"Au bout de la rue" de Florian Dennisson

 

Au bout de la rue
Auteur : Florian Dennisson
Éditions : Oiseau Noir (26 Novembre 2024)
ISBN : 979-8840538227
380 pages

Quatrième de couverture

Eleanor Perkins a emménagé avec Ray il y a six mois à Cobham en Angleterre. Dans son quartier chic et tranquille, il ne se passe jamais rien… jusqu’à ce que Grace, la voisine, débarque un matin avec la plus terrible des nouvelles : on a enlevé sa fille ! Mais très vite, Eleanor constate que les deux enfants de Grace sont bien sains et saufs, et le discours décousu de sa voisine comporte bon nombre de zones d’ombre qu’elle n’arrive pas à éclaircir. Personne ne la croit, ni son propre mari ni la police.

Mon avis

Eleanor et Ray viennent d’emménager en Angleterre dans une maison qu’ils louent, située dans un quartier sans histoire. Il est coach sportif. Elle reste souvent chez eux.  Ils arrivent des Etats-Unis et on se demande bien ce qu’ils viennent faire ici. Dès les premières pages, on sent des relations tendues entre eux sans vraiment comprendre pourquoi. Elle semble avoir tissé quelques liens avec la voisine mais ça ne va pas bien plus loin. Le lecteur s’interroge sur ce qu’ils ont à cacher, d’autant plus que leurs dialogues ne nous éclairent pas vraiment dans un premier temps.

Un jour, la voisine débarque en disant que sa fille a disparu. Eleanor est seule et l’écoute. Son mari et la police disent qu’elle fabule. Eleanor ne comprend pas mais comme elle a un peu de temps (et quelques dispositions) elle décide de mener une discrète enquête. Elle est vite mal à l’aise car des événements imprévisibles la bouleversent énormément et la mettent dans un état de stress permanent. On nage en plain brouillard. Florian Dennisson nous envoie dans tous les sens avant de recentrer son texte sur une vérité stupéfiante et là, tout s’emballe.

J’avoue être allée de surprise en surprise dans ce bon thriller domestique où chaque certitude peut être contredite dans les pages suivantes. L’auteur maîtrise son récit et sait où il veut nous entraîner. … Il s’est sans doute renseigné sur le FBI et ses moyens et son histoire se tient. L’écriture est fluide, le suspense bien présent, on sent même la peur arriver à grands pas …

J’ai malgré tout trouvé dommage de ne pas avoir une ou deux explications sur Grace (notamment sur les réactions de son mari et de la police à son égard) mais globalement c’est une bonne lecture.


"Le chant des esprits" de Sarah Lake (Das Lied der Maori)

 

Le chant des esprits (Das Lied der Maori)
Auteur : Sarah Lark
Traduit de l’allemand par Jean-Marie Argelès
Éditions : Archipel (20 Août 2014)
ISBN : 978-2352878032
580 pages

Quatrième de couverture

En 1852, Hélène et Gwyneira ont quitté l'Angleterre pour venir s'installer en Nouvelle-Zélande, le Pays du nuage blanc. Au crépuscule d'une vie mouvementée, les deux pionnières, toujours liées, s'inquiètent pour leurs petites-filles, Elaine et Kura, deux cousines que tout oppose. Belle et capricieuse, Kura possède une voix magnifique. Portée par le rêve d'une carrière internationale, elle refuse d'assumer son rôle d'héritière de Kiward Station, le domaine familial, pour se consacrer au chant.

Mon avis

Le deuxième tome de cette saga nous permet de retrouver les mêmes personnages mais le temps a passé. Les enfants deviennent des adultes et les parents vieillissent. La vie et les mœurs des Maoris sont toujours en filigrane, bien que j’aie trouvé cela moins intéressant et plus ancré sur les conflits familles / Maoris.

Globalement, j’ai été moins emballée que par le premier titre. Je ne regrette pas ma lecture mais je pouvais la poser plus facilement, signe que j’étais moins accrochée par le devenir des uns et des autres. Ce qui m’a particulièrement plu c’est l’histoire des mines et des mineurs (je ne savais pas que le charbon avait été exploité en Nouvelle-Zélande) et celle de la machine à coudre Singer (j’aimerais bien savoir s’il est vrai qu’elle est arrivée dans ce pays à cette époque).

Un point est particulièrement bien abordé. C’est le tiraillement que ressent Kura du fait de ses deux origines. Elle se sent « concernée » par la culture maorie mais on a le sentiment qu’elle ne sait pas comment se comporter avec cet héritage. De plus sa grand-mère a d’autres ambitions pour elle, notamment la reprise du domaine familial. On voit d’ailleurs à quel point l’idée de transmission des biens, d’un certain mode de vie, est important pour ceux qui ont réussi « à la force du poignet ». Ils se sont battus pour s’en sortir et ne veulent pas que leurs terres soient abandonnées et leur fortune dilapidée.

Un bon moment de lecture, porté par une écriture fluide et un récit plein de rebondissements.



"Le pays du nuage blanc" de Sarah Lark (Im Land der weissen Wolke)

 

Le pays du nuage blanc (Im Land der weissen Wolke)
Auteur : Sarah Lark
Traduit de l’allemand par Jean-Marie Argelès
Éditions : L’Archipel (28 Août 2013)
ISBN : ‎ 978-2809812367
680 pages

Quatrième de couverture

Helen, préceptrice de deux enfants dans une riche famille, répond à une annonce qui propose à des jeunes femmes de partir épouser des Britanniques installés en Nouvelle-Zélande. Sur le bateau qui la mène à Christchurch, elle se lie avec Gwyneira, une jeune noble galloise qui immigre à cause des difficultés financières de son père. L'amitié entre les deux femmes sera indéfectible malgré les épreuves.

Mon avis

Les sagas familiales sont captivantes et celle-ci ne déroge pas à la règle. On tourne les pages sans s’en rendre compte. On a le souhait de connaître le devenir des personnages, on veut que les « méchants » soient punis et que les « gentils » aient une vie agréable. C’est le bémol, c’est un peu manichéen et parfois les événements sont prévisibles.

Pour autant, je n’ai pas boudé mon plaisir et j’ai passé un agréable moment de lecture.

On est en 1852 et deux jeunes femmes, de milieux totalement opposés, et pour des raisons vraiment différentes, quittent la Grande-Bretagne, pour aller en Nouvelle-Zélande, épouser de presque parfaits inconnus. L’une connaît le père de son promis, l’autre a échangé quelques lettres (mais très peu).

Elles se lient d’amitié sur le bateau, pendant la longue traversée, bien qu’elles ne soient pas logées au même endroit et elles sont bien décidées à rester en contact une fois sur place. Malheureusement, une fois arrivées, elles réalisent que les promesses ne sont pas tenues et elles doivent faire face à quelques déceptions. On va suivre leurs déboires, les moments heureux et ceux plus difficiles, voire violents, auxquels elles sont confrontées.

J’ai beaucoup aimé ce récit. Les conditions de vie sur le paquebot sont bien décrites, on se rend compte des obstacles pour les passagers. Quand elles débarquent, c’est un autre monde. Elles ne peuvent pas forcément lutter contre ce qu’on leur impose. La place de la femme est à la maison, obéissante et soumise. Elles n’ont pas envie de se soumettre mais il leur faut agir avec discernement. J’ai trouvé intéressant le lien qu’elles créent avec les Maoris (dont on découvre l’histoire, bien intégrée au texte).

L’écriture est fluide (merci au traducteur), plaisante avec de nombreux dialogues. Les personnages sont attachants pour certains, détestables pour d’autres, mais heureusement certains sont un peu ambivalents. En tout cas, ce sont de beaux portraits de femmes qui ont du caractère et ça me plaît !


"La dinde de Poker" de Sandra Nelson & Alice Quinn

 

La dinde de Poker, le chat du Rocher
Auteurs : Sandra Nelson & Alice Quinn
Éditions : pour le calendrier de l’Avent de monBestSeller (Décembre 2024)
10 Pages

Quatrième de couverture

Un conte de Noël cosy crime aigre doux.

Mon avis

Poker, le chat adopté par Calypso Finn dans la série « Le chat du Rocher » a connu des jours de galère lorsqu’il cherchait à manger, seul, errant près des habitations.

C’est ce qu’on découvre dans cette courte nouvelle, riche en illustrations. J’ai d’ailleurs été surprise qu’elles aient été générées par intelligence artificielle. Elles sont vives, colorées, adaptées au texte.

Dans ce récit Poker voit, derrière, une vitre, un soir de Noël, une belle dinde rôtie qui lui fait bien envie. Va6til réussir à la voler ou tout simplement à mordre dedans ?

Mais quelque chose l’interpelle, ou plutôt quelqu’un. Un homme allongé qui semble sans réaction. Que s’est-il passé ?

Les auteurs nous content une petite histoire que chacun interprétera comme il le souhaite au niveau de la morale !


"Vas-y !" de Sylvie Baussier & Manu Boisteau

 

Vas-y !
Handicap ou pas
Auteurs : Sylvie Baussier (texte) & Manu Boisteau (illustrations)
Éditions : Syros (26 Avril 2001)
ISBN : 9782841469352
68 pages

Quatrième de couverture

Le handicap sous toutes ses facettes ou comment dépasser ses préjugés pour mieux vivre ensemble.

