Délivre-nous du mal
Auteur : Chrystel Duchamp
Éditions : L’Archipel (20 Janvier 2022)
ISBN : 978-2809843484
308 pages
Quatrième de couverture
Février 2018. Anaïs sollicite l'aide de son ami Thomas
Missot, commandant à la PJ de Lyon. Pour elle, pas de doute, sa soeur Esther a
été enlevée. Les mois passent et, tandis que l'enquête s'enlise, d'autres
jeunes femmes se volatilisent. Jusqu'à ce qu'un corps soit retrouvé. Puis un
deuxième... Thomas sait désormais qu'un tueur en série sévit dans la région.
Mais il ignore encore que ces cadavres ne sont que la partie immergée du plan
machiavélique...
Mon avis
Ce roman commence comme une banale enquête policière. Février
2018, Thomas, commandant à la police judiciaire de Lyon, est sollicité par Anaïs,
une amie. D’habitude, elle lui demande des renseignements pour les polars qu’elle
écrit, afin d’être sûre de ce qu’elle propose, mais là c’est autre chose qui l’a
fait venir vers lui. Sa sœur, Esther, avec qui elle s’est un peu accrochée ne
lui a pas donné de nouvelles depuis une semaine. Elle s’est rendue chez elle et
devant l’état des lieux (le chat enfermé abandonné, du désordre, un téléphone
oublié), elle est intimement persuadée que sa frangine a été enlevée. Thomas lui
explique les difficultés lorsqu’une personne majeure disparaît. Le plus
souvent, c’est volontaire. Devant son insistance, il promet de l’aider mais ne
trouve rien ou si peu…. Il a lui-même des problèmes. Son couple va mal et sa
fille n’a pas l’air heureuse, il n’arrive pas à dialoguer avec elle.
Les mois passent, d’autres femmes ont disparu sans laisser
de trace et sans qu’on établisse de lien. Rien ne bouge, on se retrouve en Mars
2019, où un jeune avide d’urbex (exploration urbaine dans des lieux désaffectés
où des passionnés font des photos) se rendant dans une usine non utilisée
découvre le corps d’une jeune femme. De quoi relancer les investigations et remettre
Thomas et son équipe dans le feu de l’action.
S’il n’y avait que ça à régler, ce serait déjà beaucoup car le
corps découvert a été supplicié mais d’autres événements tragiques arrivent et
l’atmosphère, déjà angoissante, s’alourdit nettement. Les enquêteurs sont sur
tous les fronts et s’interrogent sur les priorités qu’il faut choisir.
Plus on avance dans le récit, plus l’inhumain se fait jour.
Si on pouvait, au départ, penser qu’il s’agissait d’un polar classique, il n’en
est rien. Chrystel Duchamp insuffle un climat terrifiant, parlant de sujets d’actualité
(non, il ne s’agit pas de la pandémie), et envisageant des solutions extrêmes. Elle
souligne notamment le fait de la culpabilisation des victimes dans certains
cas. On peut se poser la question de savoir si ce qu’elle envisage serait
possible. Je pense qu’avec les dérives de notre monde, tout peut malheureusement
arriver.
Les personnages sont bien travaillés, ils ont tous un côté
humain et une part d’ombre. Certains nous révulsent mais n’ont-ils pas eu leur
lot de souffrance avant de commettre l’irréparable ? Cela ne les excuse
pas mais on peut se demander si ce qu’ils ont vécu d’atroce n’a pas déréglé
leur perception des événements, de la vie elle-même, les entraînant dans une
spirale infernale dont ils n’ont jamais pu sortir. C’est également toujours
intéressant de voir que les policiers ont une vie à côté du travail, que tout
n’est pas simple pour eux.
L’écriture de Chrystel Duchamp est accrocheuse, on veut sans
cesse connaître la suite tant pour l’enquête que pour Thomas et sa fille à qui
on s’attache. Le texte est abouti, l’auteur maîtrise très bien l’art du
suspense, relançant régulièrement notre intérêt avec un nouvel élément, souvent
intrigant et dont on cherche le rapport avec les autres faits. Il y a, comme
dans ses précédents titres, une référence à l’art, bien que ce soit plus discret.
Et chaque fois, cela me donne envie d’aller consulter les œuvres qu’elle
évoque. Le contenu monte en puissance au fil des pages, rendant notre souffle
plus court et nous laissant dans l’impossibilité de poser le recueil.
La couverture est bien pensée, on ressent une certaine « unité »
avec le titre précédent, comme une marque de fabrique. Un thriller sans temps mort
et une jeune écrivain qui confirme son talent !
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