"Les merveilles" de Viola Ardone (Grande Meraviglia)

 

Les merveilles (Grande Meraviglia)
Auteur : Viola Ardone
Traduit de l’italien par Laura Brignon
Éditions : Albin Michel (21 Août 2024)
ISBN : 9782226491428
404 pages

Quatrième de couverture

Elba porte le nom d'un fleuve : c'est sa mère qui l'a choisi. Seuls les fleuves circulent librement, lui disait-elle, avant de disparaître mystérieusement. Depuis, Elba grandit seule dans cet endroit qu'elle nomme le monde-à-moitié : un asile psychiatrique, à Naples. C'est là qu'elle pose son regard d'enfant, sur le quotidien de cette « maison des fêlés, avec dedans plein de gens qui ressemblent à des félins », nourrissant de ses observations son Journal des maladies du mental. Jusqu'au jour où le jeune docteur Fausto Meraviglia décide de libérer les patients, comme le prévoit une loi votée quelques années plus tôt en 1978, et de prendre Elba sous son aile. Lui qui n'a jamais été un bon père apprend le poids et la force de la paternité.

Mon avis

Ce récit commence en 1982, on fait connaissance avec Elba, quinze ans, née à l’asile où sa mère a été internée car elle avait fauté. Internement abusif bien sûr. Elba a grandi avec elle dans ce lieu puis est allée à l’école des bonnes sœurs avant de revenir (en se faisant passer pour malade mentale) afin de retrouver sa mère. C’est elle qui s’exprime dans la première partie de ce roman. Le phrasé est brut avec des phrases courtes, qui choquent, qui percutent. C’est même un peu « cru ». Elle décrit le monde des fêlés, le monde à moitié avec les calmes et les agités. Certains ne devraient pas être là, les soins ne sont pas forcément adaptés. On « soigne » à coups de cachets, de sangles, d’électro chocs,  parfois …. Écouter les malades ? Non, pas besoin …

Cette première partie n’est pas simple à lire, parce qu’elle renvoie des images de traitements injustes et violents pour les personnes hospitalisés. C’est révoltant car souvent les médecins ne vérifient pas le diagnostic énoncé. On peut se retrouver à l’asile parce qu’on dérange en n’étant pas d’accord avec sa famille….brrrr…. Malgré tout, j’ai eu le sentiment d’une présentation assez édulcoré du lieu et de ses habitants. Comme si l’auteur tenait à les rendre tous attachants.

Deuxième partie, 2019, c’est Fausto Meraviglia, maintenant âgé qui partage ses pensées. Il était « le jeunot », le médecin qui a débarqué à l’asile et qui, tenant compte de la loi 180 (de 1978) a voulu changer les méthodes en offrant aux patients « une ouverture sur l’extérieur ». Il raconte ses combats, ses déceptions, les difficultés rencontrées … Et on découvre cinquante ans après ce qu’il pense de tout ça.

Nous continuons cette lecture avec les années 1988 et 1989 et une dernière partie sur la journée du 31 décembre 2019.

J’ai été emballée lorsque j’ai lu « Le choix » de Viola Ardone et j’attendais beaucoup de ce nouveau titre. Je suis plus mitigée. Peut-être que j’attendais trop ou que le thème général de la folie n’était pas pour moi. Mais je ne regrette en rien ma lecture. La relation que la mère d’Elba tisse avec sa fille est merveilleuse, délicate et vaut à elle seule le détour.

L’écriture de l’auteur (merci à la traductrice) est poétique, pleine d’humanité. La lire c’est un plaisir. Elle ose aborder des sujets qui n’ont rien d’évident. Elle bouscule le lecteur, elle nous oblige à aller plus loin, à nous questionner sur tout ce qu’elle évoque.


"Au pays du matin calme" de Younghill Kang (The Grass Roof)

 

Au pays du matin calme (The Grass Roof)
Auteur : Younghill Kang
Traduit de l’anglais par Claudine Decourcelle
Éditions : Le Livre de poche (1 janvier 1967)
ISBN : 978B0014V0L58
390 pages

Quatrième de couverture

Imagine un pays où il suffit d'être poète pour que toutes les portes s'ouvrent, pour que les honneurs et les cadeaux pleuvent. Ainsi en est-il depuis des millénaires en Corée, jusqu'au début du XXe siècle. Presqu'île séparée de la Chine par la mer Jaune, c'est un empire dominé par la morale de Confucius : le culte des valeurs éthiques et esthétiques, le respect de la tradition en ont fait une nation où le lettré est placé au premier rang de la société; une nation ignorante de la fièvre de progrès qui échauffe l'Occident et, par contagion, le japon - son turbulent voisin à l'étroit sur ses îles. Dans ce «pays de l'Utopie», une paix dorée règne encore en 1903 quand naît Chung-Pa (le futur Younghill Kang). Comme son oncle le Fou-Poète, il ambitionne de devenir pak-sa, un lettré, mais le coup de force japonais de 1907 anéantit ses projets. Assimiler la science occidentale est nécessaire pour survivre, il en a une si vive conscience qu'il s'insurge contre la tradition et s'enfuit afin d'étudier dans une école occidentale.

Mon avis

Né en 1903 dans l'actuelle Corée du Nord, Younghill Kang a fait ses études en Corée et au Japon. Il a émigré aux États-Unis en 1921. Il est décédé en Floride, en 1972.

Ce livre qui raconte son enfance et le début de son parcours, jusqu’à son immigration vers les Etats-Unis, a été publié en 1931.

C’est une autobiographie où l’auteur se livre et dépeint la Corée au début du dix-neuvième siècle. L’image est un peu figée, surannée. On découvre les habitudes, les modes de vie des habitants (mariage, enterrement, vie scolaire…). Lui, c’est un gamin comme un autre, mais il écrit des poèmes. Cette forme d’expression unique qu’est l’écriture est déjà très présente dans sa vie. Devenir quelqu’un, un érudit, est son but.

Arrive ensuite l’occupation de la Corée par les japonais et les difficultés qui en découlent. Il doit revoir ses projets et finira par fuir pour étudier ailleurs, dans une école occidentale.   

J’ai lu ce livre dans une version éditée en 1937, avec des pages jaunies, une toute petite police de caractères, une odeur vieillotte … Est-ce pour cela que je ne suis pas très emballée par ma lecture ? Je ne sais pas. Les premières pages m’ont pourtant bien intéressée. J’avais le souhait de connaître l’évolution du narrateur. Peut-être que ce que j’ai découvert de lui dans le livre 2  (une certaine forme de mépris, un peu de racisme et de suffisance…) m’a déçue. Ses critiques sont assez violentes et pas forcément très argumentées. Mais je reconnais que le contenu est à découvrir.

La traduction (de l’anglais) est inégale avec des erreurs de concordance de temps ou des mots que je n’aurais pas choisis… Cela donne une lecture inégale et moins plaisante. Dommage….


"L'Homme qui voulait sauver son âme" de Jean-François Zamboni

L’homme qui voulait sauver son âme
Auteur : Jean-François Zamboni
Éditions : Publishroom Factory (19 septembre 2024)
ISBN : 978-2386254987
334 pages

Quatrième de couverture

Puisque vivre c’est avoir des sensations. L’amour serait-il l’essentiel de l’âme ? Mais ressentir son âme, est-ce vraiment possible ? Une expérience dans le but de contrôler la pensée des animaux afin d’améliorer leurs capacités à servir les hommes. Le besoin d’un professeur de trouver une aide discrète pour ses recherches et d’un étudiant surdoué. Lorsque Fracasse, un éminent scientifique propose à Jacques, sous condition d’une loyauté sans faille de l’aider sur ses travaux en laboratoire, il accepte.

Mon avis

Ce roman, avec une histoire plus qu’improbable, fait la part belle aux réflexions, presque philosophiques sur la place de l’homme, de la nature et des liens entre les deux, ainsi que la notion de conscience.

Jacques, étudiant brillant, et Julie, sa petite amie, sont invités par le professeur Fracasse, chercheur en plus d’être enseignant. Officiellement, il veut leur parler de la chasse et des animaux et de leur « philosophie » car ils ont eu un échange un peu chaud à la faculté. C’est un homme quelques fois irascible mais captivant pour ses élèves. Dans son cours, les discussions sont nombreuses et animées. Julie est mal à l’aise face à cet homme un peu « illuminé », obsédé par certaines idées. Quant à Jacques, il lui trouve des excuses et semble fasciné par lui, presque trop d’ailleurs. On sent que l’influence de Fracasse est importante pour le jeune universitaire.

D’ailleurs lorsque son prof le met dans la confidence sur ses recherches, Jacques sait qu’il doit se taire pour préserver ce rapprochement qui peut lui apporter un plus dans ses études. Quelles sont ces investigations si fascinantes ?  Le pédagogue mène des expériences sur la conscience des animaux et l’âme humaine et il propose à Jacques d’en apprendre plus à ses côtés, dans son laboratoire secret. Le disciple se laisse convaincre par le maître et le rejoint pour une découverte unique.

Ce qu’il a oublié c’est que ce dernier lui a demandé d’être discret et dévoué, pratiquement « corps et âme ». Et cela risque d’aller très loin.

Je n’en dirai pas plus pour ne rien dévoiler de ce livre, original et troublant. Par quoi est dominé notre vie ? Quelle place laisse-t-on à la science ? Comment empêcher les dérives lorsque les progrès vont trop loin ? Qu’est-ce que la conscience, comment la définir, la percevoir ? L’âme existe-t-elle ?