Mon avis

Ce petit livre devrait être présent dans les bibliothèques d’école. En quatorze réflexions, il présente le handicap, les handicaps mais pas tous bien entendus, et les réactions que les élèves peuvent avoir (crainte, pitié, aider ou pas…) ou doivent essayer d’avoir.

Les conseils sont simples. Une personne en situation de handicap est un être humain comme les autres. Il faut « apprivoiser les sentiments qu’elle inspire et apprendre à la connaître en toute confiance sans peur.

Chaque « conseil » est accompagné d’une double page de dessins au trait noir sans couleur, plutôt humoristiques et bien pensés.

Suffisant pour donner lieu à des échanges, ce recueil se suffit à lui-même !


"Jérôme K. Jérôme Bloche - Tome 29: Perpétuité" d'Alain Dodier

 

Perpétuité
Jérôme K. Jérôme Bloche Tome 29
Dessin : Alain Dodier
Scénario : Dodier
Couleur : Cerise
Éditions : Dupuis (18 octobre 2024)
ISBN : 979-1034768776
58 pages

Quatrième de couverture

Le quotidien d'un détective privé n'est pas de tout repos. Et du repos justement, Jérôme en manque. Réveillé en pleine nuit par un appel de son fidèle ami Burhan, il va découvrir qu'il doit une fois de plus enquêter sur une étrange disparition. Celle d'un doudou. Celui de Yasmina, venue accompagner sa maman, femme de ménage dans une grande maison bourgeoise et attristée de l'y avoir égaré. Jérôme va rapidement apprendre que l'oncle de Yasmina a lui aussi disparu aux alentours de cette étrange maison.

Mon avis

Quel plaisir de retrouver mon détective préféré et son solex ! J’ai appris, dans ce tome, que c’était un 3800, comme le mien quand j’étais au lycée (sauf que moi il est bleu !). D’ailleurs, Jérôme demande au curé, très moderne, de la paroisse, de le réparer et en échange, il emprunte une mobylette plus nerveuse (d’accord, mais aucun charme, n’est-ce pas ?).

Cette fois-ci, c’est Burhan, l’épicier du coin et ami de notre fin limier qui appelle à l’aide. Rachida, une de ses connaissances, est inquiète pour son frère qui n’est pas rentré. Il est allé dans la grande maison où sa sœur travaille (avec une patronne acariâtre) pour récupérer le doudou oublié par sa nièce. La femme qui habite cette demeure a été une grande pianiste mais un problème l’a contrainte à arrêter. Maintenant, elle donne des cours. Elle semble cacher quelque chose…

Jérôme décide de se rendre sur place, en cachette de la propriétaire. Mais il est toujours aussi naïf et maladroit (pour notre plus grand plaisir). Il ne croit pas trop à cette histoire de disparition. Heureusement, Babeth, son amie hôtesse de l’air, lui souffle des idées dans ses rêves et il persévère.

Si cet album n’est pas le meilleur au point de vue scénario, j’aime toujours autant l’univers créé par Dodier. Ses personnages secondaires sont un régal. Les dessins sont soignés, les détails de qualité, je suis totalement fan !


"L'adoption - Cycle 1 / Tome 2 : La Garúa" de Zidrou et Monin

 

L’adoption – Tome 2 : La Garúa
Auteurs : Zidrou (scénariste) & Arno Monin (dessinateur, coloriste)
Éditions : Grand Angle (31 Mai 2017)
ISBN : 978-2818941706
72 pages

Quatrième de couverture

"L'amour ne se vole pas. L'amour ne s'achète pas. L'amour se mérite".

« On cherche parfois à porter son amour plus loin qu’on ne le devrait. »

Qinaya est repartie. Après l’arrestation de ses parents adoptifs pour enlèvement, elle a regagné son Pérou natal. Après un an et demi de recherches, Gabriel, son « grand-père » de France, se rend à Lima pour la retrouver.

Mon avis

Qinaya, fillette péruvienne, a été adoptée par un couple habitant en France. Mais les démarches ayant été biaisées, on leur enlevé l’enfant et elle est repartie au Pérou, près de sa maman.

Gabriel, son grand-père paternel, bourru et peu enclin à la tendresse, avait fini par créer un beau lien avec elle fait d’affection et de complicité. C’est pour ça qu’il a fait appel à un détective privé pour la retrouver. Lorsqu’il a enfin des nouvelles, dix-huit mois après son départ, il se rend sur place. Qinaya va-t-elle le reconnaître ?  Rien ne se passe comme il le pensait. Peut-il encore espérer ?

Dans ce second tome concernant Qinaya, de nouveaux thèmes sont abordés. La culpabilité, les liens père / fils ou fille. Ce qu’on souhaite pour le devenir de nos enfants, ce qu’on est prêt à faire pour eux ou pas…. C’est approché notamment par la rencontre de deux pères, chacun avec ses problèmes. Et on s’aperçoit que leurs échanges leur permettent d’évoluer.

Les dessins sont toujours expressifs. Quant aux dialogues, surtout pendant la rencontre entre les deux pères qui souffrent, ils sont profonds et intéressants.

Peut-être que certains lecteurs regretteront que cette suite (et fin) s’éloigne de Qinaya. Elle est pourtant le fil conducteur, la raison du voyage, qui devient un peu initiatique pour le papy. C’est un autre aspect de la vie de cette famille et comme dans le premier tome, on n’est pas dans un monde bisounours.


"L'autre fille" d'Annie Ernaux

 

L’autre fille
Auteur : Annie Ernaux
Éditions : Nil (3 mars 2011)
ISBN : 978-2841115396
80 pages

Quatrième de couverture

" Car il a bien fallu que je me débrouille avec cette mystérieuse incohérence : toi la bonne fille, la petite sainte, tu n'as pas été sauvée, moi le démon j'étais vivante. Plus que vivante, miraculée. Il fallait donc que tu meures à six ans pour que je vienne au monde et que je sois sauvée. "

Mon avis :

L’acte d’écrire peut-il être un exutoire ?

Annie Ernaux a entendu parler de sa sœur décédée alors que les adultes pensaient qu’elle n’écoutait pas.
Combien d’erreurs commet-on en croyant que les enfants ne comprennent pas ? Combien de non-dits, de « cadavres » dans les placards découvriront-ils ?

Et que dire de la phrase : « Elle était plus gentille que celle-là » ?. C’est une remarque terriblement destructrice ; non seulement la personne qui reste est appelée « celle-là », comme si elle n’avait pas de prénom, comme si elle n’existait pas, mais en plus, elle est moins gentille…
Comment Annie Ernaux a-t-elle pu se construire, garder l’estime d’elle-même après de telles remarques ?

« Est-ce que je t’écris pour te ressusciter et te tuer à nouveau ? » demande t’elle dans cette longue lettre à celle qui restera à jamais une inconnue.

J’espère, de tout cœur, qu’elle a écrit pour elle, pour être soulagée de ce fardeau trop lourd en le partageant de si belle manière, par l’intermédiaire de son écriture douce et voilée, avec ses lecteurs ….


"La face cachée des blogs(LOL)" de Christine Chancel

 

La face cachée des blogs
Auteur : Christine Chancel
Éditions : L’atelier du Livre (5 janvier 2017)
ISBN : 978-1520314792
146 pages

Quatrième de couverture

Clémentine et son époux Louis mènent une existence paisible dans leur petite exploitation agricole. Lucie, amie d’enfance du couple, a perdu son Charles trop tôt. Cette vie des gens de la terre leur apporte un bonheur simple, partagé entre voisins lors des veillées. Claudine, fille de Clémentine et Louis, vit et travaille à Paris : elle présente les prévisions météorologiques à la télévision. Claudine décide d’offrir un ordinateur à ses parents.

Mon avis

Clémentine et Louis sont mariés. Ils habitent dans un village et sont agriculteurs. Leur fille unique, Claudine, ne reprendra pas la ferme. Après des études, un concours, elle devient météorologue et s’installe à Paris. Elle fait la fierté de ses parents, même si son père pense que la plupart du temps, la météo annoncée n’est pas la bonne et que ce métier est bien particulier.

Sa mère est bien copine avec Lucie, la voisine qui est veuve. Elles papotent souvent toutes les deux.
La vie est simple dans ce coin de France, le facteur s’arrête pour boire le café, on vit un peu « à l’ancienne ».

Claudine est choisie pour présenter les prévisions météorologiques à la télévision et elle décide d’offrir un ordinateur à ses parents. D’abord réticente, persuadée qu’elle va faire repartir cette « machine », la maman finit par s’habituer. Elle conseille même à sa voisine de se lancer et d’avoir un PC !

De clic en clic, elles se laissent, toutes les deux, entraîner dans des relations virtuelles, pas toujours bien maîtrisées. Elles sont un peu naïves, trop confiantes face à la découverte d’internet.

Dans ce roman, l’auteur rappelle qu’il faut avoir du recul sur tout ce que peut générer internet. Il faut mettre en garde les personnes âgées autant que les adolescents !

C’est le récit d’un quotidien ordinaire, bouleversé par l’arrivée d’une forme de modernité qui change les liens que les gens ont entre eux. Les protagonistes doivent comprendre les limites de ce genre de communication.

