"Mon territoire" de Tess Sharpe (Barbed Wire Heart)

Mon territoire (Barbed Wire Heart)
Auteur : Tess Sharpe
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Héloïse Esquié
Éditions : Sonatine (29 Août 2019)
ISBN : 978-2355847653
570 pages

Quatrième de couverture

À huit ans, Harley McKenna a assisté à la mort violente de sa mère. Au même âge, elle a vu son père, Duke, tuer un homme. Rien de très étonnant de la part de ce baron de la drogue, connu dans tout le nord de la Californie pour sa brutalité, qui élève sa fille pour qu'elle lui succède. Mais le jour où Harley est en passe de reprendre les rênes de l'empire familial, elle décide de faire les choses à sa manière, même si cela signifie quitter le chemin tracé par son père.

Mon avis

Une pépite de « country » noir

Bienvenue en Californie, pas celle des plages ou d’Hollywood, non celle plus sombre située dans le Nord (North County), dans un coin séparé en deux par une rivière, formant ainsi deux territoires distincts. D’un côté Duke McKenna, de l’autre Carl Springfield, chacun devant contrôler la situation de ceux qui sont sous leurs ordres pour que rien ne dérape

Duke et Carl ont aimé la même femme, elle a choisi Duke et ils ont eu une fille, Harley. Au début du récit, Harley Jean a un peu plus de vingt ans et elle a déjà une vie bien chargée derrière elle. A huit ans elle a perdu sa mère et son père s’est échiné à faire d’elle une dure à cuire, capable de se protéger, de se battre et surtout de réfléchir avant d’agir. Elle travaille pour son paternel, qui est un baron de la drogue et a également repris le Ruby, un lieu que sa mère avait mis en place pour protéger les femmes battues et leurs enfants. C’est Mo qui gère en lien avec Harley, empêchant les maris ou compagnons de s’approcher, aidant les mères à trouver du travail, à ne plus flirter avec la drogue. Mo apporte un peu de douceur à la jeune femme.
« Mon père m’a peut-être appris qui je dois être pour commander. Mais Mo est la femme qui m’apprend qui je dois être pour guider. »
« Il m’a aimée. Il m’a terrorisée. Il m’a forgée. »

Le quotidien de Harley n’est pas simple. Elle est tiraillée entre deux extrêmes : ce qu’elle veut prouver encore à son père qui est vivant en lui montrant qu’elle est digne d’être sa fille, de lui succéder, qu’elle a compris les nombreuses leçons qu’il lui a données (dont certaines très dures) et honorer la mémoire de sa mère en continuant son combat pour sauver les femmes de la violence, de l’injustice, de la rue, des mauvaises fréquentations. Cela donne une personnalité complexe mais attachante tant Harley veut tout faire à fond, ne rien laisser au hasard et rester droite toujours et encore.

Dans le roman, c’est Harley qui raconte. Elle est adulte et sa lutte pour choisir sa vie en fonction de ce que lui ont inculqué ses deux parents va être le fil conducteur. Elle veut les respecter tous les deux mais elle est « elle », une personne à part entière, et elle déteste la violence dont elle doit faire preuve parfois. Entre les chapitres du présent qui se déroulent en Juin, sont glissés d’autres chapitres sans date qui commencent toujours par « J’avais huit ans » (l’âge diffère chaque fois). Ceux là nous présentent par bribes, petit à petit, le lourd passé de ce personnage hors du commun. Ils nous permettent de comprendre comment elle a été « construite », ce qui a pu forger le caractère exceptionnel qu’elle révèle, et ses liens avec les uns et les autres. On va donc assister aux relations entre deux clans qui se détestent depuis longtemps : les McKenna et les Springfield. On verra la place que prend le shérif, la façon dont chacun, d’un côté comme de l’autre, interprète les faits, les actes. Comment maintenir l’équilibre, la paix ? Tout semble si fragile… Faut-il tuer pour trouver la liberté ?

Je ne sais pas quel âge a Tess Sharpe mais elle me paraît assez jeune. Tout ce que j’ai trouvé sur elle c’est qu’elle est la fille de deux rockeurs punks, qu’elle est née dans une cabane au fond des bois et a grandi dans une campagne reculée de Californie. Ce qui est certain, c’est que son écriture est très aboutie, puissante et que son style n’a rien à envier à personne. Son texte est bien construit, on ne se perd jamais. Les protagonistes sont nombreux à avoir une part d’ombre et on sent que parfois certains ne savent plus très bien de quel côté aller. J’ai beaucoup apprécié cette lecture et cette héroïne qui veut être en paix avec elle-même et si possible, avec les autres….




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