"L'inflation de la gloire" de Gabriele Tergit (Käsebier erobert den Kurfürstendamm)

 

L’inflation de la gloire (Käsebier erobert den Kurfürstendamm)
Berlin 1931
Auteur : Gabriele Tergit
Traduit de l’allemand par Pierre Deshusses
Éditions : Globe (2 Mai 2024)
ISBN : 978-2267048766
460 pages

Quatrième de couverture

Berlin, années 1930. Faute de nouvelles intéressantes, un journaliste publie un article dans lequel il promeut un médiocre chanteur de cabaret au rang de star. Du jour au lendemain, l’artiste connaît une ascension fulgurante qui éveille une multitude d’intérêts. La presse, les investisseurs, la haute société : tout le monde veut sa part du gâteau – et beaucoup en paieront le prix, quand le succès passager laissera place à la débâcle.

Mon avis

Gabriele Tergit (1894-192) a été écrivaine et journaliste allemande. Elle a dû fuir son pays et s’est installée à Londres à partir de 1938. « L’inflation de la gloire » est paru-e en 1932 en Allemagne et seulement en 2017 en France. Il vient d’être réédité en format poche.

L’histoire se déroule à Berlin, dans les années 30. On découvre la vie d’un journal avec les différents rédacteurs, la recherche de « papiers », de titres phares, « d’accroches » pour les lecteurs … Faut-il laisser les articles en l’état, les modifier, couper, alléger ou au contraire développer un peu plus ? Toutes ces questions se posent dans une salle de rédaction, tous les jours avant que le quotidien soit imprimé. Les responsables ont même quelques lignes sur la gadoue si un jour ils sont à cours d’inspiration. Mais parfois, il n’y a pas « matière à » et il faut trouver des idées, des sujets. C’est comme ça que Gohlisch, un des employés écrit un texte sur un chanteur de cabaret : Georg Käsebier dont il dit qu’il n’est pas estimé à sa juste valeur. Son texte finit par sortir et est repéré par le chansonnier mais également par Otto Lambeck, jouissant d’une certaine notoriété, il le reprend en embellissant encore tout ce qui a été écrit sur Georg.

D’homme discret, méconnu et luttant pour avoir quelques revenus avec ses spectacles, Käsebier passe au rang de grande vedette avec tout ce que cela implique. Les propositions affluent, pour construire un théâtre rien que pour lui, publier des livres racontant sa vie, quant aux produits dérivés, c’est de la folie !! Chacun essaie de tirer la couverture à lui pour prouver qu’il est le véritable découvreur de la star…. Chacun veut profiter de la situation pour s’enrichir …. C’est sans doute la période qui est propice, les gens ont besoin de rêver … mais est-ce qu’on peut bâtir un succès en misant sur une personne qui n’est pas vraiment une valeur sûre (non pas qu’il chante faux mais ….ça n’a rien d’exceptionnel).

Au-delà de l’histoire de cet homme, l’auteur décrit un pays qui perd pied avec la république de Weimar. Les allemands se croyaient sortis des problèmes économiques mais il n’en est rien, les difficultés sont immenses, le fascisme est aux frontières et avance de plus en plus … Tout peut s’écrouler très vite tant la réussite peut être éphémère. La gloire est quelques fois destructrice …

Ce récit captivant décrit une société qui veut s’amuser, vivre mais qui sent que le pire est sur le point d’arriver. Cela pourrait ressembler à notre présent et on s’aperçoit que tout ce qu’on lit, est, malheureusement, d’actualité. De nombreux thèmes sont abordés : le poids des apparences, le rapport à l’argent, la rançon de la gloire, la gentrification, les méthodes d’information etc.

L’écriture de l’auteur (merci au traducteur) est encore très actuelle, je n’ai pas senti un côté vieillot. Il y a de nombreux dialogues, vifs et bien écrits, ils donnent du rythme, et permettent d’approcher différemment les ressentis des personnages.

J’ai beaucoup apprécié ce roman car il reste très réel et réaliste. De plus il peut provoquer des discussions passionnées et certainement passionnantes.


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