Avec cette histoire, l’auteur nous entraîne sur des chemins ésotériques, surprenants, avec des pensées très réfléchies et pertinentes.

« Aucune vérité n’existe sans reconnaissance pour les Hommes. C’est pour cela que la nature n’a pas besoin de morale et sera toujours inaccessible à leur compréhension. L’humanité invente ses racines et rêve d’une vérité absolue, la Terre tourne et les Hommes se perdent. »

La tournure des événements m’a un peu déconcertée et c’était bien car j’aime être surprise dans mes lectures, découvrir un univers auquel je n’avais pas pensé et c’est le cas avec ce récit.

J’ai trouvé intéressant la façon dont sont amenés les ressentis et les émotions de Jacques, son évolution. L’écriture de Jean-François Zamboni est primordiale dans tout ce cheminement. Il y a la qualité du vocabulaire, la tournure des phrases, la construction du texte, le fond et la forme sont en équilibre. Il réussit à nous captiver, à nous emmener dans un monde où les repères se jouent de notre rationalité. C’est parfois déroutant, ça bouscule et c’est excellent pour notre cerveau car une fois la dernière ligne lue, on réfléchit encore à tout ça !

 

"Paris District Zéro" de Jérémy Bouquin

 

Paris District Zéro
Sam enquête en no-gone zone
Auteur : Jérémy Bouquin
Éditions : The Melmac Cat (24 Octobre 2024)
ISBN : 978-2-492759-22-2
242 pages

Quatrième de couverture

Après que la démocratie s'est effondrée en Europe, un nouveau pouvoir s'est imposé en France. Samantha, anciennement Samuel, était détective privée et s'obstine à continuer à enquêter. Face à des gangs violents et à des politiciens corrompus, elle s'efforce de retrouver une jeune femme, Clarisse, qui a mystérieusement disparu.

Mon avis

Et si ….

Et si c’était vrai, si la démocratie tombait dans les oubliettes, si le pays était fractionné avec des frontières intérieures, des clans, une surveillance accrue qui bride, étouffe et « tue » les libertés ? Qu’est-ce qu’on ferait ? Se rebeller quitte à se mettre en danger ? Se taire et se glisser dans le moule en attendant que des jours meilleurs arrivent ? Que peut-on espérer dans ce genre de situation ? Peut-on croire encore en l’homme ? En son empathie ? En son humanité ? Et sur qui compter ?

C’est dans cette atmosphère anxiogène que Jérémy Bouquin situe son dernier roman. Les gens qui vivent dans cette terrible époque ont des difficultés à être eux-mêmes car se dévoiler, montrer ses penchants, ses relations si cela ne correspond pas à la « norme », à ce qu’attendent ceux qui ont le pouvoir, c’est être en marge, et déranger et quand on dérange, l’étau se resserre. Alors la plupart deviennent « transparents », évitent les conflits, essaient de se faire oublier.

Au milieu d’eux, il y a Samantha. Autrefois c’était Samuel, flic de son état, devenu détective privé. Elle aime enquêter, comprendre les rouages, agir pour ce qu’elle pense être une bonne cause. Peut-être est-elle parfois un peu trop naïve, trop confiante ? Elle prend le risque d’être manipulée… et ce n’est jamais agréable surtout quand on s’en rend compte, le plus souvent, trop tard.

Dans Paris, ce ne sont plus les bonnes personnes qui tiennent les rênes du pouvoir, la capitale est aux mains des gangs. La loi ? C’est celle de la jungle, du plus fort, de celui qui écrase les autres.

Samantha, femme piégée dans un corps d’homme est attachante, touchante. Elle a parfois du mal à se situer parce que sa transformation n’est pas complète mais elle avance au milieu de ce tumulte. Elle répond à des missions délicates avec les moyens dont elle dispose en faisant tout pour déjouer les pièges d’une « administration stricte qui surveille tout en permanence. Parfois elle a peur, elle prend de gros risques mais a-t-elle vraiment le choix ?

Lorsque Tabatha lui demande de retrouver Clarisse, Sam se décide à l’aider sans trop savoir par quel bout prendre cette disparition et les investigations qui vont avec. Mais elle a toujours aimé mener l’enquête et en se servant de quelques personnes bien placées, elle peut obtenir des informations. Elle ne sait pas, évidemment, que rien ne va être facile et qu’elle s’embarque dans une histoire pleine de ramifications, qu’elle ne pourra plus maîtriser.

L’auteur nous emmène dans un récit choc, qui bouscule. Le verbe est haut, les actions brutales. La violence est monnaie courante. Mais quelques fois, entre les lignes, un peu de tendresse apparaît et alors le lecteur respire. Il y a des rebondissements, des protagonistes hauts en couleurs. C’est bien écrit, avec du punch, du rythme, de l’action. En filigrane, cet écrit nous offre des pistes de réflexions, de discussions. On se dit, une fois encore, qu’on doit être vigilant, ne pas se laisser bercer par certaines paroles … On le sait, encore faut-il s’en souvenir et agir dans le bon sens ….

"Aranea – La légende de l’empereur" d'Alexandre Murat

 

Aranea – La légende de l’empereur
Auteur : Alexandre Murat
Éditions : Fleuve (22 Septembre 2022)
ISBN : 978-2265155763
370 pages

Quatrième de couverture

Mai 1821. Napoléon sent la mort arriver. Avant de s'éteindre, il ordonne que sept aigles en argent bien particuliers soient distribués à des proches, initiés au grand secret qu'ils recèlent.
Novembre 2018. Alex, professeur réputé d'histoire des Civilisations, et Mary, directrice d'une agence de sécurité, sont embauchés par un milliardaire américain, James Wisslemore, pour retrouver ces aigles qui doivent mener à une découverte hors du commun : trésor inestimable, objet risquant de changer la face du monde ou secret fantasmé ?

Mon avis

L’auteur est un descendant du maréchal Murat, beau-frère de Napoléon et je ne doute pas un instant qu’il a pris autant de plaisir à écrire cette histoire que moi à la lire.

On commence dans le passé avec Napoléon qui donne des aigles en argent à des personnes de son entourage. Il faut les rassembler, les observer et décrypter les inscriptions sur leur socle. Tout cela mènera à une découverte extraordinaire ne devant pas être exploitée par n’importe qui. Pourtant, cela attire la convoitise de nombreux individus, pour de bonnes ou de mauvaises raisons …. Et tous veulent ces aigles !

On bascule rapidement dans le présent (2018) et on fait connaissance avec un trafiquant d’art astucieux, organisé mais peut-être pas infaillible.  Il a un vaste réseau, et sait se couvrir en mettant plusieurs intermédiaires qui font écran et ne savent pas que les autres existent. Ainsi il cloisonne et se protège. Bien entendu, les aigles, il décide que c’est pour lui !

En parallèle, on découvre un milliardaire américain, James Wisslemore. Il sait que les aigles existent et a bien l’intention de tous les récupérer, quitte à mettre d’énormes sommes sur la table des négociations. Pour arriver à ses fins, il recrute deux personnes. Alex, un professeur d’université passionné par tout ce qui touche de près ou de loin à l’Empereur. Mary, directrice d’une agence de sécurité, capable de tuer et de se battre. Comme James est particulièrement doué pour présenter les faits en n’hésitant pas à manœuvrer et travestir un tantinet la vérité, les deux cèdent et acceptent de travailler pour lui.

On ne fait pas plus opposés que ces deux-là. L’enseignant est calme, réfléchi, agréable, droit dans ses bottes, incapable de tricher, de mentir. Ses émotions le bouleversent quelques fois. Elle, c’est un feu follet ou un feu d’artifice. Elle va, elle vient, elle n’a peur de rien et n’hésite pas à voler, voire à tabasser et plus, tout en restant maîtresse d’elle-même et de ses émois …. Il faut pourtant qu’ils collaborent …. Pas facile de se comprendre, de discuter lorsqu’on est si différents, mais avec un peu de doigté, en faisant des concessions, ils peuvent, probablement, y arriver. Mais comme on dit, chassez le naturel ….

Avec une belle documentation historique, intégrée finement au récit, Alexandre Murat a su me captiver et m’entraîner dans son histoire. Pas de temps mort, les courses-poursuites et les jeux d’influences s’enchaînent, chacun essayant de se jouer de Mary et Alex afin de profiter de leurs compétences. Combien sont-ils à tirer les ficelles dans l’ombre ? Que veulent-ils exactement et pourquoi ?

L’écriture vive et fluide, les dialogues très vivants et les rebondissements maintiennent en permanence non seulement notre intérêt mais aussi notre envie d’en savoir plus. Le côté historique est captivant car au final, j’ai reçu des informations sur Napoléon que j’ignorais et c’est plus qu’agréable d’apprendre en lisant !

C’est donc une lecture comme je les aime. Dépaysante, emballante, prenante. On voit que l’auteur maîtrise parfaitement son sujet, il dose très bien le suspense, le côté amour pour pimenter, le rythme pour nous scotcher aux pages, les éléments de la grande Histoire. Les personnages ne sont pas trop manichéens, certains sont même capables de nous faire changer d’opinion sur eux.

Un bel équilibre pour un recueil réussi ! Vivement un autre titre !

