Emma dans la nuit (Emma in the night)
Auteur : Wendy Walker
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Karine Lalechère
Éditions : Sonatine (15 Février 2018)
ISBN : 978-2355845253
312 pages
Quatrième de couverture
Emma, 17 ans, et Cass, 15 ans, sont les sœurs Tanner,
devenues tragiquement célèbres depuis leur inexplicable disparition. Après
trois ans d'absence, Cass frappe à la porte de chez ses parents. Elle est
seule. Que s'est-il réellement passé trois ans auparavant ?
Mon avis
Les gens croient ce qu’ils ont envie de croire…..
C’est le deuxième roman que je lis de Wendy Walker et comme
dans le premier, une grande part est donnée à l’approche psychologique des
personnages. Non seulement pour expliquer leur caractère mais surtout pour
décortiquer leur mode de fonctionnement, leurs réactions et leurs rapports
humains. Ici, c’est le thème du narcissisme (et ses dérives) qui est abordé
avec brio.
Deux sœurs ont disparu il y a trois ans et malgré leurs
efforts les policiers du FBI en charge des recherches (dont Leo et Abigail
(psychiatre) ) n’ont rien trouvé. Si Leo s’en est accommodé, Abigail, elle n’a
pas digéré et elle n’a jamais oublié cette affaire. Aussi lorsqu’une des sœurs
réapparaît, elle veut reprendre les choses en mains pour relancer l’enquête.
C’est une femme dont le passé familial est assez chargé. Elle a souffert de
l’attitude de sa mère et a mis en parallèle quelques observations de sa vie
personnelle avec ce qu’elle a constaté chez les Tanner. Mais rien d’assez
probant ou d’assez « utilisable » pour que ses collègues la suivent sur cette
voie….. Avec Cass, la plus jeune des frangines, qui réapparaît, c’est
l’occasion de replonger au cœur de cette double disparition jamais élucidée.
Cass est troublante, on la suit de l’intérieur, dans ses
réflexions personnelles
« Je pense qu’il a deux sortes de personnes: celles qui
ont un cri à l’intérieur et les autres.[…]. Si vous n’avez pas le cri, vous ne
pouvez pas comprendre. »
et de l’extérieur lorsqu’on a le regard de la psychologue
sur les faits. Comment elle a agi par le passé et ce qu’elle souhaite essayer
maintenant. Cass, c’est une jeune fille, elle a grandi et changé en trois ans,
sa mère est désarçonnée, perdue devant cet enfant dont une part lui a échappé.
De plus, la relation entre les sœurs et avec la mère n’est pas nette, on le
sent, il y a quelque chose de bizarre dans cette famille, mais quoi ?
C’est là qu’Abby contribue à nous éclairer, disséquant les
liens qui ont été établis dans la fratrie in et off puisque la famille a été «
recomposée ». Le thème du narcissisme en psychologie est présenté, expliqué et
tout ce qu’on apprend est introduit au fil des pages, en suivant les pensées ou
les actes des uns et des autres. Petit à petit, les « contours » se précisent,
on comprend ce qui a pu se passer, même si on refuse de croire que ce soit
possible. D’ailleurs, est-ce que la rescapée dit la vérité ? Est-ce que ses
parents, leurs conjoints , les demi frères mentent pour cacher certains
événements ? C’est très complexe entre toutes ces personnes car aucune ne
semble vraiment clair dans ses propos, omettant volontairement ou non, de tout
dévoiler….
L’auteur s’y prend à merveille pour explorer la part
d’ombre, les failles de l’âme humaine, les troubles de la personnalité. C’est
prenant et intéressant car on découvre pourquoi les narcissiques ont besoin
d’être adulés, de contrôler leur entourage et combien leur attitude peut être
étouffante et anxiogène….
J’ai trouvé ce roman bien écrit, bien traduit également.
Wendy Walker nous passionne. Nous allons avec elle alternativement, dans le
passé, le présent, et l’esprit des protagonistes. Il n’y a pas pléthore de
rebondissements, ni de scènes difficiles et pourtant on ressent le malaise en
filigrane. On s’interroge sans cesse. Qui manipule qui ? C’est ce qu’il faudra
démêler pour avoir les tenants et les aboutissants de ce recueil qui en
surprendra plus d’un….
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