La femme parfaite (The Perfect Wife)
Auteur : J.P Delaney
traduit de l’anglais (Etats-Unis) par jean Esch
Éditions : Mazarine (7 Octobre 2020)
ISBN : 978-2863745212
464 pages
Quatrième de couverture
Lorsqu’Abbie se réveille à l’hôpital, elle ne se souvient de
rien. Cinq ans plus tôt, elle aurait eu un grave accident. Son retour à la vie
serait un miracle de la science, une révolution technologique dans le domaine
de l’intelligence artificielle pour laquelle son mari a sacrifié dix ans de sa
vie. Mais alors qu’Abbie se souvient petit à petit de son mariage, elle
commence à remettre en question les motivations de son mari, et sa version des
événements.
Mon avis
Le dernier livre de J.P. Delaney est un thriller
psychologique assez addictif qui ouvre sur plusieurs débats. Le principal étant
de se poser la question des progrès scientifiques en intelligence artificielle.
Jusqu’où aller, quand s’arrêter ?
Lorsqu’Abbie se réveille à l’hôpital, son mari la ramène
chez elle mais il lui explique qu’elle est une « cobot », c’est-à-dire
« un robot collaboratif ». Il est dirigeant d’une start up travaillant
sur ce sujet. Cinq ans après le décès d’Abbie, il a réussi. Elle est « là »,
programmée avec les souvenirs de ce qu’elle a été, dotée d’une certaine forme d’empathie,
d’une dose de « conscience ». Elle se sent « humaine » et
ne l’est pas. On va découvrir son évolution, ses pensées, ses relations aux
autres, notamment avec son fils autiste. Ce sera l’occasion pour l’auteur de
parler de différentes méthodes pour aider au développement de ces enfants (il a
lui-même un enfant concerné par ce trouble). Elle s’exprime en disant « tu »
car elle est « elle-même » sans l’être vraiment et ce procédé montre
toute l’ambivalence de sa place dans la vie de Tim, son époux.
Certains lecteurs trouveront sans doute que l’aspect autisme
ne sert à rien. Mais il a toute son utilité. D’abord parce que l’arrivée de ce
fils, porteur du syndrome de Heller (qui se détecte entre deux et quatre ans
après la naissance) a modifié les relations dans le couple, mais également
parce que le cerveau des personnes autistes ne fonctionne pas comme celui des
gens neurotypiques. Et il y a un lien avec les difficultés d’Abbie pour
comprendre le monde qui l’entoure. Son fils a du mal avec les interactions sociales.
N’est-ce pas la même chose pour elle qui existe sans exister ?
Parallèlement au cheminement de la jeune femme, on a d’autres
chapitres qui décrivent sa rencontre avec Tim, l’entreprise de ce dernier, sa tyrannie
envers ses employés, ses amis etc. On passe du passé au présent sans aucun
problème.
Petit à petit, la personnalité de chacun se précise, des incohérences dans leur
vie de couple apparaissent, en « miroir » avec la vie de Abbie maintenant.
Qui manipule dans l’ombre, qui ment, qui dit la vérité, quel est le but de tout
cela ?
De nombreux thèmes sont abordés : la domination et les
relations toxiques dans les couples, la place (minimale) des femmes dans la Silicon
Valley, les dérives possibles de l’intelligence artificielle (et pourtant, de
plus en plus, elle nous envahit), l’autisme etc…
La femme parfaite peut-elle être créée ? Une épouse qui
comprendra, qui fera ce qu’on attend d’elle ? Un monde aseptisé avec des
rapports normés, sans vagues ?
Je me suis rapidement attachée à Abbie qui n’est pourtant qu’un
robot. L’auteur a su lui donner juste ce qu’il fallait d’humanité pour qu’elle
devienne proche de nous. Il y a du rythme, l’intérêt ne faiblit pas et pourtant
ce n’était pas évident. L’écriture est fluide (merci au traducteur). C’est
troublant, on s’interroge vraiment sur la place du progrès et ça fait peur….J.P.
Delaney a réussi un excellent thriller psychologique et une fin parfaite !
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