"Kaddish et autres poèmes" d'Allen Ginsberg (Kaddish and Other Poems)

Kaddish et autres poèmes (Kaddish and Other Poems)
1958-1960
Auteur : Allen Ginsberg
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Nicolas Richard
Éditions : Globe (8 Février 2024) Nouvelle traduction
ISBN : 978-2267050349
240 pages

Quatrième de couverture

À 30 ans, Allen Ginsberg apprend la mort de sa mère, Naomi, confrontée depuis longtemps à la maladie mentale. Affecté en mission sur un bateau, il ne pourra pas assister à son enterrement. Il lui faudra trois années pour achever le poème qu’il lui a dédié. Second recueil poétique de Ginsberg paru en 1961 en anglais, comportant un long poème narratif et une quinzaine d’autres courts poèmes – nombre d’entre eux ayant été écrits sous influence –, Kaddish est l’une des œuvres marquantes de l’univers sulfureux de la Beat Generation.

Mon avis

Allen Ginsberg (1926-1975) est un poète américain. Il était membre de la Beat Generation, un mouvement littéraire aux Etats-Unis où les artistes se « libèrent », « osent » ce qui a donné lieu à divers scandales. C’était un homme atypique, aimant le jazz et la pop, hindouiste et bouddhiste, moderne, pacifiste et dérangeant dans ces premiers écrits, très crus.

Kaddish (une référence à la prière des morts chez les juifs), c’est un long poème narratif, écrit sous l’influence des amphétamines. Il y pose des réflexions sur le parcours et la mort de sa mère (Naomi). Elle a lutté toute sa vie contre des problèmes mentaux et a essayé divers traitements avant de mourir dans un asile.

Dans ce long texte, les pensées se bousculent, les mots arrivent à flots, racontant le quotidien de cette femme, vu par son fils, ses peurs à l’hôpital, leurs échanges, sa détresse à lui, l’attitude des uns et des autres face aux désordres mentaux de Naomi. Il a sans doute aimé sa génitrice, elle a aimé, à sa façon, son enfant. Avec maladresse, avec tendresse, avec une pointe de folie, des erreurs, mais qui n’en commet pas ? Il partage énormément de choses, très intimes, va-t-il trop loin ? Rédiger Kaddish a été un long chemin. Il en avait sans doute besoin puisqu’il n’était pas là lorsque sa mère est décédée.

Allen laisse les souvenirs venir à lui, ce n’est donc pas structuré, linéaire mais c’est vraiment comme dans notre esprit, une suite de « flashs » qui s’imposent, se mêlent, se superposent, l’un entraînant l’autre. Il les couche sur le papier. Hymne, ode, poésie, les mots voltigent, s’envolent, murmurent ou hurlent … Il parle de la vie de sa maman mais aussi de son ressenti, de ses émotions face à la mort (dont la sienne). La religion est évoquée, les questionnements face au sens de la vie, à ce qu’on veut mettre dans ses activités, ses choix.

Ce sont souvent des phrases de deux lignes avant d’en écrire une nouvelle, aussi longue. Quelques fois, un mot en retrait, certains sont répétés. L’auteur veut-il les imprimer en nous ? Il a écrit un poème fusée comme un message envoyé dans l’au-delà dont il se demande s’il sera compris ici sur terre ou là-bas.

Les autres poésies sont plus courtes, assez personnelles. Il se livre sans concession, il écorche les bien-pensants, les personnes trop lisses, l’Amérique. « Inutile d’écrire quand l’esprit ne guide pas », il a eu parfois recours à de stimulants pour sortir ce qui bouillonnait en lui ….

À la fin du recueil, les mêmes textes en version originale. Et, entre les deux, la vie de Naomi avec quelques photographies en noir et blanc. On y découvre une femme troublante, qui a sans doute chercher à exister dans un monde où il lui était difficile de trouver sa place,  d’être elle-même. La genèse de Kaddish est présente aussi dans cet ouvrage.

La poésie m’a toujours « parlée », elle me bouscule, elle m’émeut, elle me fait rêver, elle me procure de nombreuses émotions. J’aime que l’on joue avec les mots, qu’on les agence pour une mélodie qui me surprendra par différentes tonalités. C’est le cas avec ce recueil. Je ne connaissais pas Allen Ginsberg et je suis heureuse de cette « rencontre ».

 

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