Les meilleurs amis du monde (Odd Child Out)
Auteur : Gilly Macmillan
Traduit de l’anglais (Angleterre)
par Françoise Smith
Éditions : Les Escales (Noires) (7 Juin 2018)
ISBN : 978-2365693547
384 pages
Quatrième de couverture
Comment démêler le vrai du faux lorsque personne ne peut –
ou ne veut – parler ? Dans un Bristol électrisé par les tensions sociales, deux
adolescents, meilleurs amis depuis l'enfance, se retrouvent au cœur d'une
affaire brûlante. Noah Sadler et Abdi Mahad sont deux adolescents inséparables,
meilleurs amis depuis l'enfance. Par un
matin glacial, une équipe de secours repêche le corps de Noah dans le canal de
Bristol : son état est critique. Abdi, présent sur la scène du drame, ne peut –
ou ne veut – rien dire.
Mon avis
C’est sur quatre journées intenses (accompagnés de quelques
pages sur la veille et le lendemain) que se passe ce roman sombre, poignant, qui
inscrit durablement l’histoire de deux jeunes adolescents dans notre mémoire.
Le récit se déroule à Bristol dans le Sud du Royaume Uni,
une ville portuaire où se côtoient des
gens du cru et une communauté somalienne avec des réfugiés intégrés et d’autres
nouvellement arrivés. Abdi et Noah se fréquentent au collège (lorsque Noah n’est
pas en chimiothérapie, car il souffre d’un cancer), ils vont tous les deux au
club d’échecs, travaillent ensemble etc. Ce sont « les meilleurs amis »
reconnus par leurs pairs … Noah est le fils unique d’une riche famille, son père fait des reportages photos aux quatre
coins du monde, et sa mère se consacre à
lui. Abdi, est le second d’une famille somalienne établie depuis quelque temps
dans la ville. Il a obtenu une bourse et c’est pour cela qu’il est dans le même
établissement scolaire que Noah. La maman de Noah aurait préféré un autre
copain mais elle l’accepte …. Un soir, après une exposition particulièrement
réussie des clichés chocs du Papa photographe,
les deux jeunes dorment chez Noah et là, l’impensable se produit, ils fuguent et
vont vers le canal, où dans les eaux
froides et troubles, Noah tombe…. Que s’est-il passé ? Pourquoi des
collégiens sages, sérieux et appliqués ont-il quitté la maison alors que l’un d’eux
n’est pas en forme ? Que
voulaient-ils faire ? Y-a-t-il eu des témoins, qu’ont-ils vu ?
C’est un détective qui sort de congé maladie qui est chargé
de l’enquête, il lui faut reprendre ses marques avec ses collègues mais
également avec les méthodes de travail. Très solitaire, avec un passé lourd, il
n’est pas toujours sûr de lui et a souvent peur de ne pas avoir la bonne
attitude. Mais il a pour binôme un collègue super et cela l’aide. Il doit agir avec diplomatie, ne pas vexer
les uns ou les autres, ne pas donner lieu à des interprétations des habitants
(ce serait si facile de parler de crime racial….) En faisant des recherches
pour comprendre comment les deux amis en sont arrivés là, il va remuer beaucoup
plus de choses qu’il ne l’avait imaginé et
ses propres démons vont ressurgir. Malgré tout il veut rester intègre et
faire éclater la vérité si douloureuse soit-elle…..
Lorsque j’ai commencé ce livre, j’ai pensé que j’allais
découvrir une histoire d’amitié entre deux personnes qui, à la base, n’ont rien
en commun, un peu comme dans une caricature : le blanc riche autochtone,
le noir pauvre étranger … J’ai vite compris que je me trompais . Avec
intelligence, l’auteur aborde des thèmes délicats, voire difficiles : la maladie
grave, la mort éventuelle d’un enfant et
la souffrance des parents qui ne vivent pas cet état de fait de la même façon,
les tensions raciales dans une ville et la place de chacun, la portée des
médias : capables de manipuler l’opinion publique, de faire très mal en
allant trop loin dans leurs propos (plus ou moins vérifiés et / ou transformés
avant d’être diffusés), le rôle des enseignants, des témoins … et le poids du
passé…
Les deux familles veulent, chacune, protéger, leur enfant
mais à quel prix ? Peuvent-elles dialoguer et essayer de (se) comprendre ?
Tous les adultes paraissent avoir une part d’ombre, quels buts poursuivent-ils
dans la vie ? Quels sacrifices sont prêts à faire les uns pour s’intégrer
et les autres pour les accepter ? Quel est le secret dont la mère d’Abdi
semble dépositaire ? Qu’a-t-elle vécu, avec sa famille dans le camp de
Hartisheikh où ils étaient en transit ? L’amitié entre les deux camarades
est-elle saine ? Ne profitent-ils pas l’un et l’autre de leur situation
pour obtenir ce qu’ils veulent ? Peut-on faire abstraction de ce qu’on a
vécu et avancer en toute quiétude ?
Cet opus est une réussite. Il est très complet, bien écrit
dans un style de qualité (merci à la traductrice). L’ensemble est bouleversant et Gilly Macmillan
évoque le drame vécu par ses deux familles avec un ton très juste et beaucoup de doigté.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire