Tout faux (Niente di vero)
Auteur : Veronica Raimo
Traduit de l’italien par Audrey Richaud
Éditions : Liana Levi (23 mars 2023)
ISBN : 979-1034907458
210 pages
Quatrième de couverture
Un père obsessionnel toujours prêt à dégainer de grands principes
et un flacon d’alcool pour désinfecter tout et tout le monde, une mère anxieuse
qui appelle jour et nuit sa progéniture pour se rassurer, une grand-mère qui se
pare de ses plus beaux atours pour regarder la télévision. La famille de
Veronica, la narratrice, est résolument hors norme. Comment s’étonner alors que
Veronica, née au milieu de ce paysage déroutant où l’ennui règne en maître, ne
parvienne pas à devenir adulte, allant jusqu’à douter de ce qui lui arrive et à
croire ce qu’elle invente.
Mon avis
J’écris des choses ambiguës et frustrantes
Lorsqu’on demande à l’auteur si ce livre est une
autobiographie, elle explique que la mémoire va chercher des souvenirs qui sont
forcément soumis à interprétation. Pour elle, il ne peut pas exister une seule réalité.
Pas d’intrigue, pas de récit linéaire et pourtant un plaisir
de lecture très agréable. L’auteur nous embarque dans l’histoire d’une vie,
celle de Veronica (toute ressemblance avec etc etc ;- ) Ce n’est pas
linéaire, mais les différents « épisodes » peuvent être reliés par
une même thématique : la relation à la mère, le sexe …
Ces tranches de vie sont écrites et décrites avec humour et
ironie, c’est grinçant, désopilant. Veronica vit dans une drôle de famille, sa
mère est surprotectrice, son père a des idées bien à lui sur l’hygiène, son
grand-père l’appelle gros cafard. Elle grandit dans un petit appartement où
portes et cloisons vont et viennent. Avec son frère, elle espionne le monde
extérieur par les fenêtres diminuées de moitié. Alors elle invente pour elle et
pour ceux qu’elle côtoie, d’autres quotidiens, d’autres envies, d’autres
occupations et tout se mélange. Ce qu’il se passe réellement, ce qu’elle
souhaite ardemment pour pimenter la morosité et la répétition des évènements.
C’est gai, subtil, généreux. Le ton est âpre mais sans
animosité. On voit Veronica se lâcher, s’émanciper, faire ses propres choix,
être confronté au deuil et à la perte de l’amitié. Parfois, on la sent fuyante
quand les questions la dérangent, comme si se confier, c’était perdre une
partie de son identité. Sa famille tient une grande place, peut-être trop
d’ailleurs, alors il est nécessaire de s’affranchir, de grandir et de prendre
les rênes en main.
Le lecteur se doute bien que tout ça a, une part de faux et
une part de vrai mais en quel pourcentage ? Le mensonge (comme le fait de
souffrir d’une maladie pour expliquer une non réponse ou un retard) est-il une
pirouette ou une façon de taire une vérité dérangeante ? Et ces exemples
sont-ils issus de l’imagination de Veronica Raimo ou de ce qu’elle vit ?
La mémoire joue des tours et c’est tant mieux, ai-je envie d’écrire, cela offre
de la fantaisie, la possibilité de « retourner » les passages plus
difficiles, plus douloureux que l’on veut oublier et ainsi en créer d’autres.
Je ne sais pas si la traductrice a ri en mettant ce texte en
français. Ce qui est certain, c’est qu’elle a certainement réussi à en garder
le fait que l’auteur ne se prenne pas au sérieux, qu’elle nous transmette une
vue sur une famille italienne hors norme. Chaque individu a ses névroses (même
Veronica) mais elles ne sont pas analysées sur un plan psychologique ce qui
aurait alourdi le propos, elles sont presque tournées en dérision et cela
permet de prendre du recul.
C’est une lecture qui m’a beaucoup plu. J’ai souri le plus
souvent, j’imaginais les scènes (notamment le logement), les dialogues où
l’interlocuteur devait se demander si c’était la vérité, je me disais :
mais où va-t-elle chercher tout ça ?
Je conclurai avec ces quelques mots extraits du roman :
« Et c’est comme ça que je me sens, à chaque minute mon existence : mais oui, allez, on va dire que c’est moi. »
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