911 (Black Flies)
Auteur : Shannon Burke
Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Diniz Galhos
Éditions : Sonatine (22 Mai 2014)
ISBN :978-2-35584-253
208 pages
Quatrième de couverture
Lorsqu’il devient ambulancier dans l’un des quartiers les
plus difficiles de New York, Ollie Cross est loin d’imaginer qu’il vient
d’entrer dans un monde fait d’horreur, de folie et de mort. Scènes de crime,
blessures par balles, crises de manque, violences et détresses, le combat est
permanent, l’enfer quotidien. Alors que tous ses collègues semblent au mieux
résignés, au pire cyniques face à cette misère omniprésente, Ollie commet une
erreur fatale : succomber à l’empathie, à la compassion, faire preuve
d’humanité dans un univers inhumain et essayer, dans la mesure de ses moyens,
d’aider les victimes auxquelles il a affaire. C’est le début d’une spirale
infernale qui le conduira à un geste aux conséquences tragiques.
Mon avis
Ancien ambulancier, Shannnon Burke, plante le décor de son
nouveau roman aux urgences de Harlem : des rues sales, des terrains vagues
abandonnés, des stations de métros délabrées, des poubelles oubliées et des
logements vétustes, voilà où se situe l'hsitoire.
Nous sommes dans les années 90, Ollie Cross, qui a raté le
concours de médecine, alors que sa petite amie a réussi, travaille là-bas, tout
en révisant pour repasser les épreuves. Ses semaines sont remplies entre les
interventions, les cours, le travail personnel indispensable à une future
réussite et un minimum de repos.
Le milieu dans lequel il évolue, est impitoyable, pas le temps
de faire dans le sentiment, ni de se poser trop de questions, c'est ce que
s'évertuent de lui faire comprendre certains de ses coéquipiers. Est-ce bien
nécessaire de sauver une vie lorsque la personne concernée est droguée, malade
et doublée d'être une vraie racaille ? Dans l'ambulance, c'est nous les chefs
lui dit-on...
Cross n'est pas d'accord, il est là pour soigner et faire le
maximum pour que les patients s'en sortent.
Mais ce n'est pas si simple, les urgentistes sont le plus souvent, capables d'affronter avec une forme de calme, des tragédies, mais ils ne peuvent pas supporter que quelqu'un puisse penser qu'ils n'ont pas fait le maximum. Le regard des autres est important et personne ne fait de cadeau. Cross l'apprend à ses dépends et ce n'est pas facile à vivre pour lui, le bleu, qu'on bizute....
Alors, au fil du temps, Cross s'endurcit. Dans le boulot, il
repousse ses limites, il se forge un masque mais est-ce une force ou de
l'insensibilité ? « Être un bon ambulancier, c'est en partie adopter une
attitude de façade. » explique-t-il à sa petite amie qui lui dit qu'il a
changé, car l'attitude qu'il adopte au travail rejaillit sur leurs relations.
C'est à ce moment-là que les choses peuvent déraper... la
frontière est mince entre le fait de se « tenir en dehors » pour se protéger et
devenir celui qui peut arrêter une perfusion...parce qu'on juge que la personne
ne mérite pas de vivre...
Shannon Burke décrit le quotidien de ces hommes en phrases
courtes, coups de poing, comme si le temps lui manquait (comme aux urgentistes)
pour rentrer dans les détails. Et ce style sobre, dépouillé, est parfaitement
adapté à la situation et aux événements.
Son style est cru, violent parfois, comme ces journées qui
se suivent et qu'il dépeint. On bascule dans l'envers du décor et ce n'est pas
beau à voir .... malgré quelques petits signes de tendresse, vite oubliés
malheureusement, tant le reste est dur....
Malgré la noirceur, j'ai apprécié la lecture de ce roman, on
s'attache aux protagonistes, on attend régulièrement, une lueur d'espoir parce
qu'il faut continuer de croire en l'homme, pas n'importe lequel : celui qui se
penche sur son prochain pour l'aider .... Il n'est pas si loi, enfoui sous la
carapace ...
Et puis, il y a cette approche, extrêmement réaliste, de l'influence
d'un métier dans un certain milieu, ou comment de terribles conditions de
travail peuvent entraîner des dérapages, comment les hommes peuvent perdre
toute leur humanité parce que ce qu'ils voient « les bouffent » de l'intérieur,
comment on peut s'habituer à l'horreur, en la regardant d'un œil détaché ...
En cela, ces « soldats de l'urgence » m'ont fait penser à certains militaires qui doivent rester détachés, ne pas se laisser aller à l'empathie pour survivre... Être urgentiste à Harlem ne peut durer toute une carrière, sinon on risque d'y perdre son âme....
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