"Ce monde par-delà l’océan" de Laura Spence-Ash (Beyond That, The Sea)

 

Ce monde par-delà l’océan (Beyond That, The Sea)
Auteur : Laura Spence-Ash
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Danièle Momont
Éditions : L’Archipel (24 Octobre 2024)
ISBN : 978-2809848120
360 pages

Quatrième de couverture

Alors qu'en 1940 les bombes allemandes pleuvent sur Londres, Millie et Reginald Thompson, tous deux issus de la classe moyenne, prennent la décision déchirante d'envoyer leur fille unique de 11 ans en Amérique pour la protéger. À Boston, Beatrix est accueillie par un couple aisé, Nancy et Ethan Gregory. Quand vient la fin de la guerre, synonyme de retour en Angleterre, Beatrix parviendra-t-elle à trouver sa place dans ce pays qui lui est devenu étranger ?

Mon avis

J’ignorais totalement que des enfants anglais avaient été envoyés dans des familles américaines, pour être en sécurité, pendant la seconde guerre mondiale. J’ai fait quelques recherches et découvert que cette évacuation avait pour nom : opération Pied Piper. Le but était de les protéger en les sortant des grandes villes, dont Londres, cibles des bombardements. Ils ont été très nombreux à partir. Certains vers les campagnes plus rassurantes mais en restant en Grande Bretagne, d’autres avec leur valise, sur un paquebot, vers un pays inconnu sans savoir quand ils allaient revenir chez eux. Les adultes ont agi ainsi pour leur bien sans mesurer le traumatisme et les répercussions….

Fille unique, Beatrix a onze ans et ses parents, par amour, décident de son départ « par-delà l’océan ». Une valise, une étiquette épinglée sur sa veste et la voilà sur les flots. Une fois à Boston, c’est la famille Gregory qui l’accueille. Le couple a deux garçons : William et Gerald. La mère a toujours rêvé d’avoir une fille et elle va s’attacher à celle que le destin lui confie : Beatrix, qu’ils appelleront Bea.

Bea découvre le quotidien d’une famille aisée, sans tension (alors que chez elle, il arrivait que son père et sa mère se disputent et ils étaient de condition modeste). Son âge la situe entre les deux fils, comme un trait d’union. Ils l’aiment, elle adopte leur mode de vie. Bien sûr, elle écrit des courriers et en reçoit mais chacun reste un peu sur la réserve et au fil du temps, le contenu des lettres devient moins fluide, moins naturel.

Ce n’est pas que Beatrix oublie son papa et sa maman, c’est juste qu’avec la distance, les occupations, le temps passe et malgré quelques photos, ce n’est plus vraiment pareil. Elle s’est habituée à cette nouvelle vie, elle y a pris ses marques et de l’autre côté de l’océan, le temps a filé aussi avec ses joies et ses peines. Millie, sa mère, se rend bien compte que sa fille reçoit des biens matériels qu’elle ne pourrait pas lui offrir et cela lui serre le cœur.

Mais quand la guerre se termine, Beatrix doit rentrer. Des années après, va-t-elle se sentir chez elle ou une étrangère ? Où est sa place entre toutes ces personnes qui l’aiment, de chaque côté de cette immense étendue d’eau ? Et elle, où en est-elle dans son cœur, que souhaite-t-elle ? Peut-on aimer deux familles, deux lieux ?

Ce livre m’a intéressée et je l’ai énormément apprécié. Je l’ai trouvé bien construit. On passe d’un personnage à l’autre sur quelques pages avec le ressenti et le vécu de chacun. L’histoire s’étale de 1940 à 1977 avec des flashs plus précis sur certaines périodes. Ce récit montre que les adultes peuvent être maladroits, que parfois on fait mal en croyant faire bien. On se trompe, on le reconnaît ou pas. Quelques fois très tardivement on fait ce qu’il faut pour réparer une erreur et ainsi les choses s’apaisent.

J’ai trouvé cet opus profond et complet dans tout ce qu’il présente : la vie de chacun, les émotions, les conséquences de chaque choix, les dégâts inévitables qu’ils peuvent entraîner. Ce n’est pas simple de trouver la bonne attitude, la bonne distance, d’être juste, d’accepter ce qu’on ne peut pas changer.

L’écriture (merci à la traductrice) est fluide, prenante. Laura Spence-Ash explore avec doigté les caractères, les relations des protagonistes. Elle montre que tout ne peut pas être dit, parce qu’il faut savoir préserver certains aspects de sa vie pour qu’ils restent magiques, à part.

« Certains secrets se révèlent lourds à porter. D’autres sont des cadeaux, ils vous réchauffent, ils sont faits pour qu’on y retourne sans cesse. »

Je ne vais pas perdre de vue cet auteur !

"Secrets" de Hee-kyung Eun (Bimil gwa keojitmal)

 

Secrets (Bimil gwa keojitmal)
Auteur : Hee-kyung Eun
Traduit du coréen par Kim Young-sook et Arnauld Le Brusq
Éditions : Picquier (2 Février 2017)
ISBN : 978-2809712292
352 pages

Quatrième de couverture

A la mort de son père, Yeongjun, cinéaste audacieux mais homme taciturne et sans attaches, revient dans sa ville natale qu'il a quittée il y a vingt-cinq ans. Il y rencontre son frère et apprend que sur son lit de mort, leur père les a chargés d'une étrange mission : vendre la maison de leur enfance et faire don du fruit de la vente à une inconnue. Dès lors se lèvent les échos bruissants du passé, réveillant rêves et souvenirs, ranimant la violente rivalité des frères au temps où ils se disputaient l'attention d'un père dominateur qui a façonné leur personnalité et leur devenir d'homme.

Mon avis

Celui qui ne possède aucune richesse intérieure n’éprouve aucun goût à vivre et tout lui est indifférent. » (page 215)

Si j’ai vu quelques, très bons, films coréens, je ne me suis jamais penchée sur la littérature de ce pays. L’autrice de Secrets est connue et reconnue, l’occasion était donc là pour une découverte totale de ce roman et de Eun Hee-kyung.

C’est à pas feutrés et avec beaucoup de détails qu’on s’imprègne de cette histoire. L’écriture (bravo aux deux traducteurs) est pointilleuse, précise, « analytique ». Rien n’est laissé au hasard, ni les faits, ni les pensées de chacun. Il faut que le lecteur soit au courant de tout ou presque, je vous rappelle que le titre est « Secrets » avec les tenants et les aboutissants de ce type de situation. Le tout est parfaitement développé pour qu’on ne se perde pas (même si je suis persuadée que certains penseront qu’il aurait fallu « écrémer »).

Yeongjun est réalisateur, il a fui la ville de K. trop terne, pour faire sa vie ailleurs. Son frère, Yeongu, est resté sur place et à la mort de leur père, il reprend contact avec lui. Ils n’ont que peu de liens mais ils vont bien être obligés d’agir ensemble même si l’aîné n’en a pas envie. La tâche qui leur incombe est de vendre la maison où ils ont vécu enfants et de donner l’argent à une inconnue. Mais quelle idée a eu leur paternel dans ses dernières volontés ? Cette demeure en elle-même est une part cachée de leur vie.

Nous arrivons dans la ville de K. que nous voyons par les yeux de Yeongjun, il est assez détaché de ce qu’il examine mais ses ressentis et ses fines observations nous permettent de comprendre comment s’est construit cette cité. On le suit dans ses pensées qui font des allers-retours, qui partent sur une autre voie avant de revenir. Ce n’est pas linéaire donc ce n’est pas aisé à lire mais c’est unique par l’atmosphère qui se dégage. À travers l’histoire de cette famille sur trois générations, c’est aussi l’histoire d’un pays que l’on aperçoit.

Un des personnages s’interroge : « Pourquoi est-ce à moi de porter les secrets des autres depuis plus de trente ans ? »

Qu’en est-il de ces secrets qui unissent et désunissent les familles ? Qui rongent ? Qui changent les relations ? Qui installent suspicion et mensonges ? Au fil des pages, ce qui était tu ou caché se dévoile avant parfois d’être recouvert d’un voile flou.

Pour moi, ce récit ne ressemble en rien à ce que j’ai déjà lu, il se mérite car la construction n’est pas ordinaire. Ce qui est le plus marquant, c’est ce style, parfois épuré pour parler de certains individus qui ont moins d’importance, alors qu’il est infiniment précis pour les principaux protagonistes.

C’est l’histoire d’une famille, d’une ville, d’un pays. Les trois se sont construits, ont quelques fois été détruits, ont rebondi plus ou moins bien, ont été aimés ou détestés mais tous ont grandi, comme le lecteur au contact de ce texte qui le fait sortir de sa zone de confort, qui l’oblige à ouvrir son esprit pour mieux ouvrir son cœur et laisser le phrasé de Eun faire son chemin en nous.

"La trilogie de Copenhague - Tome 3 : Dépendance" de Tove Ditlevesen (Gift)

 

La trilogie de Copenhague - Tome 3 : Dépendance (Gift)
Auteur : Tove Ditlevesen
Traduit du danois par Christine Berlioz et Laila Flink Thullesen
Éditions : Globe (17 Octobre 2024)
ISBN : 978-2383612650
242 pages

Quatrième de couverture

Tove est désormais une poétesse publiée et reconnue, mais c’est avec les aléas des relations conjugales qu’elle doit maintenant composer. Alors que son premier mariage se défait, la jeune femme entre dans l’âge adulte et apprend, de la plus dure des manières, que le monde des femmes n’est décidément pas celui des hommes. L’appel de sa machine à écrire restera, comme un phare dans le brouillard, ce à quoi elle s’accrochera.

