Foucault à Varsovie (Foucault w Warszawie)
Auteur : Remigiusz Ryziński
Traduit du polonais par Margot Carlier
Éditions Globe (1er Février 2024)
ISBN : 978-2383612452
338 pages
Quatrième de couverture
En 1958, Michel Foucault arrive en Pologne. Il vient d’être
nommé directeur du Centre de civilisation française de l’université de Varsovie
et doit terminer sa thèse que le public découvrira plus tard sous le titre
d’Histoire de la folie à l’âge classique. Son séjour est pourtant écourté :
l’année suivante, il est contraint de quitter brusquement le pays pour éviter
un scandale diplomatique lié à son homosexualité. En fouillant les archives et
en recueillant les récits des témoins de l’époque, Remigiusz Ryziński tire le
fil de cette opération de décrédibilisation et rejoue une période effacée de la
vie de Michel Foucault
Mon avis
En s’appuyant sur le séjour d’un an de Michel Foucault à
Varsovie, l’auteur aborde la question de l’homosexualité en Pologne. En effet,
en 1958, Foucault a été nommé directeur du Centre de civilisation française de
l’université de Varsovie. Il y terminera sa thèse intitulée « Histoire de
la folie » dont quelques citations sont mises en exergue dans ce livre. Il
ne restera qu’un an car on lui demandera de quitter le pays. La raison
officielle étant « une conduite immorale ».
Foucault était homosexuel et « dérangeait ».
Pourtant, d’autres hommes, dont Cocteau, l’était également et ne posait pas
problème. Alors pourquoi lui, contrairement aux autres, était un souci ?
Mais revenons à ce séjour polonais. Lorsqu’il a voulu écrire
ce livre, Remigiusz Ryziński a fait des recherches et il s’est heurté à un mur.
Comme si Foucault n’était jamais venu, aucune trace, pas de photos, rien dans
les archives. Avait-on voulu l’effacer, le faire disparaître ? Pourtant il
savait qu’il y avait des documents. Alors, il a rusé (je laisse les futurs
lecteurs découvrir comment) et a eu accès à quelques écrits parlant de cette
année.
Des dossiers (des années 60) sont apparus, une période où
les homosexuels étaient fichés, suivis à la trace. À partir de ce moment-là,
ils ont « existé » et …. certains ne souhaitaient pas leur présence.
« Exactement, comme dans la théorie de Foucault :
seule la chose décrite existe pleinement. »
Foucault était un homme bon, agréable, à l’écoute des
autres. Facile à vivre et plaisant, essayant de ne pas faire parler de lui. D’ailleurs,
peu de ceux qui l’ont connu, témoignent de ce qu’ils ont vécu ensemble ou de
son passage. Foucault sert de fil conducteur à ce livre mais bien d’autres
sujets sont abordés. C’est tout le cheminement pour faire accepter l’homosexualité
qui est présenté. Obligés de se cacher dans des toilettes, se sachant
surveillés, suivis à la trace, les gays (on ne parle que du côté hommes dans ce
recueil) se faisaient oublier pour se noyer au milieu des autres. Mais quelle
route difficile ! Vers 1980 (soit vingt ans après Foucault), l’opération
Jacinthe (Hyacinthe) a été menée pour créer une base de données sur les « homos ».
Quelle horreur ! Comment de tels écrits peuvent-ils exister ? Bien
sûr, on ne les retrouve pas…. Bizarre non ?
J’ai trouvé ce livre très intéressant et édifiant, voire
fascinant. L’écriture (merci à la traductrice) est précise, prenante. Chaque
fait est bien situé dans l’époque, le contexte. On relie les différents
événements pour avoir une approche sociétale du quotidien de l’époque. Avec le
peu qu’il a obtenu comme renseignements, l’auteur émet des hypothèses, recoupe
ce qu’il a appris, essaie d’avancer dans la connaissance des liens, des relations
que ces hommes entretenaient.
Le gouvernement était plus que dur avec ces hommes. Avec quelques indices, quelques conversations, Remigiusz Ryziński construit un livre avec des bases solides, sur lesquelles il s’appuie pour extrapoler ce qu’il ne sait pas. C’est très bien fait et surtout captivant.
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