Jeanne Loviton et Robert Denoël
Deux amants dans la tourmente
Auteur : Tony Jagu
Éditions : Passion du livre (20 Juillet 2019)
ISBN : 9791097531362
158 pages
Quatrième de couverture
Après de brèves carrières d’avocate, de journaliste, puis de
femme de lettres, Jeanne s’était lancée dans l’édition à la mort de son père.
Tandis qu’elle entretenait les mondanités, les invitations, les soupirants et
les rencontres de journalistes et d’écrivains, Robert Denoël dépensait une
énergie folle à son métier d’éditeur, sans grandes illusions sur ses relations
amoureuses.
Mon avis
Talent de chef d’entreprise et physique de séducteur, qui
était Robert Denoël ? Il a été reproché à l’éditeur d’avoir publié le
sulfureux Louis-Ferdinand Céline au nez et à la barbe des éditions Gallimard,
qui, elles, l’avaient rejeté. Cela est-il suffisant pour expliquer son assassinat,
le 2 Décembre 1945, mis sur le compte d’un rôdeur ? Il avait douze mille
francs en liquide, restés dans sa poche, et des documents, assez compromettants
(notamment sur ses finances) qui eux, ont disparu. Bizarre … Les conditions troubles
de cette mort et l’enquête peu approfondie qui a pourtant duré longtemps ont
entraîné de nombreuses interrogations.
Repartons un peu en arrière. A l’automne 1942, Robert Denoël
tombe fou amoureux de Jeanne Loviton. Se sachant décrié, menacé par le comité d’épuration
(pour ces choix de publication), il envisage, à la fin de la guerre, de lui céder
ses parts pour continuer à diriger dans l’ombre sans être critiqué ouvertement.
Sa mort permet à Jeanne de montrer le certificat de cession et malgré de
nombreux procès, la femme légitime, Cécile Denoël ne récupère rien… Jeanne, maîtresse
de l’éditeur, avocate et écrivain, est considérée comme une croqueuse d’hommes (et
de femmes) aux dents longues… Elle sait ce qu’elle veut et ne lâche rien jusqu’à
l’obtenir…. A-t-elle comploté ? La mort de Robert Desnoël est-elle un crime passionnel,
un coup monté, le résultat d’un mauvais concours de circonstances ?
C’est en se plongeant dans les archives (retrouvées aux
Etats-Unis) de cette histoire et de nombreux autres documents que Tony Jagu s’est
lancé dans l’écriture de cette biographie. Ses recherches mises en forme
donnent un livre intéressant, abouti. C’est même captivant, certainement pour
plusieurs raisons. L’une est la période évoquée : avant et pendant la
seconde guerre mondiale avec tout ce qui est lié à la politique, à l’antisémitisme,
l’occupation, les jalousies, les rivalités entre éditeurs (Les liens que les
maisons établissent non rien de cordiaux et chacun vise le profit au maximum. Denoël
et Gallimard sont en « guerre » depuis 1929…) ainsi que les
accusations de collaboration contre Denoël qui se savait menacé d’un procès (il
préparait sa défense avec Jeanne). Une autre raison, et pas des moindres, est
la personnalité complexe de Jeanne Loviton. Elle consacre toute son énergie à
se hisser vers le cercle des élites, à avancer encore et toujours. Elle se sert
de ses charmes, de son charisme comme autant « d’outils » qu’elle met
au service de son but… Le lecteur ne peut qu’être fasciné par le caractère, l’attitude
de cette femme qui fait preuve de ressources insoupçonnées. Il y a également le
contexte historique bien présenté et mis en lien avec les événements présentés
et qui explique certaines réactions de ceux dont on parle.
Le sujet traité dans ce recueil et l’écriture de l’auteur
sont addictifs. On rentre dans ce récit et la soif de découverte va en augmentant.
Les faits se succèdent, les analyses sont approfondies et le regard est acéré.
Tout est décortiqué, avec intelligence, sans jugement, en ouvrant sur de
nombreuses possibilités et de multiples débats. Où se cache la vérité ?
J’ai beaucoup aimé ce livre qui m’a permis de connaître l’histoire
des Denoël et puisque Jeanne Loviton était écrivain, pourquoi ne pas se pencher
sur ses écrits ?
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