"L'inconnu des barricades" de Pierre Mazet

 

L'inconnu des barricades
Auteur : Pierre Mazet
Éditions : du Caïman (9 Janvier 2025)
ISBN : 978-2493739216
266 pages

Quatrième de couverture

Saint-Étienne 1834, la grève des passementiers est noyée dans le sang. Dans les rues du pourtour du quartier de Chavanelle, on ramasse des cadavres. D'une impasse, les brancardiers sortent celui d'un homme dont le visage ne rappelle nulle origine connue. C'est alors que Floréal Leroux, journaliste débutant, entre en scène, s’assignant une double mission : identifier l’inconnu, afin de lui rendre, en partie, sa dignité. Et, bien entendu, trouver le coupable, car celui que policiers et politiques désignent semble arranger un peu trop le pouvoir...

Mon avis

Saint-Etienne, 1834, après Lyon, la révolte des canuts arrive dans cette ville. Il y a beaucoup de bagarres, de violence et les morts sont assez nombreux. Les brancardiers ont de quoi s’occuper. Et voilà que, dans une impasse, ils ramassent le corps d’un homme de couleur, que personne ne reconnaît.

Richement documenté, le contexte de la rébellion des passementiers est très bien amené et intégré au récit. L’heure n’était pas au dialogue, la répression était importante. On croise des personnes ayant existé. Pour quelques-unes, elles sont présentées avec plus de détails en fin d’ouvrage, ce qui nous éclaire sur ce qu’elles étaient.

C’est Floréal Leroux, jeune journaliste, qui raconte les faits. Il décrit les arrestations, l’atmosphère chargée de peur, les conditions de travail très difficiles et l’impossibilité d’obtenir des améliorations. Voyant le macchabée, Floréal décide de mener l’enquête, profitant de quelques contacts, il fouine, interroge, recoupe les maigres informations qu’il obtient. Il voudrait que cet homme soit reconnu dans tous les sens du terme. Il pense qu’il n’est pas venu à Saint-Etienne par hasard. Il veut comprendre et savoir qui il est. Son inexpérience n’est pas un frein, car finalement il ose. Il va même aller jusqu’à la capitale où il découvrira des documents qui vont l’aider, l’éclairer dans ses recherches.

Parfois, il dérange. C’est un peu comme de nos jours, le journalisme d’investigation n’a pas toujours bonne presse (c’est le cas de le dire ; -) À trop creuser, on risque de découvrir des éléments que certains n’ont pas envie de voir dévoiler. Mais il ne se décourage jamais et il continue encore et encore, usant de son charisme et de son sourire. Il pourrait devenir un héros récurrent tant il est attachant et intéressant dans son fonctionnement.

Cette histoire m’a captivée, j’ai aimé que les événements soient reliés à Monsieur Laperouse, même si tout cela est romancé. Cela intensifie, intelligemment, l’approche historique et donne une autre dimension au texte. En outre, le vocabulaire, les descriptions (je pense, entre autres, aux Rambertes), tout est parfaitement adapté, relié à la période évoquée.

À travers ce roman, l’auteur aborde plusieurs thèmes, une certaine forme de racisme, les prises de pouvoir par certains qui en abusent, le manque d’écoute et de respect des plus petites classes sociales, le travail de journaliste pas toujours bien compris ou bien considéré. Et surtout les « raccourcis » pour la police lorsqu’elle pense avoir un coupable sous la main. Ce qui est bien pratique quand c’est un individu qu’on ne supporte pas parce qu’il a tendance à vouloir protéger les ouvriers. Si on peut s’en débarrasser ainsi, c’est parfait et tant pis pour lui, au moins, il cessera ses actions !

Moi qui suis stéphanoise, j’ai vraiment apprécié que cette intrigue, inspirée de faits réels, se déroule « chez moi ». Je connais bien les lieux mentionnés (quand les rues ont changé de nom, Pierre Mazet le signale donc on ne se perd pas) et j’avançais au rythme des différentes situations exposées, revisitant ma ville.

L’écriture est de qualité, immersive, fluide. Les indices arrivent petit à petit, maintenant notre intérêt car ce qu’on perçoit donne envie de toujours en savoir plus. C’est excellent !


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