Les pyromanes
Auteur : Vincent Delareux
Éditions : L’Archipel (24 Août 2023)
ISBN : 978-2809846683
466 pages
Quatrième de couverture
Dans un village reculé de Normandie, Thérèse Sommer attise
les passions et dicte sa loi : à son mari qu’elle trompe, à sa mère qu’elle
méprise, à ses amants qu’elle consume. Libre et indépendante, maîtresse de son
petit monde, on ne lui connaît pas de rivale. Jusqu’à la naissance de sa fille.
Mon avis
« Les pyromanes » est le deuxième livre de Vincent
Delareux. Mais, il nous présente l’histoire de deux personnages évoqués dans le
premier « Le cas Victor Sommer ». Soyez rassuré, on peut aisément les
lire séparément !
Une chose est sûre, l’auteur est monté en puissance, tant
dans le style, la construction de l’intrigue, que dans les liens établis entre
les individus et la description de cette « micro société »
représentée par une petite bourgade normande.
Dans ce village, un peu à l’ancienne, tout le monde se
connaît, sait les travers de chacun, pourrait dénoncer des faits délictueux
mais se tait. On est en 1952, le curé a encore une place primordiale, comme les
anciens qu’on écoute …ou pas. La règle c’est de ne pas s’occuper des affaires
des voisins, on peut les espionner, cancaner éventuellement sur leur dos mais en
apparence, tout reste lisse. Thérèse Sommer est mariée à Serge, souvent absent
à cause du boulot, il est sur l’eau mais n’en boit jamais…. Comme l’époux ne
rentre pas tous les soirs au logis, elle en profite car « L’adultère
était son credo et le vice sa vertu ». Fière de son corps, obnubilée
par le sexe, elle reçoit chez elle dans le lit conjugal les habitants du coin…
mais chut, on fait comme si, hein ? C’est une femme libre, qui vit sa vie,
sans entraves, sans loi, sauf celle qu’elle décide. Elle n’a que peu de lien
avec sa mère, installée pas loin, encore moins avec son conjoint qu’elle méprise
et dont elle se moque.
Elle ne veut pas de contrainte, mais elle tombe enceinte et
l’enfant reste là, malgré ses souhaits de s’en débarrasser. C’est une fille qui
naît, alors que personne ne s’en doutait. Pas maternelle pour deux sous, elle
va mener la vie dure à ce petit bout d’elle, la voyant comme une rivale, une
ennemie qu’il faut humilier, mater. L’enfant n’est pas aimée, sauf par la
grand-mère, qui fait ce qu’elle peut. Elle grandit sans affection, confrontée à
des situations terribles. Elle érige une carapace, elle se protège lorsque
c’est possible, et ne comprend pas les émotions, les sentiments. Elle est comme
détachée d’elle-même jusqu’au jour où elle rencontrera l’amour. Sera-t-elle
capable de tisser des liens « normaux » ? N’est-elle pas
« handicapée », presque « détruite » par tout ce qu’elle a
subi ?
L’auteur sait manier les mots avec un phrasé incomparable.
Les titres de chapitre, à eux seuls, sont toute une histoire. Dans le récit,
les phrases courtes au vocabulaire choisi et soigné, font mouche. Elles
dévoilent l’horreur mais on reste scotché, presque attiré par tant de noirceur.
Une infime lueur d’espoir ? On s’accroche, on espère…. Et on retombe, le
cœur en vrac.
Vincent Delareux analyse finement la psychologie de ceux
qu’il évoque, il montre combien le passé, l’enfance, l’interprétation d’un
geste, d’un sourire, d’une idée, une révélation historique (quelle idée
excellente de lier à son texte, Marguerite et Julien de Ravalet, combinant
ainsi la petite et grande histoire !) peuvent influencer des personnes un
peu crédules. Françoise n’a pas été « armée » pour affronter les
autres, elle s’est « construite » seule ou presque. Les notions de
bien ou de mal ne sont pas les bonnes. Non pas qu’elle ait « l’âme
méchante » mais elle reproduit ce qu’elle a vécu et une fois le doigt dans
l’engrenage, elle ne peut pas s’arrêter. On peut penser qu’elle a été
« nourrie » à la violence et qu’elle en a besoin pour vivre…
Va-t-elle s’en sortir ?
C’est une lecture bouleversante, présentée avec une touche
d’ironie, c’est diaboliquement noir et … on en redemande…
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