L’écriture est plaisante, j’aurais souhaité un peu plus de rebondissements pour mettre du rythme mais cela reste une lecture agréable.


"La chambre des curiosités" de Douglas Preston & Lincoln Child (The Cabinet of Curiosities)

 

La chambre des curiosités (The Cabinet of Curiosities)
Une enquête de l’inspecteur Pendergast
Auteurs : Douglas Preston & Lincoln Child
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Sebastian Danchin
Éditions : L'Archipel (27 juin 2003)
ISBN : 978-2841874965
616 pages

Quatrième de couverture

De nos jours, à Manhattan, les ouvriers d'un chantier de démolition s'affairent parmi les gravats lorsque, soudain, ils se figent devant l'horreur du charnier qu'ils viennent de mettre au jour. L'enquête menée par l'inspecteur Aloysius Pendergast, du FBI, établit qu'il s'agit des restes de trente-six adolescents, victimes d'un tueur en série : le Dr Leng, ayant sévi à New York dans les années 1880.

Mon avis

Je n’avais pas encore lu cette enquête de Pendergast et je suis contente de l’avoir fait. Elle est le trait d’union qui me manquait pour comprendre le devenir de certains personnages. Je remercie donc le lutin qui a mis ce livre sur mon chemin.

L’excellent Sebastian Danchin a, une fois encore, rédigé une traduction que je juge impeccable (bien que je ne compare pas avec le texte original). L’écriture est fluide, pas de coquilles, un vocabulaire soigné et adapté.

Aloysius Pendergast, enquêteur du FBI, est toujours aussi mystérieux. Il se joue des personnes pour arriver à ses fins, il a de la ressource, des idées, il fait une visite virtuelle des lieux pour comprendre. Il a plusieurs facettes et s’adapte à ses interlocuteurs. C’est dans ce récit qu’il rencontre Nora Kelly pour la première fois. Ils se retrouvent confrontés à un mystère : des restes humains, datant des années 1880, mais qui ont un lien, semble-t-il, avec des meurtres qui se déroulent dans le présent. Assassinats particulièrement horribles qui incitent à arrêter au plus vite le tueur.

Les investigations sont menées discrètement par ces deux personnages, ils apprennent à se connaître, à collaborer mais ils dérangent. Régulièrement, on leur met des bâtons dans les roues. Le danger rode.

J’ai beaucoup apprécié cette nouvelle aventure. Suspense, rebondissements, éléments de réflexion, personnages bien campés, il ne manque rien pour passer un bon moment.


"Julie, Claire, Cécile - Tome 14 : Ces filles sont folles !" de Michel Bom & Sidney

 

Julie, Claire, Cécile - Tome 14 : Ces filles sont folles !
Auteurs : Michel Bom (scénario) & Sidney (dessins)
Éditions : Le Lombard (22 Octobre 1998)
ISBN : 978-2803613472
48 pages

Quatrième de couverture

Ces filles sont folles ! Cela ne fait pas l'ombre d'un doute. Folles de joie de vivre. Folles de l'envie de faire de nouvelles découvertes et de se moquer d'une société -presque- aussi folle qu'elles. Folles de beaux mecs, bien entendu, pour notre plus grand plaisir !

Mon avis

Sidney, de son vrai nom Paul Ramboux, est décédé en Octobre 2023. Je l’ai rencontré plusieurs fois à la fête du livre de Saint-Etienne où il me dédicaçait, d’un dessin, la série « Julie, Claire, Cécile ».

Ce sont trois jeunes filles modernes qui rêvent de « mecs », de vacances, de bon temps. Elles doivent aller au lycée et parfois, elles se mettent dans des situations délicates. Elles ont chacune leur caractère et d’un album à l’autre, on retrouve les caractéristiques qui les définissent. Elles sont « branchées » (bon, d’accord pas de téléphone portable, à l’époque de la création de cette bande dessinée, il n’y en avait pas) et veulent croquer la vie à pleines dents.

Chaque anecdote fait une page ou plusieurs suivant son développement. Ce n’est pas la même histoire dans tout l’album (pour celui-là). Elles rencontrent des jeunes gens intéressants, intéressés, avec qui elles échangent. Elles ont des réactions en lien avec leur âge.

Parfois, un événement improbable déstabilise tout le monde, mais la plupart du temps, la bonne humeur reprend le dessus et tout se termine dans les rires.

J’ai tous les titres que je re découvre quand j’ai envie de légèreté et de ne pas me prendre la tête (et de sourire). Je ne m’en lasse pas.


"Retour à la poussière" de Matt Goldman (Gone to Dust)

 

Retour à la poussière (Gone to dust)
Auteur : Matt Goldman
Traduit de l’anglais par Estelle Roudet
Éditions : Calmann-Lévy (2 novembre 2017)
ISBN : 978-2702160855
320 pages

Quatrième de couverture

Comment résoudre un meurtre sans la moindre preuve exploitable ? C’est la difficulté que rencontre le privé Nils Shapiro. Son ancien collègue de la police d’Edina, Anders Ellegaard, vient en effet de l’appeler au sujet d’une affaire pour le moins étrange. Maggie Somerville a été retrouvée assassinée dans sa chambre mais, problème : le cadavre, la scène de crime et la maison entière sont noyés sous une épaisse couche de poussière provenant de centaines de sacs d’aspirateur éventrés. Espérer y retrouver l’ADN de l’assassin relève de l’utopie pure et simple. Nils se lance malgré tout dans l’enquête.

Mon avis

C’est une femme discrète, sans histoire, avec une vie rangée, elle est appréciée de ses voisins et de ceux qui la connaissent, alors qu’a-t-il pu bien se passer ? Qui a assassiné Maggie Somerville ? Et surtout pourquoi cette mise en scène macabre : à savoir recouvrir son corps et sa maison de poussière ? Dans quel but ?

C’est à Nils que la police demande de l’aide. Avant il était un des leurs et maintenant, il travaille en solitaire. Cela lui permet de fouiner un peu plus que les autres, de flirter avec les règles et surtout, il n’a de compte à rendre à personne….. Nils est donc un « privé » et un personnage à lui tout seul. Un de ceux que vous aimeriez rencontrer plus souvent dans les romans. Il ne s’embarrasse pas de fioriture et s’il lui arrive de faire son timide avec les femmes, le reste du temps, il est plutôt « cash », agissant et parlant « à l’instinct ». Cela met de la fantaisie dans le récit et c’est une bonne chose.

Alors pourquoi toute cette poussière ? Bien entendu pour noyer le peu de traces qu’on aurait pu avoir. Cela permet de faire déjà quelques déductions dont le détective ne se prive pas. Ne comptez pas sur moi pour vous les conter, cela n’aurait aucun intérêt. (à vous de lire pour savoir ;-)

Ce qui en a par contre, c’est de voir au fil des pages de quelle façon se construit le raisonnement de Nils. Comment les personnes qu’il rencontre peuvent lui apporter, ou pas, une autre piste, une autre vision des faits. Et puis cette Maggie, est-elle aussi lisse qu’elle en a l’air ? N’a-t-elle pas une part d’ombre comme beaucoup d’entre nous ?

Cet opus est bien construit, agréable à lire (merci à la traductrice). L’auteur réussit à introduire des thèmes intéressants (même si certains ne sont qu’effleurés) comme les problèmes de filiation, d’amour secret, de jalousie, d’immigration, de guerre civile etc. J’ai pris du plaisir à cette lecture. Il n’y a pas de temps mort et si la fin arrive un peu vite, le reste est assez bien développé.


"Le passeur" de Franck Mancuso

 

Le passeur
Auteur : Franck Mancuso
Éditions : Récamier (31 Octobre 2024)
ISBN : 978-2385771553
256 pages

Quatrième de couverture

Gabriel Spaak, commandant à la brigade criminelle, avait tout programmé. Inconsolable depuis la mort tragique de sa femme et de son fi ls, il s'était isolé au milieu de la nuit pour en finir. Jusqu'à ce que ce chauffeur de taxi, surgi de nulle part, ne chamboule ses plans. Moralité, au lieu de se la couler douce en enfer, il se retrouve à enquêter sur deux morts suspectes. Deux morts que la médecine légale ne parvient pas à expliquer. Deux morts que rien ne relie et sur lesquelles les policiers du 36 se cassent les dents. Tandis que les éléments troublants s'accumulent et que les personnages étranges se succèdent, le mystérieux chauffeur de taxi se manifeste à nouveau et propose son aide à Gabriel.

Mon avis

Il s’appelle Gabriel et depuis que sa femme et son fils sont décédés dans un accident, il est non seulement inconsolable mais aussi ingérable. Plus rien ne le retient, le boulot ne l’intéresse plus, il n’a qu’une envie : en finir et rejoindre ceux qu’il aime, de l’autre côté du chemin. Alors ce soir-là, il décide de se donner la mort. Mais un mystérieux chauffeur de taxi dans une voiture improbable l’en empêche….

