"Ce monde par-delà l’océan" de Laura Spence-Ash (Beyond That, The Sea)

 

Ce monde par-delà l’océan (Beyond That, The Sea)
Auteur : Laura Spence-Ash
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Danièle Momont
Éditions : L’Archipel (24 Octobre 2024)
ISBN : 978-2809848120
360 pages

Quatrième de couverture

Alors qu'en 1940 les bombes allemandes pleuvent sur Londres, Millie et Reginald Thompson, tous deux issus de la classe moyenne, prennent la décision déchirante d'envoyer leur fille unique de 11 ans en Amérique pour la protéger. À Boston, Beatrix est accueillie par un couple aisé, Nancy et Ethan Gregory. Quand vient la fin de la guerre, synonyme de retour en Angleterre, Beatrix parviendra-t-elle à trouver sa place dans ce pays qui lui est devenu étranger ?

Mon avis

J’ignorais totalement que des enfants anglais avaient été envoyés dans des familles américaines, pour être en sécurité, pendant la seconde guerre mondiale. J’ai fait quelques recherches et découvert que cette évacuation avait pour nom : opération Pied Piper. Le but était de les protéger en les sortant des grandes villes, dont Londres, cibles des bombardements. Ils ont été très nombreux à partir. Certains vers les campagnes plus rassurantes mais en restant en Grande Bretagne, d’autres avec leur valise, sur un paquebot, vers un pays inconnu sans savoir quand ils allaient revenir chez eux. Les adultes ont agi ainsi pour leur bien sans mesurer le traumatisme et les répercussions….

Fille unique, Beatrix a onze ans et ses parents, par amour, décident de son départ « par-delà l’océan ». Une valise, une étiquette épinglée sur sa veste et la voilà sur les flots. Une fois à Boston, c’est la famille Gregory qui l’accueille. Le couple a deux garçons : William et Gerald. La mère a toujours rêvé d’avoir une fille et elle va s’attacher à celle que le destin lui confie : Beatrix, qu’ils appelleront Bea.

Bea découvre le quotidien d’une famille aisée, sans tension (alors que chez elle, il arrivait que son père et sa mère se disputent et ils étaient de condition modeste). Son âge la situe entre les deux fils, comme un trait d’union. Ils l’aiment, elle adopte leur mode de vie. Bien sûr, elle écrit des courriers et en reçoit mais chacun reste un peu sur la réserve et au fil du temps, le contenu des lettres devient moins fluide, moins naturel.

Ce n’est pas que Beatrix oublie son papa et sa maman, c’est juste qu’avec la distance, les occupations, le temps passe et malgré quelques photos, ce n’est plus vraiment pareil. Elle s’est habituée à cette nouvelle vie, elle y a pris ses marques et de l’autre côté de l’océan, le temps a filé aussi avec ses joies et ses peines. Millie, sa mère, se rend bien compte que sa fille reçoit des biens matériels qu’elle ne pourrait pas lui offrir et cela lui serre le cœur.

Mais quand la guerre se termine, Beatrix doit rentrer. Des années après, va-t-elle se sentir chez elle ou une étrangère ? Où est sa place entre toutes ces personnes qui l’aiment, de chaque côté de cette immense étendue d’eau ? Et elle, où en est-elle dans son cœur, que souhaite-t-elle ? Peut-on aimer deux familles, deux lieux ?

Ce livre m’a intéressée et je l’ai énormément apprécié. Je l’ai trouvé bien construit. On passe d’un personnage à l’autre sur quelques pages avec le ressenti et le vécu de chacun. L’histoire s’étale de 1940 à 1977 avec des flashs plus précis sur certaines périodes. Ce récit montre que les adultes peuvent être maladroits, que parfois on fait mal en croyant faire bien. On se trompe, on le reconnaît ou pas. Quelques fois très tardivement on fait ce qu’il faut pour réparer une erreur et ainsi les choses s’apaisent.

J’ai trouvé cet opus profond et complet dans tout ce qu’il présente : la vie de chacun, les émotions, les conséquences de chaque choix, les dégâts inévitables qu’ils peuvent entraîner. Ce n’est pas simple de trouver la bonne attitude, la bonne distance, d’être juste, d’accepter ce qu’on ne peut pas changer.

L’écriture (merci à la traductrice) est fluide, prenante. Laura Spence-Ash explore avec doigté les caractères, les relations des protagonistes. Elle montre que tout ne peut pas être dit, parce qu’il faut savoir préserver certains aspects de sa vie pour qu’ils restent magiques, à part.

« Certains secrets se révèlent lourds à porter. D’autres sont des cadeaux, ils vous réchauffent, ils sont faits pour qu’on y retourne sans cesse. »

Je ne vais pas perdre de vue cet auteur !

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