L’aigle des Tourbières
Auteur : Gérard Coquet
Éditions : Jigal (15 Février 2019)
ISBN : 978-2377220595
282 pages
Quatrième de couverture
Au pays de l'Aigle, la coutume ancestrale, le Kanun, fait
force de loi ! Il n'y est question que de vendettas et dettes de sang... Et
dans le nord de l'Albanie, entre contrebandiers, armées des Balkans et clans
mafieux, le Kanun a fort à faire ! Susan s'y retrouve prise au piège avec son
fils Bobby entre les absurdités du régime d'Enver Hoxha et la perte de ses
illusions politiques. Des années plus tard, en Irlande, terre celtique de
beauté et de mystères, Ciara McMurphy, flic de son état, coule des jours tranquilles
entre affaires courantes, Guinness et feux de tourbe jusqu'à ce qu'un rapace ne
vienne troubler sa quiétude...
Mon avis
C’est sombre, c’est âpre mais on en redemande !
Décembre 1981, la secrète Albanie et son dictateur Enver
Hoxha se dévoilent un peu à nous. Gérard Coquet a dû faire de grandes
recherches pour que son intrigue colle à la réalité parfois méconnue de ce coin
d’Europe où il n’est pas facile de pénétrer. Susan est journaliste, pleine d’illusions,
de fougue, elle rêve d’interviewer le camarade Hoxha. Déjà plusieurs mois,
pratiquement un an, qu’elle est sur place, avec son fils Bobby, onze ans. Elle
essaie de s’approcher, de réaliser ce que lui a demandé le journal du Parti
mais on lui demande de s’imprégner de la culture albanaise avant la rencontre.
C’est long…. Elle espère car ce serait l’article de sa vie, si en plus, elle
arrivait à cerner les méandres de la ligne politique de cet homme en dialoguant
avec lui. Mais Susan n’a pas tout dit, elle a caché ses origines irlandaises et
quelques-uns de ses papiers ont éveillé les soupçons. Ça se retourne contre
elle et il lui faut fuir, dans des conditions difficiles….
Octobre 2015, la verte et belle Irlande est là, avec ses
pubs, ses rouquins, ses filles aux taches de rousseur (et au caractère de
cochon), ses landes, ses trolls…..et surtout Ciara, rencontrée dans le roman
précédent de l’auteur. C’est une jeune femme flic qui aime boire de la Guinness,
qui traîne un passé pas facile, et qui déteste qu’on lui dise ce qu’elle doit
faire. Elle préfère, de loin, gérer elle-même toutes les situations, même les
plus délicates…. La voilà qui est appelée avec son binôme Bryan Doyle (à l’opposé
d’elle, il est marié et père de famille) sur une scène de crime. Leur supérieur
leur parle d’Interpol avec qui il va falloir collaborer… La mission est de
retrouver Bobby le Fou, un irlandais qui a passé du temps en Albanie … Les
voilà tous les deux à fouiner, chercher mais ils sont parfois empêchés car ils
dérangent …
Les deux parties sont ainsi reliées. Si dans la première, il
s’agit d’une course contre la montre a un rythme effréné, dans la seconde, c’est
plus centré sur les personnages, les liens entre les uns et les autres, ce qu’ils
cachent, ce qu’ils ont toujours tu … Entre les légendes que l’on peut trouver
dans les deux pays, le Kanun, sorte de code droit albanais, dont un des adages
pourrait être « œil pour œil, dent pour dent », et les clans
irlandais qui érigent des lois, qui se font la guerre, l’ambiance est tendue, l’atmosphère
lourde d’autant plus que les disparitions et les cadavres s’accumulent….
Les pieds enfoncés dans la tourbe, le regard embrumé par le
vent et la pluie, les protagonistes vous tourmentent, vous hantent et vous vous
demandez à quoi ils peuvent s’accrocher pour garder une infime lueur d’espoir ….
On sent que l’auteur se documente, se renseigne avant
d’écrire. Il ancre ses intrigues dans des contextes douloureux où le passé joue
un grand rôle surtout avec tout ce qui peut lier les personnes entre elles.
Parfois, on est ligoté par l’histoire familiale et on n’a pas le choix, on ne
peut pas vivre comme on l’entend….
Gérard Coquet écrit des romans noirs mais il a l’art de
glisser des phrases « décalées » qui allègent le propos. Il y a d’abord les titres
de chapitres qui sont amusants « Tourner l’eau dans le bénitier », ou
des comparaisons truculentes : « Par étapes successives, la femelle de
l’ordre des phocidés s’extirpa de son aquarium à images…. »
Ses histoires ressemblent à une immense toile d’araignée
mais elle est déjà construite : on part de chaque bord et on déroule le fil
pour revenir au centre….
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