"Horn venait la nuit" de Lola Gruber

 

Horn venait la nuit
Auteur : Lola Gruber
Éditions : Christian Bourgois (11 Janvier 2024)
ISBN : 978-2267050233
620 pages

Quatrième de couverture

Simon Ungar ne sait pas grand-chose de sa famille paternelle ni de son père, parti refaire sa vie au Canada. Alors quand il se fait licencier et que sa petite amie le quitte, il se dit que c’est l’occasion d’en savoir plus sur ses origines : il part en République tchèque, dans la petite ville d’Olomouc, le berceau des Ungar. Ilse Küsser est elle aussi originaire de cette partie de l’Europe, née en Tchécoslovaquie pendant l’entre-deux guerres. Dans la Tchécoslovaquie communiste des années 1950, elle sera accessoiriste de théâtre, à Bratislava. C’est là qu’elle tombera folle amoureuse du mystérieux Horn. Jusqu’à ce qu’un jour l’histoire d’Ilse rejoigne celle de Simon.

Mon avis

Dans un entretien, l’auteur explique qu’elle a mis un an à préparer le plan de « Horn venait la nuit ». En 2020, elle s’est rendue en Europe Centrale pour recueillir les éléments nécessaires à la rédaction de ce roman. C’est dire le long travail de documentation qui a été fait en amont de la publication de ce récit.

Une vieille dame à Berlin reçoit une lettre. Qui est-elle ? Elle se souvient. On découvre alors l’histoire d’Ilse Küsser, jeune gymnaste tchécoslovaque de haut niveau dont la carrière est interrompue par une chute. Une soirée à l’Opéra l’aidera à reprendre le dessus. Elle deviendra accessoiriste de théâtre, principalement à Bratislava. Elle cherche ce qui colle aux spectacles, elle crée le décor qui va bien, en lien avec ce qui se passe sur scène. C’est un travail plus exigeant qu’il y paraît mais ça lui plaît. Elle rencontre Horn, tombe amoureuse, mais c’est un homme secret, brisé, elle ne saura jamais tout de lui et le peu d’informations qu’elle arrive à obtenir n’est peut-être pas la vérité. Ça se passe tout de suite après la seconde guerre, la vie n’est pas aisée, les relations ne sont pas naturelles. De qui faut-il se méfier, qui croire, à qui donner sa confiance, voire son amour sans prendre de risque ?

En parallèle, en 2014, on suit Simon, il vient d’être licencié et sa petite amie l’a quitté. Comme il ne sait pas tout sur la famille de son père, d’origine juive, il part en République Tchèque où des gens auront probablement le même patronyme que lui : Ungar. C’est le moment, il a du temps devant lui. Des bribes d’histoires vont jalonner son chemin, l’envoyant d’un lieu à l’autre. Il cherche les liens, dissimule qui il est pour en savoir plus. Il peut suivre une fausse piste, croire un mensonge et s’en emparer comme d’un fait réel. Lui-même se cache derrière différentes identités… Il est tenace et s’accroche à la moindre information, sans pouvoir vérifier.

« Croire. N’importe quoi, tu l’avales. Tu sais que parfois, les gens se souviennent de travers ? Et je suis désolé de te l’apprendre, parfois aussi les gens mentent. »

Les deux approches se recoupent, se complètent, mais chacun interprète à sa façon. Les souvenirs d’Isle sont parfois fragiles, presque confus. Tout se bouscule dans son esprit. Un mot mal traduit, une phrase ou un geste mal interprétés et tout peut être remis en question…. Même le lecteur ne sait plus démêler le vrai du faux.

C’est un roman foisonnant, complet parfois complexe, car on sent que tout ne s’emboîte pas vraiment comme si les réminiscences avaient quelques petites imperfections et c’est bien sûr, volontaire. La vie des personnages est jalonnée par des faits historiques réels et par la mémoire juive, ainsi que des rencontres riches en échanges divers, offrant des portraits forts d’individus de pays et de confessions variés. C’est une quête et une enquête. La quête de soi, de ses origines et les recherches essentielles pour avancer. C’est un texte puissant, à l’écriture fluide qui se lit avec tout un panel d’émotions. On peut sourire, serrer les poings devant l’indicible, ou être heureux lorsque l’amour semble arriver….

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