Le briseur d’âmes (Der Seelenbrecher)
Auteur : Sebastian Fitzek
Traduit de l'allemand par Penny Lewis
Éditions : l’Archipel (mars 2012)
270 pages
Quatrième de couverture
Un psychopathe sévit dans les environs de Berlin. Lorsque la
police retrouve ses victimes, ces dernières sont vivantes, n'ont subi aucun
sévice, mais se trouvent prostrées dans un état végétatif, psychologiquement
anéanties, comme privées de conscience...
D'où le surnom que lui a donné la presse : le briseur
d'âmes. Quelles tortures mentales a-t-il infligé à ses proies ? Et pourquoi
laisse-t-il dans leur main une phrase énigmatique ?
Mon avis
Waouhh !!! Un huis clos qui décoiffe, qui secoue, qui
déroute … Une vraie réussite…
Lecture sur deux tableaux :
1) Des étudiants, avec un professeur, consultent le dossier
d’un patient après avoir signé une « décharge » d’un genre particulier.
2) Le dossier du patient nous raconte une courte période
dans une clinique psychiatrique où les personnes présentes se retrouvent
bloquées sur place par la neige. (et subtilité amusante, lorsqu’on arrive page
89 du dossier du patient, on est page 89 dans le roman….).
Toute se mêle astucieusement, et on se laisse aller à penser
« où est la vérité ? » …
Nous passons de l’un à l’autre.
De temps en temps (pas souvent mais un peu), les étudiants
ou leur professeur s’expriment et on revient dans le présent. Un présent
presque aussi angoissant que le récit que l’on découvre par l’intermédiaire du
suivi d’un malade, le tout décortiqué dans un horaire précis, avec un passage
avant la Peur (avec une majuscule) et un après …
C’est très très bien pensé. L’auteur réussit à nous
manipuler, comme le sont ses personnages. Aucune conviction, aucune certitude
ne peuvent nous habiter … seuls les doutes, le flou, les questions sont présentes
en nous. Le tout accompagné d’une ambiance terrifiante, la tension montant en
force au fil des pages, parallèlement à la terreur qui s’installe dans la
clinique …
« On prétend que
l’homme ne révèle sa véritable nature que dans des situations extrêmes. »
Les hommes et les femmes enfermés dans la clinique sont dans
ce cas. Jusqu’où peuvent-ils aller ? Qui croire ? Comment agir pour s’en sortir
? A travers une situation qui évolue sans cesse, nous sommes comme eux, confrontés
sans arrêt à des interrogations sans fin, doutant de tout et de tous …
Caspar, le « patient » est amnésique, son passé semble
trouble, il ne sait plus qu’il est, il a été retrouvé sans papier d’identité.
Parfois des « échos » (alors écrits en italiques) résonnent en lui, à ce moment
là, des paroles ou des images s’imposent dans son esprit torturé …. Rêves,
cauchemars, souvenirs réels ou déformés ? Il nous entraîne à sa suite, nous
laissant entrevoir des pistes pour mieux le comprendre, le connaître … Mais
est-il celui que nous croyons ?
Tout n’est-il pas qu’apparence ?
« Méfiez-vous des
apparences. Oui, à première vue, on dirait un roman. Mais ce n'est que l'arbre
qui cache la forêt. »
Dit le professeur à ses élèves …. avant même de les laisser
lire ….
Petites énigmes pour « décompresser » (mais pas tant que ça
… parfois elles rajoutent à l’oppression), réflexion sur le rôle de l’hypnose
par rapport à la souffrance, influences des êtres humains sur d’autres
lorsqu’ils bouleversent leur mode de pensées, leur réalité, tous ces sujets
sont abordés dans ce roman.
L’écriture est acérée, cinglante, économisant le superflu
pour ne laisser que les mots qui « frappent », qui envahissent cerveau, esprit,
pensées … comme autant de coups de butoir déstabilisant nos piètres certitudes
….
Parler des personnages serait déflorer le roman, sachez
juste que chacun d’eux est remarquablement décrit, introduit dans l’intrigue à
un moment clé, pour ajouter à ce climat alarmant si bien retranscrit ….
La grande force de l’auteur est de réussir avec brio à nous
faire passer sans arrêt d’un état à un autre et à retourner régulièrement la
situation décrite quand elle semblerait se stabiliser ….
On s’imagine que tout va s’apaiser, que chacun a trouvé sa
place et puis … il n’en est rien …
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