Mon avis

Ce livre a été écrit en 1971, cinq ans avant le suicide de l’auteur. On peut considérer que c’est le tome 3 de ses mémoires. Nous découvrons Tove dans une période de sa vie où c’est une poétesse reconnue, avec une certaine notoriété. Mais elle a toujours une personnalité trouble. Elle est mal à l’aise avec les sentiments, elle aime sans aimer pour aimer, mais sans vraiment s’investir dans la relation. Ce qui la porte, la nourrit, l’enflamme, c’est l’écriture. Et pourtant écrire est resté longtemps secret et interdit pour elle lorsqu’elle était jeune. Sans l’écriture, elle n’existe plus. Tout lui semble fade. Son style est poétique, parfois épuré mais toujours porteur de sens.

« Je n’ai que vingt ans, mais je sens bien que la vie, hors de ces pièces vertes, file en fanfare pour les autres, alors que les journées me recouvrent insensiblement comme de la poussière, l’une après l’autre, toutes exactement semblables. »

Elle a besoin de poser des mots, de rédiger des poèmes, des romans, ou de parler de sa vie comme dans ce recueil. Elle le fait avec un naturel désarmant, sans filtre, ni pathos. Elle décrit ses émotions, les situations qu’elle traverse, elle dit ses besoins, ses angoisses…. On la sent fragile et en parallèle pleine de force lorsqu’elle prend une décision. Ella parle de ses mariages, de ses choix face à la grossesse, de ses priorités. On a l’impression qu’elle ne s’interdit rien ni dans son quotidien ni dans ce qu’elle choisit d’exposer au grand jour par ce texte. De qui, de quoi est-elle vraiment amoureuse ? Des hommes ave qui elle vit ou de ce qu’ils peuvent lui apporter ?

Elle raconte également ses dépendances, à l’alcool, à une certaine forme de drogues. On pourrait être choqué qu’elle dise les choses aussi crument mais son style (merci à la traductrice) sans fard, est limpide. Elle n’en rajoute pas, elle rédige et par choix, elle dit tout. Elle en est attachante et bouleversante de naturel, offrant son vécu avec une certaine simplicité.

Son récit évoque également la place de la femme dans la société danoise à l’époque, entre 1940 et 1971 à peu près. Elle cherche la sienne, comme si être « adoubée » en tant qu’écrivain n’était pas suffisant. Pourtant c’est son seul moteur, son seul désir. Elle ne se cache pas, elle se met à nu, quitte à déplaire, perdre le peu d’amis qu’elle a. Elle est en perpétuelle lutte pour rester entière dans ce qu’elle veut être. Je pense sincèrement que parfois, elle a fait de l’ombre aux hommes qui la côtoyaient et que cela ne leur plaisait pas. Elle dérangeait mais jamais elle n’aurait accepté de s’effacer.

On sent derrière cette femme régulièrement au bord de la névrose, la petite fille qu’elle a été, celle qui voulait être écrivaine, qui se sentait habitée par les mots, qui ne pouvait pas vivre sans écrire et qui le dit si bien. J’espère que malgré tout ce qui a été difficile pour elle, elle a su être heureuse.

 

Le titre original est Gift qui signifie à la fois marié et poison. C’est très significatif pour ce recueil sombre et éblouissant à la fois.


"Et ils vécurent heureux malgré tous leurs enfants" de Raphaëlle Giordano

 

Et ils vécurent heureux malgré tous leurs enfants
Auteur : Raphaëlle Giordano
Éditions : Récamier (17 octobre 2024)
ISBN : 978-2385771188
338 pages

Quatrième de couverture

" Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants... " Les contes ne racontent pas la suite. Et pour cause. Être parent n'est pas un chemin bordé de roses ! Qui pourrait affirmer sans mentir qu'il n'a jamais eu " mal à ses enfants " ? D'où les petites crises de daronnalgie, ces douleurs spécifiques à la parentalité. C'est ce qui arrive à Andrea, en difficulté avec sa fille de seize ans, Suzanne. Un jour, une opportunité inattendue se présente à elle, un casting national pour une nouvelle émission de téléréalité : La Darons Academy.

Mon avis

« Je voudrais vivre sur une île déserte, quelques jours. Je n’en peux plus de mes gosses. » Je crois que beaucoup de parents ont été effleurés par cette pensée ou une similaire … On est bien d’accord, certains jours c’est trop ! On a beau aimer ses enfants, parfois on ne les supporte plus. Pas eux, mais tout ce qu’on doit assumer pour que ça « tourne ». Anticiper, penser à (tout un tas de choses sauf soi), ne pas oublier de, organiser, prévoir etc. Qu’on soit homme ou femme, on se doit d’être un « daron à la hauteur » si possible bien meilleur que celui de la famille d’à côté.

Andrea dont on fait la connaissance au début de ce roman est une mère et une épouse qui essaie de s’en sortir au mieux entre les crises d’adolescence de sa fille, les regards indifférents de son époux. Elle est à bout et ne sait plus quoi envisager pour respirer un peu, prendre du recul, recontrôler sa vie et ne pas se faire « bouffer ». On reconnaît dans son portrait (même si parfois c’est un peu caricaturé) un ou une ami(e), quelqu’un de sa famille, une connaissance ou soi-même ….. Quand une maman ou un papa n’arrive plus à gérer, que faire ? Les conseils des uns et des autres, ce n’est pas toujours la bonne solution….

Alors lorsqu’Andrea, en train de faire son marathon de superwoman au centre commercial, est alpaguée par un animateur avec un flyer pour la « Daron Academy, une émission de téléréalité elle le prend. Elle ne sait pas ce qu’elle fera de ce papier mais on ne sait jamais. Arrivée chez elle, face à tout ce qui la submerge, elle se dit qu’elle ferait bien de postuler. L’idée de passer six semaines dans un château avec d’autres parents lui plaît bien. Ce serait l’occasion de vivre pour soi, de discuter avec d’autres darons, confrontés eux aussi aux comportements imprévisibles de leurs enfants. Est-ce que c’est une bonne idée ? On sait bien que parfois, ces émissions sont « scénarisées », que la production induit les attitudes, manipule les images…. Sa fille supportera-t-elle de voir sa mère ainsi exposée et elle aussi par ricochets ?

Dans ce nouveau titre, Raphaëlle Giordano s’est appuyée sur de nombreux témoignages de familles (elle explique et partage de nombreux documents dans les dernières pages) qui, sans tabou, font part de leurs difficultés, de ce qu’ils n’ont pas osé exprimer, ce qu’ils ont tu. Dans le récit lui-même, il y a des lettres émouvantes, magnifiques, criantes de vérité.

Quant à la Daron Academy, l’auteur égratigne, avec humour, dérision et même un peu de causticité, le monde quelques fois superficiel de la télévision. Elle a une plume alerte, amusante, capable de faire rire, mais aussi d’émouvoir comme dans les courriers qu’elle introduit dans son texte.

J’ai eu un peu de mal à entrer dans l’histoire, je ne ressentais pas assez d’émotion, j’avais envie de prendre les choses en mains et de secouer tout ce petit monde. Puis petit à petit, je me suis attachée à Andrea, qui veut être forte, malgré ses faiblesses, ses manques, et qui va peut-être s’autoriser à être elle-même. Finalement, lorsque les masques tombent, on entre dans la vraie vie ….

C’est une histoire pétillante, par ses côtés fantaisistes et divertissants, mais également très juste dans l’approche du métier de parents. Le ton n’est pas moralisateur mais quelques pistes sont suggérées (lâchez du lest, ne pas s’oublier ni oublier son couple etc.) Et bien sûr qu’on sait tout cela mais le lire sous la plume de Raphaëlle Giordano, ça fait du bien !

"Le chat du Rocher – Tome 4 : L'affaire du sapin assassin" de Sandra Nelson et Alice Quinn

 

Le chat du Rocher – Tome 4 : L'affaire du sapin assassin
Auteurs : Sandra Nelson & Alice Quinn
Éditions : Bookelis (16 Octobre 2024)
ISBN : 979-1042429041
270 pages

Quatrième de couverture

Qui aurait cru qu'un sapin de Noël pouvait être une arme fatale ? Lors d'un gala de charité au profit d'un orphelinat indien, un convive est écrasé par un immense sapin. Accident ? Pour Calypso Finn, ex-actrice devenue brocanteuse dans le village du Rocher, c'est un meurtre ! D'autant plus que des cartes menaçantes illustrant les sept péchés capitaux, transforment les fêtes en cauchemar. Aidée par son chat Poker, plus rusé qu'un espion du KGB sous couverture mexicaine et sa tante Peggy, qui lit l'avenir dans le champagne, Calypso mène l'enquête sur le gourou, président de l'orphelinat.

Mon avis

Quel bonheur de lire à nouveau les deux amies écrivaines, Alice et Sandra. On ne sent pas de coupure, le style de l’une ne domine pas celui de l’autre. C’est fluide, agréable et suffisamment « animé » pour que notre intérêt ne faiblisse pas.

J’ai retrouvé avec plaisir, Calypso Finn, ex-actrice de telenovelas au Brésil, trahie par son mari. Elle s’est installée, en France, sur « le Rocher », chez sa tante. Elle l’aide à tenir une brocante mais ce qu’elle aime par-dessus tout, c’est mener l’enquête. En effet, elle a collaboré avec Vadim, le policier du coin. Collaborer est peut-être un peu exagéré. Disons que les circonstances, la curiosité de Caly, son sens de l’observation ont aidé Vadim. Bien entendu, il aimerait mieux qu’elle reste à sa place mais toute information est bonne à prendre, n’est-ce pas ? Alors, pourquoi ne pas l’écouter, d’autant plus si ça permet de résoudre les affaires qui lui sont confiées. Et puis, je me demande (et je ne suis pas la seule, vu les réflexions de certains personnages) s’ils n’en pincent pas l’un pour l’autre. De là, à ce que les principaux intéressés le reconnaissent, c’est autre chose….

