La nuit, quand elle vient
Auteur : Aurore Py
Éditions : de l’Aube (6 Juin 2019)
ISBN : 9782815933605
386 pages
Quatrième de couverture
« Parce que les petits garçons qui tirent sur les oiseaux
deviennent des hommes qui tirent sur d'autres hommes et que ceci est aussi
inéluctable que la succession des saisons. »
On avait dit der des ders. Et pourtant, en ce mois de mai 1939, la guerre gronde, l'étau se resserre, jusque dans la campagne bourguignonne.
On avait dit der des ders. Et pourtant, en ce mois de mai 1939, la guerre gronde, l'étau se resserre, jusque dans la campagne bourguignonne.
Mon avis
Ce roman démarre en 1939, en Bourgogne, dans la France rurale.
On découvre une famille. Une grand-mère, Jeanne, veuve. Une fille, Marie, veuve
elle aussi mais battante et patronne pour maintenir sa ferme à flots. Emma, sa sœur,
enseignante et portée vers des idées de gauche, elle est « l’intellectuelle »,
mariée à un médecin. Il y a aussi Louise, l’épouse de Pierre, le fils de la
famille, ils ont déjà trois enfants. Tous sentent que le climat est instable et
que peut-être la guerre va éclater même si la précédente était « la der des
ders ». Chacun réagit avec sa personnalité : déni, acceptation,
colère…. Tous voudraient que ce soit
différent mais on ne choisit pas… et la folie des hommes a souvent,
malheureusement, le dernier mot …
La guerre éclate, des hommes partent, d’autres restent, trop
âgés, trop faibles, déjà blessés, mais ce qui est sûr, c’est que dès que les
garçons sont au front, les femmes prennent les choses en main. Elles ont du caractère,
de la volonté et font preuve de ressources insoupçonnées. On dit que les gens
se révèlent dans l’adversité, et c’est le cas pour la plupart des dames de ce
roman. Magnifiques portraits de celles qui, dans l’ombre ou la lumière,
agissent pour maintenir une certaine forme de paix, éviter les conflits, apporter
du bonheur, vivre tout simplement et croire, encore, toujours, que demain est
un autre jour, que le soleil brillera à nouveau dans leur quotidien, que l’amour
vaincra malgré tout ….
C’est sur les quelques années de la seconde guerre mondiale
que nous allons suivre les différents protagonistes. L’écriture sensible et
délicate d’Aurore Py nous offre un regard approfondi sur chaque membre de cette
maisonnée. Elle décrit les situations avec finesse, analyse avec doigté les
ressentis de chacun, les difficultés pour se construire lorsque tout est
instable, les peurs, les joies, les petites faiblesses ou les lâchetés, les victoires,
qui, même minimes, sont extraordinaires. On voit combien l’équilibre est
difficile à garder lorsque la séparation, la crise, la suspicion prennent de la
place… Chacun réagit différemment, s’accroche comme il le peut et essaie de
faire face….
C’est avec infiniment de doigté que l’auteur nous présente
cette période. Elle n’en fait jamais trop et c’est très bien « dosé ».
L’intérêt pour tous les personnages est maintenu en permanence. Je me suis
beaucoup attachée à Emma (peut-être à cause de son métier qui est aussi le
mien) et à Marie. J’ai apprécié leur combativité, leur énergie sans cesse
renouvelée. Emma sait ce qu’elle veut et Marie transmet de la fraîcheur, tel un
feu follet, malgré les difficultés. Je les ai trouvées « pétillantes »
et ainsi elles apportent des étincelles de lumière dans un contexte qui
pourrait être sombre. D’ailleurs, Aurore Py ne sombre jamais dans le
misérabilisme, la plupart des personnes qui peuplent ce recueil ne baissent pas
les bras et portent un message d’espoir.
Cette lecture a un côté apaisant bien que la guerre soit
présente en filigrane, sans doute parce que l’auteur a plus parlé des individus
que des événements. Ce livre est une belle découverte car on est bien loin du
style léger et jubilatoire de « Lavage à froid uniquement» du même auteur.
Comme quoi, Aurore Py réussit à rédiger de beaux textes dans différents genres !
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