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Auteur : Jakub Zulczyk
Traduit du polonais par Kamil Barbarski et Erik Veaux
Éditions : Rivages (24 Mai 2023)
ISBN : 978-2743659134
546 pages
Quatrième de couverture
Marcin Kania, star du rock polonais tombé dans l’alcoolisme,
est surtout connu pour avoir composé un tube rebelle et ironique, « Je t’aime
comme la Russie ». À plus de cinquante ans, il aurait sans doute sombré
sans ses droits d’auteur et sa réputation de légende. Mais lorsque son ancien producteur
lui propose d’investir dans une affaire juteuse, Marcin est bien loin de se
douter de l’enfer qui l’attend.
Mon avis
Boire n’est ni un récit, ni un mystère, ni une gloire*
Le ton est donné, c’est sur fond d’alcoolisme que se déroule
ce récit. L’alcoolisme des gueules de bois qui vous rendent amnésiques, des
vomis, des coups donnés et reçus et oubliés aussitôt, des amis qui en ont assez
de vous voir dans cet état, des séances auprès des alcooliques anonymes où vous
parlez, écoutez et ne retenez pas grand-chose, des promesses non tenues, des pleurs,
des pardons, des nuits hachées, des journées perdues, d’une vie gâchée …..
Quand on lit les notes en fin d’ouvrage, où l’auteur
remercie ses thérapeutes, on comprend qu’il sait de quoi il parle et que son
texte a des accents de vérité. Cela fait d’autant plus mal. Car disons-le
carrément, c’est un livre glauque, dur, terrible. Il nous montre les dégâts
d’une addiction ainsi que les dommages collatéraux. Parce que, à la limite, que
Marcin foute sa vie en l’air, c’est triste et dommage vu que c’est une star du
rock, mais que ça rejaillisse sur sa famille, c’est une catastrophe. C’est
destructeur et plus personne ne peut le supporter, ni sa femme, ni ses enfants.
Son fils et sa fille, son épouse, tous sont épuisés par ses frasques, le fait
de ne pas pouvoir communiquer avec lui car il n’est presque jamais sobre et
quand il l’est, il ne se souvient pas forcément de ce qu’on lui dit.
Dans ce roman plus que noir, en plus des problèmes liés à la
boisson, l’histoire présente les difficultés de la relation père / fils. De
plus, Jakub Zulczyk dénonce le scandale de la privatisation des logements et
égratigne le gouvernement polonais. Il évoque les méthodes de gangsters, les
magouilles, les mensonges, pour arriver au résultat recherché par ceux qui
tirent les ficelles dans l’ombre.
C’est Marcin qui s’exprime, tout est rédigé à la première personne.
Il y a des nombreux allers-retours sans date mais au vu des événements, on sait
exactement où ça se situe dans l’intrigue. On ne peut jamais souffler, on est
toujours dans le chaos, l’espoir semble interdit. Un jour, son fils disparaît
et Marcin veut absolument le retrouver. Il va chercher dans Varsovie et les
environs mais est-il conscient que cette absence est peut-être une conséquence
de ses dérives à lui ? Est-il en état d’agir ?
Avec une écriture nerveuse et sèche (merci aux deux traducteurs), on plonge dans l’horreur d’un couple qui se déchire, d’un homme qui se perd. On suit les rencontres thérapeutiques, les courses poursuites, les peurs, les délires, les cauchemars. Le style est vif, rapide, sans aucun pathos, brut, douloureux. C’est presque épuisant de lire car on retient sa respiration en se demandant jusqu’où on va tomber, enfin pas nous, Marcin…
Je suis ressortie lessivée de cette lecture, j’avais
l’impression d’avoir donné de l’énergie pour maintenir mon esprit dans le fait
qu’il s’agissait d’une fiction, uniquement d’une fiction…. Mais comme c’est,
malheureusement, très réaliste, c’est éprouvant de découvrir le quotidien de
Marcin et de sa famille. Que c’est triste d’en arriver à de telles situations !
Jakub Zulczyk retranscrit à la perfection l’univers torturé d’un père de famille et toutes les conséquences dramatiques qui découlent de son comportement.
La mémoire, c’est la vérité.
La vérité, c’est la douleur.
La douleur, c’est la gueule de bois.
La gueule de bois, c’est tout ce qui reste.
Sans doute.
*page 516
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