Cette fois-ci, on est en pleine préparation des fêtes de fin d’année, l’ambiance est à la fête, sapins, petits lumignons et cotillons sont de sortie. Sauf qu’un plaisantin (c’est ce que tout le monde suppose) s’est amusé à envoyer des cartes de vœux désagréables (ne comptez pas sur moi pour vous donner des détails). Chaque récipiendaire se sentant particulièrement visé, l’expéditeur doit être un familier mais qui ? Et pourquoi ? Qui est ciblé et dans quel but ? Calypso s’interroge mais n’a pas tous les éléments.

Elle doit aider à préparer une soirée de gala organisée au profit d’un lieu d’accueil pour enfants abandonnés en Inde. C’est Colette, une veuve du Rocher qui, amoureuse de Shankar Kapoor, authentique gourou, directeur de l’orphelinat et responsable d’un ashram, a décidé de cette manifestation. Certains sont un peu sceptiques mais tout le monde y met du sien pour que ce soit réussi. Caly est présente et examine tout, comme à l’accoutumée. Certains faits la titillent mais elle ne cherche pas plus. Tout à coup, c’est le drame. Un accident de sapin et un homme mort au sol. Fait rarissime qu’un arbre décoré s’écroule et tue quelqu’un. Un mauvais concours de circonstances … Vraiment ?

Calypso sent que cette vision de la situation est un peu facile. Elle décide que ce n’est pas net et pousse Vadim à faire quelques investigations. D’autant plus que d’autres événements bizarres et surprenants se produisent, sans compter que l’attitude et les déclarations de certains interpellent …

J’ai « plongé » dans ce récit pour n’en ressortir qu’une fois ma lecture terminée ! Je voulais savoir, comprendre. Il y a du rythme, des rebondissements, une atmosphère à la fois de gaieté (car les fêtes sont là) et de suspicion. Les protagonistes connus évoluent tout doucement, les nouveaux s’installent pour rester ou pas…. C’est un polar mais ça reste gai, plein d’humour, notamment grâce aux réflexions de Zézé, la petite voix de Calypso dans son ex-rôle d’actrice et aussi parce que Poker, le chat, fait des réflexions bien ciblées. L’écriture addictive, teintée de dérision, est un vrai régal ! Longue vie à Poker et à sa maîtresse d’adoption !

"L'agent" de Pascale Dietrich

 

L’agent
Auteur : Pascale Dietrich
Éditions : Liana Levi (3 Octobre 2024)
ISBN : 979-1034909735
192 pages

Quatrième de couverture

Après une enfance calamiteuse, Anthony Barreau s’enorgueillit d’habiter le XVIe arrondissement parisien, de porter d’impeccables chemises blanches et de mener une brillante carrière d’agent. Pas agent d’auteurs ou de stars. Non, lui gère les contrats qu’on pose sur la tête de certains indésirables et qui rapportent dix pour cent du montant destiné au tueur. Un travail méticuleux et tranquille, tant qu’on efface ses traces et qu’on évite les ratés. Mais le jour où une mission tourne au fiasco et que le commanditaire, un caïd redoutable, se retourne contre lui, tout part en vrille.

Mon avis

Jubilatoire !

Après avoir galéré lorsqu’il était enfant, Anthony Barreau se targue d’avoir réussi. Il habite à Paris, dans le seizième, il s’habille classe et a deux chiens qu’il promène quotidiennement. Pas d’attache familiale ni amoureuse, il pense que ce n’est pas compatible avec son travail… C’est un dénicheur de talents, un découvreur de pépites, un agent comme on en voit dans le show biz. Sauf que lui, ce ne sont pas les paillettes et la lumière qui l’attirent, c’est un homme de l’ombre. Organisé, pointilleux, ayant autant de téléphones que de contacts, il ne laisse rien au hasard. La moindre erreur, le plus petit faux pas et ça pourrait être catastrophique. Il faut donc une organisation au cordeau, de la précision. Comme lorsqu’on s’entraîne au stand de tir. C’est d’ailleurs là, que souvent, il déniche ses « stars », des personnes qui deviendront des tueurs à gage à son service.

La plupart du temps, ce sont de très gros contrats et sa commission de dix pour cent lui suffit largement. Il se tient à distance, fait très attention à ce que l’assassin ne sous-traite pas la commande car ce n’est pas bon que trop de personnes soient impliquées, ça multiplie les risques. Si trop d’individus sont au courant, alors il faut « nettoyer », faire le vide et on risque des dommages collatéraux. Heureusement, Anthony est « carré » et il tient à jour les petites fiches sur ceux qu’il embauche. Il a de l’expérience et ne fait pas d’erreurs.

Une nouvelle mission ne se déroule pas comme prévu et tout part en vrille. Il a peur et se dit que la fuite est sans doute une bonne solution mais où ?

En parallèle, on fait connaissance avec une dame un peu âgée, directrice d’une agence matrimoniale. À l’heure des applications et sites de rencontres, son affaire est un peu en berne et ayant emprunté de l’argent, elle se fait maintenant harceler par le prêteur. Il est coriace, appelle sans arrêt et ne la lâche pas.  L’angoisse la ronge et un accident vasculaire cérébral finit par la terrasser et la place dans une position délicate. Sera-t-elle obligée d’aller en maison de retraite ? Ses copines ne lui en font pas un tableau très attirant.

« Ses enfants l’ont accusé de laisser-aller et hop, en maison de retraire ! Un régime alimentaire atypique, une pensée divergente, et on vous fait enfermer. Dès qu’on s’écarte de la norme, la sanction est immédiate. »

Comment peut-elle s’en sortir avec sa main affaiblie, sa mémoire qui flanche et ses pensées fugitives ? Son neveu et sa femme ont déjà fait des recherches pour une résidence… Et si elle prenait le large ?

Le sourire ne m’a pas quitté pendant cette lecture, hautement addictive et totalement jubilatoire. Les situations ont un petit côté improbable et loufoque et ça fait un bien fou ! Les dialogues, les descriptions sont vives, avec tout le temps une pointe d’humour. On ne s’ennuie pas et on s’attache aux personnages hauts en couleurs.

On découvre des individus humains, avec leurs failles et leurs forces. Ils ont été cabossés par la vie et ça laisse des traces. Parfois un petit coup de pouce du destin peut aider à surmonter une mauvaise passe ….

J’ai aimé les liens qui se tissent entre les deux principaux protagonistes, comment et pourquoi ils se sont apprivoisés. En apprenant à se connaître, ils se sont compris. Finalement dans ce récit où les malfrats sont nombreux, il est beaucoup question d’amour, d’ouverture d’esprit. Je suis totalement fan du style et de l’univers de ce roman qui est une belle réussite !


"le Prêtre et le Braconnier" de Benjamin Myers (Beastings)

 

Le prêtre et le braconnier (Beastings)
Auteur : Benjamin Myers
Traduit de l’anglais (Grande-Bretagne) par Clément Baude
Éditions : Seuil (11 Octobre 2024)
ISBN : 978-2021377736
290 pages

Quatrième de couverture

Au nord de l’Angleterre, dans la région des lacs, une jeune fille s’enfuit avec un bébé. Ignorante de tout, elle plonge dans une nature sublime et dangereuse ; elle lutte contre la faim, les éléments, les hommes qu’elle croise – l’agriculteur, l’ermite, le chasseur ; elle rêve de traverser les eaux pour gagner une île miraculeuse où elle élèverait l’enfant dans la joie. Mais le prêtre local est chargé de les retrouver. Il engage le braconnier pour l’aider à les traquer.

Mon avis

Roman sombre, sinistre et pourtant captivant. Porté par une écriture (merci au traducteur pour son travail de qualité) puissante, raffinée, envoutante, incisive. Pas de virgules, pas de dialogues en style direct. On peut penser que ça va être lourd, difficile à lire et bien non, pas du tout. Le phrasé exprime une forme de poésie, malgré les propos durs, terribles et l’atmosphère très noire.

On ne sait pas quand les faits se déroulent, on peut supposer que c’est au début des années 1900. Des adolescentes sont accueillies chez des religieuses où elles apprennent à tenir une maison, faire « la bonne ». C’est le cas de « la Fille » que l’on croit simplette parce qu’elle ne parle pas (même si elle entend tout). Elle est confiée à une famille pour aider car il y a un nouveau-né. Mais au bout de quelque temps, elle décide de fuir avec l’enfant pour le protéger. Elle est jeune, elle n’a rien, elle est démunie face à un environnement hostile (des collines, des lacs) mais elle avance. Elle fait des rencontres déconcertantes, déstabilisantes, elle tombe, mais toujours elle se relève et continue. C’est son but, ce qui la porte, jour après jour. Aller le plus loin possible, mettre de la distance entre elle et les poursuivants.

Car le prêtre est à ses trousses, aidé par un braconnier. On le sent immédiatement, le curé n’est pas net, il a une personnalité trouble, jouant double jeu suivant qui lui fait face. Il fait froid dans le dos, il effraie le lecteur. C’est un homme de Dieu qui n’a rien de sain, ni de saint. Je l’ai trouvé abject, horrible, à vomir…. Même son acolyte est plus supportable.

