Minuit à Atlanta (Midnight Atlanta)
Auteur : Thomas Mullen
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Pierre Blondil
Éditions : Payot & Rivages (5 Mai 2021)
ISBN : 978-2743653064
496 pages
Quatrième de couverture
Atlanta, 1956. L’ex-agent de police Tommy Smith a
démissionné pour rejoindre le principal journal noir de la capitale en tant que
reporter. Mais alors que l’Atlanta Daily Times couvre le boycott organisé par
Rosa Parks à Montgomery, son directeur est retrouvé mort dans son bureau. FBI,
flics racistes, agents Pinkerton : beaucoup de monde semble s’intéresser d’un
peu trop près à cette affaire.
Mon avis
Après avoir lu Darktown et Temps noirs du même auteur, j’attendais
avec impatience de découvrir ce nouveau roman qui allait me permettre de retrouver
des personnages connus dans un contexte historique bouillonnant aux Etats-Unis.
Nous sommes en 1956, les policiers à peau noire dérangent toujours autant. Les
lois Jim Crow qui ont introduit la ségrégation dans les services publics, les lieux
de rassemblement etc, sont toujours bien présentes. Mais l’Arrêt Brown est
arrivé et il est considéré comme une étape décisive du mouvement américain des
droits civiques pour obtenir l'égalité citoyenne des Afro-Américains. Une
avancée qui n’est pas du goût de tout le monde (surtout des blancs …), on s’en
rend vite compte en lisant ce roman….
Thomas Mullen tisse son récit avec des personnages fictifs évoluant
dans une période historique qu’il a soigneusement étudiée. Cela représente sans
aucun doute une somme de travail colossal, c’est impressionnant ! On croise çà
et là des événements réels et toute son histoire sonne vraie. C’est ce que j’apprécie
par-dessus tout dans ses écrits. On a vraiment l’impression de vivre les
situations. On ressent les tensions, la peur, les petites victoires. On se
révolte avec ceux qui luttent, on serre les poings, on hurle devant tant d’injustice,
de mauvaise foi, de mensonges et de manipulation. Cet auteur me bluffe tant ses
livres sont empreints de véracité, d’humanité, de profondeur.
Smith a fait partie du contingent des premiers policiers
noirs mais il a démissionné et il est devenu reporter criminel pour un « journal
noir » plutôt actif. Il se sent plus libre ainsi pour agir.
« Peut-être le meilleur moyen de réformer le système
était-il de l’extérieur, après tout. Peut-être était-ce mieux comme ça.
Peut-être n’avait-il pas simplement abandonné. »
Assez séducteur, il vit seul dans un petit espace car son
salaire est peu élevé. Il est resté un peu en contact avec McInnis, son ancien
chef, un blanc qui a appris à connaître ceux qui travaillent sous ses ordres et
qui, petit à petit, leur a fait confiance. Son regard sur ces hommes a évolué
au fil du temps et il s’est attaché à eux en quelque sorte. Pourtant, ce n’est
pas simple, son rôle est mal vu par les autres blancs (dont certains très
proches du Klan) qui se moquent de lui et de son équipe.
Un soir, Smith reste tard au journal et il s’endort. C’est
un coup de feu qui le réveille et il monte vite à l’étage où Bishop, le
directeur travaillait. Il est mort et Smith appelle aussitôt McInnis. Smith va
très vite se retrouver en position d’accusé et il va lui falloir mener l’enquête
pour comprendre ce qui a pu se passer, d’autant plus qu’il réalise que les
policiers blancs n’ont pas l’intention de creuser. Beaucoup de personnes
semblent s’intéresser à cette affaire et pas forcément pour les bonnes raisons,
certaines fuient le contact notamment lors des funérailles. Que cachait Bishop ?
L’atmosphère est électrique, pourquoi le FBI se mêle-t-il de ce fait ?
Smith et ses anciens coéquipiers vont mener des investigations
en parallèle. Les événements sont articulés avec intelligence, les
ressentis et les descriptions sont précises. Le rythme ne faiblit pas et chaque
fois que quelque chose de nouveau se produit, on se demande où cela va nous
entraîner.
L’écriture est puissante (merci au traducteur, qui n’est pas
le même que pour les romans précédents, les a-t-il lus avant de traduire pour
apprivoiser ambiance et individus ?), le texte étoffé, complet. On apprend
énormément sur l’histoire du pays en découvrant ces aventures. L’enquête est
loin d’être simple, les fausses pistes et les ramifications sont nombreuses, la
vie passée de chaque protagoniste va intervenir de différentes façons, tout
cela rend le texte de plus en plus addictif. Les protagonistes sont tous intéressants
dans leur évolution, notamment McInnis, ils ont leurs failles, ils sont humains
donc imparfaits.
Je suis totalement fan de Thomas Mullen et j’ai hâte de
découvrir d’autres recueils qu’il a écrit (en plus il semblerait que les trois que
j’ai cités vont être adaptés au cinéma…)
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