L’accident de l’A 35 (The Accident on the A35)
Auteur : Graeme Macrae Burnet
Traduit de l’anglais pas Julie Sibony
Éditions : Sonatine (19 Septembre 2019)
ISBN : 978-2355847561
340 pages
Quatrième de couverture
Avocat respectable dans une petite ville alsacienne,
Bertrand Barthelme, trouve la mort une nuit dans un accident de voiture.
Lorsque l’inspecteur Georges Gorski vient annoncer la triste nouvelle à sa
femme, celle-ci lui apparaît peu affectée. Une seule question semble
l’intriguer : que faisait son mari sur cette route au milieu de la nuit ?
Question banale...
Mon avis
Bertrand Barthelme est un notaire réputé. Depuis qu’il est
marié, tous les mardis soir, il va manger avec son club : c’est-à-dire trois
amis et lui à l’auberge du Rhin. Dans ce groupe on trouve : son collègue
et associé de cabinet, un agent immobilier et un propriétaire d’une usine pas
loin de la ville de Saint-Louis, en Alsace où se déroule ce récit.
On est mardi, et la voiture de ce brave homme vient de s’encastrer
dans un arbre. Il est mort sur le coup et il faut prévenir son épouse. C’est l’inspecteur
Georges Gorski qui doit annoncer la nouvelle et c’est peut-être la seule chose
qui sorte de l’ordinaire qu’il fera dans la semaine. Il prend son rôle très au
sérieux et va sonner à la porte. La gouvernante ouvre, Madame le reçoit au lit
et ne semble pas bouleversée par le décès de son mari. Elle lui demande de
prévenir leur fils qui est dans sa chambre (c’est un lycéen de 16 ans). Elle fait
quand même remarquer qu’il s’avère étonnant que le véhicule ait été trouvé sur
l’A35 alors que ce n’est pas l’itinéraire pour revenir du restaurant où les
quatre compères dînaient toutes les semaines, depuis des années….
Notre inspecteur, tombé sous le charme de la jeune veuve (en
plus il a bien vu qu’elle faisait chambre à part !), se propose de creuser
un peu l’affaire afin de comprendre ce que Bertrand Barthelme faisait sur l’A35
dans ce sens… Il va donc mener l’enquête, discrètement, et s’aperçoit très vite
que le souper n’était qu’un alibi et n’existait pas …. Il n’est pas le seul à vouloir connaître un
peu plus le notaire. Le fils, Raymond, bien que peu touché par cette
disparition, entreprend également quelques démarches, en cachette de sa mère,
bien entendu.
Nous allons suivre leurs investigations respectives et c’est
un régal. Il y a une atmosphère délicieusement surannée. On est encore au temps
des cabines téléphoniques, des gens qui fument dans les cafés, des carnets pour
prendre des notes, des empreintes sur les verres … Exit internet, le traçage
des téléphones, l’ADN … Un petit bout de papier oublié dans un tiroir suffit à
déclencher une tempête…
La femme et la fille de Georges Gorski l’ont quitté, il boit
trop et ne s’occupe pas assez de sa famille alors, bien sûr, cette enquête qui
n’en est pas une, va l’intriguer au plus au point et lui permettre, peut-être,
de faire remonter sa cote. On plonge dans ses pensées, ses raisonnements, on le
suit de près, on sent presque l’odeur d’alcool lorsqu’il se laisse aller. On
découvre à sa suite, les petites villes un peu étriquées, où tout se sait ou
presque. Les mensonges, les faux semblants, les peurs du « qu'en-dira-t-on
», l’hypocrisie pour répondre aux conventions et faire comme si … Et l’inspecteur creuse encore et encore. Est-ce
parce qu’il est attiré par Lucette (Madame Barthelme), ou parce qu’il a besoin
de comprendre ce que cachait le notaire et qui il était vraiment?
L’écriture de l’auteur (bien traduite), assortie d’un faux
rythme, assez lent, est réjouissante. Il ausculte les habitudes, les choix de chacun,
les travers des uns et des autres. Il traque le moindre détail pouvant le mener
sur une piste afin de cerner ce qui lui échappe. Le style est truculent parce que l’air de
rien, par petites touches, des portraits se dessinent sous nos yeux, de plus en
plus précis et c’est amusant de constater que notre opinion évolue au fil des
pages. Il est également très intéressant de voir combien ce décès qui n’a pas
semblé bouleversé la femme et le fils, a en réalité, complètement chamboulé le
quotidien du jeune lycéen, faisant ressortir ce qu’il avait étouffé jusque-là.
J’ai beaucoup apprécié cette lecture, ce phrasé original, la
manière dont les événements sont abordés, réfléchis par l’enquêteur et j’ai
hâte de relire cet auteur atypique.
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