"Ce qui vient après" de JoAnne Tompkins (What Comes After)

 

Ce qui vient après (What Comes After)
Auteur : JoAnne Tompkins
Traduit de l’américain par Sophie Aslanides
Éditions : Gallmeister (Totem) (7 Septembre 2023
ISBN : 978-2-35178-891-2
530 pages

Quatrième de couverture

Dans l’État brumeux de Washington, Jonah a tué son meilleur ami Daniel, avant de se suicider sans laisser la moindre explication. Sidérés par cette tragédie, leurs parents, autrefois amis, s’évitent désormais, séparés par leur incommensurable douleur. Jusqu’à l’arrivée salutaire d’Evangeline, une vagabonde de seize ans, enceinte, que chacun souhaite aider et qui apporte de la lumière dans leur vie. Mais une révélation éclate, risquant de briser ce nouvel équilibre : la jeune fille a croisé le chemin des deux garçons quelques jours avant leur mort.

Mon avis

Daniel et Jonah se connaissent depuis l’enfance, ils sont très amis, leurs parents aussi. Un jour, Daniel disparait et ne rentre pas. Une semaine après Jonah se suicide en disant où trouver le corps de celui qu’il a assassiné. C’est l’incompréhension et la fracture entre les deux maisons voisines.
L’une avec Isaac, le père de Daniel et l’autre avec Lorrie et Nells, mère et sœur de Jonas.

Isaac est très déprimé, il vit seul avec son chien, la vaisselle sale s’accumule et il peine à reprendre le dessus. Pourtant ses amis, dont Peter et George, essaient de l’aider et à avancer afin qu’il reprenne les cours (il est enseignant). Heureusement, il a Rufus, son chien fidèle qui était très attaché à son fils et qui est sa seule compagnie.

Voilà qu’une jeune fille de seize ans, une vagabonde, enceinte, débarque au milieu de tout ça. Elle atterrit chez Isaac qui l’accueille pour lui éviter la rue. Il l’incite à retourner au lycée afin d’avoir une vie plus dans la normalité. Elle s’appelle Evangeline et il s’avère qu’elle a connu les deux garçons.

Une relation se noue, parfois difficile, parfois plus apaisée. Elle est enceinte et les questions vont fuser sur sa présence dans cette petite bourgade. On s’interroge, que fait-elle là, est-ce un « choix » d’avoir croisé la route de ces deux familles très éprouvées ? Que cherche-t-elle ?

Dans ce roman à l’écriture infiniment délicate, trois voix s’expriment : Jonah, Isaac, et un narrateur extérieur qui complète le tableau d’ensemble. À travers les chapitres de Jonah, on comprend ce qu’il s’est passé, pourquoi il a réagi ainsi. Ceux d’Isaac montre le rapport de cet homme avec son ex-femme, ses amis et la religion (c’est un quaker de la « société des amis »). On voit que ce mouvement religieux a beaucoup d’impact sur sa vie.

Avec la narration à la troisième personne, on suit Evangeline, son parcours difficile, même douloureux, sa difficulté à faire confiance, à s’attacher, à croire en un quotidien meilleur. Son cheminement tout au long de sa grossesse pour devenir mère.

« Elle se demanda si c’était ça, être mère. Souffrir pour une vie qui n’est pas la sienne, brûler d’amour pour un enfant qui pouvait, sans la moindre action de sa part à elle, disparaître totalement de son champ de vision. »

Tout au long de ce récit, on apprend tout ce qui a été tu, enfoui, mais rarement oublié. On pénètre dans les prémices des événements qui ont eu lieu et qui ont touché le vécu de tous les personnages. J’ai aimé Isaac, cet homme bourru, solitaire, taiseux qui par la grâce d’une rencontre se laisse apprivoiser. S’il a raté des choses dans son lien avec son fils, il s’en servira peut-être pour que ça aille mieux maintenant avec cette âme perdue qui est peut-être synonyme de résilience.

Cette lecture est bouleversante. Le style de l’auteur (merci à la traductrice) est lumineux, plein d’empathie pour ses protagonistes. Ils sont terriblement humains dans leur force et leur fragilité. Elle décrit à merveille les hésitations, les décisions, les peurs, les joies, les émotions de chaque individu. On pénètre dans l’intimité de chacun, on est au plus près d’eux, près à leur tenir la main, à les accompagner et c’est avec énormément de regrets que je les ai laissés poursuivre leur route. J’aurais voulu rester avec eux encore un peu.

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