Il lui demande de comprendre comment est mort un rocker. On a conclu rapidement que c’était une overdose mais en vérifiant, il n’en est rien. L’attrait de l’enquête motive Gabriel, alors pourquoi pas une dernière affaire ? Le revoilà sur le terrain. Il a souhaité reprendre très vite après le drame et ses collègues se questionnent sur son attitude. Ne fait-il pas des erreurs ? Bourré de médicaments, n’a-t-il pas des visions ? De plus, c’est compliqué de discuter avec lui. Il faut dire qu’il est confronté à quelques événements bizarres qu’il ne sait pas trop comment interpréter et que ses amis, eux, ont du mal à le croire réels.

Malgré les obstacles, notamment le manque de compréhension de ses coéquipiers, Gabriel prend l’enquête à bras le corps. Il s’y consacre même en dehors des horaires officiels, il veut trouver des réponses et quand d’autres macchabées sont annoncés, il souhaite arrêter les dégâts. Va-t-il y arriver ? Ne risque-t-il pas d’y laisser des plumes ou encore plus de son sommeil, de sa santé ?

Franck Mancuso a travaillé vingt ans dans la police avant de devenir scénariste, réalisateur puis écrivain en rédigeant son premier roman : Le passeur. Il a une écriture visuelle, dynamique, son récit pourrait être adapté en film sans problème. Il y a du rythme, du mouvement. On pourrait s’attendre à une enquête banale mais on s’interroge sur des faits et des personnages énigmatiques. Mon esprit cartésien a bien émis des hypothèses tout en me soufflant : non, je ne crois pas. Cet aspect ésotérique est très bien pensé, pas du tout surfait car bien intégré à l’histoire. Peu importe si quelques petites choses se devinent, j’ai adhéré et ça m’a bien plu.

L’enquête en elle-même est intéressante, avec son lot de rebondissements, d’individus surprenants ou attachants. J’ai bien aimé Gabriel, on sent sa souffrance, ses émotions à fleur de peau, on veut qu’il s’en sorte, que la vie reprenne le dessus.

Un livre étonnant et un auteur à suivre.


"Terminus pogo" de Ulric

 

Terminus pogo
Auteur : Ulric
Éditions : Jarjille (25 octobre 2024)
ISBN : 978-2493649188
132 pages

Quatrième de couverture

L’histoire se déroule dans les années 80 dans une banlieue française. Gilles, Rachid et Arnaud ont un programme bien huilé pour passer l’été avant leur entrée dans la vie active : concerts, bières, glande, la belle vie ! Mais entre errances et influences malsaines, leur amitié va connaître quelques turbulences…

Mon avis

On est dans les années 80. Une bande de jeunes, principalement des garçons, « zone » dans un quartier de banlieue. Ils savent bien qu’il leur faut chercher du travail, rentrer dans la vie active… mais en attendant, c’est l’été et ils entendent bien profiter de leur temps libre au maximum.

Il y a Rachid, dont la sœur est bien jolie d’ailleurs, Gilles et Arnaud. Ils écoutent des chansons engagées, punk, dont on a plusieurs extraits pour illustrer certaines situations rencontrées par les personnages. On a de quoi écouter une play list qui déménage !

On découvre les problématiques des jeunes désœuvrés, qui oublient souvent de réfléchir. Drogue, alcool, drague maladroite, bagarres entre clans rivaux, racisme bête et méchant, provocations stupides, influences néfastes …. Ils s’ennuient alors certains se laissent embarquer à faire les mauvais choix et les « conneries » arrivent et avec des conséquences quelques fois désastreuses ….

Les visages sont expressifs. Les dessins sont très réalistes, les scènes présentées également, malheureusement, parfois car la violence est là. L’auteur montre bien comment une rencontre banale, un peu de baratin, et hop un des jeunes a le cerveau retourné et se fait embrigader par des fachos … au risque de perdre ses copains et de ne pas suivre le bon chemin …

Le vocabulaire est teinté d’argot mais pas vulgaire. Il y a parfois des pages où les croquis se suffisent à eux-mêmes pour faire passer un message, une émotion, une action. C’est très bien fait, les mouvements sont « croqués » d’une façon très vive, on croit voir le décor bouger et entendre les différents bruits…

Dans les dernières pages, Ulric explique l’importance des chansons citées, elles sont liées à ses souvenirs de jeunesse. Pour lui, il était essentiel de comprendre le message que voulaient faire passer les interprètes.

J’ai beaucoup apprécié le côté « documentaire » de cet album ainsi que la qualité des illustrations. Je pense qu’il conviendra à des gens ayant été adolescents dans les années 80. Ils retrouveront un peu de l’atmosphère qu’ils ont connu (et peut-être des chansons qu’ils écoutaient), surtout s’ils vivaient en cité.



"Jour de ressac" de Maylis de Kerangal

 

Jour de ressac
Auteur : Maylis de Kerangal
Éditions : Verticales (15 Août 2024)
ISBN : 978-2073054975
256 pages

Quatrième de couverture

"Finalement, il vous dit quelque chose, notre homme ? Nous arrivions à hauteur de Gonfreville-l'Orcher, la raffinerie sortait de terre, indéchiffrable et nébuleuse, façon Gotham City, une autre ville derrière la ville, j'ai baissé ma vitre et inhalé longuement, le nez orienté vers les tours de distillation, vers ce Meccano démentiel. L'étrange puanteur s'engouffrait dans la voiture, mélange d'hydrocarbures, de sel et de poudre. Il m'a intimé de refermer, avant de m'interroger de nouveau, pourquoi avais-je finalement demandé à voir le corps ?

Mon avis

Son corps a été retrouvé sur une plage du Havre, dans un coin ou les dealers passent souvent. Sa mort est-elle liée à un quelconque trafic ? Cet homme n’a aucun papier sur lui, à part un ticket de cinéma au dos duquel est griffonné un numéro de téléphone. Alors la police appelle. Au bout du fil, une femme, doubleuse au cinéma et donneuse de voix. Elle a un conjoint, une fille, une vie tranquille.

Une demande : « Madame, venez au Havre pour une affaire qui vous concerne, un homme décédé, non identifié ». C’est le choc, les questions puis le lendemain, le départ vers cette ville où elle a vécu quand elle était jeune.

Elle ne voit pas ce qu’elle va faire là-bas, un aller-retour rapide, hop le train pour rentrer et on n’en parle plus. Mais une fois sur place, après avoir vu les photos du cadavre, elle décide de rester quelques heures de plus pour essayer de comprendre ce que son numéro faisant dans la poche où il a été retrouvé. Peut-être le connaissait-elle … autrefois ?

Le lecteur peut penser que la narratrice (dont on ne saura jamais le nom) va se lancer dans une enquête policière. Mais pas du tout. Elle déambule dans cette ville au gré de ses recherches, de ses pas, de ce qui lui revient en mémoire. C’est son histoire personnelle qui la porte et on chemine avec elle, dans son passé, son présent, ses pensées. On est dans son intimité, au plus profond de son esprit, de ses émotions, de ses ressentis. Finalement sa venue dans cette cité est prétexte à refaire le chemin de sa vie et telle la vague brutale apportée par le ressac, les souvenirs affluent, se heurtent, vont et viennent ….

Comme toujours, avec Maylis de Kerangal, le vocabulaire est choisi avec soin, parfaitement adapté au contexte, ici un bord de mer tumultueux (le vent, la pluie, la drogue…) qui a même connu la guerre. Les dialogues sont en style indirect, insérés au texte et pourtant ça n’alourdit pas la lecture. Les phrases sont longues, elles éveillent tous nos sens car l’auteur parle de sons, de météo, de pierres qui écorchent et salissent les mains etc … Et puis quand le présent surgit, au milieu des pensées, le style se fait plus vif.

« Pâles coïncidences, perturbations sensorielles, associations fugaces et discutables, ces divagations se côtoyaient en moi comme piégées dans le maillage translucide et serré d’un filet de tulle : je les voyais qui voletaient, se posaient, battaient des ailes comme des papillons, je les rapprochais les unes des autres. »

On s’attache aux pas de cette femme, on visite le Havre à ses côtés, elle nous offre une approche de cette ville et au final, on irait bien passer quelques jours là-bas ou encore quelques pages avec l’auteur pour le plaisir de la musicalité du phrasé empli de poésie, de sens et qui déclenche chez le lecteur un coup de cœur !


"L'Arabe du futur - Tome 6 : Une jeunesse au Moyen-Orient, 1994-2011" de Riad Sattouf

 

L'Arabe du futur - Tome 6 : Une jeunesse au Moyen-Orient, 1994-2011
Auteur : Riad Sattouf (texte et dessin)
Éditions ‏ : ‎ Allary (24 Novembre 2022)
ISBN : 978-2370734242
186 pages

Quatrième de couverture

Ce livre raconte l’histoire vraie de la disparition de l’Arabe du futur.

