Seul le silence (A Quiet Belief in Angels)
Auteur : R. J. Ellory
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Fabrice Pointeau
Éditions : Sonatine (21 Août 2008)
ISBN : 978-2355840135
510 pages
Quatrième de couverture
Joseph Vaughan, écrivain à succès, tient en joue un tueur en
série, dans l'ombre duquel il vit depuis bientôt trente ans. Joseph a douze ans
lorsqu'il découvre dans son village de Géorgie le corps horriblement mutilé
d'une fillette assassinée. La première victime d'une longue série qui laissera
longtemps la police impuissante. Des années plus tard, lorsque l'affaire semble
enfin élucidée, Joseph décide de changer de vie et de s'installer à New York
pour oublier les séquelles de cette histoire qui l'a touché de trop près.
Lorsqu'il comprend que le tueur est toujours à l'œuvre, il n'a d'autre solution
pour échapper à ses démons, alors que les cadavres d'enfants se multiplient,
que de reprendre une enquête qui le hante afin de démasquer le vrai coupable
Mon avis
Lorsqu’on tourne la dernière page de ce livre, on reste
assis un long moment, comme hébété, habité par le contenu saisissant de ce
roman, l’écriture « coup de poing » de son auteur.
Tout au long des pages on voit grandir un enfant, il se pose des questions, il
est tourmenté, il est tellement mal parce que son vécu va « au-delà du malheur
» ... on voudrait pouvoir l'aider, lui dire: "laisse toi aller, dis ce qui
ne va pas …" mais on ne peut pas...Alors on l'accompagne dans sa quête
folle, dans ses démarches qui se retournent parfois contre lui ... Je crois
pouvoir écrire que l'on souffre avec lui ... et de ce fait ... on ne ressort
pas tout à fait indemne de cette lecture ... ou du moins pas indifférent.....
Bien sûr, parfois, on trouve que c’est « un peu trop », qu’il est difficilement
envisageable que tant d’horreurs s’abattent sur une même et seule personne …
Pourtant lorsqu’on se penche un tant soit peu sur l’histoire personnelle de
R.J.Ellory, on s’aperçoit que pour lui « la vie n’est pas un long fleuve
tranquille ». Cet homme a une importante « part d’ombre », une approche
particulière de la solitude (orphelinat, prison), des expériences qui l’ont
marqué au « fer rouge ». Il cite d’ailleurs avant de commencer son livre,
Cynthia Ozick « Ce que nous nous rappelons de notre enfance nous nous le
rappelons pour toujours-fantômes permanents, estampés, écrits, imprimés,
éternellement vus. »
Il est hanté par son passé et écrire doit l’aider à éliminer ses fantômes
personnels ….
« Alors écris le livre »
« Le livre ? »
« Celui que les gens comme toi ont toujours en eux »
Cet échange (page 252), montre, à mon avis, combien, R.J.Ellory porte «
l’écriture » en lui.
Joseph Vaughan, son héros, est hanté par son enfance, par un premier meurtre
resté sans réponse, par ce passé qui lui colle à la peau même lorsqu’il essaie
de s’éloigner.
Trente-quatre chapitres se succèdent, où Joseph s’exprime, raconte ce qu’il
vit. Parfois quelques pages en italiques, une voix off qui reprend des
événements évoqués ou pas par Joseph, qui décortique les pensées, qui analyse,
qui nous chuchote à l’oreille.
Cette voix off, nous permet de pénétrer dans l’intimité de Joseph, de fouiller
avec lui son âme, on est silencieux, immobile pour mieux l’écouter.
J’ai (forcément) apprécié son institutrice qui lui dit : « Écrire est
un don, monsieur Vaughan, et nier son importance, ou faire autre chose
qu’utiliser ses capacités, serait une erreur grave et lourde de sens. »
Elle est peut-être une des rares personnes à avoir compris Joseph, à lui
permettre de ne pas sombrer. Joseph qui veut « récupérer » sa vie, qui ne sait
plus où, comment, pour quoi (en deux mots) vivre, Joseph qui voudrait se
soulager du fardeau du chagrin et pouvoir continuer la route, libéré, mais qui
ne peut pas, tant le passé le poursuit ….
L’écriture nous happe, nous englobe, comme des serres d’angoisse qui se mettent
à nous retenir fermement. On a du mal à s’échapper pour faire autre chose et
lorsqu’on pose ce livre, en cours de lecture, Joseph est encore « présent » en
nous.
R.J.Ellory réussit à nous « faire toucher du doigt » le mal-être de son
personnage principal. Cela va presque plus loin que de l’empathie, l’écriture
est telle que ce Joseph est « en nous ».
C’est douloureux. Parfois, on voudrait avoir le courage de lui dire :
«Lâche-moi, prends ta vie en mains, je ne veux plus t’écouter, te lire…» mais
ce n’est pas possible, une fois commencé, ce livre s’impose à vous et vous
n’avez plus envie de le poser, à part pour « souffler » de temps en temps avant
de mieux reprendre la route aux côté de Joseph ….
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