"Que le spectacle commence" de Ann Featherstone (Walking in Pimlico)

 

Que le spectacle commence (Walking in Pimlico)
Auteur : Ann Featherstone
Traduit de l’anglais par Carine Chichereau
Éditions : 10/18 (21 avril 2011)
ISBN : 9782264050816
380 pages 

Quatrième de couverture

Dans le monde du spectacle, les apparences sont reines et les secrets mortels. Et s’il y a bien un rôle que l’amuseur public Corney Sage aurait préféré ne pas endosser, c’est être témoin du meurtre de la jeune actrice Bessie Spooner ! Le Constellation Concert Rooms devra se passer de ses services, il préfère prendre la fuite. Mais sous ses nombreux déguisements, l’assassin rôde et se rapproche...

Mon avis 

C’est un roman à plusieurs voix, très bien construit que j’ai découvert et apprécié.
Vingt et un chapitres, trois cent quatre-vingts pages et pas d’ennui, ni de lassitude.
Je suis loin d’être une « aficionado » des polars victoriens, malgré tout celui-ci m’a conquise.

Reste à vous expliquer pourquoi …

Lorsque je l’ai commencé, j’ai pensé que ça n’allait pas bien me plaire. La raison en est simple. Dans le premier chapitre, c’est Corney Sage qui s’exprime, Corney et sa gouaille, Corney et sa familiarité : « C’était pas plein, mais y avait quand même du beau linge. Et ils faisaient un sacré ramdam parce que les richards, ça sait pas boire. ».

J’étais persuadée que j’allais me lasser de cette façon de s’exprimer, qui peut être amusante mais pas si cela dure trop longtemps …

Ann Featherstone a dû penser la même chose que moi et c’est là qu’elle a fait preuve de subtilité.

Corney Sage ne tiendra pas « le crachoir » pendant tout le roman.

D’autres personnages vont s’exprimer et le langage sera différent.

Chaque chapitre va donc avoir comme sous titre le nom de la personne qui parle (le livre est écrit à la première personne « je ») et le lieu où elle se trouve.

On se repère très facilement, on passe de l’un à l’autre, d’un type de vocabulaire à l’autre sans aucun problème.

L’histoire est originale par plusieurs aspects.

D’abord le milieu où elle se déroule et on ne peut que constater que l’auteur sait de quoi elle parle, qu’elle est remarquablement documentée et qu’elle nous transmet ses connaissances «sans trop en faire », ce qui est agréable. On aborde ainsi un milieu nouveau et on se cultive tout en passant un bon moment de lecture.

Il y a ensuite, l’intrigue en elle-même, non seulement, le fait de donner la parole aux uns et aux autres mais aussi la complexité de chaque personnage.

On peut être balloté d’une impression à un autre, tout en restant dans le domaine du crédible.

Enfin, il y a Londres ….

Je suis tombée sous le charme de cette capitale il y a de nombreuses années et c’est un lieu que j’affectionne particulièrement et où je me rends régulièrement. « Voir » cette ville à une autre époque, avec d’autres yeux m’a permis de connaître des quartiers (à l’époque) sordides, de mauvaise réputation où la violence, l’alcool etc sont présents mais aussi l’amitié, l’entraide et une certaine forme de respect.

J’ai apprécié le personnage de Corney Sage, on pourrait dire « Corney le Sage » qui, sous des dehors parfois insolents et superficiels, est un homme attachant, qui se connaît bien. Pas plus courageux que ça, pas plus fou non plus, il est conscient de ses faiblesses, d’un certain manque de courage mais l’assume. Par contre, il est capable d’être présent pour ses amis si le besoin s’en fait sentir.

L’assassin, personnage complexe, dont je ne dirai rien, est particulièrement bien pensé.

Avec lui, l’auteur nous emmènera dans les méandres d’un esprit tortueux, parfois torturé, passant d’une situation à l’autre, avec des choix et des pulsions qui démontrent qu’une fois qu’on a mis le doigt dans l’engrenage du mensonge, de la trahison, il est difficile de s’arrêter …

Les personnages secondaires, sont, eux aussi, bien « brossés », que ce soit pour leur physique ou leur caractère.

L’écriture de Ann Featherstone doit être assez « visuelle » et précise car j’ai très bien imaginé les décors, les scènes, les lieux évoqués, pourtant, je n’ai jamais eu l’impression de lire des descriptions à n’en plus finir.

D’autre part, elle manie la plume avec dextérité, passant d’une langue châtiée à une autre beaucoup plus ordinaire, sans jamais se tromper, tout en glissant des références de qualité sur l’époque qu’elle a étudiée et qu’elle connaît bien.

En résumé, une découverte de qualité et un très bon moment de lecture.


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