Mon avis

Riad a maintenant seize ans, il est au lycée et veut devenir dessinateur de BD. C’est difficile car pour sa mère et ses grands-parents ce n’est pas un métier d’avenir. Même lui ne semble pas trop y croire tant il est obsédé par ce que dirait ou penserait son père (il vit en Syrie avec Fadi, frère de Riad, qu’il a enlevé et que la mère ne peut pas récupérer). Il voudrait s’affranchir de ce « poids » paternel mais que c’est dur…

Ce tome est le moins léger des six, il a beaucoup de texte. On voit Riad qui est suivi par une psy pour essayer de mieux gérer sa vie, de ne pas être envahie de cauchemars, d’angoisses… Il se pose beaucoup de questions pour ses grands parents vieillissants… Sa mère essaie tout un tas de démarches pour retrouver Fadi, elle espère et croit un peu n’importe qui… Il finit par intégrer des établissements post bac et quitte le domicile familial mais il galère au quotidien …

Les rares courriers du père critiquent la France. Le fossé se creuse et Riad s’interroge sur ce frère qui, depuis de nombreuses années, grandi loin de la France, sans eux, avec d’autres coutumes, une autre façon de vivre…

Il établit un lien ténu avec lui et constate que sa vie est là-bas. Pourtant quand les événements politiques en Syrie mettent sa vie en danger, Fadi souhaite venir en France avec sa nouvelle famille….

J’ai beaucoup aimé toute la série mais le numéro 6 m’a particulièrement plu. Riad Sattouf explique comment il a rencontré le succès, comment il est devenu lui-même et pas ce qu’on voulait qu’il soit….


"Le premier qui pleure a perdu" de Sherman Alexie (The Absolutely True Diary of a Part-Time Indian)

 

Le premier qui pleure a perdu (The Absolutely True Diary of a Part-Time Indian)
Auteur : Sherman Alexie
Traduit de l’anglais (américain) par Valérie Le Plouhinec
Illustrations de Ellen Forney
Éditions : 9782226399274
290 pages

Quatrième de couverture

Voici les péripéties poignantes et drôles de Junior, un jeune Indien Spokane, né dans une Réserve. Rien ne lui sera épargné – il a été le bébé qui a survécu par miracle, l’enfant dont on se moque et il est désormais l’adolescent qui subit en soupirant coups de poings et coups du sort. Jusqu’au jour où cet éternel optimiste réalise qu’un déplorable avenir l’attend s’il ne quitte pas la Réserve. Admis à Reardan, une école prestigieuse surtout fréquentée par les Blancs, Junior se sent devenir un Indien à temps partiel…

Mon avis

C’est un roman classé jeunesse mais les adultes peuvent le lire ! D’autant plus que ce récit est largement inspiré de l’histoire de l’auteur, de ce qu’il a vécu. Il est également intéressant de savoir que ce livre a été parfois censuré ou controversé aux Etats-Unis. Peut-être que ça dérange lorsque la vérité est dite un peu crument ou de façon irrévérencieuse ?

En effet, dans cette presque biographie, Sherman Alexie explique combien il est difficile pour un indien né dans une réserve, d’aller, une fois adolescent, étudier à la ville voisine. C’est pourtant ce que décide de faire Junior, jeune Spokane, car il souhaite une autre vie. Il a bien compris que s’il ne quitte pas la réserve, il n’aura pas le choix de son avenir.  Donc être inscrit dans un lycée de blancs peut l’aider, enfin c’est ce qu’il pense. Faisant fi de ses problèmes de santé, il fait tout pour obtenir gain de cause.

Mais comment s’y rendre chaque jour, comment payer les repas, les fournitures, comment se faire accepter ? A-t-il anticipé tout ça ? La souffrance que ça engendre pour lui, les élèves qui le rejettent et même certains profs ? malgré tout, il ne lâche rien, quitte à perdre son meilleur ami, resté là où ils ont toujours vécu.

Présenté sous forme de journal, bien écrit, agrémenté de dessins, ce recueil est une belle découverte. L’auteur nous montre le gouffre qui existe entre ces deux mondes qu’il décrit, les obstacles pour les uns et les autres. Rien n’est aisé quel que soit le côté où Junior se trouve.

Je l’ai trouvé très fort. Tenace, il suit son chemin sans oublier ses racines, les coutumes de son peuple qu’il partage avec nous. On suit l’évolution de sa « position » » au lycée, de ses rapports avec les autres et on espère que ce que la brèche qu’il a ouverte servira à d’autres….

"L’adoption - Cycle 1/ Tome 1 : Qinaya" de Zidrou & Monin

 

L’adoption - Cycle 1 / Tome 1 : Qinaya
Auteurs : Zidrou (scénariste) & Arno Monin (dessinateur, coloriste)
Éditions : Grand Angle (4 Mai 2016)
ISBN : 978 2 8189 3603 0
72 pages

Quatrième de couverture

"L'amour ne se vole pas. L'amour ne s'achète pas. L'amour se mérite".
Lorsque Qinaya, une orpheline péruvienne de 4 ans, est adoptée par une famille française, c'est la vie de tous qui est chamboulée. Mais pour Gabriel, ce sera encore plus compliqué : il lui faudra apprendre à devenir grand-père, lui qui n'a jamais pris le temps d'être père. Des premiers contacts un rien distants aux moments partagés, Gabriel et Qinaya vont peu à peu nouer des liens que même le vieux bourru était loin d'imaginer.

Mon avis

Zidrou et Monin ont fait plusieurs albums sur le thème de l’adoption mais d’après ce que j’ai compris, ils vont deux par deux. Celui-ci est le premier du « Cycle 1 » (il y a trois cycles pour l’instant).

Suite à un tremblement de terre au Pérou, Qinaya est adoptée par un couple français. Gabriel, le grand-père, qui ne s’est pas beaucoup consacré à son fils, n’a pas envie de ce bouleversement dans sa vie. Il a maintenant pris sa retraite et confié sa boucherie, il entend bien profiter de son temps libre avec sa femme et ses potes (qui eux aussi tenaient des commerces).

Oui, mais voilà, Qinaya est là ! Gabriel n’a pas demandé à être Papi, mais, au fil des jours, il s’attache à elle. Un lien très fort se tisse. Le vieux grincheux finit par devenir un papi gâteau. Il se laisse apprivoiser par ce petit bout de femme, il s’attendrit.

Les auteurs sont très doués pour nous offrir des dialogues et des dessins réalistes et expressifs aux couleurs douces. C’est très réussi. Ils montrent les émotions de chacun, les sentiments qui grandissent. Les discussions entre les grands-parents sont très intéressantes et celles entre les vieux copains ne manquent pas d’humour.

Un monde de bisounours ? Pas sûr ! La fin m’a vraiment surprise et je me demande ce que va donner le tome 2….



"Terrasses" de Laurent Gaudé

 

Terrasses
ou Notre long baiser si longtemps retardé
Auteur : Laurent Gaudé
Éditions : Actes Sud (10 Avril 2024)
ISBN : 978-2330189143
144 pages

Quatrième de couverture

Vendredi 13 novembre 2015, il fait exceptionnellement doux à Paris – on rêve alors à cette soirée qui pourrait avoir des airs de fête. Deux amoureuses savourent l’impatience de se retrouver ; des jumelles s’apprêtent à célébrer leur anniversaire ; une mère s’autorise à sortir sans sa fille ni son mari pour quelques heures de musique. Partout on va bavarder, rire, boire, danser, laisser le temps au temps. Rien n’annonce encore l’horreur imminente.

Mon avis

L’histoire fera le récit.

Novembre 2015, l’horreur en plein Paris. Laurent Gaudé campe plusieurs protagonistes, que l’on retrouve de page en page sans repère de prénoms, de lieux, ou d’heures. Le temps s’est arrêté. Seules restent les scènes vécues au ralenti ou de plein fouet.

Il présente les gens qui sont là ou qui passent pas loin, se retrouvant emprisonnés de cet instant où tout a basculé. Il y a ceux qui vivent et ceux qui voient. Les pensées des premiers se bousculent, pourquoi moi, qu’est-ce que je fais là, j’ai raté mon rendez-vous, j’ai oublié de dire pardon/je t’aime / attends-moi…. Les pensées des seconds décrivent le chaos, leurs actions pour soutenir, soulager, rassurer…

C’est un roman choral à la structure surprenante, en dix parties. L’écriture est tendue comme l’atmosphère étouffante suite aux actes odieux qui ont détruit des vies. On survole les lieux, les gens, ce qu’ils font, ce qu’ils subissent. On entend leurs cris, muets s’ils sont morts, on souffre pour eux, on est révoltés…

L’écriture est belle, poignante, mais ça reste assez haché, court. L’auteur parle de plusieurs cas, comme s’il voulait faire un panel de tous ceux qui ont été là … ce qui est bien entendu totalement impossible. Cela reste malgré tout une forme d’hommage pour toutes les victimes, leur famille, les secouristes et tous ceux qui ont donné d’eux pour aider.


"Carmen Cru la vioque de choc – Intégrale volume 02" de Jean-Marc Lelong

 

Carmen Cru la vioque de choc – Intégrale volume 02
Auteur : Jean-Marc Lelong (scénario, dessins)
Éditions : Fluide glacial (18 février 2003)
ISBN : 978-2858153619
152 pages

Quatrième de couverture

Les aventures de la petite vieille exécrable mais attachante qui abuse outrageusement des privilèges que son âge peut lui donner.

Mon avis

Elle est insupportable, irrévérencieuse et pourtant on rit avec elle.  Carmen Cru profite de son âge pour tout s’autoriser, brûler les meubles du voisin qui gênent dans la cour, se faire servir, passer devant le tout le monde etc.