Nous, on est là, collé aux basques de cette jeune fille, on suit ses moindres mouvements, ses errements, ses peurs, ses petits répits lorsqu’il y a une légère lueur. La Fille ne parle pas, est-ce une raison pour ne pas la considérer ? C’est pourtant le cas et c’est révoltant. On souffre pour elle, avec elle. Les mots, les maux, nous prennent aux tripes, nous font serrer les poings. Car il ne faut pas rêver, c’est bien la bassesse de certaines personnes qui nous saute aux yeux, qui nous apostrophe, qui nous fait mal. Les émotions nous coincent la gorge, les ressentis sont décuplés tant la formulation est forte.  

 On sait peu de choses des protagonistes, ils sont plus désignés par ce qu’ils sont que par leur nom. Mais c’est suffisant car cela met encore plus d’intensité dans chaque geste, dans chaque mot prononcé, dans chaque situation. On pourrait dire que l’écriture est dépouillée, chirurgicale, précise à l’extrême. L’auteur offre une approche pointilleuse du bien et du mal. Il arrive que des personnes fassent du mal en croyant agir pour le bien… D’autres portent le vice en eux et ne vivent pas que pour ça.

On en prend plein le cœur : la pauvreté, les privations, la peur du lendemain…. Ce livre c’est de la souffrance mais présentée avec force et finesse, c’est stupéfiant. On n’est jamais dans le voyeurisme, dans la banalité des actes, on vit l’histoire. La Fille est attachante, le Prêtre est détestable et le Braconnier, lui n’est pas aussi superficiel qu’on pourrait l’imaginer, il n’hésite pas à pousser le curé dans ses retranchements.  

C’est un récit qui marque, qu’on ne peut pas oublier tant il résonne et se démarque par le fond et la forme.

Hildur de Satu Rämö (Hildur)

 

Hildur (Hildur)
Auteur : Satu Rämö
Traduit du finnois par Aleksi Moine
Éditions : Seuil (4 Octobre 2024)
ISBN : 978-2021547306
450 pages

Quatrième de couverture

Vingt-cinq ans après la disparition non-élucidée de ses jeunes sœurs. Hildur Rúnarsdóttir vit toujours en Islande, où elle est inspecteur de police. Après quelques années passées dans l’unité des enfants disparus de Reykjavik, la jeune femme est en poste dans un petit commissariat. Elle accueille bientôt un stagiaire. À peine apprennent-ils à se connaître qu'ils sont amenés à enquêter sur un incendie qui a causé la mort d'un pédophile.

Mon avis

Satu Rämö est née en Finlande. Après un voyage d’études en Islande, elle est restée et y a continué sa vie. Elle a rédigé des livres de non-fiction (dont un sur le tricot). Hildur est son premier roman policier et pas le dernier (d’autres titres sont déjà prévus).

Hildur Rúnarsdóttir est une inspectrice de police avec un passé lourd, la disparition de ses deux petites sœurs qui ne sont jamais montées dans le car scolaire. Elle est maintenant adulte mais n’a jamais oublié. Elle ressent beaucoup de culpabilité, parfois sous forme d’une rage qui l’envahit. Dans ces cas-là, elle fait du sport, à fond, presque violemment. Elle court, elle surfe dans des conditions extrêmes sans peur. Son voisin l’accompagne de temps en temps dans ses activités, ils s’entendent bien et plus si affinités, tout en restant chacun chez soi. Elle se donne à fond dans tout ce qu’elle fait, sans doute un moyen pour elle de se soigner, de faire le vide sans pour autant oublier.

Au bureau, un stagiaire, Jakob, arrive. C’est plutôt surprenant qu’il ait choisi de venir dans ce petit commissariat islandais, lui qui est finlandais, en plus il ne connaît pas la langue du coin ! Il va faire équipe avec Hildur et il s’avère que lui aussi, a une histoire personnelle difficile. Pour « évacuer », il pratique « l’escaping » en tricotant et des pulls avec des motifs !

« En outre, le tricot, c’était en fin de compte un peu comme la vie. Imprévisible, voire chaotique. Même quand on tient soi-même les aiguilles et qu’on suit les instructions, on ne peut jamais être sûr du résultat. »

Ils vont réussir à communiquer, à faire équipe et à mener l’enquête ensemble. Parce que bien entendu, on pourrait croire que dans cette bourgade pas très grande, il ne se passe rien. Et bien si !

Un homme, qui avait des penchants pédophiles et trempait dans des trafics de drogue, est découvert assassiné chez lui. L’occasion pour les deux collègues de se lancer dans des investigations pour coincer qui a tué et pourquoi. Les ennemis de cet homme ne manquant pas, ça va être compliqué, d’autant plus que d’autres événements graves ont lieu.

Non seulement l’atmosphère de ce pays est très bien retranscrite, les descriptions des scènes sont pointilleuses, les lieux et paysages sont présentés avec un vocabulaire très visuel, mais on va aussi dans les pensées, les réflexions, les raisonnements des protagonistes, on est proche de chacun et on suit leur quotidien. Quelques chapitres, en italiques, ajoutent une part de mystère.

Cette lecture m’a offert un très bon moment d’évasion. L’écriture (merci au traducteur) est fluide, l’intrigue en lien avec le passé, est super bien pensée et j’ai aimé son côté « scientifique ». Les relations entre les personnages sont intéressantes dans la mesure où il faut que tout le monde trouve sa place. Ce n’est pas si simple car on a tous notre caractère, nos petites manies et quelques fois pour se parler, il faut y mettre du sien. Accepter l’autre comme il est sans juger, sans vouloir le changer, quand on le côtoie régulièrement n’a rien d’évident. Et pourtant, c’est plus facile pour avancer ! Je me suis attachée à Hildur et Jakob, j’espère les retrouver prochainement. J’ai aimé le contexte, cette Islande sauvage et mystérieuse qui me fait rêver ! Je veux y retourner, ne serait-ce que grâce à Satu Rämö !

"Le palais des mille vents - Tome 3 : La princesse de la taïga" de Kate McAlistair

 

Le palais des mille vents - Tome 3 : La princesse de la taïga
Auteur : Kate McAlistair
Éditions : L'Archipel (10 octobre 2024)
ISBN : 978-2809847284
530 pages

Quatrième de couverture

Angleterre, 1870. Après une enfance russe chez des boyards qui l'ont recueilli à sa naissance, le jeune lord William Ashton s'est installé à Gray Castle, le manoir de sa famille. Alors qu'il tente de se construire une identité parfaitement britannique, le gouvernement de Sa Majesté lui propose un poste de diplomate à Saint-Pétersbourg. Doit-il accepter ? Serait-ce enfin l'occasion de revoir son frère de lait, Viktor, à qui il était très attaché et dont il est sans nouvelles ? Que choisira-t-il : construire une vie de famille auprès de sa jeune épouse Rose ou renouer avec son passé ?

Mon avis

Ce roman est le troisième tome de la série « Le palais des mille vents ». Il peut être lu indépendamment car les légers rappels au passé sont glissés de façon intelligente sans être trop lourds (en outre, le lecteur peut avoir un peu oublié ce qu’il s’est passé et c’est un bon soutien). Malgré tout, lire dans l’ordre est mieux, ne serait-ce que pour voir comment les individus évoluent.

Cette fois-ci, le récit se déroule entre l’Angleterre et la Russie, c’est tellement bien fait que je pensais que l’auteur était russe et j’ai cherché qui était le ou la traducteur-trice !

On commence en 1870, dans une noble famille anglaise où William a été recueilli par son oncle. Ses parents sont morts en Russie et il a commencé son enfance là-bas, avec un frère « jumeau » qu’il n’a pas revu depuis des années. De la lointaine Russie et de ce qu’il y a vécu, il a emmené avec lui Nicolaï, plus un ami qu’un serviteur, l’amour des chiens et des chevaux, la nostalgie de certains plats. Il s’est adapté à son nouvel environnement et il est heureux. Le seul souci, c’est son oncle vieillissant qui le presse de se marier afin de voir les héritiers à venir…

Il y a malgré tout une certaine dualité en lui, il est partagé : peut-être l’envie de repartir dans cette contrée lointaine qu’il n’a pas oubliée, mais sera-t-il le bienvenu, retrouvera-t-il ses repères, son frère ? Ou bien couler une vie tranquille en Angleterre sans se poser de question ?

Son cœur bat pour Rose et son tonton le presse de l’épouser. Finalement, ce sera plus facile de convoler en justes noces, de continuer un quotidien agréable et de se laisser porter…

Sauf que le destin, ou le hasard, décide parfois pour nous …. On croit choisir … Mais des événements imprévisibles changent le cours des choses …. Ici, c’est le gouvernement qui propose à William un poste de diplomate à Saint-Pétersbourg. L’occasion de retourner sur les traces de son passé, de revenir à ses racines, de revoir le frangin bien aimé. Dire oui ou non ? Cette envie de retourner sur place le hante à nouveau… Va-t-il y aller ou rester ?

Amour contrarié, jalousie, mensonge, trahison, manipulation, personnages bien représentés (attachants, détestables, entre les deux), scènes très visuelles, tout est réuni pour une lecture plaisante et agréable. J’apprécie énormément les livres de cet auteur. Les histoires sont intéressantes, liées à un contexte historique assez riche, intégré au texte sans que ce soit pénible. L’écriture est fluide, tout prend « corps » sous nos yeux. Les dialogues sont vifs, les rebondissements bien placés pour éviter tout temps mort. Je suis admirative de l’équilibre entre tous ces éléments qui rend la lecture très fluide.

J’ai particulièrement apprécié Nicolaï, il est dévoué, prêt à tout pour son « maître », il analyse bien les situations, il sait prendre du recul et sous ses airs de gros géant costaud, il est sensible et a un cœur d’or. En plus, il ne lâche rien.

