intérieure d’Emma….  L’auteur a su prendre en lui tout ce qui envahit cette femme pour le faire vivre sous sa plume de fort belle manière…..

Page 297

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