Elle se plaint énormément, ne respecte personne, filoute pour ne pas payer ou arriver à ses fins. C’est la reine de la mauvaise foi, elle est détestable ! Elle a du plaisir à être méchante et à faire souffrir les autres, vous voyez le genre ? Pire qu’une peste ! Elle se déplace avec un vélo et une carriole antique. Elle ne prend aucune précaution, tant pis si elle renverse quelqu’un ! Elle n’a pas un visage avenant, berk !

Le dessin est en noir et blanc, touffu, sans dégradé, il faut bien se concentrer si on ne veut pas rater un détail sur les personnages car le décor, lui, est plutôt minimaliste. Le trait est fin.

Les histoires font quelques pages, jamais plus de cinq ou six. Cela permet de vite passer à autre chose si on accroche moins avec un scénario. Je les ai trouvées un peu inégales, certaines ne me faisaient pas trop rire. Peut-être qu’il y avait trop de pages pour moi ? Ce sont des situations de la vie de tous les jours où Carmen agit dans le but de faire du mal… Pas très moral me direz-vous ? Normal, l’éditeur, c’est Fluide Glacial…

Je l’ai lu par petits bouts, pas tout d’un coup. Je crois que j’ai bien fait car elle m’aurait rapidement exaspérée.

NB : L’auteur a choisi de se donner la mort en 2004 et le personnage n’a pas de repreneur (peut-être qu’il ne le souhaitait pas, ce qu’on peut comprendre).



"Clara lit Proust" de Stéphane Carlier

 

Clara lit Proust
Auteur : Stéphane Carlier
Éditions : Gallimard (1er Septembre 2022)
ISBN : 978-2072991301
192 pages

Quatrième de couverture

"Proust. Avant, ce nom mythique était pour elle comme celui de certaines villes - Capri, Saint-Pétersbourg... - où il était entendu qu'elle ne mettrait jamais les pieds." Clara est coiffeuse dans une petite ville de Saône-et-Loire. Son quotidien, c'est une patronne mélancolique, un copain beau comme un prince de Disney, un chat qui ne se laisse pas caresser. Le temps passe au rythme des histoires du salon et des tubes diffusés par Nostalgie, jusqu'au jour où Clara rencontre l'homme qui va changer sa vie : Marcel Proust.

Mon avis

Avec Proust elle a l’impression de tout voir.

Clara est coiffeuse dans une ville de taille moyenne. Elle travaille avec Jacqueline Habib, la patronne, et une autre employée, Nolwenn. Le samedi et pour les fêtes, Patrick vient aider. Elle est en couple avec JB et la vie s’écoule au rythme des jours, avec une certaine forme de routine rassurante. Petits potins du salon de coiffure où, c’est bien connu, pas mal de gens se confient. Déjà, chacun ses têtes. Certains-nes ne veulent être coiffé-e-s que par une personne qu’ils, elles, choisissent. C’est important la confiance, ne pas mettre ses cheveux dans n'importe quelles mains. On discute, on papote, parfois des clients ne disent pas grand-chose.

C’est le cas de celui qui, un jour, oublie un livre, volontairement ou non. Sans raison particulière, Clara le récupère et commence la lecture. Pourquoi ? Elle ne saurait pas l’expliquer. C’est une impulsion qui lui a fait tendre la main et ramasser ce titre. Et puis, elle plonge dans le récit de Proust et c’est presque un coup de foudre. Elle libère du temps pour retrouver les personnages de Marcel, elle achète la suite…

Pour elle

« Il n’emploie pas de mots compliqués, c’est juste que ses phrases, souvent, vont voir ailleurs. »

Elle s’autorise à sauter des pages quand il y a des longueurs, trop de descriptions, mais elle suit l’histoire, elle peut en parler et elle le fait bien. Dans un petit carnet, elle note ses réflexions, des citations. Et Proust lui ouvre des portes, celle d’une autre vie, d’un autre quotidien, d’une autre approche de la littérature … Acceptera-t-elle ce bouleversement ou restera-t-elle dans sa vie bien rangée ? Elle vaut peut-être mieux que ce qu’elle a actuellement ? Lire Proust la « révèle » à elle-même et aux autres…

Ce roman, court, vite lu, est un petit bijou. Il est empli de délicatesse, de tendresse. Partagé en trois parties, comme les trois étapes de la vie de Clara, il n’est ni dénué d’humour, ni de sens. Sous des dehors légers, des thèmes sérieux sont abordés. Rien d’approfondi mais c’est suffisant pour nous interpeler.

J’ai eu beaucoup de plaisir à découvrir ce texte qui a tout pour plaire, même auprès d’un public jeune. Il n’est pas mièvre mais il fait du bien par ses pointes d’humour et son approche de Proust (je me suis dit : bon, il va falloir le lire !)


"Sentir mon corps brûler" d'Aure Hajar

 

Sentir mon corps brûler
Auteur : Aure Hajar
Éditions : Eyrolles Poche (4 Septembre 2024)
ISBN : 978-2416007118
360 pages

Quatrième de couverture

« Je crevais d'être vue par eux, voulue par eux, admirée d'eux. Leur approbation conditionnait ma vie. Alors je les flattais et leur donnais ce qu'ils attendaient, je croyais ainsi m'émanciper, m'éloigner de ma mère, défier des règles ancestrales ou reli­gieuses. J'étais en vérité leur esclave. » Quand Lila emménage à Paris pour y étudier le droit, tout lui semble à portée de main. Pourtant, à la faculté, la réalité des rapports sociaux la rattrape. Ses camarades des beaux quar­tiers respirent l'assurance et la sécurité, elle enchaîne les petits boulots pour payer son loyer. Une situation qui la rend invisible. Alors, protégée par un pseudonyme, Lila commence à se pros­tituer sur Internet.

Mon avis

La précarité étudiante existe et elle est encore très présente en France. Elle touche des jeunes qui ne peuvent pas joindre les deux bouts sans un boulot à côté. Sauf qu’avoir une activité professionnelle ce sont des heures qu’on ne consacre pas aux études. Manque de sommeil, malbouffe, logement juste salubre etc… Difficile de tenir bon dans ces conditions.

C’est le cas de Lila, qui s’installe à Paris pour suivre une fac de droit. Sa mère est marocaine, son père n’est pas là. Il faut qu’elle se débrouille au milieu de tous ceux qui ont plus de ressources financières. Elle ne peut pas vraiment les fréquenter, les suivre dans leurs sorties, ses finances ne lui permettent pas de s’offrir le luxe de quelques extras. Ils sont sûrs d’eux, à l’aise, elle se sent gênée et peine à trouver sa place, comme si elle n’existait pas.

Que faire, que décider ? Lorsque l’occasion de gagner rapidement, beaucoup d’argent, en peu de temps, se présente, Lila fonce. Elle sera escort girl. Ce qu’elle n’imagine pas, ce sont les dérives. Les hommes qui demandent n’importe quoi, qui exigent toujours plus, qui sont violents, qui ne paient pas…. Et l’obligation de faire comme si pour recevoir son dû, ne pas être ennuyée ….

Pour supporter tout cela, Lila se dédouble. Son corps n’est qu’un accessoire, sa personne s’efface, elle n’est pas là, elle s’évade…. Mais la souffrance physique, le traumatisme de certaines situations, tout cela ne peut pas être nié, oublié. Même si elle l’enfouit, elle y pense …

« J’ai compris depuis que nos choix, ou même les options qui se présentent à nous, ne sont que rarement le fruit du hasard ; ils découlent de notre histoire. »

Dans ce roman, Aure Hajar emploie parfois des mots crus parce qu’on ne prend pas de gants dans la « putosphère », le corps est outil mais à quel prix ? Les cauchemars qui hantent les nuits, les douleurs qui brûlent le ventre le jour, la peur omniprésente d’être rejetée par la famille si elle découvre cette triste réalité, par les quelques amis…

L’auteur explore les facettes du sexe qu’on pourrait appeler facile, avec les passes rémunérées, le cinéma porno… Elle explique l’engrenage qui broie, l’escalade pour gagner un peu plus, le quotidien compliqué. Elle souligne la difficulté à créer des liens, à faire confiance à un homme, les images qui restent présentes, qui envahissent l’esprit. Son écriture brute, sans pathos nous noue les tripes.

Malgré une fin que j’ai trouvé un peu rapide, c’est un récit qui fait mal, qui met une claque. On peut se demander comment une jeune femme peut en arrive là. Et elle nous renvoie cette question principale : qu’est-ce que la société offre comme solutions pour aider ceux qui souhaitent apprendre et se retrouvent face à d’énormes problèmes financiers ?


"Une femme de "caractères" " de Christine Chancel

 

Une femme de « caractères »
Auteur : Christine Chancel
Éditions : Le Moulin du Gué-Chaumeix (8 Décembre 2016)
ISBN : 9872951688186
186 pages

Quatrième de couverture

C'est à l'âge de dix ans que Martine doit aller vivre avec ses parents, quittant une grand-mère qui avait jusque-là, tendrement, veillé sur elle. "On ne montre pas ses sentiments, ça ne se fait pas, c'est agaçant", lui intime-t-on ! La vie a amené Martine à se forger un "caractère". Elle a vingt-six ans et Serge vient de lui demander de l'épouser. Elle a besoin de réfléchir, elle l'aime plus que tout autre, mais... Martine décide alors de partir pour Capri. Elle ne fuit pas... Elle espère seulement que le dépaysement et la distance l'aideront à prendre la bonne décision...