Je suis impressionnée par l’univers que crée Kate McAlistair pour ses protagonistes, c’est vraiment bien fait !  Malgré les coups durs, elle glisse toujours une petite lueur d’espoir et c’est bon pour le moral !


"L'instant Ricoré" de Séverine Tales

 

L’instant Ricoré
Auteur : Séverine Tales (textes et dessins)
Éditions : Jarjille (15 mai 2024)
ISBN : 9782493649270
20 pages

Quatrième de couverture

Sous bock est une collection des éditions Jarjille.
L’instant Ricoré est le numéro 28 de la collection.

Mon avis

La Ricoré c’est une boisson d’anciens -nes, on est bien d’accord ?

C’est d’ailleurs ce que propose mémère à sa petite fille venue lui rendre visite à la maison de retraite sauf que …. Quand on rentre dans ce genre de lieu, on n’a plus de cuisine et parfois plus d’autonomie, même si on essaie de donner le change, de faire comme si, d’oublier les odeurs désagréables, les pertes de mémoire ….

Le dessin est épuré, on devine les expressions du visage plus qu’on ne les voit. D’ailleurs, c’est le texte qui marque, l’image est à son service pour l’appuyer. Comme ce n’est pas détaillé, on peut tous s’identifier et voir les yeux de quelqu’un qu’on connaît, assis dans un fauteuil semblable.

En quelques pages Séverine Tales, avec énormément de talent, nous touche où ça fait mal, au plus profond de nos sentiments, de nos peurs aussi.

Elle ose aborder un sujet grave sous une forme légère, peu de place, mais les quelques mots suffisent à partager. C’est un dialogue auquel on ne voudrait pas être confronté mais on sait que ça risque d’arriver et on ne sera peut-être pas du meilleur côté.

J’ai trouvé ce sous bock puissant, porteur de sens, un peu douloureux (parfois on a envie de faire l’autruche) mais pleinement réussi.



"Voir plus loin" d'Esther Kinsky (Weither sehen)


Auteur : Esther Kinsky
Traduit de l’allemand par Cécile Wajsbrot
Éditions : Christian Bourgois (3 Octobre 2024)
ISBN : 9782267047851
226 pages

Quatrième de couverture

La narratrice de Voir plus loin voyage en Hongrie. Dans une petite localité au sud-est du pays, désertée par une partie de sa population, elle est frappée par la mélancolie qui émane du lieu. Plus encore, elle est fascinée par le « Mozi », l’ancienne salle de cinéma qui fut jadis au centre de la vie collective, l’endroit vers lequel les rêves des habitants convergeaient du temps du rideau de fer, lorsque nul autre voyage n’était possible. La passionnée de cinéma en elle est saisie par la magie du lieu, et elle se met alors en tête de le réhabiliter…

Mon avis

Aller au cinéma dilate le temps et le monde, le cinéma reste un endroit magique.

Rentrer dans la salle, choisir sa place (centrée ou pas ? dans les premiers rangs ou au fond?), s’asseoir, attendre que l’éclairage diminue et entrer dans un autre univers pour rêver, pleurer, avoir peur, s’évader etc … Seulement les images sur grand écran, on peut difficilement faire autre chose et le rapport à ce qu’on a sous les yeux n’est pas le même que lorsqu’on est chez soi. Les différences ? Un vrai public, un espace plus grand, un lieu dédié.

Pourtant, il arrive que des cinémas disparaissent …. Dans ce livre, la narratrice est en Hongrie, dans une petite ville ayant perdu de nombreux habitants. De ce fait, le cinéma a été abandonné mais en passant près de l’endroit où il était, elle ressent sa présence, son histoire et un projet fou lui vient à en tête. Lui redonner une existence, le remettre en état, le faire revivre et briller afin d’offrir aux spectateurs l’occasion de « Voir plus loin »… Au milieu du vide et du silence, le son et les vidéos pourraient revenir…

Avec ce livre, Esther Kinsky explore la place du cinéma dans notre vie, dans nos mémoires (ah, mes premiers films de Disney vus avec ma Maman, les premiers baisers dans la pénombre, Autant en emporte le vent sur grand écran avec toute une salle qui vibre des mêmes émotions) …. c’est autre chose qu’un DVD et une télévision.

Raconter les rencontres, la démarche de la reconstruction, c’est l’occasion pour l’auteur de s’interroger sur notre rapport à ce qu’on voit, à notre perception du monde, à notre lien aux autres ….

« Où porter le regard ?
Dans la vision, il y a deux aspects : ce qu’on voit et comment on voit. »

C’est avec une écriture (merci à la traductrice) poétique et aboutie qu’elle nous entraîne à sa suite.

« […] même si la fin était difficile à supporter. Pas en raison de l’histoire mais simplement parce que le film était terminé, parce qu’on ne pouvait plus voir plus loin, parce que le regard sur un ailleurs, depuis la fenêtre, se refermait. »

Au départ la narratrice n’agit pas, elle fait des repères, laisse les idées venir à elle, se demandant s’il faut se lancer dans cette aventure. Elle questionne, parle, va et revient et puis un jour « Veux-tu acheter le cinéma ? »
Faut-il se lancer là-dedans ? Pourquoi a-t-il été fermé ? (ce sera l’occasion d’un retour en arrière et pour le lecteur de découvrir celui qui avait lancé cette salle). C’est aussi la possibilité de réfléchir au pourquoi et au comment du déclin de ce lieu qui rassemblait …. et qui n’est plus utilisé.

Le récit est à la première personne et je me demande jusqu’où Esther Kinsky a mis d’elle dans son texte. J’ai lu que c’était une excellente cinéphile, ce qui explique qu’elle s’exprime si bien sur ce sujet. Son style est teinté de mélancolie, empli de délicatesse, elle raconte ceux qui ont aidé, donné de leur temps, de leur énergie pour arriver à l’objectif final. Mais une fois atteint, que se passera-t-il ?

En explorant ce thème avec de belles et profondes réflexions, l’auteur nous offre un recueil étonnant, surprenant, captivant, intéressant portant un message puissant.  

 

"Le dernier jour de la vie antérieure" d'Andrés Barba (El último día de la vida anterior)

 

Le dernier jour de la vie antérieure (El último día de la vida anterior)
Auteur : Andrés Barba
Traduit de l’espagnol par François Gaudry
Éditions : Christian Bourgois (3 Octobre 2024)
ISBN : 978-2267047653
160 pages

Quatrième de couverture

Dans une maison vide promise à la vente, une agente immobilière découvre un enfant assis sur une chaise. Il la regarde sans ciller, dans un accoutrement désuet qui ajoute à son étrangeté. Leur rencontre bouleverse le quotidien de cette employée sans histoire : elle retourne jour après jour sur les lieux, à l’insu de ses proches, obnubilée par cet être et ce foyer désert qui partagent un lien invisible.

Mon avis

On ne sait pas grand-chose d’elle, à part qu’elle est agente immobilière, qu’elle vit avec un homme ou plutôt qu’elle partage un peu de son temps avec un compagnon, et que son patron a un chien vieillissant. On découvre que c’est une femme calme, posée, qui doit vendre des logements. Plutôt douée pour percevoir les demeures, les juger, connaître leur potentiel, leur valeur, presque comme s’il s’agissait de personnes humaines (avec qui elle est plus maladroite, moins à l’aise). Elle ressent la vie de ceux qui y ont élu domicile. Un bout de plancher non décoloré sous une fenêtre et elle cerne que l’habitant n’était pas heureux.  Pourquoi ? Il n’ouvrait pas le rideau et le soleil ne pénétrait pas à l’intérieur… Les maisons et elle, c’est toute une histoire.

« Elle comprend que cette maison est accueillante quand on la parcourt, pas quand on s’arrête. »

Alors, ce jour-là quand elle voit un enfant dans la cuisine d’une villa qu’elle fait visiter, elle n’est pas déstabilisée, pas tout de suite. Elle lui explique qu’il ne peut pas rester ici. Elle l’observe, il ne cille pas et ne semble pas décidé à partir. Il finit par s’en aller mais elle ne se sent pas libérée. Est-ce à dire que ce gamin, un intrus quand même, va bouleverser son quotidien, son fonctionnement ? Elle voudrait continuer son traintrain, l’oublier. Mais ce n’est possible. Bien sûr, elle ne se l’explique pas, son comportement n’est pas rationnel. Et puis, c’était sans doute une vision, une espèce de rêve, il ne sera plus là quand elle reviendra. Pourtant elle s’interroge et retourne sur les lieux, seule, cherchant à saisir l’inexplicable. Il est là mais elle aussi. Faille temporelle, dérèglement de son esprit, illusion ?

C’est à l’insu de tous que jour après jour, elle élimine les futurs visiteurs pour rencontrer cet enfant et être seule avec lui. Hors du temps, hors de toute logique, hors de toute normalité….

Un lien étrange, particulier, fort, se tisse entre eux. Elle s’aperçoit que cette relation unique modifie la perception qu’elle a de sa vie. Peut-être qu’elle ne devient pas une autre, mais tout simplement elle-même ?

« Un enfant l’a sortie de la vie. Un enfant l’a rendue à elle-même. »

Ce roman nous interroge sur ce qu’il reste de nos souvenirs, de nos vies lorsqu’un événement terrible semble arrêter le cours des choses. La solitude est-elle une prison, une compagne ? Peut-on aider les autres et s’aider soi-même ?

