"Le disparu du Jules Verne" de Guillaume Lefebvre

Le disparu de Jules Verne
Auteur : Guillaume Lefebvre
Éditions : Aubane (6 Mai 2024)
ISBN : 9782487020252
324 pages

Quatrième de couverture

Le 25 février 1997, Antoine Bart, marin à bord du Jules Verne, disparaît mystérieusement au large de
Boulogne-sur-Mer. Les conclusions de l’enquête reposent sur des faits indéniables, mais vingt-cinq ans plus tard, sa fille entreprend des démarches pour faire rouvrir le dossier. L’enquête s’annonce difficile. Avec l’aide d’Armand Verrotier, un ancien officier du navire, la fille de Bart plonge dans les abysses de la marine, un univers impitoyable des gens de mer où l’omerta règne.

Mon avis

Guillaume Lefebvre a été capitaine de navire, c’est dire s’il sait de quoi il parle en situant ses intrigues dans le milieu maritime. Ce que vit son héros récurrent : Armand Verrotier doit être inspiré de ce qu’il a vu pendant les années où il a navigué.

Armand est retraité, aime pêcher et écouter de la musique classique. Il apprécie les jolies femmes mais vit seul dans une petite maison à Cayeux sur Mer, en baie de Somme, lieu que connaît très bien l’auteur. D’ailleurs, il donne envie à ses lecteurs -trices d’aller sur place tant ses descriptions font défiler de belles images sous nos yeux.

Cette fois-ci, l’histoire se déroule en 2022. La fille d’un ancien marin, Antoine Bart, commissaire de bord sur le bateau où travaillait Armand, vient le trouver pour lui demander de faire des recherches sur son père, décédé en 1997. D’après les écrits du responsable de la traversée, ce monsieur était dépressif et se serait probablement suicidé. Le corps a été rejeté par la mer dans un sale état quelque temps après avoir constaté sa disparition.

Même s’il n’avait pas de contacts réguliers avec cet homme, Armand se souvient de lui. De plus, sa fille est plutôt mignonne et il se laisse attendrir. Il fera quelques investigations et lui rendra compte de ses avancées. Elle est d’accord. Mais remonter le temps, vingt-cinq ans en arrière n’est pas simple. À l’époque pas de téléphone portable, les archives n’étaient pas informatisées et la police n’a pas cherché plus loin vu qu’Antoine a mis fin à ses jours.

Armand essaie de rencontrer ceux qui étaient présents, parmi le personnel, sur le Jules Verne au moment des faits. Certaines personnes sont introuvables, d’autres ont tout oublié et pour les dernières, celles qu’il peut rencontrer, elles se taisent ou ne disent que des bribes. Il comprend rapidement qu’une espèce d’omerta s’est installée sur les événements de cette nuit-là et sur certains trafics qui se déroulaient à bord ou à quai. Magouilles qu’il n’avait pas remarquées et qu’il ignorait. De plus, il réalise que ses questions dérangent et que certaines révélations sont mensongères. Pourquoi lui cache-t-on certains éléments ? Rien n’est simple dans ce milieu où les hommes se serrent les coudes, surtout s’ils sont du même côté au niveau syndical. Tout se sait ou presque mais rien ne transpire. En protégeant les autres, sans dévoiler les combines d’achat/revente de certains produits pour se faire un peu d’argent facile, on s’assure une certaine forme de tranquillité. Alors Armand qui ressort tout ça plus de deux décennies après … forcément, c’est un gêneur !

De nombreux thèmes sont abordés dans ce récit. La difficulté de vivre en mer par rapport à la famille (épouse, enfants), et les tentations qui en découlent pour chacun. Les non-dits dans la vie professionnelle ou personnelle, la vieillesse, la solitude…. Le tout intégré dans une enquête bien menée. La construction des chapitres avec des retours en arrière permet d’éviter toute lassitude et éclaire, petit à petit, sur les enjeux du présent. J’apprécié de me retrouver dans cette région, que je connais maintenant. Des informations sont glissées çà et là, on apprend plein de choses, comme le fait que la Chapelle de Saint Valéry (ou Chapelle des Marins) soit surmontée d’une girouette avec, non pas un coq, mais un goéland !

L’écriture et le style sont fluides, on ne se perd pas, on repère bien les différents personnages. Aucun n’est vraiment parfait, comme dans la vraie vie. Leurs caractères sont bien définis, avec des forces et des faiblesses.

