"Bête noire" d'Anthony Neil Smith (Hogdoggin')


Bête noire (Hogdoggin')
Auteur : Anthony Neil Smith
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Fabrice Pointeau
Éditions : Sonatine (12 Septembre 2019)
ISBN : 9782355847349
400 pages

Quatrième de couverture

L’agent du FBI Franklin Rome a juré la perte de Billy Lafitte, ex-shérif adjoint dans le Minnesota. À n’importe quel prix. Il est vrai que, pour un homme de loi, l’existence de Billy ressemble à une insulte perpétuelle. Celui-ci a en effet à peu près tous les vices imaginables. Aussi, après quelques tracas avec sa hiérarchie, Billy a-t-il quitté les forces de l’ordre pour entrer dans un groupe de bikers, comme on entre en religion. Là, sous les ordres de l’impitoyable Steel God, il peut enfin mener une existence à peu près tranquille. Mais s’il pense avoir tiré un trait sur son passé, celui-ci le rattrape lorsque l’agent Rome décide de s’en prendre à son ex-femme et à ses enfants.

Mon avis

Décapant !

Les feux d’artifice, vous connaissez ? Et bien dans ce roman d’Anthony Neil Smith, c’est un peu ça : le bruit, les explosions, les couleurs, les cris, l’odeur de poudre … mais pas pour les mêmes raisons.
A la toute fin du titre précédent, on avait laissé Billy Lafitte assez mal en point. On le retrouve copain comme cochon avec une bande de gros bras (il s’est d’ailleurs musclé à leurs côtés), des bikers. Ex-shérif adjoint, il pourrait, il devrait (ce serait mieux pour lui), se faire oublier…Un agent fédéral, Rome a décidé de le coincer et de l’évincer définitivement histoire de nettoyer le coin. Il faut donc faire sortir Lafitte du bois, ou plutôt des gros cubes. Mais comment l’appâter ? Son talon d’Achille, c’est ses gosses et son ex-femme … Et effectivement ça fonctionne. Billy quitte le gang et part pour se rendre compte par lui-même de ce qu’il se passe réellement…. Enfin, disons que c’est ce qu’il souhaite. Mais sur le terrain, les choses sont plus compliquées qu’une simple balade « motocyclée ». Cet homme a l’art d’attirer les emmerdes et une fois de plus, il n’y coupe pas…. Et là, c’est un festival qui commence, ça boit, ça dit des grossièretés, ça canarde, ça se lâche, ça triche, ça vit à cent à l’heure (même plus, je vous l’assure) etc. Le lecteur en prend plein les yeux, les oreilles, le nez, la peau … On voit les scènes, parfois violentes, comme si on y était, on renifle la poudre, la peinture, le sang (et son goût métallique nous envahit la bouche), les tympans souffrent en entendant les cris, les coups de feu, les pétarades, on ressent les blessures … on est pratiquement aussi lessivé que les personnages…Pas une seconde de répit….et comme ça se passe aux Etats-Unis, tout est un peu démesuré.

Il n’est pas vraiment mauvais Billy, il se trompe, il ne fait pas les bons choix, il réagit au quart de tour au lieu de réfléchir et il a la main et le pied lestes avec ou sans pistolet.  Il est attachant car on sent, même s’il faut gratter beaucoup, qu’il a un bon fond. Les personnages qui gravitent autour de lui sont tous hauts en couleur, pas toujours nets, hâbleurs, assez rudimentaires, hypocrites, manipulateurs et tous bigrement intéressants. Je ne sais pas comment l’auteur s’y prend mais, en peu de mots, il leur donne de la consistance. Les femmes ne sont pas faibles, ni effacées, elles n’ont rien à envier aux hommes et je pense qu’il vaut mieux ne pas les croiser quand elles sont énervées.

Anthony Neil Smith et son fidèle traducteur, Fabrice Pointeau, s’en donnent à cœur joie pour jouer avec les mots, les émotions, les ressentis afin d’impliquer le lecteur. La tension est palpable dans ce récit mais une ironie mordante, un humour décoiffant permettent de relâcher … un peu … car chaque fois, ça repart très vite, comme une fusée de feu d’artifice. Pas le temps de souffler ! Rythme et phrasé sont en phase : addictifs, vifs, efficaces.

Même si ce roman peut être lu indépendamment, il me semble préférable d’avoir découvert le premier pour mieux le comprendre. En effet, l’auteur approfondit la connaissance de certains protagonistes, notamment Rome et sa femme, Nate et sa compagne, et lire « dans l’ordre » permet de découvrir l’évolution des uns et des autres.

S’il me faut toujours quelques pages pour reprendre contact avec le style percutant d’Anthony Neil Smith, une fois plongée dans le récit, je suis à fond dans l’intrigue. C’est totalement dépaysant et le côté « brut de décoffrage » ne me dérange pas, sans doute parce que je sens entre les lignes, un peu de tendresse chez tous ces écorchés vifs.




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