Un style évanescent, une écriture poétique tissant les mots pour présenter une scène, un décor, une conversation, une image, une atmosphère éthérée entre fantastique et réalité, tout cela est troublant et fascinant. On reste dans des faits factuels, sans détails superflus, décrits de façon quasi chirurgicale et pourtant c’est magique et magnifique. On sait que ce que ce n’est pas la réalité que cette femme perçoit. Mais c’est la sienne à ce moment-là, celle dont elle a besoin.

C’est tellement beau et délicat. Peu importe que ce soit possible ou pas. L’essentiel, c’est le plaisir de pénétrer sur la pointe des pieds dans cet univers, où le temps est suspendu, pratiquement figé entre passé et présent. Il suffit d’observer, d’écouter le peu de paroles échangées, d’entendre la musique de la vie qui se tricote, se détricote avant de reprendre son cours ….

"Les enquêtes de l'aliéniste - Tome 2 : La danse macabre" de Jean-Luc Bizien

 

Les enquêtes de l'aliéniste - Tome 2 : La danse macabre
Auteur : Jean-Luc Bizien
Éditions : L’Archipel (3 Octobre 2024)
ISBN : 978-2809849554
386 pages

Quatrième de couverture

"Paris, Mai 1889. L'Exposition universelle vient d'ouvrir ses portes et la tour de Mr Gustave Eiffel se dresse majestueusement vers le ciel. Tandis que la foule s'y presse chaque jour plus nombreuse, une découverte macabre alerte les services de la Sûreté : à deux pas du champ de Mars, on a ramassé la main momifiée d'une jeune femme et le corps effroyablement mutilé d'un malfrat est découvert à son tour...Dès lors, les autorités redoutent qu'un vent de terreur submerge la capitale.

Mon avis

Jean-Luc Bizien a créé un univers bien à lui, avec un aliéniste dans Paris à la fin du dix-neuvième siècle. Ce scientifique veuf depuis peu, Simon, vient d’embaucher une jeune femme dégourdie, Sarah pour l’aider. Ils ont déjà, dans un premier titre, mené des investigations avec un certain succès. Cette fois-ci, c’est pendant l’Exposition Universelle de 1889 que se déroulent les faits.

On commence ce récit avec une découverte particulièrement sinistre. Une main de femme momifiée et le corps d’un homme mutilé. À l’époque, bien entendu, pas d’ADN et compagnie pour relier un morceau humain à une personne. L’enquête s’annonce vraiment délicate, même si certains policiers émettent des hypothèses plutôt bien vues. Léonce Desnoyers et Raoul Mesnard se sentent malgré tout assez démunis, d’autant plus que ça se passe vers la tour Eiffel et donc près de l’Exposition Universelle. Si les choses viennent à se savoir, gare à la panique, aux fausses rumeurs, et à la peur. Autant agir vite, discrètement, résoudre l’affaire ni vu ni connu et laisser la sérénité régner. C’est pour ça que Léonce se décide à demander de l’aide à l’aliéniste. Ce dernier, bien que fatigué, accepte la mission et avec sa fidèle gouvernante, il arpente les environs et les allées de l’Exposition pour essayer de stopper tout ça.

L’atmosphère est un vrai point fort de ce tome. Le contexte historique est parfaitement décrit, les côtés sombres de certains quartiers sont explorés. Les agissements des malfrats, la place de la magie noire et de la magie tout court, tout cela est richement documenté et intéressant. De chapitres en chapitres, on va d’un personnage à l’autre, avec des points de vue différents et la sensibilité de chacun sur les situations exposées.

J’ai beaucoup aimé la place donnée à tout ce qui est illusion et spiritisme ainsi que la façon dont s’est présenté. Un autre atout de ce roman, c’est de découvrir comment raisonnent Simon et Sarah. Pour l’époque, ils font très fort car ils vont plus loin que les apparences, déduisent, observent, analysent, décortiquent. Ils se complètent et s’apportent beaucoup l’un à l’autre. Leur relation est teintée de respect, de complicité, de bonne entente, même si parfois la jeune gouvernante anglaise s’interroge, il faut dire que rien que la demeure de son patron, avec une façade en trompe-l’œil, est peu ordinaire.

« N’était-il pas plus fou que ses malades, lui qui entendait les guérir par le dialogue et des soins attentionnés ? »

L’écriture de Jean-Luc Bizien est très addictive. Les personnages dégagent quelque chose qui nous attire et nous donne envie, sans cesse, d’en savoir plus Les voleurs à la petite semaine sont presque charmants dans leur naïveté. L’auteur met en scène une intrigue palpitante portée par un décor original et des individus atypiques. C’est totalement réussi, j’ai hâte de lire le tome 3 !

Pour compléter cette lecture captivante, en fin d’ouvrage, quelques notes de l’auteur, précisant des faits réels dont il s’est inspiré et la reproduction du Guide Joanne de Paris permettant de « déambuler » dans les allées de l’Exposition (explications détaillées sur les moyens de transport, les pavillons, les travées etc…) J’ai pensé que j’aurais presque pu le lire avant afin d’être complètement dans l’ambiance.

NB : Bravo pour les illustrations des couvertures !

"Confession américaine" de Eddy L. Harris (House of Lies, American Confessional)

 

Confession américaine (House of Lies, American Confessional)
Auteur : Eddy L. Harris
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Grace Raushl
Éditions : Liana levi (3 Octobre 2024)
ISBN : 979-1034909780
96 pages

Quatrième de couverture

Pourquoi et comment n’a-t-il rien vu venir ? C’est la question que se pose Eddy L. Harris le jour où, à 60 ans, alors qu’il regarde un jeu télévisé inepte chez une amie, il prend soudain conscience que depuis toujours son pays d’origine a abusé de sa confiance. Depuis sa plus tendre enfance il a gobé les mensonges servis par les dirigeants politiques, les enseignants, les prêcheurs de tous bords… Lui, ses parents, et la majorité des Américains ont cru à une image faussée de leur pays, sans se rendre compte qu’ils étaient manipulés. Alors Eddy décide de remonter cette route pavée de mauvaises intentions afin de mettre au jour les racines du mal. Chemin faisant il s’interroge sur ses origines, sur son lien à ce pays natal où il ne vit plus depuis trente ans et sur ses choix de vie.

Mon avis

Eddy L. Harris, écrivain américain, est installé en France, dans un village charentais depuis bientôt vingt ans.  J’ai eu la chance de le voir, une vraie rencontre, où on échange, on partage, on s’écoute en confiance.

Quand je lui ai demandé s’il retournait souvent « chez lui » (sous-entendu aux Etats-Unis), il m’a regardée et a répondu « chez moi ? c’est ici chez moi, les habitants du village m’ont adopté et je les ai adoptés » et puis un silence….  «  je repartirai pour voter, il le faut ».

Ce n’est pas parce qu’il réside en France, que cet homme est détaché de ce qui se passe et se vit de l’autre côté de l’océan. C’est peut-être, justement parce qu’il a du recul, qu’il peut voir de haut et de loin, qu’il a la possibilité d’analyser et d’essayer de comprendre comment les citoyens américains ont pu être manipulés par les hommes politiques.

Dans ce court, mais complet et édifiant, essai, l’auteur avec une écriture précise, documentée, pointue (merci à la traductrice) revient dans le passé. Il nous emmène avec lui, on entrevoit une part du vécu de sa famille, ses parents, son parcours personnel. Ce en quoi il a cru, ce qui l’a déçu, mis en colère, bouleversé …. Certains se taisent, font l’autruche…

« Nous nous rendons coupable par notre silence complice, notre propension à aller de l’avant en suivant le mouvement, notre péché d’ignorance et de déni. »

Mais d’autres, comme lui, refusent le silence. Son texte est fort, puissant, édifiant, intéressant. Eddy L. Harris entre en résistance, ouvre les yeux de ceux qui le lisent. Il nous démontre, avec des exemples précis, pourquoi il a le sentiment que les Etats-Unis ont perdu pied, pourquoi il n’a plus sa place là-bas, en quoi la couleur de peau peut poser problème. Il s’interroge, se questionne. Y-a-t-il possibilité de discussion, de réconciliation entre toutes les ethnies ? Les habitants sont-ils prêts pour un espace d’unité véritable ?

Ce livre est exceptionnel comme l’homme qui l’a rédigé. Il a mis des mots sur tout ce dont on se doute et bien plus encore. De pages en pages, j’ai découvert plus en détails ce que je percevais de l’atmosphère aux USA, des relations entre les hommes et les femmes, des magouilles politiques, des combats à mener, parce qu’il ne faut pas rêver, Eddy le rappelle, même Obama n’a pas de fait de miracles …

J’ai énormément apprécié qu’Eddy partage sa démarche, qu’il décortique son raisonnement face à certaines situations, même vécues quand il était plus jeune. J’ai notamment remarqué que son cheminement l’avait amené à enlever « ses lunettes roses » alors que son Papa faisait l’inverse.

Je ne sais pas comment cet essai sera accueilli dans le pays d’origine de Eddy. Est-ce qu’il sera mis de côté ? Considéré comme un coup de pied dans une fourmilière (qui dérange mais permet d’ouvrir d’autres chemins) ? Je suis persuadée que cette lecture peut donner lieu à des débats très animés. Ce que je sais, c’est que pour moi, il est primordial que des hommes, des femmes, osent, parlent, écrivent et dénoncent ce qui ne va pas.

« Nous ne pouvons que tenter de cicatriser. Et, si ce n’est pas trop tard, espérer. Peu importe le temps que ça prendra. »

NB : message personnel pour Eddy : je suis bien contente d’apprendre que je n’ai pas été la seule à inventer des péchés dans le confessionnal. 😉