Tout n’est pas perdu (All is not forgotten)
Auteur : Wendy Walker
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Fabrice Pointeau
Édition : Sonatine (12 Mai 2016)
ISBN : 978-2355845154
352 pages
Quatrième de couverture
Alan Forrester est thérapeute dans la petite ville cossue de
Fairview, Connecticut. Il reçoit en consultation une jeune fille, Jenny Kramer,
quinze ans, qui présente des troubles inquiétants.
Celle-ci a reçu un traitement post-traumatique afin
d'effacer le souvenir d'une abominable agression dont elle a été victime
quelques mois plus tôt. Mais si son esprit l'a oubliée, sa mémoire émotionnelle
est bel et bien marquée.
Bientôt tous les acteurs de ce drame se succèdent dans le
cabinet d'Alan, et lui confient leurs pensées les plus intimes, laissant tomber
leur masque pour faire apparaître les fissures et les secrets de cette petite
ville aux apparences si tranquilles.
Mon avis
Autopsie d’un viol….
Au cours d’une soirée festive, dans la petite ville de Fairview,
Jenny a été violée, non loin de la maison où se déroulait la fête Elle a reçu
un traitement pour « l’oubli » des faits mais elle reste marquée par les
douloureux événements et va devoir rencontrer un thérapeute. Cet homme est
spécialisé dans l’étude des stress post-traumatiques et il fera le maximum pour
aider la jeune fille, sa famille et ceux qu’il reçoit dans son cabinet….
C’est lui qui (se) raconte dans le roman, qui nous entraîne
à sa suite dans de longues conversations avec ses patients et avec lui-même. A
la manière d’une autopsie, allant de plus en plus profond, enlevant « les
couches » les unes après les autres, il va décortiquer les faits, les analyser,
les étudier pour faire émerger une vérité terrible qui le renverra à sa propre
histoire…. L’écriture est pointilleuse (bravo au traducteur), chaque détail est
important, chaque indice glissé ça et là aura son rôle à jouer à un moment ou
un autre.
On pourrait se poser la question de ce « médicament de
l’oubli » mais là n’est pas le principal sujet. Il faut plutôt se pencher sur
les dégâts que des situations traumatisantes peuvent provoquer et comment
chacun peut les gérer (car il n’y a pas que Jenny, il y a Sean aussi…), se
demander également quelles sont les limites à ne pas franchir pour les praticiens
… Jusqu’où peuvent-ils aller pour aider leurs patients, quelle est la frontière
entre le travail et l’empathie qui peut les envahir ?
« Nous luttons chaque jour pour contrôler le regret, pour
l’empêcher de nous ravir notre bonheur. »
Alan Forrester flirte dangereusement avec le code de
déontologie. L’air de rien, il insinue, oriente pour obtenir ce qu’il désire,
ce qu’il pense être le mieux….
Les chapitres se succèdent, chaque fait nous emmène vers un
autre, à la manière d’un labyrinthe dont chaque virage révélerait une nouvelle
surprise. On croit que c’est fini, que l’on a, en mains, tous les morceaux du
puzzle, et puis surgit devant nous un autre élément qui nous emporte plus loin
dans la découverte de la personnalité des individus croisés ici ou là… On peut
s’interroger. Est-ce que toute vérité est bonne à dire, à connaître, comment
ressortiront ceux qui découvriront la face cachée des gens en qui ils avaient
toute confiance… Est-ce que l’amour que l’on porte aux siens peut tout
justifier, tout expliquer ? Comment une famille se remet-elle après un acte
pareil ? A quel point la culpabilité peut être présente chez les parents et
pourquoi ?
J’ai eu beaucoup de plaisir à lire ce récit malgré la dureté
du propos. La construction et la façon d’aborder les choses, originales, y sont
pour beaucoup. Donner la parole ainsi au psychanalyste n’est pas ordinaire. Je
me suis même demandée si cela orientait un peu, beaucoup ou totalement notre
ressenti. Finalement, l’approche de tout ce qui s’est passé est faite
principalement par sa voix car, même si ses consultants s’expriment, c’est lui
qui retranscrit…. En tout cas, ce procédé offre une « entrée » surprenante,
captivante et on ne voit pas le temps passer.
En conclusion, une lecture qui sort des sentiers battus et
qui est très prenante.
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