"Nocturne pour le commissaire Ricciardi" de Maurizio de Giovanni (Notturno per il commissario Ricciardi)

 

Nocturne pour le commissaire Ricciardi (Notturno per il commissario Ricciardi)
Auteur : Maurizio De Giovanni
Traduit de l’italien par Odile Rousseau
Éditions : Rivages (5 octobre 2022)
ISBN : 978-2743657857
386 pages

Quatrième de couverture

Quinze années se sont écoulées depuis que Vinnie Sannino a émigré en Amérique. Là-bas, il a réussi et est devenu champion du monde de boxe. Son dernier adversaire est mort par sa faute. Il est rentré chez lui pour retrouver un amour jamais oublié, Cettina. Elle est maintenant femme et épouse. Veuve aussi, parce que son mari est retrouvé mort. Pour le commissaire Ricciardi commence une longue semaine sous la pluie napolitaine.

Mon avis

Nous sommes dans les années trente, Viennie, un jeune amoureux décide de quitter l’Italie pour aller en Amérique. Son but ? Réussir à gagner de l’argent pour revenir et épouser celle qu’il aime (Cettina) la tête haute. Elle lui dit qu’elle ne sait pas si elle pourra l’attendre. Il s’éloigne quand même. Quinze ans après le voilà de retour.

« Mais, quand je suis rentré, elle aurait dû comprendre que je n’étais pas parti. Que je m’étais seulement éloigné. »

Pendant tout ce temps, il n’a eu qu’un seul but, qu’une seule idée : les retrouvailles avec celle qu’il n’a cessé d’aimer. Il est devenu champion de boxe et il est riche. Lorsqu’il débarque, il apprend qu’elle est mariée (elle a épousé un homme prospère pour sauver le magasin de son père) et qu’il n’y a plus d’espoir….

Peu après, le mari de Cettina est retrouvé assassiné. Il a reçu un coup à la tempe qui est la « marque de fabrique » de Viennie. Viennie qui, malgré les demandes répétées du Duce, refuse de continuer son sport. Il est évident pour tout le monde qu’il est coupable, d’autant plus qu’il a menacé l’époux de son ex-fiancée devant de nombreux témoins.

Le commissaire Ricciardi et son fidèle adjoint, Maione, vont mener l’enquête. Ils n’aiment pas les choses trop évidentes, alors ils vont creuser. Leur souhait : comprendre le motif précis et remonter ce fil pour dénouer l’affaire.

C’est le deuxième livre que je lis de cet auteur, avec certains personnages récurrents mais des histoires totalement indépendantes. La construction ressemble à un puzzle, des éléments du passé, du présent, des interludes en italiques Il n’y a pas de repère temporel en tête de chapitre et pourtant, on ne se perd jamais. Une poésie se dégage des lignes, une atmosphère feutrée, intime, palpable. Ricciardi essaie de s’infiltrer dans la tête de celui qui a agi, de raisonner comme lui, il veut connaître les motivations d’un tel acte. Ce policier est tourmenté, amoureux n’osant pas se déclarer, hanté par son passé qu’il porte comme une malédiction. Pour lui, la douleur est forte et son sixième sens, s’il l’aide, le paralyse parfois également. Sa maladresse, dans ses relations aux autres, est touchante même si elle peut être « handicapante ».

Le mari de Cettina avait un commerce de tissus et allait réaliser un achat très avantageux lorsqu’il a été tué. Comme l’argent de la transaction n’a pas disparu, le boxeur est forcément fautif. En plus, il ne se souvient de rien car il avait bu … À moins qu’un concurrent mal intentionné et jaloux ait agi ? Les enquêteurs ont du travail. Ils mènent leurs investigations dans une ville pluvieuse, Naples au début du fascisme, parfois mal éclairée. Ils dérangent car pour tous, il n’y a pas à se poser de questions ….

J’ai apprécié qu’une chanson serve de fil conducteur. L’écriture (merci à la traductrice) est belle, emplie de sensibilité, de délicatesse. Maurizio De Giovanni décrit à merveille les ressentis des hommes et des femmes, sans pour autant nous abreuver de phrases lourdes. La sensibilité est présente et représente une grande force du style de l’auteur. Les personnages ont de vraies personnalités. Les déductions des deux détectives sont intéressantes, ils recoupent des faits, observent, réfléchissent, ne se précipitent jamais.

Une lecture toute en nuances et très agréable.

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