Mon avis

Martine a vécu chez une grand-mère douce et aimante, puis à l’âge de dix ans, elle est revenue auprès de ses parents. Chez eux, pas question de montrer ses sentiments, d’être faible, on avance. Adulte, elle a eu une fille, Danièle, qu’elle élève seule. Elle fait connaissance de Serge et très amoureux l’un de l’autre, il lui demande de l’épouser. C’est un bouleversement pour elle, elle ne sait pas quoi répondre.

C’est Martine qui se confie dans ce roman. Elle parle de son amour pour son conjoint mais des difficultés éprouvées lorsqu’il se montre suspicieux, jaloux, peu enclin au dialogue. Parfois méfiant sans raison, elle a du mal à comprendre ses réactions qui lui semblent exagérées. Cela la met mal à l’aise, elle perd de son naturel et ne sait pas vraiment comment se comporter. Quand Serge est serein, que ses angoisses s’éloignent, tout va bien, ils ont des projets, il est moteur. Il peine malgré tout à accepter que sa femme prenne son « envol ».

C’est une époque où l’émancipation de la femme n’est pas totalement rentrée dans les mœurs. La société les « attend » plutôt à la maison, à s’occuper du foyer.

Pourtant, Martine a des idées, des compétences. Il est important pour elle qu’elle se sente exister, qu’elle n’ait pas l’impression d’être « bonne à rien ». Il y a certainement des solutions pour qu’elle puisse s’épanouir dans un travail et ne pas négliger son rôle de mère et de maîtresse de maison. Tout est question d’organisation ! Si chacun y met du sien, fait quelques concessions, tout ira pour le mieux.

Ce récit décrit une vie ordinaire avec ses hauts et ses bas. Christine Chancel analyse bien les ressentis de chacun, les obstacles rencontrés lorsque communiquer est compliqué. Elle prône les discussions, rappelant qu’il est essentiel d’échanger dans l’écoute et le respect pour que chacun trouve sa place et se sente bien au sein de la famille.

Avec une écriture très plaisante, nous suivons Martine pendant plusieurs années. Cela nous permet de voir comment elle évolue, ce qu’elle met en place pour que le quotidien devienne plus fluide pour chacun.


"Retour à Rédemption" de Patrick Graham

 

Retour à Rédemption
Auteur : Patrick Graham
Éditions : Anne Carrière (11 Mars 2010)
ISBN : 9782843375460
387 Pages

Quatrième de couverture :

Vingt ans après avoir purgé sa peine à Rédemption, camp de redressement pour mineurs, Peter Shepard renoue avec son passé comme on reçoit un coup de couteau en plein cœur. Le brillant avocat d'affaires de San Francisco pensait avoir tiré un trait définitif sur ce sinistre établissement où régnaient brimades, humiliations et sévices. Le meurtre de sa famille lui fait douloureusement retrouver la mémoire. Quelqu'un cherche à lui faire goûter une nouvelle fois à l'enfer de Rédemption...

Quelques mots sur l’auteur
 :

Patrick Graham est un auteur de nationalité franco-américaine. Né en France, il a passé une partie de sa vie aux États-Unis.
Son premier roman, l'Évangile selon Satan, [prix Maisons de la Presse] 2007, a été vendu à plus de 200 000 exemplaires et fait actuellement l'objet d'une quinzaine de traductions à travers le monde.
Âgé d’une quarantaine d’années et père de trois enfants, Patrick Graham est pilote d'avion de formation et expert en intelligence économique auprès de grandes entreprises internationales.

Mon avis :

Note
 : Rédemption : Dans le christianisme, le « rachat » des hommes s’est fait par la mort du fils de Dieu pour sauver l’humanité de ses péchés. L’homme retrouve ainsi sa liberté. En contre partie, il a foi en Jésus-Christ. C’est l’aspect divin du salut de l’homme.

Chose promise …. chose ….

« Il est en train de passer de l’autre côté. Au-delà de la souffrance et de la peur. »

Une vingtaine de lignes et déjà, je sentais que l’écriture de Patrick Graham allait me toucher.
Ventre noué, cœur battant, gorge serrée, lèvres sèches, yeux humides …. toutes ces sensations m’ont habitée pendant ma lecture.
Je ne pouvais pas oublier les protagonistes lorsque je posais le livre, ils étaient là, présents … Je me demandais comment ils allaient réagir dans les pages suivantes. Ce que moi, j’aurais fait à leur place, si en faisant un autre choix, la situation aurait été meilleure ou moins pire ….

Alternant les aller retour entre la vie actuelle de Peter Shepard et son enfance, nous ferons avec lui, le chemin ardu le ramenant à Rédemption, le camp de redressement où il a vécu une partie de son adolescence.
On ne se débarrasse pas facilement de son passé, surtout lorsqu’il a été douloureux, lorsque les hommes, des prévôts, ont détourné la religion pour vous faire souffrir le martyr ….

Tout au long de ma lecture, une phrase d’Aragon s’est imposée à moi ….

« Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa force
Ni sa faiblesse ni son cœur. Et quand il croit
Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix »


C’est un livre qui fait mal, qui dérange par tant de violence et qui parallèlement est empreint d’une grande tendresse, de sentiments très forts et très bien exprimés comme l’amour, l’amitié mais aussi tous ces « codes » que créent nos relations, qui nous « lient » les uns aux autres.

Le personnage principal, Peter Shepard, avocat célèbre, riche, à tout pour être heureux …
Raccourci trop galvaudé ce « tout pour être heureux », comme si le bonheur se mesurait à « un tout », comme si couple + enfants + argent = bonheur. Ce serait si facile !
Ce serait sans compter sur le poids du passé. Il ne s’oublie pas celui-là, même si on le repousse le plus loin possible … Il est là, il est enfoui au creux de vous et un beau matin, vous le prenez en pleine face …. Et comme il se doit, ce n’est pas le côté brillant qui s’impose à vous …. Oh non ! C’est la face cachée, sombre, noire, celle qui n’aurait pas dû exister, celle dont on n’ose pas se souvenir tant les images font peur, font mal, tant on s’en veut de ne pas avoir ou de trop avoir, enfin … tant on aurait souhaité que ce soit différent ….

C’est ce passé, à la fois si proche et si lointain, qui va ressurgir dans la vie de notre avocat.
Pourquoi maintenant ? Pourquoi lui ? Qu’est ce qui le rattache aux autres, qu’en est-il de ce serment qui réapparaît dans sa vie ?

Les autres membres de ce récit ont eux aussi, une «part d’ombre» et tout cela va revenir les hanter. Ce serait si facile de dire comme Ferré « Monsieur mon passé, voulez-vous passer, j’ai comme une envie d’oublier ma vie.» Mais ce n’est pas envisageable, autant dans les livres que dans la vraie vie …. « On n’oublie rien de rien …. On s’habitue c’est tout. » Et en cheminant aux côtés de Peter, on fera connaissance avec les « enfants perdus » qui se retrouveront ou pas mais à quel prix ?

En conclusion, ce livre vous prend dans ses rets et vous ne pouvez pas reprendre votre souffle tant qu’il n’est pas terminé. Il est bien écrit, le vocabulaire s’adapte aux situations, parfois lourd et vulgaire, parfois tendre, délicat, parfois torturé lorsque les différents individus se posent des questions.
Tour à tour, l’écriture explose dans votre tête, murmure à votre oreille des mots d’amour ou d’amitié, chuchote des promesses, se fait douce pour apprivoiser la souffrance, la mort ….
Mais jamais, jamais, ne vous laisse indifférent


Fin d'Amérique" de Damien Ruzé

 

Fin d’Amérique
Une enquête du lieutenant Zollinger
Auteur : Damien Ruzé
Éditions : Krakoen (1er Avril 2013)
ISBN: 978-2367940243
400 pages

Quatrième de couverture

En repêchant dans la Loire une voiture volée utilisée dans un braquage qui a mal tourné, le lieutenant Zollinger ignore que les séismes politiques et les scandales financiers peuvent engendrer de violentes répliques jusqu’au fond de la Sologne et de ses immenses forêts. Le flic passionné de chasse entame alors une enquête agitée, traquant la vérité, au risque de devenir lui-même gibier.

Mon avis

Il préfère les bières au café, aime son amie Reine ( institutrice) et la chasse tout autant que son indépendance. Il apprécie de travailler seul avec des méthodes qui lui conviennent même si elles ne sont pas toujours bien orthodoxes.

Lui, c'est le lieutenant Zollinger, un gros fumeur qui ne fait pas assez de sport ( même s'il marche beaucoup lorsqu'il chasse). Il doit enquêter sur un homicide, une histoire bizarre avec de multiples ramifications qu'il va lui falloir démêler, rencontrant des gens impliqués de près ou de loin dans le meurtre de ce jeune acteur pornographique, fils de bonne famille. Les magouilles politiques seront présentes, le chantage sous une certaine forme aussi ainsi que le mensonge....