J’ai vraiment apprécié cette lecture, non seulement pour son contexte mais également pour toutes les réflexions qu’elle peut engendrer et surtout parce que j’aime bien suivre les raisonnements d’Armand Verrotier !

 

"Filles d’Irlande -Tome 1 : Le secret des Deverill" de Santa Montefiore (Songs of Love and War)

 

Filles d’Irlande -Tome 1 : Le secret des Deverill (Songs of Love and War)
Auteur : Santa Montefiore
Traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Dominique Haas et Stéphane Leigniel
Éditions : Verso (5 Juillet 2024)
ISBN : 978-2386430008
530 pages

Quatrième de couverture

Irlande, 1900. L’année marque le début d’un nouveau siècle et la naissance de deux jeunes femmes bien différentes : Kitty Deverill, une noble anglo-irlandaise intrépide aux flamboyants cheveux roux, et Bridie Doyle, la timide fille de la cuisinière qui aspire à une vie meilleure. Mais elles ont grandi ensemble au château de Deverill et une profonde amitié les lie. Bientôt, leur vie paisible dans ce bastion de la suprématie britannique est menacée par la lutte du pays pour son indépendance.

Mon avis

L’Irlande, un château, des conflits (la première guerre mondiale et la guerre d’indépendance du pays), des familles avec leurs secrets et leurs non-dits, une atmosphère mystérieuse, des personnages intéressants qu’on suit de 1910 à 1925. Tout est réuni pour avoir une agréable lecture sous les yeux.

Une famille noble, anglo-irlandaise (les Deverill), est installée dans un château bâti par leur ancêtre, Barton, sur des terres appartenant aux O'leary. Ces derniers, en colère, ont alors jeté une malédiction sur tous les héritiers mâles du clan jusqu’à ce tort soit réparé.

1910, un couple avec quatre enfants, un garçon et trois filles, habite ce lieu, il y a même les grands-parents. Ils ont de l’argent et vivent entourés de domestiques. La petite dernière, Kitty, neuf ans, est pleine de vie, imprévisible, espiègle, et sa mère n’arrive pas à s’attacher à elle. Elle est rousse, a un regard parfois impertinent, n’a pas la langue dans sa poche. Sa gouvernante essaie de la faire rentrer dans « le rang » mais Kitty aime courir la campagne avec Birdie, la fille de la cuisinière, Jack, et sa cousine Celia quand elle est là.

Elle porte un regard acéré sur tout ce qu’elle observe, tant dans sa famille qu’à l’extérieur. Elle est profondément liée à son pays. Révoltée face à la pauvreté, elle se sent prête à se battre pour garder ses racines, ses amis malgré les différences de niveaux de vie, de religions etc …. Elle s’intéresse aux caractères des individus, à ce qu’ils sont vraiment. Elle est pétillante et sa vivacité rejaillit dans tout le livre. C’est un vrai plaisir de l’accompagner, et quand elle doit faire des choix douloureux, on est peiné pour elle.

Santa Montefiore prend le temps de décrire le contexte et les protagonistes. On s’imprègne des paysages, de l’ambiance, des conditions de vie et des occupations de chacun. On comprend les liens établis entre les uns et les autres. On est au cœur du Comté de Cork, on visualise tout.

Puis viennent les événements, les rebondissements, ce qui était tu ou caché que certains découvrent et les bouleversements qui en découlent. Et là, on est dans l’action, on s’interroge, que va-t-il se passer ?

L’auteur présente à la perfection la vie quotidienne à l’époque, le rôle de chacun, les « codes » (on ne devient pas amie avec une domestique, pourtant c’est le cas de Kitty et Bridie qui de ce fait, ne doivent pas montrer leur affection réciproque), il faut toujours rester dans le « politiquement correct » et on voit combien c’est difficile pour quelques-uns.

J’ai trouvé le fond historique bien documenté et intégré au texte sans que ce soit lourd à lire. L’écriture est d’ailleurs très fluide, plaisante (merci aux traducteurs), le style vif nous maintient en permanence dans le récit.

J’ai été conquise par ce roman (dire qu’il faut attendre décembre pour lire la suite…), il est bien dosé entre les nombreux thèmes abordés, malgré quelques aspects un peu clichés. Il est captivant, pas de temps mort, du mouvement en permanence. On ne s’ennuie pas une seconde. La relation entre Kitty et sa mamie m’a rappelé les conversations que j’avais avec la mienne à qui je me confiais beaucoup.

Bien sûr, j’attends les tomes deux et trois avec impatience puisque certaines questions restent en suspens …