L'auteur, comme son personnage principal, doit aimer la chasse, j'en veux pour preuves, les scènes décrites avec forces précisions et un vocabulaire pointu et adapté.
L'enquêteur a même des linges propres pour emporter la viande qu'il découpe sur place ( est-ce bien légal?) lorsqu'il tue un sanglier.
D'ailleurs, ce n'est pas seulement quand le policier chasse le sanglier que nous retrouvons les termes de ce loisir... Quelques une des situations étant visualisées comme des scènes de chasse. De plus, le héros n'hésite pas à se servir de son arme en prenant les humains pour du gibier... Brrr....

Alternant le "Je" lorsque Zollinger s'exprime et le récit au style narratif pour le reste, le langage oscille entre plusieurs genres. On peut voir les mots brème et canopée dans un paragraphe suivi de thug et chtarbé dans le suivant, le lieutenant ayant une fâcheuse tendance à utiliser le verlan (qui n'est pas ma tasse de thé) ainsi que des mots très familiers pour lesquels j'ai dû sortir mon dictionnaire... Et à côté de ça une approche quelquefois recherchée avec des métaphores et des phrases sophistiquées qui auraient pu (dû) me plaire.... Sans oublier l'emploi de tournures anglo saxonnes... Cette ambivalence m'a, je l'avoue, plutôt désarçonnée et parfois gênée dans ma lecture qui, de fait, m'a semblé moins fluide et donc moins prenante.

Hormis le lieutenant, ce sont surtout des protagonistes masculins que nous côtoyons. En effet, il y a peu de femmes et elles ont un rôle plutôt effacé.
La relation avec l'être aimé, Reine, est évoquée avec pudeur mais pas réellement approfondie. C'est aussi parce que Zollinger ne sait pas trop comment se situer par rapport à elle. Comme s'il avait peur. D'ailleurs, les angoisses de cet homme sont évoquées plusieurs fois et on aperçoit les failles de la "brute sanguinaire" (j'exagère...  bien qu'il soit maladroit, il peut être doux et tendre). Ces moments-là, sont finement décrits, comme si l'auteur connaissait lui aussi, sous des dehors détachés, la montée de cette boule qui commence dans le ventre, coince votre gorge et finit par envahir votre esprit, vous ôtant tout sens commun, car il n'y a plus qu'elle et qu'il vous est impossible de réfléchir de façon posée car elle monte telle une houle pour tout bouleverser sur son passage.

Je reste sur une impression mitigée avec ce roman. Les individus m'ont intéressée et les liens qu'ils entretenaient aussi. De plus, la construction de l'intrigue est bien menée, le lecteur ne voyant pas toujours arriver les événements et pouvant être surpris par les réactions des uns et des autres. Cela met du piment à la lecture car elle perd ainsi son côté linéaire et lisse.
Mais, le mélange des genres, côté expression écrite, m'a posé problème. Je n'ai pas saisi l'utilité de ces différents styles littéraires si ce n'est pour démontrer que l'auteur peut passer de l'un à l'autre sans difficulté...

"L'Arabe du futur - Tome 5 : Une jeunesse au Moyen-Orient, 1992-1994" de Riad Sattouf

 

L'Arabe du futur - Tome 5 : Une jeunesse au Moyen-Orient, 1992-1994
Auteur : Riad Sattouf (texte et dessin)
Éditions ‏ : ‎ Allary (5 Novembre 2020)
ISBN : 978-2370733528
186 pages

Quatrième de couverture

Ce livre raconte l’histoire vraie d’un adolescent plus du tout blond, de sa famille franco-syrienne et d’un fantôme.

Mon avis

Riad a quatorze ans et il vit avec sa mère et un de ses frères, l’autre a été enlevé par son père et vit avec lui en Syrie.

Son adolescence n’est pas toujours celle des jeunes de son âge. Sa mère entreprend des tas de démarches pour prouver ses droits et retrouver le fils qui est parti loin d’elle. Toutes ces journées, toute son énergie, tout tourne autour de ce combat. Elle va même à Lourdes ! Riad essaie de temporiser, de positiver parfois. Il ne peut pas parler de cette situation à ses copains, alors, avec eux, il reste un ado. Les discussions sont des échanges sur la musique, les filles, les histoires d’amour, les « bandes » dont celles qu’il faut éviter…. Il lui arrive de faire des cauchemars, repérés par des couleurs vives.

Il a un regard acéré sur les événements, sur son père, on sent qu’il grandit, qu’il observe « d’en haut » ce qu’il se passe. Il n’arrive pas toujours à prendre du recul mais ça commence.

Cet album donne beaucoup de place aux problèmes des ados, certaines personnes penseront que c’est trop. Moi, ça ne m’a pas gênée car je me suis attachée à Riad et j’ai envie de savoir plein de choses sur lui. La couleur dominante est le bleu puisque tout, ou presque, se passe en France. Quelques pointes de rouge apparaissent pour des éléments ou des actions qui ont de l’importance.

Sa passion pour le dessin et les BD est en train de se mettre en place. Il cherche son style.

J’ai vraiment apprécié cette lecture, suivre sur plusieurs tomes ce jeune Riad me noue le ventre. Il n’a pas eu une vie facile mais il a su en faire une force.


"Perdue dans les Bois-Noirs" d'Erika Navilles

 

Perdue dans les bois noirs
Auteur : Erika Navilles
Éditions : du Mot passant (21 septembre 2023)
ISBN : 978-2357922310
254 pages

Quatrième de couverture

Un étang au milieu des Bois-Noirs. Le corps d’une jeune fille noyée. Un tatouage de nénuphar rouge sur l’épaule. Diminué par un Covid long, le lieutenant Christophe Roche vient d’être affecté à la brigade de Morages, le village de son enfance. Il a la charge de l’enquête. Depuis qu’elle est arrivée chez lui pour les vacances de la Toussaint, Lucie, sa fille de dix-sept ans, l’ignore. Cette affaire va faire remonter un secret familial enfoui depuis plus de trente ans.

Mon avis

Le COVID est encore présent, non seulement dans les esprits, mais encore dans le quotidien des protagonistes de cette histoire. Christophe Roche, lieutenant de police, ancien plongeur subaquatique, fatigué par la forme longue du virus, est affecté dans une petite brigade, à Morages. Lorsqu’il prend son poste, beaucoup se demandent ce qu’il vient faire dans ce coin perdu. C’est le village de son enfance, là où réside encore son père, un homme bourru mais il n’a encore rien dit de ses origines.

Christophe Roche tient un peu de son père, il est peu causant et n’en dit pas trop sur ce qu’il fait. Sa fille est en vacances chez lui (il est divorcé) mais elle préfère passer du temps avec son grand-père. On sent bien que la relation entre Lucie et lui est compliquée. Il veut la protéger mais il est très maladroit. Elle veut dessiner, elle aime ça, elle réussit plutôt bien mais pour lui, ce n’est pas la meilleure façon d’avoir un avenir professionnel stable. Le dialogue est chaotique entre ces deux-là.

La vie pourrait s’écouler paisiblement, avec ses hauts et ses bas. Mais ce n’est pas le cas. Dans l’étang situé au milieu des Bois Noirs, une jeune fille est découverte, noyée. Il ne sembla pas y avoir de traces de violence mais ça ne veut rien dire bien entendu. Suicide, meurtre ? Ce n’est pas sans rappeler un drame qui s’est déroulé il y a longtemps. Coïncidence ou pas ? La police enquête, Christophe et ses hommes doivent élucider cette affaire. Lui, il essaie d’avancer, d’observer mais reste soucieux par rapport à sa fille, qui lui échappe, lui tient tête. Est-ce que cela joue sur ses compétences au travail ? Je ne pense pas mais tout cela reste présent dans son esprit en permanence, il préférerait un lien plus fluide. Cela le rend très humain et attachant.

À Morages, on imagine qu’habituellement tout se déroule dans le calme, à part de rares conflits de voisinage, dus aux caractères ombrageux de quelques anciens, des agriculteurs au franc-parler, comme on peut en rencontrer dans le Forez (région évoquée dans ce livre). Finalement, tout n’est pas si simple. Christophe s’aperçoit vite que quelques habitants ne sont pas clairs, ni dans leur vie de tous les jours, ni par rapport à leurs actes passés. Lui qui a vécu ici ne risque-t-il pas d’être concerné par certains faits ?

J’ai beaucoup apprécié cette lecture. Je trouve intéressant qu’Erika Navilles ait donné une bonne place à la nature et qu’elle ne se soit pas contentée de l’enquête et des ressentis du lieutenant. Dans son texte, les Bois-Noirs ont une place prépondérante. On les sent presque vibrer, vivre, bruisser autour de nous. Tous ceux qui y ont élu domicile sont là, avec leur part de mystère, échappant à l’œil acéré de ceux qui s’approchent trop près. Que cachent-ils ?

La tension monte au fil des chapitres, on sent l’angoisse nous nouer les tripes. On veut comprendre, on essaie de relier les indices et d’avoir des réponses. L’écriture est plaisante, bien dosée dans différents aspects : investigations, sentiments, relations humaines, passé qui ressurgit. C’est un bel équilibre qui permet au lecteur de se plonger dans ce recueil et de passer un excellent moment !